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LE RÉFORMISME BOURBONIEN : LE RÈGNE DE CHARLES III (1759-1788) 1. Introduction

LE RÉFORMISME BOURBONIEN : LE RÈGNE DE CHARLES III (1759-1788) 1. Introduction : la philosophie des Lumières et la monarchie éclairée - La philosophie des Lumières (cat. “La Il·lustració”, esp. “La Ilustración”) est un mouvement philosophique du XVIIIe siècle qui pose la raison au coeur de sa pensée. Alors, d’après ces philosophes, tout ce qui est raisonnable est bon, tandis que tout ce qui ne l’est pas, est mauvais. - Bien que le principal philosophe des lumières (cat. “ﬁlòsof il·lustrat”, esp. “ﬁlósofo ilustrado”) soit Kant, les philosophes des Lumières francophones, dont Montesquieu, Rousseau et Voltaire sont ceux qui se consacrent à la critique politique. Ils attaquent les fondements de l’Ancien Régime parce qu’ils les considèrent irrationnels : - Son fondement économique, c’est à dire le féodalisme et le revenu féodal, ne sont pas raisonnables. - Son fondement social, c’est à dire la société d’ordres, ne l’est pas non plus. - Son fondement politique, c’est à dire la monarchie absolue de droit divin, ne l’est pas non plus. - L’Ancien Régime craint la philosophie des Lumières du fait de son inﬂuence sur les non privilégiés, dont les bourgeois, capables d’organiser une révolution sociale. En sachant qu’on ne réussira pas à effacer cette philosophie, il essaie de l’intégrer. Le résultat sera une nouvelle forme de gouvernement, la monarchie éclairée (ou despotisme éclairé) (cat. “despotisme il·lustrat”, esp. “despotismo ilustrado”). - Monarchie éclairée : - Origine : dans la plupart de pays absolutistes —sauf la France— dont l’Espagne, la monarchie absolue évoluera en acceptant quelques idées des Lumières dans l’idée d’apaiser l’opposition du tiers état (ou Tiers-État), dont la bourgeoisie, contre l’Ancien Régime. Le résultat de telle fusion idéologique sera une nouvelle évolution de l’État moderne (dont la monarchie autoritaire, d’abord, et la monarchie absolue, ensuite), sous la forme d’une nouvelle forme de gouvernement, la monarchie éclairée. - Déﬁnition : forme de gouvernement de l’État moderne (Ancien Régime) construite à partir de l’évolution de la monarchie absolue où le roi concentre encore tout le pouvoir politique mais où on a introduit la notion de ‘bon gouvernement’, c’est à dire, que le roi essaie d’entamer de réformes de caractère rationnel visant l’amélioration des conditions de vie de leurs sujets, donc le progrès économique, matériel. 1 - But : apaiser les esprits, en admettant la rationalisation de la vie économique sans altérer l’oeuf de l’Ancien Régime. - Devise (slogan) : “Tout pour le peuple, rien par le peuple” (cat. “Tot per al poble, però sense el poble”, esp. “Todo para el pueblo, pero sin el pueblo”). - Limites : la contradiction entre une rationalisation toujours incomplète d’une partie de la vie économique et la conservation des éléments clé de l’Ancien Régime, tout à fait irrationnels, dont le revenu féodal. Comment sauver avec la raison un modèle globalement irrationnel? 2. Les réformes de Charles III (1759-1788) - Charles III (1759-1788) est le représentant de la monarchie éclairée en Espagne. Étant donné qu’en qualité de despote éclairé espagnol il a entamé beaucoup de réformes, il représente, donc, le réformisme bourbonien espagnol. (NOTE pour aider l’étude : Charles III était le troisième ﬁls de Philippe V ; à la mort de Philippe V en 1746 lui succède Ferdinand VI, qui règnera entre 1746 et 1759). - Avant de devenir roi de l’Espagne, Charles III avait été le roi de Naples. C’est en Italie où il a appris à gouverner comme un despote éclairé, entouré des philosophes des Lumières italiens, qui étaient leurs ministres et hommes de conﬁance. - Les réformes de Charles III se déroulent en deux étapes ou phases : A) Premiers essais : la Mutinerie de Squillace (esp. “el Motín de Esquilache”) - Quand Charles III se rend en Espagne, il le fait accompagné de ses conseilleurs italiens, auxquels il nomme ministres, ce qui provoque la jalousie des privilégiés espagnols, qui convoitent la proximité du roi et du pouvoir qu’il représente. - Charles III et son ministre italien Squillace (appelé Esquilache en Espagne) préparent une première série de réformes : 1) Obliger aux privilégiés à payer des impôts dans l’idée de fournir le Trésor Public (il reprend ainsi une ancienne idée de Philippe V appliquée non seulement à la noblesse de l’ancienne Couronne d’Aragon, mais à tous les privilégiés espagnols). 2) Mesures d’ordre public pour diminuer la violences aux villes. 3) Abandonner la politique de prix politiques pour le pain (NOTE pour aider à l’étude : pendant l’Ancien Régime le pain était le produit de consommation principal du petit peuple, dont le prix maximum était déterminé depuis le pouvoir public pour contenter la foule. Pourtant cela allait au détriment des producteurs de pain, qui sortaient très peu de proﬁt de leur produit et parfois abandonnaient la production de 2 pain. C’est pour cela qu’Esquilache a eu l’idée d’accorder le prix du pain au niveau demandé pour le marché libre, ce qui a provoqué le mécontentement du petit peuple). - Les privilégiés étaient mécontents avec les ministres étrangers et surtout avec les impôts qu’ils devraient payer dorénavant. Néanmoins ils n’osaient pas se soulever ouvertement contre l’autorité du roi. C’est pourquoi ils ont poussé le petit peuple de Madrid (la capitale du royaume) à la révolte contre le ministre Esquilache, en tirant proﬁt du malaise populaire contre les restrictions d’orde public et, surtout, contre la montée du prix du pain. C’est la Mutinerie de Squillace. - Le roi comprend qu’il est allé trop vit à son processus de réformes, d’autant plus qu’il est encore un jeune roi qui vient d’arriver de l’étranger et dont le pouvoir en Espagne n’est pas encore tout à fait enraciné. C’est pourquoi il décide de reculer pour l’instant, de façon qu’il ordonne dévaler le prix du pain et aussi ordonne la destitution d’Esquilache. B)La maturité de Charles III et les grandes réformes - Après avoir laissé couler quelques années, pendant lesquelles Charles III a bien enraciné son pouvoir et bien planiﬁé son programme réformiste, il entame une nouvelle étape de réformes plus complète et ambitieuse que la première. Cette fois il s’entoure de ministres éclairés espagnols pour contourner la critique contre des étrangers, dont Jovellanos, Campomanes, Aranda et Floridablanca. - Les plus importantes réformes de Charles III pendant la période se groupent en trois chapitres, dont l’économique est le plus important, bien qu’il ne soit pas le seul : a) Réformes religieuses 1) Charles III est un roi régaliste (cat. “regalista”, esp. “regalista”). Le régalisme (cat. “regalisme”, esp. “regalismo”) est une doctrine politique du XVIIIe siècle d’après laquelle l’État doit complètement contrôler la religion, et non à l’inverse. Donc, Charles III interdit au clergé d’être fonctionnaires publics (soit on serve l’État, soit on serve l’Église). 2) Expulsion des jésuites, considérés par le Roi le cerveau (les auteurs intellectuels) de la Mutinerie de Squillace. 3) Désamortissement (cat. “desamortització”, esp. “desamortización”) de terres de l’Église : les terres amorties (cat. “amortitzades”, esp. “amortizadas”) étaient des terres “en mains mortes”, c’est à dire, non cultivées. Charles III exproprie une partie de ces terres (non toutes) pour les rendre à des agriculteurs qui les 3 cultiveront, de façon qu’on augmentera la production agricole et, en même temps, on limitera le pouvoir de l’Église. b) Réformes éducatives - La plupart de philosophes des Lumières espagnols sont très préoccupés par l’instruction publique. C’est pourquoi on essaie d’augmenter le nombre d’espagnols alphabétisés, même si on est encore loin de l’éducation universelle. c) Réformes économiques 1) Charles III déclare publiquement et ofﬁciellement honnêtes tous les métiers, pour lutter contre l’idéal nobiliaire de refus du travail, qui à l’époque était imité par beaucoup d’espagnols (NOTE pour aider à l’étude : bref, Charles III comprend que l’Espagne ne pouvait pas se développer si elle continuait à être un pays de fainéants). 2) Réformes de l’agriculture : - Charles III limite (mais il ne supprime pas) les privilèges de libre circulation dans les campagnes des brebis de ‘la Mesta’ (on ne traduit pas), une organisation de nobles propriétaires de bétail, concrètement de mérinos (cat. “ovelles merines”, esp. “ovejas merinas”) dont la laine était très appréciée. Les troupeaux de mérinos épuisaient les champs où elles pâturaient, d’où le malaise des agriculteurs (qui n’étaient pas nobles) à propos de la libre circulation de ces brebis par leurs champs. - Le ministre Jovellanos prend en charge un étude pour évaluer les avantages de substituer la propriété féodale de la terre par la propriété privée. Il sort la conclusion de qu’agir ainsi améliorerait beaucoup la production agricole, donc ils propose au Roi un projet de réforme complète de la propriété agricole. Charles III comprend que Jovellanos a raison, pourtant il n’ose pas supprimer la principale source du pouvoir économique et social de la noblesse (la propriété féodale et le revenu féodal) parce que faire cela entraînerait précisément détruire ce que la monarchie éclairée voulait sauver, qui étaient les privilèges de la noblesse. Alors, le projet de Jovellanos ne dépassera pas le niveau théorique (NOTE pour aider à l’étude : voilà un beau exemple des limites de la monarchie éclairée). - Repeuplement de terres à la Sierra Morena : l’intendant uploads/Geographie/ 03-le-reformisme-bourbonien-le-regne-de-charles-iii.pdf