1 Document n° 12 La coopération décentralisée dans l’espace francophone Projet
1 Document n° 12 La coopération décentralisée dans l’espace francophone Projet de rapport Présenté par Mme Martine BONDO, sénatrice (Gabon) Et M. Martin BALIKWISHA NYONYO, sénateur (République démocratique du Congo) Co-Rapporteurs ABIDJAN (Côte d’Ivoire) | 9-12 juillet 2013 2 INTRODUCTION Depuis trois décennies, l’action publique à l’international n’est plus une exclusivité des Etats. De nouveaux acteurs tels que les ONG, les associations professionnelles et surtout les collectivités locales, jouent un rôle de plus en plus important dans la coopération au développement. La notion de coopération décentralisée désigne ces nouveaux processus. Parce qu’elle prend appui sur les collectivités territoriales, la coopération décentralisée est souvent présentée comme l’un des instruments les plus appropriés pour dynamiser les initiatives locales de développement. La coopération décentralisée au sein de l’espace francophone n’est pas une problématique nouvelle. Celle-ci fait l’objet depuis un certain temps d’une abondante littérature et de débats divers dans plusieurs rencontres internationales, organisées dans le cadre de l’espace francophone, notamment de l’Association Internationale des Maires Francophones (AIMF), de l’Association Internationale des Régions Francophones (AIRF), des Cités et Gouvernements Locaux Unis d’Afrique (CGLUA), pour ne citer que ces trois associations. La thématique est bel et bien au centre des préoccupations de l’organisation internationale de la Francophonie (OIF) qui, du reste, ne laisse pas indifférente l’Assemblée Parlementaire de la Francophonie (APF) et cette dernière l’inscrit de plus en plus dans ses débats. Et les parlementaires francophones ne cessent de se l’approprier. Dans une dynamique de décentralisation et d’autonomisation, le nombre de collectivités territoriales qui s’engagent dans des relations au-delà des frontières nationales est de plus en plus croissant. Leurs domaines de prédilection sont aussi variés que divers. Ceux-ci vont de la démocratie locale à la santé publique, en passant par la lutte contre les inégalités sociales et la promotion du développement économique, sans oublier la protection de l’environnement ou l’action humanitaire, etc. Il ne fait donc l’ombre d’aucun doute que l’OIF est consciente que l’avenir de la francophonie passe par également ce type de coopération car c’est le seul moyen sûr pour valoriser les richesses contenues dans l’espace francophone au travers de la langue française par les échanges de proximité qu’elle occasionne. Un révolutionnaire espagnol, cité par Louis Michel, alors Commissaire européen, n’avait-il pas dit que ‘’la langue est le sang de l’esprit’’. I. CONTEXTE HISTORIQUE DE LA COOPERATION DECENTRALISEE 1. Définition de la Coopération décentralisée D’emblée, il n’est pas aisé de définir cette notion de la coopération décentralisée sans s’attirer des critiques véhémentes. 3 Ainsi, la coopération décentralisée peut être perçue comme cette pratique d'échanges internationaux faisant intervenir des collectivités et associations locales, des organisations non-gouvernementales, des administrations centrales, des groupes d'intérêts, des entreprises, etc. Il ressort que le terme de « coopération » fait référence à des initiatives et actions menées en collaboration avec des structures, des collectivités ou autorités territoriales étrangères, celui de « décentralisée » définit le niveau et le mode de cette coopération, c’est-à-dire celui des collectivités ou autorités territoriales de pays différents pour des initiatives d’intérêt public local. En clair, dans le cadre de cette problématique, l’approche de la coopération décentralisée accorde une importance particulière au statut public des acteurs et aux objectifs. C’est la coopération entre des collectivités territoriales (de pays développés) et leurs homologues étrangères (de pays généralement en développement) du reste du monde dans les différents domaines. C’est cette forme de coopération entre le Nord et le Sud qui fait l’objet de cette analyse. Mais ces relations entre des collectivités territoriales de plusieurs Etats peuvent entraîner avec elles, dans des opérations de coopération, d’autres agents économiques et sociaux, en particulier des associations, des universités, des entreprises, etc. A ce sujet, deux thèses s’affrontent dans cette tentative de circonscrire la réalité de la coopération décentralisée, à savoir la thèse anglo-saxonne et la thèse francophone comme l’ont souligné Adda BEKKOUCHE et Bertrand GALLET, deux spécialistes de la coopération décentralisée. 1.1. Thèse anglo-saxonne Appelée aussi approche extensive, celle-ci pense que les associations et organisations de solidarité internationale jouent un rôle central dans l’émergence des collectivités et autorités territoriales de coopération. Ainsi, pour cette conception la coopération décentralisée comprend toute action internationale mise en œuvre par des acteurs infra-étatiques, pas nécessairement territoriales. Tel est le cas de la coopération entre universités ou entre ONGs. Comme l’on peut s’en apercevoir, cette approche met l’accent sur le secteur ou le domaine d’activités et est défendue par les pays anglophones et l’Union européenne. 1.2. Thèse francophone Qualifiée de restrictive, cette dernière accorde la qualité et le statut d’agent de coopération décentralisée uniquement aux collectivités et autorités territoriales, car l’on considère qu’il s’agit de relations décentralisées au sens étroit de l’expression. Les acteurs de la coopération, dans ce cadre, sont les collectivités décentralisées et leurs groupements. Ainsi, toute collectivité ou institution publique, disposant d’une assemblée élue au suffrage universel, peut mener des actions de coopération décentralisée. Ce sont donc les autorités locales élues qui ont par excellence le statut d’agent de la coopération décentralisée. 4 Tous les organismes, qui ne relèvent pas de cette catégorie d’institutions et qui ont des relations avec des organismes étrangers, font de la coopération non gouvernementale. La doctrine française et la pratique des autres Etats latins en la matière ont tendance à privilégier cette conception. Cette conception, comme l’on peut le remarquer, favorise l’autonomie locale, et donc la démocratie à la base, pour tout dire contribue à l’essor de la décentralisation. Mais il faut aussi reconnaître que ces organismes contribuent tout au tant à l’éclosion de la décentralisation. En somme, c’est cet ensemble d’actions extérieures des acteurs infra-étatiques que l’on qualifie, dans ce contexte, de la coopération décentralisée. Ces acteurs sont : la Région ou la Province, la Ville, la Commune ou toute autre entité territoriale bénéficiant de pouvoirs d’autonomie pour certaines actions pour le développement de leurs contrées. Ces acteurs entrent en relation directe avec les instances supranationales et définissent leurs activités en fonction d’intérêts particuliers et de zone qui transcendent les frontières de l’Etat-nation. Cette coopération est basée essentiellement sur des projets de développement. II. EVOLUTION DE LA COOPERATION DECENTRALISEE DANS LE MONDE, ET PARTICULIEREMENT DANS L’ESPACE FRANCOPHONE Il y a encore 40 ans, les entités territoriales décentralisées, que ce soit en Europe comme dans le reste du monde pesaient peu au sein des Etats et encore moins sur le plan international. Ceci était d’autant plus vrai dans des Etats fortement centralisés comme l’étaient la France ainsi que la plupart des pays d’Afrique francophone qui avaient repris le système centralisé français. L’essor de nouveaux acteurs dans la scène internationale s’est accompagné d’une restructuration de la souveraineté de l’Etat. Celui-ci, tout en demeurant le seul détenteur de multiples prérogatives, a encouragé d’autres entités territoriales en son sein à intervenir, à côté de lui, dans le champ international. Au nombre de ces acteurs, il y a lieu d’épingler les entités territoriales décentralisées. Alors qu’au sommet de la terre de Rio en 1992, les entités territoriales décentralisées étaient absentes, elles sont aujourd’hui totalement impliquées dans toutes les négociations et initiatives en matière de développement durable et font partie des acteurs qui négocient au côté des Etats, des organisations internationales et des ONG dans les sommets internationaux. C’est ainsi qu’aujourd’hui aucune compétence, à part la défense et la sécurité, n’échappe à la décentralisation : police, aménagement du territoire, développement économique, santé, éducation…Toutes les compétences se redistribuent ou se partagent entre l’Etat et les entités territoriales décentralisées qui sont devenues des acteurs incontournables de la vie des Etats. Il y a lieu de noter que dans cette mutation, les Nations unies, l’Union européenne et la France, en particulier, ont joué un rôle non moins négligeable dans l’émergence de ces nouveaux acteurs. 5 En effet, au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, en vue de créer des liens d’amitié entre populations, les jumelages entre villes d’Europe occidentale se sont développés, particulièrement entre la France et l’Allemagne. C’est ce que fait remarquer le Professeur Christophe Mestre de l’Université catholique de Lyon, lors des assises du premier forum sur la Coopération décentralisée, tenues à Kinshasa en octobre 2012, quand il souligne que l’origine des relations de coopération décentralisée remonte à la mise en place des jumelages franco-allemand de l’après guerre, jumelages motivés par la volonté de responsables politiques de l’époque de construire une culture de paix, pour qu’une catastrophe comme celle de la deuxième guerre mondiale ne se reproduise plus. Dans l’élan de solidarité qui a suivi les indépendances des pays anciennement colonisés, des liens directs entre populations du Nord et du Sud se sont noués. L’Assemblée générale des Nations Unies a même tenté, lors de sa 26e session, en 1971, d’institutionnaliser la démarche ou tout au moins de lui donner un caractère de solennité en encourageant les relations entre villes sur l’ensemble de la planète. La France, pays dont les Collectivités territoriales ont une tradition de la coopération décentralisée vieille de plusieurs décennies, n’a pas hésité un seul instant à institutionnaliser cette pratique d’abord en 1982, puis en 1992, avec la loi du 2 février relative à l’administration territoriale de la République, complétée par uploads/Geographie/ 2013-07-session-cap-rapportcoopdecentr.pdf
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- Publié le Dec 26, 2021
- Catégorie Geography / Geogra...
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