CAHIER DE RECHERCHE DE DRM N° 2011-2 Valeur perçue et comportements en ligne en

CAHIER DE RECHERCHE DE DRM N° 2011-2 Valeur perçue et comportements en ligne en état d’immersion : Le rôle modérateur de l’implication et de l’expertise1 Ahmed Anis CHARFI(2) Pierre VOLLE(1) Résumé : Les concepteurs et responsables de sites marchands cherchent de plus en plus à favoriser l’immersion des internautes lors de leurs expériences en ligne. Pour comprendre l’intérêt de ces démarches, une étude quantitative permet de mettre en évidence l’impact de l’expérience immersive en ligne sur la valeur perçue de la visite et sur les réponses des internautes envers le site, la marque et le produit. L’étude se penche également sur les effets modérateurs de l’expertise et de l’implication. Sur le plan théorique et managérial, cette recherche offre des perspectives de compréhension aux chercheurs et aux professionnels sur les bénéfices perçus des expériences immersives vécues en ligne. 1 Charfi A.A. et Volle P. (2011) « Valeur perçue et comportements en ligne en état d’immersion : Le rôle modérateur de l’implication et l’expertise », 27ème Congrès international de l’Association Française du Marketing, Bruxelles, 18-20 Mai. 2 Université Paris-Dauphine, DRM CNRS, UMR 7088, F-75016 Paris, France Mots-clés : Internet, expérience, immersion, valeur perçue, expertise, implication. Valeur perçue et comportements en ligne en état d’immersion : Le rôle modérateur de l’implication et de l’expertise Introduction Le rôle d’Internet comme canal de communication et de commercialisation est désormais indiscutable. Les sites Web sont devenus le principal point de contact avec un grand nombre de consommateurs et ils constituent l’un des leviers essentiels pour développer une entreprise (Jouffroy, Ber et Tissier, 2010). L’expérience de visite est aujourd’hui l’un des moyens de se différencier et d’inciter les consommateurs à acheter en ligne (e.g., Wang et al., 2007). Toutefois, créer une ambiance émotionnellement attractive, ne pas survaloriser le spectacle au détriment de l’achat et proposer aux internautes un environnement qui s’adapte à l’évolution de leurs attentes sont les conditions qui permettent de créer de la valeur pour l’internaute, autant que pour l’entreprise. Une course mêlant créativité et innovation s’est donc engagée entre les différents acteurs du commerce électronique afin de proposer aux visiteurs de vivre des expériences d’immersion dans des environnements virtuels thématisés par les marques. Faire vivre aux internautes des expériences uniques (sinon inoubliables) et favoriser leur immersion dans des contextes originaux grâce à Internet, constituent aujourd’hui les objectifs que les professionnels du marketing digital cherchent à atteindre. En effet, les consommateurs sont de plus en plus sensibles aux caractéristiques subjectives et symboliques des sites marchands ; ils cherchent à s’immerger dans des contextes expérientiels plutôt qu’à simplement acheter des produits ou services (Carù et Cova, 2006). Il s’agit alors, de comprendre le vécu de l’internaute dans un environnement expérientiel en ligne, la manière dont il réagit à cet environnement ainsi que les bénéfices qu’il peut en retirer et les comportements probables envers le site, la marque et le produit. Pour répondre à ces questionnements, notre étude se donne plusieurs objectifs. Il s’agit d’abord de déterminer l’effet de l’immersion sur la valeur perçue et sur les comportements des internautes (intention d’achat, bouche à oreille et intention de revisiter le site). Il s’agit ensuite d’étudier l’effet de la valeur perçue sur les comportements des internautes (permettant ainsi de caractériser l’éventuel rôle médiateur de la valeur perçue). Toutefois les réactions des internautes ne sont pas toutes semblables ou positives. Les individus doivent mettre en jeu des compétences individuelles. L’expertise d’Internet et l’implication envers la catégorie de produit semblent jouer un rôle important dans la relation immersion – valeur perçue. Notre recherche se propose alors d’étudier le rôle modérateur de ces facteurs. Ci-dessous, nous présentons brièvement les concepts mobilisés, nos hypothèses de recherche, ainsi que le modèle à tester. Nous exposons ensuite la méthodologie retenue et les principaux résultats obtenus. Enfin nous conclurons par les contributions théoriques et managériales de l’étude et quelques voies de recherche susceptibles de prolonger utilement cette investigation. 1. Le cadre conceptuel et les hypothèses de recherche Le cadre conceptuel et les hypothèses de recherche s’intéressent aux composantes de l’expérience immersive dans les environnements expérientiels et plus spécifiquement, aux concepts d’immersion et de valeur perçue. 1.1. L’immersion dans les environnements expérientiels en ligne Le marketing expérientiel s’est fixé pour but de faciliter l’immersion du consommateur dans des expériences (Cova et Cova, 2009). Les professionnels du marketing cherchent alors à aider les consommateurs à produire leurs propres expériences (e.g., Brakus, Schmitt et Zarantonello, 2009 ; Schmitt et Rogers, 2008), notamment dans le commerce (e.g., Hetzel, 2002) et plus récemment, dans le commerce électronique. Ils théâtralisent le décor, mettent en scène l’offre, stimulent les actions et interactions entre les consommateurs et leur environnement. La combinaison de ces trois registres d’action conduit les consommateurs à s’immerger dans l’environnement expérientiel. Fornerino, Helme-Guizon et Gotteland (2006 ; 2008) définissent l’immersion comme « l’état d’activité intense dans lequel le consommateur se trouve quand il accède pleinement à l’expérience » ; l’immersion se traduit par un fort niveau d’engagement et se manifeste par le degré avec lequel l’individu ignore toute autre sollicitation attentionnelle en dehors de l’activité elle-même (Simon, 2007). D’après Carù et Cova (2003, 2006), l’immersion n’est pas instantanée : elle se compose d’un ensemble d’opérations que l’individu effectue de façon circulaire pour s’approprier l’expérience (nidification, exploration et marquage). L’immersion dans l’environnement du site est modulée par les compétences individuelles mises en jeu lors de la navigation. Le concept d’expérience immersive en ligne vient utilement renouveler une littérature plus ancienne qui repose principalement sur le paradigme stimulus-organisme-réponse (e.g., Eroglu, Machleit et Davis, 2001). L’immersion est à la fois un processus et un état. Il s’agit d’un concept plus large que le flow (état de flux) dans le sens où le flow est un cas particulier, celui de l’immersion totale ou de l’expérience optimale (e.g., Hoffman et Novak, 2009). 1.2. Les conséquences de l’immersion dans les environnements expérientiels en ligne Une étude qualitative préalable (Charfi et Volle, 2010) nous a permis d’identifier la valeur perçue et les comportements des internautes envers le site, la marque et le produit comme résultantes de l’immersion. • La valeur perçue du site L’expérience vécue en ligne apparaît comme fortement conditionnée par la perception et par l’évaluation de l’environnement. Ses conséquences résident dans les bénéfices émotionnels que le consommateur peut retirer de la visite du site : « l’analyse du contenu de l’expérience ne prend sens qu’au regard de la valeur susceptible d’en résulter pour le consommateur » (Ouvry et Ladwein, 2006). Pour éclaircir le phénomène d’immersion dans un environnement expérientiel en ligne, le concept de valeur perçue semble particulièrement pertinent puisqu’il permet de considérer l’ensemble des dimensions affectives, cognitives, sensorielles et sociales perçues et d’identifier les bénéfices que les internautes retiennent suite à leur immersion. L’intérêt de ce concept est double puisque « la valeur permet d’appréhender l’expérience de manière multidimensionnelle et fournit un cadre général pour l’analyser » (Mencarelli, 2008). La compréhension multidimensionnelle de la valeur de consommation retient les caractères utilitaires et hédoniques de l’expérience (e.g., Babin, Darden et Griffin, 1994 ; Gallen et Bouder-Pailler, 2010). Cette vision de la valeur trouve des racines dans l’approche expérientielle de Holbrook et Hirschman (1982), qui postule que l’expérience vécue par le consommateur est source de gratifications hédoniques (Mathwick, Malhotra et Rigdon, 2002). L’expérience de consommation se trouve alors au centre de l’évaluation du consommateur. La valeur perçue ne dépend pas seulement du produit consommé, mais de la manière dont l’expérience s’est déroulée dans sa globalité (Minvielle et Mars, 2010). La valeur perçue est induite par les bénéfices générés et les pertes engendrées pendant l’expérience. De nombreuses recherches ont permis d’identifier plusieurs typologies (e.g., Sheth, Newman et Gross, 1991 ; Holbrook, 1996 et 1999 ; Parasuraman et Grewal, 2000 ; Sweeney et Soutar, 2001 ; Aurier, Evrard et N’Goala, 2004). Dans le cadre de cette recherche, nous nous focaliserons sur la classification de Babin, Darden et Griffin (1994). Cette vision de la valeur perçue se compose de deux dimensions : la dimension utilitaire et la dimension hédonique. Il s’agit d’une dimension robuste de la classification de la valeur par Holbrook (1996; 1999) : la valeur intrinsèque / extrinsèque dans une perspective « orienté vers soi » (Cottet, Lichtlé et Plichon, 2005). Cette vision de la valeur reste fondamentale pour de nombreux phénomènes de consommation (e.g., Cottet et Vibert, 1999). Elle considère, à la fois, que l’expérience a un objectif et qu’elle constitue un objectif en elle-même. La valeur utilitaire renvoie à un but. Elle est la conséquence d’actions raisonnées et orientées vers la réalisation d’une tâche (Hartman et Samra, 2008). Elle accorde une grande importance aux attributs matériels de l’expérience et fait appel à la rationalité et l’objectivité du consommateur. La valeur hédonique, quant à elle, correspond à l’aspect subjectif de l’expérience de magasinage incluant le plaisir, la fascination et l’évasion (Holbrook et Hirschman, 1982 ; Dholakia et Uusitalo, 2002). L’achat est accessoire et le consommateur se focalise sur les attributs intangibles de la consommation. D’où l’hypothèse suivante : H1 : L’immersion influence positivement la valeur perçue de la visite. - H1a : L’immersion influence positivement la uploads/Geographie/ cahier-de-recherche-de-drm-27-congres-international-de-l-x27-association-francaise-du-marketing-bruxelles-18-20-mai.pdf

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