* Communication présentée le 2 mars 2004, cf. « Bulletin de l’année académique

* Communication présentée le 2 mars 2004, cf. « Bulletin de l’année académique 2003-2004 », dans M.S.A.M.F., t. LXIV (2004), p. 250- 251. 1. B. TOLLON, « “Dame Tholose”, une allégorie politique de la Renaissance », dans M.S.A.M.F., t. LIX (1999), p. 189-201. 2. Géraldine CAZALS, Guillaume de La Perrière (1499-1554). Un humaniste à l’étude du politique, thèse de doctorat, Université de Toulouse I, 2003, t. 1, 712 p. et t. 2, documents, 331 p. ; L’Humanisme à Toulouse (1480-1580), colloque international, 13-14-15-16 mai 2004, Toulouse (actes à paraître sous la direction de Nathalie Dauvois), et L’humanisme à Toulouse 1480-1580, catalogue d’exposition, 22 avril au 22 mai 2004, Bibliothèque d’étude et du patrimoine, 152 p., dir. Nathalie Dauvois et Jocelyne Deschaux. 3. B. TOLLON, 1999, pour l’ensemble des références (voir note 1) et pour les devis de réparations en 1829, A.M. Toulouse, 1M7, liasse (14 pièces) et 5S215. Nous nous proposons de revenir sur « Dame Tholose », l’effigie qui domine actuellement le monument fondé à la mémoire du général Dupuy, pour apporter quelques précisions sur la statue du XVIe siècle réutilisée et pour préciser le cadre dans lequel s’inscrit, sous la Monarchie de Juillet, le monument hybride conçu par Urbain Vitry et inauguré en 1834. En 1999, notre premier article (1) insistait sur les aspects idéologiques et politiques. La statue personnifiant la Ville, « Dame Tholose », qui couronnait la tour des archives, célébrait la cité grâce au langage de l’allégorie, nouveau dans le domaine public (fig. 1). Les liens avec l’Antiquité s’y trouvaient affirmés de la façon la plus savante. En 1544, une telle entreprise pouvait paraître précoce, car ce nouveau type d’image suppose une large adhésion de la part du public et doit être justifié par un contexte culturel très favorable. Depuis 1999, les travaux consacrés à certains acteurs de la vie culturelle de Toulouse au XVIe siècle ont été menés à bien, fournissant un éclairage complémentaire (2). On peut donc verser ces indications au dossier des personnages principaux, humanistes, artistes, fondeurs, et confronter aussi la statue à d’autres œuvres. En attendant le démontage qui apportera des faits nouveaux grâce à l’enquête technique, nous voudrions faire le point à partir de ces nouveaux travaux sur la vie culturelle à Toulouse au XVIe siècle et cadrer sa réutilisation dans un monument du XIXe siècle qui mérite lui aussi attention. Il convient d’abord de rappeler quelques éléments établis. Ils ont pu être réunis grâce à la relecture de l’abondante documentation conservée dans les archives municipales. Cette mine, jusqu’ici peu exploitée, a permis d’établir la chronologie de ce grand projet. On y voit les capitouls passer commande à l’un des principaux sculpteurs de la ville, Jean Rancy, auteur quinze ans auparavant d’une statue d’enfant destinée à servir de girouette au sommet de la Tour des Archives. L’ouvrage en bois, bien que soigneusement doré, menaçait ruine et son remplacement s’imposait. En 1544, à la suite d’une commande verbale, le sculpteur exécute rapidement le modèle en bois destiné à un tirage définitif en bronze. Sans attendre l’exécution de la fonte, la statue est mise en place au sommet de la tour municipale (elle mesurait 5 pans et 1/2 de hauteur, soit environ 1,37 m et fut livrée début septembre 1544) sans doute pour en mesurer l’effet. L’exécution du bronze a été confiée au « maître de l’artillerie de la ville », Claude Peilhot. Faute d’argent, l’entreprise est retardée et la statue définitive n’est livrée qu’en 1550. Après dorure, elle est installée sur la tour de l’Hôtel de Ville et y reste jusqu’en 1829. À cette date, sa dépose et son envoi provisoire au musée furent décidés avant que l’on entame des réparations urgentes à la tour elle-même (3). Intéressons-nous d’abord au contexte politique et intellectuel de la création et en particulier aux circonstances qui ont pu pousser les capitouls à renoncer aux emblèmes religieux ou à une simple girouette en forme de putto (on « DAME THOLOSE » ET LA COLONNE DUPUY par Bruno TOLLON et Louis PEYRUSSE * Mémoires de la Société Archéologique du Midi de la France, t. LXV (2005) 244 MÉMOIRES DE LA SOCIÉTÉ ARCHÉOLOGIQUE DU MIDI DE LA FRANCE a voulu voir dans la girouette de 1529 un saint Michel sous les traits de l’enfant) pour préférer une statue de grande taille symbolisant la Ville. En adoptant le bronze et une iconographie inédite en 1544 (jusqu’à preuve du contraire) pour une sculpture destinée à figurer sur le toit d’un édifice public, les capitouls manifestaient une adhésion sans partage à la cause humaniste et à son savant système de représentation. Un personnage semble jouer auprès de ceux-ci un rôle essentiel: Guillaume de La Perrière. Il est mieux connu aujourd’hui grâce à la thèse de Géraldine Cazals (2). Elle a mis en lumière les années de formation de l’auteur des fameux livres d’emblèmes en français. Issu de la petite noblesse méridionale, né à Toulouse en 1499, il fit ses études à la faculté de droit de sa ville natale puis à celle d’Avignon. Après avoir obtenu son grade de licencié en droit, il regagne Toulouse où il reçoit, entre 1528 et 1534, les bénéfices de différentes cures qui lui assurent une certaine sécurité matérielle. L’humaniste peut se consacrer aux lettres. Il fréquente le milieu littéraire, concourt pour les Jeux Floraux et entre au Collège de rhétorique où il se ménage de solides appuis. Ainsi est-il invité à donner une épître liminaire aux Controverses des sexes Masculin et féminin de Drusac, publiées en 1534, preuve qu’il joue bien, dès cette date, un rôle non négligeable dans le mouvement intellectuel. La Perrière avait de larges champs d’intérêt. Un document passé inaperçu, concernant ses années d’étude en Avignon, apporte un éclairage révélateur sur les curiosités du jeune licencié. Pensant revenir rapidement dans la ville, il y avait laissé des livres et des « médailles » entre les mains d’un ami. En 1526, installé à Toulouse, il demande à les récupérer. Cet intérêt porté aux monnaies et médailles apporte la preuve que le jeune étudiant a fréquenté le milieu international des « antiquaires » et, à leur contact, y a gagné la passion de la collection. Il ne s’est plus séparé de la sienne, à preuve la mention d’une des pièces de sa collection évoquée dans le Miroir Politique (1555) à propos de « la déesse de virginité Vesta, de laquelle iay une Médalle très antique et de grand artifice ». On comprend mieux, comme l’a montré Géraldine Cazals, le rapport particulier qu’il a entretenu avec les images et le soin apporté aux illustrations de ses livres, comme on peut le vérifier avec la publication des Annales de Foix (dont il tient à conserver les « formes »), puis pour chacun de ses livres d’emblèmes (4). On comprend mieux aussi, dans ces conditions, le rôle qu’ont pu lui confier les capitouls pour l’entrée de François Ier. Introduit à l’Hôtel de Ville par le greffier Pierre Salomon, l’humaniste va jouer un rôle que Géraldine Cazals a restitué dans tous les détails en 4. G. CAZALS, 2003 p. 71-72; B. Tollon, 2004, catalogue cité, n. 75 p. 96-100; et aussi Alison SAUNDERS, « Picta poesis: the relationship between figure and text in the sixteenth century french emblem books », dans Bibl. Humanisme Renaissance, t. XLIX (1986), n. 3, p. 621-652. FIG. 1. COLONNE DUPUY (détail): « Dame Tholose » transformée en « Victoire » en 1834, photographiée après les réparations et la redorure de mai 1995. FIG. 2. Annales manuscrites de Toulouse, Livre II, f° 2, « Tholossa »: la figure, véritable déesse couronnée, est inspirée, de façon assez libre, par les médailles antiques (A.M. Toulouse, BB274). Cliché A.M. Toulouse. « DAME THOLOSE » ET LA COLONNE DUPUY 245 apportant la preuve d’une implication beaucoup plus directe qu’on ne le supposait jusque-là dans la confection des architectures feintes, des devises et des inscriptions intégrées aux décors mis en place lors de l’entrée royale de 1533. Salomon lui adresse un mandement de deux écus, puis 32 livres (à partager avec un décorateur nommé Francès Ardit) pour les « échafauds » destinés à l’entrée de la reine, ce qui suppose la confection de sentences et d’emblèmes (mai 1533). Deux ans plus tard, on lui confie la préparation de l’entrée de la sœur du roi, Marguerite d’Angoulême, reine de Navarre. À cette occasion, il réunit un nombre impressionnant d’emblèmes très favorablement accueillis. Il doit également fournir au peintre Bernard Nalot le modèle des médailles destinées aux souverains. Pour Géraldine Cazals, l’emblématiste ne s’est pas contenté de l’« invention ou ordonnance des médailles », il aurait tenu la main au peintre. Elle voit dans le Théâtre des Bons Engins, offert la veille de l’entrée à Marguerite de Navarre, la preuve qu’il « maniait avec sûreté à la fois la plume et le pinceau. Sa présentation du Théâtre des Bons Engins indique très clairement qu’il avait lui-même illustré ses dixains, composant concomitamment des textes et des illustrations dont la complémentarité saute aux yeux des lecteurs » (5). Une telle argumentation, même uploads/Geographie/ dame-tholose-et-la-colonne-dupuy 1 .pdf

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