Charte de vie relationnelle à l’école ou jalons pour mieux communiquer entre en

Charte de vie relationnelle à l’école ou jalons pour mieux communiquer entre enfants et adultes au cours d’une année scolaire par Jacques Salomé Psychosociologue Illustrations de Françoise Malnuit Albin Michel « Osons créer des utopies pour ne pas se laisser enfermer dans la réalité et aller ainsi vers plus de réel. » Ma grand-mère Toute grande réalisation a d’abord été un rêve dans la tête de quelqu’un. A. EINSTEIN CHARTE DE VIE POUR DE MEILLEURES RELATIONS DANS LE MONDE DE L ’ÉCOLE OU DE L ’ÉDUCATION L ’école – qu’elle soit petite ou grande – est certes un lieu d’apprentissage, de transmission des savoirs et des savoir-faire, mais c’est aussi un cadre de vie. Nous y passons directement une bonne partie de notre temps et elle mobilise indirectement une bonne partie de nos énergies, que nous soyons enfant (élève, collégien ou étudiant), adulte (enseignant, formateur, éducateur). Nous y sommes confrontés à un contexte codifié, constitué de règles et de contraintes définies explicitement : l’école est obligatoire pour tous, elle a son fonctionnement propre, son règlement, son échelle de valeurs ; ou imposées implicitement : nous ne choisissons ni nos maîtres, ni même nos camarades de classe, les professeurs ne choisissent ni leurs élèves, ni leurs collègues de travail (dans un premier temps en tout cas, même si des préférences et des affinités se nouent ensuite). Dans ce monde institutionnalisé, les priorités sont souvent l’urgence du temps, la primauté du collectif, le choix des méthodes, le contenu des matières, le règne du rationalisme et de l’utilitaire, le privilège de l’efficacité, le souci de la cohérence interne, la perpétuation et la pérennisation de l’identique. Dans ce contexte, quelle est la place accordée à la qualité de vie, aux échanges, au savoir-être, au savoir-devenir, aux initiatives personnelles, aux besoins intimes fondamentaux, aux désirs, aux attentes, aux engagements et aux investissements individuels autres que ceux qui sont directement convertibles en rendement mesurable, quantifiable et évaluable selon la logique interne du système de référence ? Dans ce microcosme où chacun tisse une multitude de relations significatives et marquantes (faites le compte du nombre d’enseignants et de camarades que vous avez pu côtoyer, rencontrer et connaître tout au long de votre propre scolarité !), quelle est la place laissée aux initiatives personnelles ? Quelle est la place offerte à l’imprévisible, aux possibles, à la manière d’être, au relationnel ? Est-ce donc une utopie que de rêver un espace et un temps pour une réelle prise en compte de la dimension relationnelle afférente à l’acte d’enseigner et d’apprendre, quand nous savons aujourd’hui que le savoir est vendu, consommé et oublié tel un produit banalisé ? Il est transmis sans intermédiaire, du compilateur (et non du producteur) au consommateur potentiel. Prémastiqué, prédigéré en encyclopédie, en logiciel, en CD-ROM ou en bandes dessinées. Le savoir est trop souvent coupé du sens et de ses liens avec la vie. Est-ce une gageure que de se donner les moyens de mettre en œuvre un véritable projet d’amélioration de la communication à l’école pour des interactions plus riches et plus satisfaisantes ? Est-ce un leurre que d’imaginer la constitution d’un contrat personnalisé et individualisé entre enseignants et enseignés, enseignés et enseignants, et de jeter ainsi les bases de ce qui pourrait devenir une charte de vie pour de meilleures relations dans le monde de l’école et de l’éducation ? Une charte de vie susceptible de prendre en compte les principaux types d’échanges qui ont cours à différents niveaux, à savoir : les échanges verticaux adulte-enfant (des enseignants vers les enseignés et, réciproquement, des élèves à l’égard de leurs maîtres ou professeurs) ; les échangés horizontaux entre pairs ou collatéraux (des adultes entre eux, entre collègues, ou des enfants entre eux, entre camarades). Une charte de vie relationnelle qui, au-delà des principes administratifs en vigueur (emploi du temps, rapports hiérarchiques, règlement intérieur, programmes…) ferait l’objet d’une élaboration à laquelle participeraient les acteurs concernés, tous considérés comme des interlocuteurs valables, respectables et dignes d’être entendus, qui pourraient mettre en commun leurs idées, leurs expectatives, leurs souhaits. Cette charte serait définie sur la base d’attentes énoncées et d’engagements pris de part et d’autre, chacun de sa place, afin d’améliorer le quotidien de ce temps de partage. Elle pourrait être rédigée en début d’année scolaire, puis revisitée et réactualisée régulièrement au cours des différentes phases qui scandent les étapes de cette vie ensemble. Le texte qui suit constitue l’ébauche de ce rêve, la trame d’une telle charte. Il s’agit d’un canevas proposé davantage à titre de schéma et de repère que d’exemple à suivre à la lettre. Imaginé plus comme un support stimulant pour une réflexion que comme un modèle à suivre et à appliquer, il se veut ouvert, à compléter éventuellement, mais surtout à s’approprier, à oser expérimenter et pratiquer sans se décourager… Il a été divisé en deux principales rubriques en partant du point de vue de l’interlocuteur concerné, qu’il s’agisse de l’enseignant ou qu’il s’agisse de l’enseigné. En tant qu’enseigné, voici ce que j’attends de mes professeurs ou maîtres, de mes camarades. En tant qu’enseignant, voici ce que j’attends de mes élèves, de mes collègues. Chacune de ces rubriques est indépendante de l’ensemble. Dans ce monde d’aujourd’hui, il était une fois, seulement une fois, un enseignant et un groupe d’enseignés qui échangèrent sur leurs façons habituelles et trop souvent malhabiles de communiquer. Ils s’interrogèrent non seulement sur leurs insatisfactions et leurs déceptions, mais surtout sur leurs attentes et leurs souhaits réciproques. Ils étaient pleins d’enthousiasme, animés d’un réel et profond désir d’améliorer la qualité de leur partage, d’enrichir et d’agrandir les possibles de leur mise en commun, durant le temps d’une année scolaire. Ils imaginèrent alors de définir les modalités d’un projet à bâtir ensemble. Ils décidèrent de convenir d’un accord recevable par les uns et par les autres, en posant les premières pierres de ce qui pourrait devenir une « Charte de Vie relationnelle » entre un élève et un adulte et, peut-être aussi et surtout, entre un enseignant et ses élèves. « Il ne s’agir pas de transmettre la bonne parole aux nouvelles générations, mais aussi de leur permettre de prendre la parole et que naissent de nouveaux cercles de poètes. » François Marchand Il ne suffit plus aujourd’hui d’inculquer des savoirs et de proposer ou d’imposer des « savoir faire ». Le temps est venu d’offrir des références, d’apporter des témoignages, de tenter des expériences pour développer ces acquis de base et les prolonger en un savoir-être, un savoir-créer et un savoir-devenir dans un monde en pleine mutation. CHAPITRE I COMME ENFANT CE QUE J’ATTENDS DES ADULTES « Comme enseigné ou comme élève, pourrait commencer un enfant, voici ce que j’attends de mon professeur… » Peut-être chaque enfant trouvera-t-il d’autres mots, d’autres expressions, d’autres moyens plus visuels pour se dire, pour se faire entendre, mais l’essentiel en sera énoncé. J’attends que vous me considériez comme un sujet en évolution, un « être apprenant » et non comme un objet d’apprentissage ou de gavage, étiqueté, catalogué et catégorisé ! J’ai le désir d’apprendre, mais pas à n’importe quel prix. Et si je ne réussis pas, ce n’est pas parce que je ne veux pas, par paresse ou par manque d’intérêt, mais pour des enjeux qui peuvent m’échapper, pour des contradictions qui ne sont pas toujours claires pour moi-même. J’attends et j’espère que vous me reconnaissiez tel que je suis, là où je suis… et non tel que vous voudriez que je sois. Je ne tire aucune gloire à représenter le portrait-robot de l’élève type, standardisé à tel ou tel niveau, dans telle ou telle matière. Dans ma classe, comme dans ma famille, je me sens un être unique, un enfant, un adolescent qui affronte cette tranche de vie en commettant des erreurs, en me heurtant à des difficultés, en butant ou en me confrontant à des limites. Je me reconnais aussi comme disposant d’infiniment de ressources, d’enthousiasme avec tous mes possibles. J’attends de l’adulte, que vous êtes, qui sera mon instituteur, mon professeur, mon maître : Que vous m’écoutiez parfois dans ce que je vis, dans ce que je ressens, dans ce que j’imagine ou dans ce que je rêve. Que vous ne m’enfermiez pas dans vos réponses, dans votre savoir. Que vous ne restiez pas exclusivement au niveau des faits, de la logique. Que vous ne vous réfugiez pas dans des références normatives ou des raisonnements. Je souhaite avoir devant moi : Un adulte qui soit capable de m’entendre, même dans mes hésitations, mes contradictions et mes tâtonnements. Un adulte qui puisse recevoir mes interrogations, mes désirs et mes peurs… sans les prendre nécessairement en charge, sans se sentir obligé de les résoudre, de les dévier, de les contrer ou de s’y opposer. Je souhaite que vous puissiez considérer comme important le fait de consacrer du temps à de véritables échanges, au partage, à la mise en commun ouverte, sur des thèmes, des questions ou des centres d’intérêt qui, même s’ils paraissent « hors sujet » ou éloignés du programme, uploads/Geographie/ ebook-salome-jacques-charte-de-vie-relationnelle-a-lecole.pdf

  • 45
  • 0
  • 0
Afficher les détails des licences
Licence et utilisation
Gratuit pour un usage personnel Attribution requise
Partager