l d Bibliothèque de philosophie Collection fondée par Jean-Paul Sartre et Mauri

l d Bibliothèque de philosophie Collection fondée par Jean-Paul Sartre et Maurice Merleau-Ponty j MAR TIN HEIDEGGER SCHELLING LE TRAITÉ DE 1809 SUR L'ESSENCE DE LA LIBERTÉ HUMAINE édité par Hildegard Feick Traduit de l'allemand par Jean-François Courtine GALLIMARD d Galatasaray Üniversitesi Merkez Kütüphanesi 111111111111111111111111111111111111111111111 *0087812* 255.07.02.01.06.00/08/0087812 Titre original: SCHELLINGS ABHANDLUNG ÜBER DAS WESEN DER MENSCHLICHEN FREIHEIT (1809) © Max Niemeyer Verlag, Tübingen, 1971. © Éditions Gallimard, 1977, pour la traduction française. , , NOTE DE L EDITEUR Les chiffres marginaux renvoient à la pagination de l'édition allemande: Schellings Abhandlung Über das Wesen der menschli- chen Freiheit (1809), Niemeyer Verlag, Tübingen 1971. 1 AVANT-PROPOS DE L'ÉDITEUR Cet écrit donne dans sa partie principale le texte d'un cours tenu à l'Université de Fribourg-en-Brisgau durant le semestre d'été 1936. Le manuscrit en a été transcrit, et certaines phrases ont été complétées par des termes de liaison chaque fois qu'elles ne comportaient que des indications abrégées. Nous sommes redevables au professeur Heidegger de ses avis et de son aide lors de la collation du texte. Comme le manuscrit ici publié représente une rédaction devant servir de base à un cours, il nous a fallu dans sa resti- tution écrite suppléer à l'occasion à tout ce qui, dans un exposé oral, peut faciliter la compréhension, et introduire, à titre d'expédient, quelques éclaircissements supplémen- taires. Çà et là des répétitions et de courtes remarques annexes ont également été supprimées, quand elles nous ont paru inutiles à l'intelligence du texte. De manière générale, nous avons conservé le style parlé. L'appendice donne quelques passages choisis par nous et tirés des manuscrits préparatoires à un séminaire sur Schel- ling destiné à des étudiants avancés; le séminaire eut lieu durant le semestre d'été 1941. M. Fritz Heidegger avait déjà pris soin d'établir une transcription de ces manuscrits. Cet appendice contient en outre un extrait des notes de séminaire - elles aussi transcrites - datant des années 1941-1943. Nous remercions cordialement MM. Harmut Buchner et Friedrich-W. von Herrmann pour l'aide scrupuleuse qu'ils nous ont apportée lors de la correction des épreuves; nous remercions aussi H. Buchner pour ses indications, reprises dans les « notes Il. Hildegard Feick. AVERTISSEMENT DU TRADUCTEUR Ce texte offre quelques difficultés particulières de traduc- tion qui tiennent essentiellement au fait qu'il s'agit là d'un commentaire suivi du traité sur la liberté, ce qui conduit Heidegger à souligner la terminologie schellingienne et à accentuer ce qu'elle peut avoir de déconcertant. Sans pour autant nous en faire une règle absolue, nous nous sommes généralement efforcé de faire correspondre aux termes allemands qui sont directeurs un seul et même équi- valent français. D'où sans doute quelques inévitables singu- larités d'expression. Le lecteur trouvera à la fin de ce volume un index français- allemand et un glossaire où sont groupées par familles ces principales équivalences. Dans quelques passages, peu nombreux, nous avons complété le travail de l'éditeur en signalant les références au texte de Schelling cité par Heidegger. Dans ce cas, nous avons rétabli les guillemets et nous indiquons la référence entre crochets obliques. Quelques termes ajoutés par le traducteur à titre explica- tif sont indiqués par le même signe. Emmanuel Martineau a bien voulu relire attentivement le manuscrit de cette traduction en cours d'élaboration; il a pu ainsi nous faire part de nombreuses suggestions toujours précieuses. Ce dont nous le remercions ici très cordialement. J.-F. Courtine. (1) EXPLICATIONS INTRODUCTIVES 1. L 'œuvre de Schelling et la tâche de l'interprétation Schelling aborde la question de l'essence de la liberté humaine dans un traité qui a pour titre : Recherches philosophiques sur l'essence de la liberté humaine et les objets qui sy rattachent. Ce traité paraît pour la première fois, accompagné de tra- vaux déjà publiés par Schelling, en un volume intitulé : Écrits philosophiques de F. W. Schelling. Tome premier, Landshut, chez Philipp Krüll, libraire de l'Université, 1809 1. 1809 : Napoléon règne, c'est-à-dire en l'occurrence opprime et outrage l'Allemagne. Depuis 1806 l'Empire a perdu jusqu'à son nom. Cette année-là seize princes alle- mands rejoignent la Confédération du Rhin, placée sous le protectorat de Napoléon. Le 1 er août, ils avisent le Reichstag à Regensburg de leur scission d'avec le Reich. Le 6 août, François II répond en abdiquant la couronne impériale alle- mande. Le 14 octobre 1806, la Prusse connaît à Iéna et à Auerstedt son plus complet effondrement. Napoléon peut écrire au sultan: « La Prusse a disparu. )) Le roi s'était enfui à Memel, au fin fond de la terre allemande. Avec la paix de Tilsit, la Prusse est réduite à la rive droite de l'Elbe. La Saxe Électorale passe à la Confédération du Rhin. Jusqu'à l'Elbe le français devient langue officielle. En 1808, Napoléon convoque à Erfurt une assemblée des Princes. C'est là que Gœthe eut l'occasion de s'entretenir avec Napoléon. Ils parlèrent de poésie, en particulier de la 14 Schelling tragédie et de la représentation du destin. Napoléon dit: les tragédies « appartiennent au passé, à une époque plus sombre. Qu'a-t-on affaire aujourd'hui du destin? Le destin, c'est la politique. Venez à Paris, je vous le demande instam- ment. Là-bas, la conception du monde est plus vaste. li 1809 : Gœthe avait soixante ans. Le Faust, première partie, venait de paraître. Cinq ans plus tôt, en 1804, mourait Kant à l'âge de quatre-vingts ans. L'année suivante, en 1805, Schiller était emporté prématurément. En 1809, Napoléon subit sa première défaite sévère à la bataille d'Aspern. Les (2) paysans tyroliens, menés par Andreas Hofer, se rebellèrent. Entre-temps, au nord, la Prusse avait commencé à retrou- ver son cc esprit ferme et sûr /) (Fichte). Le baron d'Empire von Stein présidait à la refonte de l'Administration. Scharn- horst formait et animait une nouvelle armée. A l'Académie de Berlin, Fichte prononçait ses Discours à la nation alle- mande. Schleiermacher devenait, avec ses sermons à l'église de la Trinité, le maître politique de la société berlinoise. En 1809, Wilhelm von Humboldt devenait ministre prus- sien des cultes et de l'instruction publique : il poursuivit la fondation de l'Université de Berlin, déjà préparée par les cc mémoires » de Fichte et de Schleiermacher. En cette même année, la Cour royale revint de Konigsberg à Berlin. L'année suivante mourait la reine Louise. Un an plus tard, le poète Heinrich von Kleist se tua à Wannsee, lui qui avait long- temps nourri le sombre projet de supprimer Napoléon - Napoléon que Gœthe admirait comme un grand cc phénomène naturel li, que Hegel, en le voyant, au soir de la bataille d'Iéna, traverser la ville à cheval, avait nommé l' cc âme du monde li, et dont le vieux Blücher disait : cc Laissez-le faire, ce n'est qu'un sot. li Pendant ce temps, le diplomate Hardenberg était devenu chancelier d'État; il préservait le soulèvement prusso-allemand, qui allait grandissant, d'une répression immédiate. Tous ces hommes nouveaux - très différents, et poursui- vant chacun sa volonté propre - s'accordaient cependant sur cela même qu'ils voulaient. Ce qu'ils voulaient trouve son expression dans ce mot d'ordre qui circulait entre eux : ils nommaient l'État prussien en formation l' cc État de l'intelligence ), c'est-à-dire de l'esprit. A leur tête, le soldat Scharnhorst réclamait avec toujours plus d'acharnement, Explications introductives 15 pour la guerre, certes de la vaillance, mais pour la paix, des connaissances, encore des connaissances, et de la culture. Culture - Bildung - cela désignait alors un savoir essentiel capable de donner tournure à toutes les positions fondamen- tales de l'être-là historiaI, ce savoir qui constitue la pré- supposition de toute volonté forte. Et bientôt devait se révéler au grand jour la non-vérité profonde de ce mot que Napoléon avait prononcé à Erfurt devant Gœthe: « Le destin, c'est la politique. Il Non, c'est l'esprit qui est destin, et le destin est esprit. Or l'essence de l'esprit, c'est la liberté. En 1809 paraissait le traité de Schelling sur la liberté. C'est ce que Schelling a fait de plus grand, et c'est en même temps l'une des œuvres les plus profondes de la philoso- phie allemande, et par là, de la philosophie occidentale. Deux ans avant le traité de Schelling sur la liberté, en 1807, était parue la première et la plus importante des œuvres de Hegel: la Phénoménologie de l'esprit. La préface de cette œuvre contient un net désaveu de Schelling, et elle aboutit à une rupture définitive entre les deux amis de jeu- (3) nesse. Le troisième, dans cette alliance de jeunesse des trois compagnons souabes, Holderlin, fut, à la même époque, emporté et pris en garde par ses dieux dans l'abri de la folie. Ainsi les trois compagnons qui avaient partagé la même chambre au StiJt de Tübingen se trouvèrent-ils douloureu- sement déchirés et séparés les uns des autres en leur être-là - c'est-à-dire en même temps dans leur œuvre -, mais non pas simplement dispersés. Ils ne faisaient ainsi qu'accomplir, chacun selon sa loi propre, la configuration de l'esprit allemand, dont la métamorphose en une force historiale n'est pas encore achevée, et ne pourra enfin s'achever que si nous réapprenons d'abord à admirer uploads/Geographie/ heidegger-m-schelling-le-traite-de-1809-sur-l-x27-essence-de-la-liberte-humaine.pdf

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