Marcel Mauss (1904-1905) « Essai sur les variations saisonnières des sociétés e

Marcel Mauss (1904-1905) « Essai sur les variations saisonnières des sociétés eskimo Étude de morphologie sociale » Un document produit en version numérique par Jean-Marie Tremblay, professeur de sociologie au Cégep de Chicoutimi Courriel: jmt_sociologue@videotron.ca Site web: http://pages.infinit.net/sociojmt Dans le cadre de la collection: "Les classiques des sciences sociales" Site web: http://www.uqac.uquebec.ca/zone30/Classiques_des_sciences_sociales/index.html Une collection développée en collaboration avec la Bibliothèque Paul-Émile-Boulet de l'Université du Québec à Chicoutimi Site web: http://bibliotheque.uqac.uquebec.ca/index.htm Marcel Mauss, « Essai sur les variations saisonnières des sociétés eskimo » 2 Marcel Mauss, (1904-1905) Cette édition électronique a été réalisée par Jean-Marie Tremblay, professeur de sociologie au Cégep de Chicoutimi Le 17 février 2002 PAR Marcel Mauss (1904-1905) « Essai sur les variations saisonnières des sociétés eskimo. Étude de morphologie sociales » Article originalement publié dans l'Année Sociologique (tome IX, 1904-1905), avec la collaboration de H. BEUCHAT. Polices de caractères utilisée : Pour le texte: Times, 12 points. Pour les citations : Times 10 points. Pour les notes de bas de page : Times, 10 points. Édition électronique réalisée avec le traitement de textes Microsoft Word 2001 pour Macintosh. Mise en page sur papier format LETTRE (US letter), 8.5’’ x 11’’) Marcel Mauss, « Essai sur les variations saisonnières des sociétés eskimo » 3 Marcel Mauss, (1904-1905) Table des matières Essai sur les variations saisonnières des sociétés Eskimos. Étude de morphologie sociale CHAPITRE I Morphologie générale CHAPITRE II Morphologie saisonnière CHAPITRE III Les causes de ces variations saisonnières CHAPITRE IV Les effets CHAPITRE V Conclusion ANNEXES TABLEAU I District de la Kuskokwim (orientation portrait) TABLEAU II Âge et état civil des habitants du district de Kuskokwim (orientation paysage) Marcel Mauss, « Essai sur les variations saisonnières des sociétés eskimo » 4 Marcel Mauss, (1904-1905) « ESSAI SUR LES VARIATIONS SAISONNIÈRES DES SOCIÉTÉS ESKIMOS ÉTUDE DE MORPHOLOGIE SOCIALE 1 » Retour à la table des matières Nous nous proposons d'étudier ici la morphologie sociale des sociétés Eskimos. On sait que nous désignons 2 par ce mot la science qui étudie, non seulement pour le décrire, mais aussi pour l'expliquer, le substrat matériel des sociétés, c'est-à-dire la forme qu'elles affectent en s'établissant sur le sol, le volume et la densité de la population, la manière dont elle est distribuée ainsi que l'ensemble des choses qui servent de siège à la vie collective. Mais parce que notre travail porte sur une population géographique déterminée, il faut se garder d'y voir une étude de pure ethnographie. Notre intention n'est nullement de rassembler, en une monographie descriptive, les particularités diverses que peut présenter la morphologie des peuples Eskimos. Nous entendons, au contraire, à propos des Eskimos, établir des rapports d'une certaine généralité. Et si nous prenons pour objet spécial de notre étude cette remarquable population 3 c'est que les relations sur lesquelles nous voulons 1 Extrait de l'Année Sociologique (tome IX, 1904-1905), avec la collaboration de H. BEUCHAT. 2 Voir. Année Sociologique, note de M. DURKHEIM, II, p. 520 sq., et les années suivantes (vie section). 3 Nous disons « population » faute d'un meilleur mot. Il serait en effet parfaitement inexact de parler d'une nation, dont les tribus eskimos, ellesmêmes mai délimitées, n'ont jamais même eu l'embryon. Mais il serait aussi parfaitement inexact de s'imaginer entre les tribus de ce groupe, peu nombreux (on évalue leur nombre à à peine 60 000 individus, v. H. RINK, The Eskimo Tribes, Their distribution and Characteristics in Meddelelser om Grönland, XI, I, p. 31 sq., et les chiffres donnés n'ont pas été controuvés par les recherches ultérieures), des différences du genre de celles qui séparent entre elles les tribus des autres populations dites primitives. La civilisation tout entière ainsi que la race y sont d'une remarquable uniformité. Sur l'unité de la race voir RINK, ibid., p. 8 sq. et BAHNSON, Ethnografien, Copenhague, 1894, I, p. 223. Sur l'unité de la langue, Voir RINK, ibid., et ibid. vol. 11, p. 6 sq. (nous n'admettons pas, naturellement, toutes les hypothèses de Rink) et surtout l'excellent livre de M. W. THALBITZER, A Phonetical Study of the Eskimo Language, etc. Meddelelser om Grönland, vol. XXXI, Copenhague, 1904, p. 225 et suiv. Cette unité était un fait bien connu des plus anciens explorateurs, et a servi de base aux Marcel Mauss, « Essai sur les variations saisonnières des sociétés eskimo » 5 Marcel Mauss, (1904-1905) appeler l'attention y sont comme grossies et amplifiées, elles y présentent des caractères plus accusés qui permettent d'en bien comprendre la nature et la portée. On est ainsi mieux préparé à les apercevoir même dans les sociétés où elles sont moins immédiatement appa- rentes, où la trame formée par les autres faits sociaux les dissimule davantage à l'observateur. Ce qui fait que les Eskimos offrent, sous ce rapport, un champ d'étude privilégié, c'est que leur morphologie n'est pas la même aux différents moments de l'année : suivant les saisons, la manière dont les hommes se groupent, l'étendue, la forme de leurs maisons, la nature de leurs établissements changent du tout au tout. Ces variations, dont on verra plus loin l'ampli- tude exceptionnellement considérable, permettent d'étudier dans des conditions particulière- ment favorables, la manière dont la forme matérielle des groupements humains, c'est-à-dire la nature et la composition de leur substrat, affectent les différents modes de l'activité collective. On trouvera peut-être qu'une seule et unique population constitue une base bien étroite pour une étude où l'on vise à établir des propositions qui ne s'appliquent pas uniquement à un cas particulier. Mais tout d'abord il ne faut pas perdre de vue que les Eskimos occupent une aire immense de côtes, sinon de territoires 4. Il y a, non pas une, mais des sociétés Eskimos 5 dont la civilisation est assez homogène pour qu'elles puissent être utilement comparées, et assez diversifiée pour que ces comparaisons soient fécondes. De plus, c'est une erreur de croire que le crédit auquel a droit une proposition scientifique dépende étroitement du nom- bre des cas où l'on croit pouvoir la vérifier. Quand un rapport a été établi dans un cas, même instructions de Franklin et des successeurs de Franklin. Cf. FRANKLIN, Narrative of an Expedition Io the shores of the Polar Sea, London, Murray, 1823, p. 43 ; MIERTSCHING, Reisetagebuch, p. 37, p. 42; MARKHAM, in Arctic Papers, p. 151. Sur l'unité de la situation matérielle et morale le livre de M. MURDOCH, The Point Barrow Eskimo, Xth Annual Report of the Bureau of American Ethnology, abonde en renseignements. Celui de M. H. P. STEENSBY, Om Eskimo Kullurens Oprindelse, en etnografisk og antropogeografisk studie, Copenhague, 1905, est plus spécialement consacré à la civilisation matérielle et constitue une excellente démonstration du fait que nous avançons en ce moment. Un certain nombre de travaux ethnographiques spéciaux sont tout aussi probants; ce sont ceux : de M. 0. MASON, v. plus bas, p. 395, no 3, de M. MURDOCH, The forms of the Eskimo Bows, Naturalist, VIII, surtout p. 869, A Study of the Eskimo Bows, Rep. U.S.N.M., 1884, II, pp. 307-316 ; de MM. RINK et BOAS, sur les légendes, Journal of American Folk-Lore, II, p. 122, sq. The Folklore of the Eskimos, ibid., vol. XVII, pp. 1-14; Cf. The Eskimos of Baffin Land, Bull. of the Amer. Mus. of Nat. Hist., XV, I, 1901, p. 355 et suiv. Les différents groupes Eskimos ont une seule mythologie, une seule technologie, une seule organisation sociale, une seule langue; il n'y a que des différences dialectales en ce qui concerne la langue, et des variations pratiques en ce qui concerne le reste de leurs traits collectifs. Le présent travail servira aussi à démontrer qu'ils n'ont qu'une morphologie. La comparaison et la généralisation seront de plus, par là, infiniment facilitées et garanties. 4 Voir plus bas p. 396. 5 Nous ne pouvons donner ici une énumération des sociétés Eskimos avec leurs noms. Nous nous contentons d'indiquer les principaux travaux qui se sont occupés de cette question de nomenclature géographique. Ce sont, en commençant par l'Alaska: DALL, Alaska and ils Resources, 1872, I, p. 180 sq. et in Contributions to North American Ethnology, 1, pp. 1-8 ; ceux de PORTER et de WELLS et KELLEY Cités Plus bas, p. 397, no 5; celui du P. PETITOT, Monogaphie des Esquimaux Tchiglit, Paris, 1872, p. XIII sq. ; BOAS, The Central Eskimos, Sixth Annual Report of the Bureau of American Ethnology, p. 414 sq. Comme on le verra, les divers groupes du Labrador et du Groenland ne semblent pas porter de noms tribaux (cf. plus bas, pp. 400 et 401). La carte la meilleure et la plus explicative que toute énumération est celle de M. THALBITZER, A Phonet. Stud., in Medd. Gr. XXXI. Marcel Mauss, « Essai sur les variations saisonnières des sociétés eskimo » 6 Marcel Mauss, (1904-1905) unique, mais méthodiquement et minutieusement étudié, la réalité en est autrement certaine que quand, pour le démontrer, on l'illustre de faits nombreux, mais disparates, d'exemples curieux, mais confusément empruntés aux sociétés, aux races, aux civilisations les plus hété- rogènes. Stuart Mill dit quelque part qu'une expérience bien faite suffit à démontrer une loi uploads/Geographie/ mauss-essai-sure-les-variations-saisonnieres-des-societes-eskimo.pdf

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