(1) Les promesses que je t’ai faites, Je les ai faites en badinant. Je les ai f

(1) Les promesses que je t’ai faites, Je les ai faites en badinant. Je les ai faites oui, Je les ai faites non, Je les ai faites c’était pour rire C’était pour mieux passer le temps. J’ai eu la faiblesse de promettre à mes petits - enfants d’écrire mes mémoires. Contrairement à ce qu’affirme la chanson de ma jeunesse, je tiens presque toujours mes promesses. Pas celle des autres. Je vais donc essayer de me lancer dans une vaste entreprise, vous faire part de ce que j’ai vu, entendu, vécu, de Mai 40 à Mai 1961…Dans une époque où les documents historiques concernant cette période sont souvent incomplets, rarement objectifs, les pages qui suivent auront valeur de témoignage. J’espère avoir le temps et le courage d’aller jusqu’au terme de ce travail de mémoire. Le titre choisi peut surprendre. C'est Caroline, ma première petite fille, qui m'a donné le nom de "’ Grand - Loup", en lieu et place de Grand Père. Aujourd'hui, tous ceux qui me connaissent bien m'appellent ainsi et cela me convient parfaitement. Quant au mot cornichon, il appelle une explication : Les classes de préparation à Saint - Cyr s'appellent des corniches et les élèves, tout naturellement, reçoivent le nom de cornichons. N'étant pas très futé, (à l'issue de la lecture des pages qui suivent vous en serez convaincus), c'est donc à deux titres que je me range dans le club des "pauvres cornichons". Dans l’espoir de voir un de mes petits-fils embrasser la carrière des armes j’ai, parfois,fait suivre certains évènements de commentaires tactiques qui pourront "raser" les malheureux "pékins", (civils indécrottables),qui auront eu l'imprudence de se lancer dans la lecture de mes folies de jeunesse... J’espère qu’ils me pardonneront cette déformation de vieux "sabreur". Avant de laisser courir une plume rétive, deux remarques préliminaires : D'abord, contrairement à ce que disent les malveillants, le nombre de sots sous l'uniforme, statistiquement parlant, n'est pas plus élevé que dans les autres sociétés. !. Ensuite, dans la mesure ou l'on privilégie l'amitié, c'est dans le tumulte des grandes difficultés qu'elle se forge. Jamais dans l'ombre de préoccupations boutiquières. Finalement, comme vous le remarquerez au fil des pages qui suivent, le petit paysan lorrain complexé de 1940 a bénéficié de l'ascenseur social offert par la vieille armée. Aussi, je peux le dire sans mentir, le métier des armes convenait parfaitement à mon épanouissement. Les mémoires de Grand’Loup. (Ou la vie d’un pauvre "cornichon") 152 2 Deux années bien occupées (17 ans en Mai 1940.) Elève de seconde à Poincaré : Né le 29 Avril 1923, je venais de fêter mes 17 printemps quand l’offensive allemande des Ardennes a fait éclater mes certitudes et l’environnement qui les justifiait. Elève de seconde au lycée Henri Poincaré de Nancy, gaillard turbulent et studieux à la fois, je n’ai pas moissonné les premiers prix de math ou de physique de ma classe, loin s’en faut. Par contre, le prix de gymnastique ne m’a jamais échappé. Cette classe de cinquième VB ouverte en toute hâte en octobre 1936 visait à redonner une chance aux garçons des départements de l’Est, départements qui avaient inventé un certificat d’études primaires dit supérieur, certificat parfaitement inutile puisqu’il conduisait à une voie sans issue. Cette classe dite VB rassemblait une trentaine d’élèves de tous horizons et m’a fait découvrir la communauté juive lorraine représentée par 6 garçons, dont mon vieil ami Eugène Bas, le fils du Rabbin de Nancy. Dans les années 1930, au lycée, la première heure du premier jour était consacrée à l’échange d’informations. A l’appel de son nom, chacun se levait et se présentait en indiquant ses dates et lieu de naissance, l’adresse de ses parents et la profession du père. Eugène Bas avait provoqué la stupéfaction d’un certain nombre de demeurés auxquels j’avais l’honneur d’appartenir quand il avait annoncé 'Père ministre officiant du culte israélite pour la ville de Nancy." Je m’étais alors penché vers mon voisin, Pierre Epin, mille fois plus futé que moi, pour savoir ce qu’était un ministre officiant. Pierre, condescendant, m’avait alors informé qu’il s’agissait du Rabbin, information ponctuée d’un Eh, ballot ! si mortifiant que je n’avais pas osé demander quel était, exactement, le rôle du Rabbin. A l’époque, pour les adolescents, l’antisémitisme n’existait pas et les 6 israélites furent totalement et très naturellement intégrés dans notre groupe. Mes parents habitaient Jeandelincourt, village planté sur la bordure nord du grand Couronné, entre Nancy et Metz, à la limite de la Lorraine annexée par le Reich en 1871. Comme la grande majorité des Alsaciens-Lorrains, ma famille manifestait des sentiments d'un patriotisme exigeant, voire chatouilleux. Tous mes cousins mobilisables servaient dans la ligne Maginot dont ils étaient très fiers. A leurs yeux, cette ligne de forteresses était inviolable. Plus tard, je n’ai jamais osé leur rappeler le vieil adage militaire: "Dans le béton les plus cons". En ce temps là, les cœurs étaient peints en "bleu, blanc, rouge" dès la naissance. Par conséquent, aux yeux de tous les miens, douter de la ligne Maginot et de la victoire de nos forces armées relevait d’un défaitisme honteux, presque de la trahison. 152 3 Rien d’étonnant donc si en Août 1939, l’annonce du pacte germano-soviétique avait définitivement placé l’URSS au ban des pays fréquentables et le parti communiste français aux limites de la communauté nationale. Pendant les 6 premiers mois du drôle de guerre, il ne se passa rien. Jeandelincourt fut utilisé comme base arrière des régiments d'intervalle de la ligne Maginot. Les soldats apprenaient à creuser des tranchées étroites susceptibles de les protéger au passage des chars. Leurs travaux, parfaitement inutiles, nous passionnaient. Le 10 Mai 1940, quand la Meuse fut franchie par les blindés de Gudérian, ce fut la consternation. On voulait se rassurer, grâce aux communiqués officiels et successifs qui annonçaient le" colmatage de la brèche". Le désastre de Dunkerque provoqua le KO debout. Pourtant, une grande lueur d’espoir interrompit cette avalanche d’événements apocalyptiques : l’annonce du limogeage du Généralissime Gamelin et son remplacement par le Général Weygand. Selon nos pères, le premier n’avait pas de colonne vertébrale mais le second, ancien chef d’état -major de Foch, avait un caractère forgé dans l’acier. Il pouvait renouveler le miracle de la Marne. Hélas, hélas, hélas, le miracle n’eut pas lieu et, le 14 Juin 1940, tout bascula pour nous dans une ambiance surréaliste. En effet, si les nouvelles diffusées à la radio annonçaient la débâcle, chez nous en Lorraine, il ne se passait rien, rigoureusement rien ! Sauf dans le domaine aérien. A Jeandelincourt, mis en vacances dès le 1er Juin, grand-loup s’était transformé en observateur du ciel. J’avais "piqué " les jumelles de mon père et, couché sur le toit de notre maison, j’examinais tout ce qui passait au dessus de moi. A partir du mois de juin, à mon grand désespoir, tous les avions qui survolaient mon village portaient la fameuse croix noire de la "luftwaffe". Les cocardes tricolores avaient définitivement disparu. 152 4 Et ce fut la "débâcle " Mollement attaquée, la ligne Maginot tenait sans difficulté son rôle protecteur du pays lorrain. Aussi, tandis que les Allemands marchaient sur Paris, Nancy vivait dans un calme trompeur. Brutalement, nous apprîmes, par la voie des ondes, la mobilisation des français de 17 à 50 ans. A ce titre, nous avons embarqué dans la vieille Ford de Monsieur Poinsignon, l’adjoint au Maire de Jeandelaincourt, en compagnie de Lucien Maire, un ancien de 14-18, de trois de mes camarades. Les adieux furent brefs. Nous sommes arrivés sans grande difficulté à Dijon où nous devions nous présenter à l’autorité militaire. Celle-ci nous invita à continuer vers Lyon car les allemands déboulaient déjà dans la capitale bourguignonne par la route de Paris. A la surprise générale et, je crois, pour la première fois de notre histoire, les hordes germaniques déferlaient sur nos vielles provinces en arrivant par l’Ouest. Déjà, les troupes d’Hitler s’affranchissaient, sans vergogne, des règles de la guerre, des traditions et de la bienséance. On ne peut, évidemment, écarter une erreur de lecture de la carte. A Lyon, nous avons écoutâmes, effondrés, le discours du vieux Maréchal Pétain qui annonçait sa demande d’armistice "dans l’honneur". Autour de nous, la foule manifestait sa joie. Quelques hommes pourtant, pleuraient à chaudes larmes. En ce qui nous concerne, nous étions abasourdis. Pourquoi demander l’armistice ? Les lorrains, c’est bien connu, ne sont pas très futés et l’ampleur de la catastrophe nous échappait totalement. Aussi, est-ce pour en découdre que nous nous sommes présentés à la caserne la plus proche. Nos aînés, nés tous deux en 1920, furent retenus. Les deux vieux de 14-18 et les deux " jeunots" furent invités à aller se faire pendre ailleurs, ce que nous fîmes sans perdre un instant. Sans raison valable, nous avons suivi les colonnes de réfugiés jusque dans le Massif central et nous nous sommes arrêtés, en panne sèche, dans une ferme proche de St Nectaire. Là, nous avons survécu en participant à la fenaison des paysans voisins..: Nous faisions donc les foins pour payer les repas uploads/Geographie/ memoire-1944-45-cne-jm-heissat-4-esc-du-2-rsar.pdf

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