1 Paul Bairoch, Mythes et paradoxes de l’histoire économique, Paris, La Découve

1 Paul Bairoch, Mythes et paradoxes de l’histoire économique, Paris, La Découverte/Poche, collection sciences humaines et sociales, 1999, 288 p. Frédéric Schneider Europe 1 La vingtaine de livres et les cent vingt articles scientifiques qu’il publie en l'espace de quarante ans couvrent aussi bien le démarrage industriel de l'Occident, le sous-développement du Tiers Monde, les inégalités de développement, l'histoire des villes, que la population active, le commerce extérieur, l'énergie ou la productivité agricole. Paul Bairoch naît à Anvers le 24 juillet 1930. Après une charge de cours dans cette même université et un passage au GATT à Genève, Paul Bairoch est nommé, en 1969, professeur à la Sir George Williams University (Montréal). En 1971, il accepte le poste de directeur d'études à l'Ecole Pratique des Hautes Etudes, puis, une année plus tard, celui de professeur d'histoire économique à l'Université de Genève, où il restera jusqu'à sa retraite en 1995. Il occupe en outre la chaire d'Etat réservée à des savants étrangers au Collège de France (Paris 1983). Paul Bairoch est décède à Genève en 1999. Dans son ouvrage Mythes et paradoxes de l’histoire économique, Paul Bairoch nous dévoile le fait que l’histoire économique est remplie de mythes et de paradoxes (dans une moindre mesure). Il définit le terme de « mythe » comme « la fausse perception d’un phénomène de l’histoire économique ». L’auteur dénonce tout particulièrement les mythes de deux groupes d’économistes dont les avis divergent fortement. Le premier est celui des libéraux qui font les louanges du libre-échange qui aurait permis l’essor de l’Occident au XIX siècle. Le second est celui des keynésiens et des marxistes qui propagent des mythes concernant l’exploitation du futur tiers-monde par les pays occidentaux qui aurait permis un enrichissement considérable de l’Occident durant la colonisation (surtout au XIX siècle). Les avis de ces deux types d’économistes convergent donc en un point : les pays occidentaux se sont développés rapidement au XIX siècle. Et cela est également un mythe. Paul Bairoch relève d’autres mythes, tournants inaperçus et paradoxes de l’histoire économique du XIX et du XX siècles concernant l’Occident, le tiers-monde et les échanges entre ces deux mondes. L’auteur s’engage donc dans une croisade contre les idées fausses qui circulent dans le cercle des chercheurs qui étudient l’histoire économique des deux derniers siècles. Ceci est un enjeu crucial pour la recherche contemporaine, puisque les économistes se servent de l’histoire pour élaborer leurs théories. Toutes les idées fausses doivent donc être évincées pour que les théories macroéconomiques soient efficaces. D’ailleurs, selon Paul Bairoch, l’idée fausse principale, c’est qu’il y aurait des lois économiques absolues. L’économiste ne peut donc pas se fonder principalement sur les expériences de l’histoire. 2 L’auteur dévoile d’abord les mythes qui concernent le monde développé en montrant que l’idée qu’on se fait du krach de 1929 est fausse, que l’âge d’or du libre échange en Europe ne dure pas aussi longtemps que l’on l’imagine, si le libre échange est pratiqué dans le reste du monde au XIX siècle et que l’impact du protectionnisme n’est pas toujours négatif. Suivent ensuite les grands mythes sur le rôle du tiers monde dans le développement occidental avec les arguments de Bairoch qui montrent que les matières premières ne sont pas indispensable à l’industrialisation occidentale pendant la période colonialiste, que les débouchés coloniaux ne jouent pas un rôle décisif dans le développement des industries occidentales et que le colonialisme ne joue pas un rôle important dans le déclenchement de la révolution industrielle. Il fait aussi un bilan du colonialisme. La troisième partie concerne les mythes sur le tiers monde : celui des écarts de revenus importants avant le développement économique moderne, celui de la détérioration séculaire des termes de l’échange, celui des relations entre l’essor des exportations des produits tropicaux et les importations de produits alimentaires, ainsi que celui selon lequel la croissance démographique serait favorable à l’économie. Dans la dernière partie, l’auteur nous présente six mythes d’ordre secondaires, des tournants historiques généralement passés inaperçus et ses conclusions. I. Les grands mythes concernant le monde développé L’auteur commence par les mythes qui concernent le krach de 1929 et la grande dépression. Selon le premier de ces trois mythes, les années 1920 sont des années de protectionnisme croissant. Pourtant, il suffit de regarder la moyenne pondérée des droits de douanes sur les produits manufacturés en 1913 et en 1929 pour se rendre compte que ce constat est faux- en effet, cette moyenne est égale à ces deux dates. Évidemment, ce chiffre cache des tendances divergentes mais il suffit pour prouver que l’idée reçue étudiée est fausse. Les années 1920 sont caractérisées par une libéralisation des échanges même s’il ne s’agit pas d’une période de libre échange. Le volume du commerce international rattrape celui de l’avant-guerre en 1924 et il augmente de 6% par an dans les cinq années qui suivent. L’auteur pense que le mythe du protectionnisme des années 1920 est dû au fait que les Etats-Unis adopte une politique commerciale protectionniste à la fin des années vingt. Mais ceci n’est pas le cas de tous les pays occidentaux. Le deuxième mythe concernant la grande dépression auquel Bairoch s’attaque est celui de son ampleur. Même s’il est vrai que la croissance économique baisse fortement, il n’y a pas de dépression dans les pays développés dans les années 1930. Cette baisse est à nuancer à son tour car , même si les années 1925-1929 sont des années de très forte croissance, la croissance des années 1913-1929 (hormis les quatre années de guerre) est à peine supérieure de moitié à celle des années 1929-1939. Cependant, il est vrai que le taux de chômage est très important dans la plupart des pays occidentaux, surtout dans le secteur industriel. Une différenciation nous permet de voir que, finalement, la crise touche différemment les pays. En effet, certains pays occidentaux connaissent même une croissance 3 plus forte dans les années 1930 que dans les années 1920. Ces Etats représentent même la moitié de la population de l’Occident. La grande dépression touche également dans une ampleur variable différents secteurs. Ainsi, l’industrie la subit le plus, alors que, par exemple, la production agricole européenne progresse au cours de cette période. Le dernier des mythes qui concerne la grande dépression est celui selon lequel les économies fascistes la surmontent mieux que les économies libérales. Certes, le taux de croissance est très fort et le taux de chômage s’affaiblit d’une façon importante dans les années trente en Allemagne, mais les performances économiques de ce pays sont médiocres en 1929, il lui est donc facile de rebondir. De plus, ces chiffres ne se traduisent pas par l’augmentation du niveau de vie que l’on pourrait imaginer. En effet, ils sont dus au réarmement de l’Allemagne et ils sont accompagnés d’une augmentation du nombre d’accidents de travail et d’une diminution du salaire horaire. En outre, l’autre grande économie fasciste, l’Italie, ne se développe pas très rapidement. Par la suite, Paul Bairoch s’oppose au mythe selon lequel le libre-échange connaît un âge d’or en Europe dans les années 1815-1914. Les économistes du début du XIX siècle adoptent une position très libérale dans le domaine du commerce équitable. Mais ce n’est pas pour autant que le protectionnisme, sous la forme mercantile ou sous une nouvelle forme, disparaît, bien au contraire. En effet, différents pays prennent conscience de l’avancée de l’industrie du Royaume-Uni et du processus de développement économique. La distanciation des concurrents par le Royaume-Uni fait que les industries nationales ne sont pas compétitives face à lui et qu’une éventuelle diminution des tarifs douaniers serait très néfaste pour elles. C’est à cause des avantages qu’il a dans le domaine de l’industrie que le Royaume-Uni s’oriente progressivement vers le libéralisme. Il ne le fait pas dès le début du XIX toutefois, ce n’est qu’en 1842 que le processus commence. En 1846, on observe un autre tournant décisif- le Royaume- Uni abroge les corn laws. Face à cette offensive du Royaume-Uni, le continent est obligé d’adopter une nouvelle forme de mercantilisme, le protectionnisme, dans les années 1840. Le Royaume-Uni devient de plus en plus libre-échangiste au cours des années 1846-1860 et il influence de plus en plus les théoriciens du continent qui y voient une des origines du développement de ce pays. Le commerce extérieur des pays européens augmente fortement à la fin des années 1840 et pendant les années 1850 mais les diminutions des droits de douane ne sont que très peu significatives avant 1860. C’est en 1860 que le libre-échange effectue sa véritable percée avec le traité de commerce franco-britannique suivi d’autres accords similaires. Mais les États européens sont rapidement déçus par le libre-échange car celui-ci n’apporte pas la croissance économique escomptée et est à l’origine d’une balance commerciale très déficitaire dans la plupart des pays du continent (à l’égard du Royaume-Uni principalement). Les intérêts industriels et agrairiens sont lésés. Ceci explique le retour progressif au protectionnisme au cours des années 1879-1892 sur le continent. L’adoption du tarif Méline par la France en 1892 clos définitivement la période libérale. Les années 1892-1914 sont uploads/Geographie/ paul-bairoch-resume-livre-mythes-et-paradoxes-de-l-x27-histoire-economique-par-frederic-schneider 1 .pdf

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