Éco-cités en Chine Comment l’exemple de l’éco- cité de Tianjin nous éclaire-t-i
Éco-cités en Chine Comment l’exemple de l’éco- cité de Tianjin nous éclaire-t-il sur les limites d’un urbanisme écologique d’État ? Lara Cuvelier Jeimila Donty Aurélie Fierla Juliette Tellez Jean-François Vu SOMMAIRE 2 INTRODUCTION I. L’EXEMPLE DE TIANJIN A. Historique de la construction de la ville B. Les acteurs de sa construction et de sa gouvernance C. Bilan : réussite ou nouvel échec ? II. LES LIMITES D’UNE POLITIQUE VOLONTARISTE A. Les problèmes de gouvernance dans le contexte politique chinois B. Les conflits entre intérêts public et privé C. Cergy vs. Tianjin : deux modèles III. RECOMMANDATIONS SUR EXEMPLES DE RÉUSSITES A. Exemple d’une écocité “réussie” comme Amsterdam en insistant sur l’intégration des citoyens et des entreprises dans le projet politique B. Recommandations : intégrer la société civile dans la construction des villes nouvelles CONCLUSION BIBLIOGRAPHIE 3 INTRODUCTION Nous avions choisi le sujet des éco-cités car elles sont le meilleur enseignement que l’on puisse tirer d’une tentative de créer l’idéal écologique vers lequel on aimerait tous tendre aujourd’hui, compte tenu du contexte climatique et politique. Qu’est-ce qu’une éco-cité exactement ? Les gouvernements et organismes de défense de l’environnement s’accordent assez bien sur la définition d’une éco-cité : également appelée "ville durable", l'éco-cité est une ville aménagée et gérée selon des objectifs et des pratiques de développement durable, et sur des problématiques aussi vastes que : la qualité de l'air, la gestion de l'énergie, de l'eau et des déchets, mais aussi les transport, les aspects sociaux (mixité sociale) et économiques (création de l'emploi). Cette cité en appelle à l'engagement de l'ensemble de ses habitants. Il existe alors deux types d’éco-cité : celles nées de l’aménagement d’une ville existante en la rendant plus durable (les smart cities), ou celles issues de la création d’une ville ex nihilo qui se veut répondre entièrement aux exigences éco- responsables. C’est sur ce deuxième type d’éco-cité que nous avons choisi de nous attarder, et particulièrement sur les tentatives du gouvernement chinois. La première est celle de l’écocité de DonTang, au nord de Shanghai. Construite sur 86 km², elle devait accueillir entre 50 000 et 80 000 habitants et être un exemple écologique : véhicules électriques, légumes bio, une consommation énergétique 70% inférieure aux centres villes chinois. Mais le projet est mort-né; une affaire de corruption. Mais la Chine ne s’arrêtera pas sur cet échec, et retente l’aventure avec la création Tianjin. Si le projet a pu, cette fois-ci, voir le jour, les résultats ne sont pas pour autant au rendez-vous, malgré l’implication du gouvernement chinois. Comment l’exemple de l’éco-cité de Tianjin nous éclaire-t-il sur les limites d’un urbanisme écologique d’État ? 4 I. Exemple de Tianjin A. Historique de la construction de la ville Pour le gouvernement chinois, l’objectif principal de la création des éco-cités était de faire face à la croissance démographique exponentielle chinoise tout en prenant en compte les enjeux du réchauffement climatique. À horizon 2020, il s’agissait de créer une ville de 350 000 habitants sur une surface de 34km2. Dates clés 2006 : la Chine lance plusieurs projets d’éco-cités et fait appel à l’expertise de nombreux pays (dont Singapour et la France). 2007 : création de l’éco-cité sino-singapourienne appelée Tianjin. 2008 : début effectif des travaux. Fin 2015 : seulement ¼ de l’opération est réalisée, et la population de la ville est inférieure à 10% de l’objectif initial qui était de 350 000 habitants. Tianjin est l’histoire d’un partenariat sino-singapourien d’envergure. C’est une joint- venture géante entre la Chine et Singapour, public et privé, qui est à l’origine de la création de la ville. Le choix du lieu s’est fait sur deux critères : il fallait une terre arable mais surtout proche de Pékin pour offrir des opportunités économiques à la ville. Pour mener à bien le projet, les acteurs se sont fixés des objectifs ambitieux en 3 phases : ● phase 1 (de 2008 à 2011) : 85 000 habitants et 30 000 emplois sur une surface de 4 km² au sud du périmètre de l’opération ; ● phase 2 (de 2011 à 2015) : 200 000 habitants et 150 000 emplois au total, aménagement du futur quartier central ; ● phase 3 (de 2016 à 2020) : 350 000 habitants et 210 000 emplois au total, aménagement des quartiers nord et nord-est. B. Les acteurs de sa construction et de sa gouvernance Pour comprendre ce projet, il est important de se pencher en détail sur les acteurs qui en sont à l’origine. Ici, les acteurs du projet sont le gouvernement central chinois et le gouvernement singapourien. La vision du gouvernement chinois pour Tianjin est de l’inscrire dans son plan à 5 ans pour les objectifs de développement durable, dont la 2ème version a été publiée en 2012. L’un des outils mis en avant par ce plan était le développement des éco- 5 cités. En effet, pour la Chine, les éco-cités participent à répondre au problème de la pollution dans les villes, avec leur approche écologique, et leur logique de développement à petite échelle. Elles sont un moyen de montrer au reste du monde que la Chine s’engage pour le développement durable et l’environnement, et elles sont censées être une sorte de vitrine exemplaire sur ces sujets. La joint venture réalisée avec des entreprises singapouriennes a permis au projet d’acquérir une solidité du point de vue de son financement. Le capital du projet est partagé entre différents types de financeurs, et ne dépend pas uniquement de fonds publics. Le gouvernement singapourien s’est investi dans le projet principalement pour des raisons économiques, car les éco cités représentent pour les entreprises un marché juteux et en pleine croissance. Pour les investisseurs privés, l’intérêt du projet est de pouvoir entrer sur le marché des éco cités, qui est en pleine expansion en Chine. Siemens et Philips, par exemple, ont obtenu des contrats d’exclusivité pour leurs produits en échange de l’argent investi dans le projet de Tianjin. C’est pourquoi certains notent que le projet a vu ses exigences baisser en terme d’écologie pour mieux correspondre aux attentes de rentabilité des entreprises. C. Bilan : réussite ou nouvel échec ? Derrière cette vitrine d’exemplarité en matière environnementale, qui a reçu un bon accueil du public et des médias, se trouve une ville exsangue. Pour rappel, la construction a commencé en 2008 et l’objectif était d’atteindre une population de 350 000 habitants. Cependant, la ville ne comptait que 30 000 habitants en 2015, soit moins de 10% de l’objectif initial. L’activité économique y est également quasi- inexistante: les bureaux créés à l’occasion n’ont pas attiré les entreprises, et malgré la présence de facilités et de services publics, la population et les entreprises ne s’y installent pas suffisamment pour atteindre les objectifs de départ. Alors même que les autorités chinoises revendiquent la présence de 1 000 entreprises licenciées, le constat est que ces entreprises ne sont en réalité que des coquilles vides. Un journaliste du quotidien britannique The Guardian décrit la présence de nombreux restaurant qui restent cadenassés même à midi. L'éco-cité s’est fixé comme objectif 50% à 70% le taux de résidents locaux étant employés sur place, soit environ 114 000 d’emplois d’ici 2020. Il s’agit d’un enjeu majeur pour la réussite d’une ville durable. Pourtant, aujourd’hui seulement 4 000 personnes travailleraient dans l’éco- cité. Cet échec économique se double d’un échec financier en raison d’un 6 dépassement de budget considérable par rapport à ce qui a été prévu initialement. D’après le Rapport de la Banque Mondiale, le budget prévu était de 9,7 milliards de dollars. Selon des estimations, le coût final a été réévalué à 230 milliards de dollars. II. Les limites d’une politique volontariste A. Les problèmes de gouvernance dans le contexte politique chinois Le pilotage du projet d’éco-cité Tianhin par une joint venture joignant l’entreprise chinoise TEDA Holding et l’entreprise singapourienne Keppel Corporation pose d’emblée la question du mode de gouvernance, puisqu’un joint venture est un accord passé entre deux entreprises privées, et non une entité administrative per se. Une meilleure définition des rôles des parties prenantes est donc nécessaire. Selon l’article “L’éco-cité de Tianjin: innovations et limites d’une conception sino- singapourienne d’une ville durable” publié dans Métropoliques, le rôle de cette joint venture est avant tout en charge du “développement foncier, de la promotion immobilière, de la promotion économique ainsi que de certaines infrastructures”. En ce qui concerne la gouvernance locale et la gestion administrative de l’éco-cité, le gouvernement central chinois a créé un comité d’administration locale censé assurer les fonctions administratives de l’éco-cité. Ce comité est piloté à la fois par un conseil de direction conjoint, codirigé par les vice-Premiers ministres chinois et singapourien, et un comité de travail conjoint, “codirigé par le ministère chinois du Développement urbain et le ministère du Dévelopemment national singapourien et associant diverses agences gouvernementales, qui supervise la mise en oeuvre du projet et la réalisation de ses objectifs”. Le fait que la Chine ait créé une instance locale et consenti à une codirection avec Singapour montre son réel souhait de soutenir le projet, comme si elle avait uploads/Geographie/ rapport-ecocite-chine-final.pdf
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- Publié le Jan 29, 2021
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