1 Rapport de Stéphan Carbonnaux commandé par l'association FERUS Mai 2008 FERUS
1 Rapport de Stéphan Carbonnaux commandé par l'association FERUS Mai 2008 FERUS BP 114 13 718 Allauch Cedex www.ferus.org 2 RAPPORT HISTORIQUE ET PROSPECTIF SUR LE PROTECTION DE L’OURS DANS LES PYRENEES Préambule Au mois d’octobre 2007, j’ai été embauché comme chargé de mission "ours" par FERUS. J’ai réuni des éléments ayant servi à la rédaction du bilan à mi parcours du Plan de restauration et de conservation de l’ours brun dans les Pyrénées françaises 2006-2009, publié par FERUS, Pays de l’Ours-A.D.E.T. et le W.W.F.-France au mois de mars 2008. Par ailleurs, FERUS m’a demandé de rédiger un rapport personnel qui n’engage bien évidemment que ma personne et aucunement l’association. Ce document évoluera encore puisque certains renseignements, notamment d’origine étrangère, ne sont pas encore assez complets pour être exploités. C’est ainsi que depuis l’automne 2007, j’ai rencontré plusieurs dizaines de personnes compétentes issues des associations, des administrations ou bien des particuliers. J’ai agi avec une totale liberté, choisissant de rencontrer les personnes qui me semblaient à même de me renseigner. Une liste de noms est jointe à ce rapport. N’y figurent pas cependant quelques noms pour la raison exigée de confidentialité ou bien parce que je préfère les taire pour la tranquillité des personnes en cause. Ce n’est un secret pour personne, la vie dans les vallées est aussi faite de représailles lorsqu’on ne pense pas comme le voudraient certaines autorités. J’ajoute qu’au cours de cette mission de recherche, j’ai participé au voyage organisé par le ministère de l’Écologie et la D.I.R.E.N.-Midi-Pyrénées en Trentin (Italie du Nord) et que j’ai effectué deux séjours dans les Asturies en février et en avril. Le premier fut un séjour d’études sur le terrain invité par le F.A.P.A.S. (Fonds pour la protection des animaux sauvages) au cours duquel j’étais accompagné par Denis Bouissou, administrateur de FERUS. Le second fut un séjour de travail et d’observations en compagnie notamment de Sabine Matraire, coordonnatrice "ours" et trésorière de FERUS. Je précise également qu’au terme de trois voyages privés en Slovénie depuis 2005, cumulant dix semaines sur le terrain, au contact quotidien tant des hommes de tous horizons, que de la nature et des ours, de jour comme de nuit, je commence à avoir une bonne vision du rapport hommes/ours dans ce pays. Du reste, le rapport de l’homme et de la nature me passionne depuis longtemps. J’ai ainsi accumulé de nombreuses expériences et observations sur le terrain, je vais dans la nature la nuit, y dors à la belle étoile (y compris seul, là où vivent ours, loups et lynx), ne manque jamais d’approcher toutes les personnes rencontrées au dehors et lit ou visionne quantité de livres ou de films. Je dois beaucoup ici à l’œuvre fondatrice de Robert Hainard. Enfin, je tiens à signaler mon attachement profond et amoureux aux Pyrénées. La Rhune, le Xoldokogagna et le Jaizkibel furent les premières montagnes que j’ai vues avant même de savoir marcher, et le théâtre de mes premières grandes observations dans la nature. J’ai d’ailleurs été initié à l’ornithologie par le grand-père d’amis d’enfance qui vivait à Hendaye, un homme remarquable, basque et béarnais d’origine, qui m’a emmené dans maints endroits du Sud-Ouest. Les yeux et le cœur toujours fixés sur les Pyrénées, la découverte de la vallée d’Aspe en 1992 a décidé de mon installation à Pau il y a quinze ans, d’abord comme permanent de la S.E.P.A.N.S.O.-Béarn avec le statut d’objecteur de conscience. C’est très tôt, sur l’Artzamendi, la montagne de l’ours, un jour de février 1981, que j’ai ressenti combien l’ours était intimement lié aux Pyrénées, à sa nature et à sa culture. Stéphan Carbonnaux Chargé de mission "Ours" à Ferus 3 SOMMAIRE I Le sens profond du retour de l’ours dans les Pyrénées p 5 La création d’une économie autour de l’existence de l’ours est manifestement une voie intéressante à suivre dans les Pyrénées. Elle représentera peut-être, si elle est bien conçue, une nouvelle ère pour nos montagnes. Toutefois, le sens du retour de l’ours est ailleurs, dans une nouvelle relation à vivre avec le roi déchu des animaux de notre continent. II Chronique de la protection l’ours dans les Pyrénées p 12 Il a été dressé ici un historique, à compléter, des désirs et des mesures de protection de l’ours dans les Pyrénées, sans oublier des éléments d’ambiance nécessaires à une meilleure compréhension d’une bataille ô combien difficile. La protection de l’ours des Pyrénées fut un cinglant échec, reste à assurer le renouveau de l’ours dans les Pyrénées. III Les derniers ours des Pyrénées p 29 Recenser les cas de disparition artificielle des derniers ours des Pyrénées nous a paru une tâche obligatoire pour bien saisir les raisons de la disparition de la souche autochtone et la responsabilité de nos autorités devant la catastrophe lente annoncée depuis plus de 50 ans. Pourquoi a-t-on échoué quand les Espagnols ont réussi de leur côté dans la Cordillère cantabrique ? IV La politique pastorale des associations de protection de l’ours dans les Pyrénées occidentales p 42 Défendue comme une révolution, la politique pastorale des associations de défense de l’ours a servi les intérêts du monde de l’élevage quand les ours, eux, disparaissaient les uns après les autres. Une bien cruelle désillusion qu’il faudra effacer d’une manière ou d’une autre. V Le pastoralisme et la prétendue biodiversité p 48 Les éleveurs et leurs moutons ont-ils déjà créé une espèce de plante ou favorisé une plus riche biodiversité ? Qu’y a-t-il vraiment derrière cette fameuse biodiversité que chacun s’accapare ? Voici quelques éléments sur une question fondamentale. VI La chasse et l’ours dans les Pyrénées p 94 Chasser dans un pays peuplé d’ours est possible avec une protection de l’animal. Cependant, dans les Pyrénées, de gros efforts restent à faire tant certaines pratiques cynégétiques sont incompatibles avec la tranquillité de l’ours et de la faune. VII L’espace vital de l’ours dans les Pyrénées p 113 L’ours vit aussi bien dans les contrées les plus sauvages du monde que dans des régions très marquées par l’homme. Au XXIe siècle, l’ours a plus que jamais une place à n os côtés dans les Pyrénées. 4 VIII L’ours et le tourisme dans les Pyrénées p 138 Où il sera combattu les fantasmes et mensonges de certains, selon lesquels le retour de l’ours provoquerait la fin de l’économie touristique des Pyrénées. IX Pour des ours sans puce ni collier électroniques p 143 Dans notre société de plus en plus normalisée, l’animal sauvage doit être fermement défendu pour la liberté qu’il incarne. N’oublions pas que les animaux sont des bancs d’essai de futurs traitements pour les hommes… 5 LE SENS PROFOND DU RETOUR DE L’OURS « Une forêt sans ours n’est pas une vraie forêt. » Robert Hainard Ces dernières années, il est fréquent d’entendre des voix prétendument autorisées, notamment des scientifiques qui ne maîtrisent pas les sujets dont ils parlent, tels Claude Allègre ou Yves Coppens, s’élever contre le retour de l’ours et/ou du loup au motif qu’ils n’auraient pas ou plus leur place dans une société moderne comme la nôtre. Même Jean-Louis Etienne, grand connaisseur des pôles mais ignorant des réalités ursines pyrénéennes, estimait en 2006 qu’« il est ridicule de vouloir réintroduire des ours dans les Pyrénées [...] parce que ça bouscule tout un écosystème qui n’y est plus familiarisé » et déclarait par ailleurs que « l’ours ne fait plus partie de la biodiversité des Pyrénées » (ça c’est un scoop !), qu’ils sont « incontrôlables » (M. Etienne veut-il les équiper de dispositifs neutralisateurs ?) et que « le pastoralisme est la meilleure façon d’entretenir les montagnes1 ». Nous reviendrons sur ce vieux préjugé "néolithique" dans une partie consacrée au pastoralisme et à ce qu’on appelle la biodiversité. Ces renforts médiatiques donnent du poids à un discours récurrent chez les opposants les plus radicaux à l’ours et aux prédateurs. Quel intérêt, si la souche pyrénéenne a disparu et puisque les ours bruns ne seraient pas menacés d’extinction2, d’en relâcher dans les Pyrénées, s’interroge par exemple l’ex-enseignant défenseur acharné du monde pastoral, Bruno Besche- Commenge ? « Il n’y a plus de vipères au bois de Boulogne. On ne parle pas de les réintroduire3 » ajoute-t-il, persuadé de clore toute discussion contradictoire par une pirouette dialectique aussi grossière. Rien d’étonnant alors qu’une journaliste d’un magazine d’informations français conclue son article par cette phrase : « En ville, l’ours est tendance, mais dans les Pyrénées il appartient au passé4. » Il est plus que jamais nécessaire de combattre farouchement une telle manière de penser, et de définir un terme au cœur de notre sujet, celui de "nature"5. De moins en moins employé dans le vocabulaire courant, ou à tort et à travers, le mot nature se définira pour nous comme ce que l’homme n’a pas créé et qui vit en dehors de sa volonté. Cette définition a été formulée par le Suisse Robert Hainard6 dès les années 1930, puis reprise par de nombreux naturalistes et quelques essayistes français tels François Terrasson ou Jean-Claude Génot. Ainsi, la forêt vierge ou uploads/Geographie/ rapport-ferus-carbonnaux-mai-08.pdf
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- Publié le Jul 13, 2021
- Catégorie Geography / Geogra...
- Langue French
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