A Eric Alliez Maurizio Lazzarato Guerres et Capital A Editions Amsterdam 2016 ©

A Eric Alliez Maurizio Lazzarato Guerres et Capital A Editions Amsterdam 2016 © Éditions Amsterdam, 2016 15, rue Henri Regnault 75014 Paris www.editionsamsterdam.fr Facebook : @editionsamsterdam Twitter : @amsterdam_ed ISBN : 978-2-35480-144-1 Diffusion-distribution : Les Belles Lettres Sommaire Introduction. À nos ennemis 12 1. État, machine de guerre, monnaie 36 2. L'accumulation primitive continuée 48 2.1/La guerre contre les femmes 53 2.2/ Guerres de subjectivité et modèle majoritaire 56 2.3/ Libéralisme et colonisation : le cas Locke 62 2.4/ Foucault et l'accumulation primitive 72 2.5/ Généalogie coloniale des disciplines de la biopolitique 77 2.6/ Le racisme et la guerre des races 80 2.7/ La guerre de/dans l'économie-monde 83 2.8/ L'accumulation primitive en débat 85 3. L'appropriation de la machine de guerre 92 3.1/ L'État de la guerre 94 3.2/ L'art et la manière de la guerre chez Adam Smith 102 4- Deux histoires de la Révolution française 108 4-i/ La Révolution française de Clausewitz 109 4-2/ La révolution nègre 114 5- Biopolitiques de la guerre civile permanente 122 S-1/ La séquestration temporelle de la classe ouvrière (et de la société toute entière) 123 5-2/ La formation de la cellule familiale 129 5.3/ Le dressage subjectif n'est pas idéologique 137 6. La nouvelle guerre coloniale 142 7. Les limites du libéralisme de Foucault 154 8. La primauté de la prise, entre Schmitt et Lénine 172 9. Les guerres totales 184 9.1/ La guerre totale comme réversibilité des colonisations interne et externe 188 9.2/ La guerre totale comme guerre industrielle 200 9.3/ La guerre et la guerre civile contre le socialisme (et le communisme) 213 9.4/ Le « paradoxe » du biopouvoir 221 9.5/ Machine de guerre et généralisation du droit de tuer 224 9.6/ Warfare et welfare 232 9.7/ Le keynésianisme de guerre 243 10. Les jeux de stratégie de la Guerre froide 250 10.1/ Cybernétique de la Guerre froide 258 10.2/ Le montage de la Guerre froide 266 10.3/ Le Détroit de la Guerre froide 272 10.4/ Les dessous de American way oflife 286 10.5/ Le business de la Guerre froide 297 11. Clausewitz et la pensée 68 304 11.1/ Distinction et réversibilité du pouvoir et de la guerre 309 11.2/ La machine de guerre de Deleuze et Guattari 319 12. Les guerres fractales du Capital 330 12.1/ L'exécutif comme dispositif « politico-militaire » 336 12.2/ La réalisation de la machine de guerre du Capital 344 12.3/ Les guerres au sein des populations 351 12.4/ Le marxisme hétérodoxe et la guerre 381 12.5/ La guerre de l'Anthropocène n'a pas (encore) eu lieu 388 12.6/ Machines de guerre 410 Remerciements La matière et les grandes articulations de ce travail ont été présentées dans le cadre d'un séminaire associé qui s'est tenu en 2014 et 2015 au département de philosophie de l'Université Paris 8. Que soient donc d'abord remerciés les étudiant.e.s ayant suivi ces séminaires de façon particulièrement assidue et engagée, et les ami.e.s et collègues du département qui, à un titre ou à un autre, ont soutenu l'initiative: Stéphane Douailler, Antonia Bimbaum, Bertrand Ogilvie et Patrice Vermeren. Le travail a également été présenté dans une série de conférences et de workshops dans différentes universités canadiennes où il a donné lieu à des échanges soutenus avec le public et les organisateurs : Gary Genosko et Ganaele Langlois (York University), Enda Brophy (Simon Fraser University), Antonio Calcagno (Western University), Imre Szeman (University of Alberta), Erin Manning (Concordia University) et Brian Massumi (Université de Montréal). Nos plus vifs remerciements aussi au maître éditeur Nicolas Vieillescazes, qui a accompagné le projet depuis sa toute première formulation et « supporté » de bout en bout ses deux artisans. Si vous voulez connaître une questio faites-en l'histoire. — Un (impossible) maître en politique Introduction A nos ennemis 1. Nous vivons dans le temps de la subjectivation des guerres civiles. Nous ne sortons pas de la période du triomphe du marché, des automatismes de la gouvernementalité et de la dépolitisation de l'économie de la dette pour retrouver l'époque des « concep- tions du monde » et de leurs affrontements. Nous entrons dans l'ère de la construction des nouvelles machines de guerre. 2. Le capitalisme et le libéralisme portent les guerres en leur sein comme les nuages portent la tempête. Si la fînanciarisation de la fin du xixe siècle et du début du xxe a conduit à la guerre totale et à la Révolution russe, à la crise de 1929 et aux guerres civiles euro- péennes, la fînanciarisation contemporaine pilote la guerre civile globale en commandant à toutes ses polarisations. 3- Depuis 2011, ce sont les multiples formes de subjectivation des guerres civiles qui modifient profondément à la fois la sémiologie du capital et la pragmatique des luttes s'opposant aux mille pouvoirs de la guerre comme cadre permanent de la vie. Du côté des expérimen- tations des machines anticapitalistes, Occupy Wall Street aux USA, les Indignés en Espagne, les luttes étudiantes au Chili et au Québec, 14 Guerres et Capital la Grèce en 2015 se battent à armes inégales contre l'économie de la dette et les politiques d'austérité. Les « printemps arabes », les grandes manifestations de 2013 au Brésil et les affrontements autour du parc Gezi en Turquie font circuler les mêmes mots d'ordre et de désordre dans tous les Suds. Nuit Debout en France est le dernier rebondissement d'un cycle de luttes et d'occupations qui avait peut-être commencé sur la place Tiananmen en 1989. Du côté du pouvoir, le néolibéralisme, pour mieux pousser les feux de ses poli- tiques économiques prédatrices, promeut une postdémocratie autoritaire et policière gérée par les techniciens du marché, tandis que les nouvelles droites (ou « droites fortes ») déclarent la guerre à l'étranger, à l'immigré, au musulman et aux underclass au seul profit des extrêmes droites « dédiabolisées ». C'est à celles-ci qu'il revient de s'installer ouvertement sur le terrain des guerres civiles qu'elles subjectivent en relançant une guerre raciale de classe. L'hégémonie néofasciste sur les processus de subjectivation est encore confirmée par la reprise de la guerre contre l'autonomie des femmes et les devenirs-mineur de la sexualité (en France, la « Manif pour tous ») comme extension du domaine endocolonial de la guerre civile. A l'ère de la déterritorialisation sans limite de Thatcher et Reagan succède la reterritorialisation raciste, nationaliste, sexiste et xéno- phobe de Trump qui a d'ores et déjà pris la tête de tous les nouveaux fascismes. Le Rêve américain s'est transformé en cauchemar d'une planète insomniaque. 4. Le déséquilibre entre les machines de guerre du Capital et des nouveaux fascismes, d'une part, les luttes multiformes contre le système-monde du nouveau capitalisme, de l'autre, est flagrant. Déséquilibre politique, mais aussi déséquilibre intellectuel. Ce livre se concentre sur un vide, un blanc, un refoulé théorique aussi bien que pratique, qui est pourtant toujours au cœur des puissances et impuissances des mouvements révolutionnaires : celui du concept de « guerre » et de « guerre civile ». À nos ennemis 15 5. « C'est comme une guerre », a-t-on entendu à Athènes pendant le week-end du 11-12 juillet 2015. Avec raison. La population a été confrontée à une stratégie à grande échelle de continuation de la guerre par les moyens de la dette : elle a parachevé la destruc- tion de la Grèce et, du même coup, enclenché l'autodestruction de la «construction européenne». L'objectif de la Commission européenne, de la BCE et du FMI n'a jamais été la médiation ou la recherche du compromis, mais la défaite en rase campagne de l'adversaire. L'énoncé « c'est comme une guerre » est une image qu'il faut aussitôt rectifier : c'est une guerre. La réversibilité de la guerre et de l'économie est au fondement même du capitalisme. Et cela fait bien longtemps que Cari Schmitt a dévoilé l'hypocrisie « pacifiste » du libéralisme en rétablissant la continuité entre l'économie et la guerre : l'économie poursuit des buts de guerre avec d'autres moyens (« le blocage du crédit, l'embargo sur les matières premières, la dégrada- tion de la monnaie étrangère »). Deux officiers supérieurs de l'armée de l'air chinoise, Qiao Liang et Wang Xiangsui, définissent les offensives financières comme des « guerres non sanglantes », tout aussi cruelles et efficaces que les « guerres sanglantes » : une violence froide. Le résultat de la globalisa- tion, expliquent-ils, « c'est que tout en réduisant l'espace du champ de bataille au sens étroit, le monde entier [a été transformé] en un champ de bataille au sens large ». L'élargissement de la guerre et la multiplica- tion de ses noms de domaine finit d'établir le continuum entre guerre, économie et politique. Mais c'est dès le départ que le libéralisme est une. philosophie de guerre totale. (Le pape François semble prêcher dans le désert lorsqu'il affirme, avec une lucidité faisant défaut aux hommes politiques, aux experts de tout acabit et jusqu'aux critiques les plus aguerris du capitalisme : « Lorsque je parle de guerre, je parle de la vraie guerre, non pas de la guerre de religion, mais d'une guerre mondiale en mille morceaux. [...] C'est la guerre pour uploads/Histoire/ alliez-eric-lazzarato-maurizio-guerres-et-capital-amsterdam-2015.pdf

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  • Publié le Mar 03, 2021
  • Catégorie History / Histoire
  • Langue French
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