N° 82 octobre-novembre 2006 Magazine de l’Université de Genève Le français tire

N° 82 octobre-novembre 2006 Magazine de l’Université de Genève Le français tire la langue Campus N° 82 Perspectives Un million de dollars Vincent Piguet, professeur au Service de dermatologie et vénéréologie, a obtenu un appui financier de 1 350 000 dollars de la part de «Human Frontier Science Program», une organisation non gouvernementale de promotion de la science. Le projet primé concerne l’étude du passage du virus du sida au travers de la muqueuse Campus: Qu’allez-vous pouvoir étudier grâce à ces 1 350 000 dollars? > Vincent Piguet: Nous allons nous intéresser à la muqueuse, qui est la première barrière que doit traverser le virus de l’immunodéficience humaine (VIH) avant d’infecter un individu. Lorsqu’il entre en contact avec ces tissus, l’agent infectieux est immédiatement capté par des cellules dites dendritiques dont le rôle est de neutraliser ce genre d’en- vahisseur. Une fois leur tâche accomplie, ces cellules trans- mettent les restes des virus à des lymphocytes (les CD4, aussi appelés globules blancs) qui achèvent la destruction des intrus. Dans le cas du sida, ce mécanisme n’est pas opti- mal. Certains virus survivent au traitement des cellules dendritiques et sont acheminés vivants vers leurs futures victimes, les CD4. Ces derniers, censés protéger notre orga- nisme, deviennent le lieu de prolifération du VIH qui peut commencer l’infection proprement dite. Notre travail vise à comprendre les mécanismes de contact et de transfert des virus entre les cellules dendritiques et les CD4, ce que nous appelons les «synapses infectieuses». Cela fait quelques années que les chercheurs étudient le passage du VIH au travers de la muqueuse. Mais cela demeure un domaine largement méconnu. Si l’on contracte le sida, c’est parce que la muqueuse, notre premier système de protection, est inapte à arrêter le virus? > En réalité, la muqueuse est sans doute extrêmement per- formante, mais même une efficacité de 99,99% n’est pas suffisante pour arrêter le virus. Il faut du 100% pour empê- cher l’infection. Toutefois, c’est durant le passage au tra- vers de la muqueuse que le VIH est le plus vulnérable puis- qu’il n’a pas encore commencé à se répliquer. Un point faible que l’on doit pouvoir exploiter. Nous espérons donc que nos efforts débouchent sur la découverte d’une cible thérapeutique potentielle qui permettrait de fermer défi- nitivement la porte au virus. Sur quel genre de thérapies vos recherches pourraient-elles déboucher? > Cela ne dépend pas de nous, puisque nous pratiquons de la recherche fondamentale et non du développement de médicaments. Cela dit, on peut imaginer que nos travaux permettent la fabrication d’un gel ou d’un spray qui s’ap- pliquerait directement sur les muqueuses susceptibles d’entrer en contact avec le virus. Un tel produit pourrait jouer le même rôle protecteur (contre les maladies) qu’un préservatif lors des relations sexuelles. Quel avantage aurait un tel gel sur un préservatif? > Il présente surtout une alternative au préservatif. On voit bien aujourd’hui que l’épidémie de sida progresse sans cesse, surtout en Afrique, mais aussi en Asie et en Russie. Parfois mal accepté culturellement, le préservatif n’est manifestement pas un moyen de protection suffisant pour arrêter la maladie. Dans ce contexte, un gel protecteur constituerait une arme supplémentaire dans la lutte contre le sida. Par ailleurs, un tel produit aurait l’avantage de pouvoir être utilisé par les femmes, qui contrôleraient ainsi elles-mêmes leur protection. Il est utile de savoir que la plupart des victimes du sida sont des femmes ayant eu des rapports avec des hommes séropositifs. Il est donc par- ticulièrement urgent de mettre à leur disposition un moyen de se protéger. Vos recherches pourraient-elles s’appliquer à d’autres agents infectieux? > Oui, il existe d’autres virus qui empruntent le même che- minement via les cellules dendritiques que le virus du sida, notamment le virus Ebola, celui de l’hépatite C et peut-être certaines bactéries. I Propos recueillis par Anton Vos www.hfsp.org pour fermer la porte au sida Campus Université de Genève Presse Information Publications Rue Général-Dufour 24 - 1211 Genève 4 campus@presse.unige.ch www.unige.ch/presse/ Secrétariat, abonnements T 022/379 77 17 F 022/379 77 29 Comité de rédaction Jean-Paul Descœudres / Pierre-Yves Frei Pascal Garcin / Pierre Spierer Ariane Vlerick Responsable de la publication Didier Raboud Rédaction Vincent Monnet / Anton Vos Jacques Erard / Pierre Chambonnet Correctrice Samira Payot Direction artistique et graphisme ADB Atelier Dominique Broillet Chatty Ecoffey Illustrations Isabelle Pralong Photolithographie Lobsiger Photolithos Impression ATAR Roto Presse, Vernier Tirage: 20’000 exemplaires Publicité Go! Uni-Publicité SA Rosenheimstrasse 12 CH-9008 St-Gall/Suisse T 071/244 10 10 F 071/244 14 14 info@go-uni.com www.go-uni.com Reprise du contenu des articles autorisée avec mention de la source. Les droits des images sont réservés. Université de Genève RENDEZ-VOUS 32 > L’invité «Le choc des civilisations a lieu dans les sociétés, pas entre elles», estime Baber Johansen, titulaire de la chaire «Islamic Religious Studies» à la Harvard Divinity School et spécialiste de l’histoire religieuse et politique dans l’Islam 34 > Extra-muros Une espèce de lichen observée à Genève pour la dernière fois au Vengeron au XIXe siècle a refait surface au Bois de la Grille à Vernier. Philippe Clerc, conservateur aux Conservatoire et Jardin botaniques de la Ville de Genève, raconte sa découverte 36 > Parcours Un nouveau baccalauréat universitaire, deux instituts prestigieux qui fusionnent, un réseau d’études qui se met en place: les études internationales se réorganisent à tous les niveaux. Présentation 38 > Etudiants De retour du Tour de France à la voile, Sylvain Wenger fait escale à Genève pour sa rentrée universitaire. Etudiant en maîtrise de globali- sation et régulation sociale, le marin a des rêves de grand large, mais les pieds sur terre. Rencontre 41 > A lire 42 > En bref 44 > Thèses sommaire > octobre-novembre 2006 12 – 29 DOSSIER Le français tire la langue > Difficultés grammaticales, lexique restreint, mauvaise maîtrise de la conjugaison sont les symptômes d’un mal qui met en danger la capacité de chacun à communiquer, mais aussi à conceptualiser le monde > L’apprentissage du français à l’école primaire est-il satisfaisant? Les points de vue des différents acteurs impliqués dans l’instruc- tion des enfants > Le français vient du latin et les grammairiens du passé ont ins- crit cette filiation dans la graphie. Il en résulte l’orthographe rela- tivement complexe que l’on connaît aujourd’hui RECHERCHE 4 > Droit Avec l’apparition des tribunaux modernes entre le XVe et le XVIe siècle, se développe une iconographie pensée pour renforcer la légitimité de l’institution judiciaire naissante. Explications du pénaliste Christian-Nils Robert 6 > Neurosciences L’Ecole de traduction et d’interprétation s’est associée à la Faculté de médecine dans le cadre d’une étude visant à mieux compren- dre le fonctionnement du cerveau des personnes bilingues 8 > Géographie Les lignes de démarcation qui partagent le Moyen-Orient n’apparaissent pas toutes sur les cartes de géographie. Explications dans le dernier numéro de la revue «a contrario» 9 > Sciences politiques Les indicateurs socio-structurels traditionnels servant à décrypter les comportements politiques ne sont plus adaptés à la réalité du marché du travail. Daniel Oesch, maître assistant au Laboratoire de recherches sociales et politiques appliquées, a développé une nouvelle grille d’analyse 10 > Mathématiques Des physiciens et des linguistes font appel à l’algèbre linéaire pour analyser la structure d’œuvres littéraires comme «Moby Dick» ou «Hamlet». Petit voyage lettré dans les espaces vectoriels en compagnie du professeur Jean-Pierre Eckmann recherche dossier l’invité extra-muros étudiants actualités droit Campus N° 82 4 «Dis papa, pourquoi la justice a-t-elle les yeux bandés?» Pour répondre à cette inter- rogation, sortie de la bouche d’une fillette de 8 ans au cours d’une prome- nade dans les rues de Berne, Christian- Nils Robert, professeur au Département de droit pénal, a longtemps étudié les représentations allégoriques de la justice et en particulier la statuaire destinée à l’espace public. Pris au jeu, le pénaliste a récemment choisi de pousser la porte des hôtels de ville pour ausculter le décor des salles de tribunaux. Illustré avec le plus grand soin, La Justice dans ses décors montre comment la justice laïque s’est appuyée sur des références empruntées à la religion pour asseoir sa puissance et sa légitimité. Qu’on ne s’y trompe pas cependant: le message, souvent d’une violence extrême, s’adressait au moins autant aux justiciables qu’aux magis- trats. Les représentations de la justice étant rarissimes dans les tribunaux des royau- tés, c’est dans les villes du cœur de l’Europe (Hanse, les Flandres, villes d’em- pire, cités confédérées, Bourgogne, Italie du Nord) que Christian-Nils Robert s’est efforcé de dénicher toiles et autres pan- neaux peints. Autant de régions caracté- risées par l’existence d’une bourgeoisie importante cherchant à affirmer un pou- voir urbain autonome et à laïciser l’insti- tution judiciaire, tout en disposant de la puissance économique nécessaire à cette entreprise. Loin de prétendre à l’exhaus- tivité – les experts estiment de toute façon que seuls 2% environ des œuvres originales de cette époque sont parvenus jusqu’à nous –, Christian-Nils Robert a toutefois choisi de concentrer ses efforts sur une dizaine d’exemples embléma- tiques parmi lesquels deux toiles inédites découvertes à Payerne (lire ci- contre). De la Bible au prétoire «La période considérée uploads/Histoire/ campus-no-82.pdf

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  • Publié le Sep 26, 2021
  • Catégorie History / Histoire
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