• N°45 • INDUSTRIES - MARS 1999 PAGE 11 Dossier réalisé par Laurence Alary-Gral
• N°45 • INDUSTRIES - MARS 1999 PAGE 11 Dossier réalisé par Laurence Alary-Grall, Pierre Bourgeois et Laurence Estival. P riorité est désormais donnée à l’utilisateur dans la mise au point de nouveaux produits, biens de consommation et outils de travail. Pour se différencier sur le marché, grands groupes et PME font de plus en plus souvent appel à des ergonomes pour collaborer avec les designers et les concepteurs. Pour appuyer leurs démarches, des laboratoires de recherche peuvent intervenir ponctuellement et le secrétariat d’Etat à l’Industrie leur apporter des aides financières. CONCEPTION & DESIGN L’ERGONOMIE D’ABORD CAHIER INDUSTRIES Les cahiers Industries sont disponibles en téléchargement sur Internet : www.industrie.gouv.fr EVA SOLO PAGE 12 MARS 1999 - INDUSTRIES • N°45 • CAHIER INDUSTRIES ANALYSE La dimension ergonomique d’un nou- veau produit est aujourd’hui prise en compte dès sa conception. Aussi bien par les grands groupes que par les PME. L ’homme moyen n’existe pas. Il y a des grands, des petits, des minces et des corpulents. Pour- quoi continuer à proposer un seul modèle de chaise ? », s’interroge Gérard Laizé, directeur général de l’Association pour la valorisation de l’in- novation dans l’ameublement, qui montre dans une étude comment la morphologie de l’individu et l’évo- lution des modes de vie sont pris en compte dans les nouveaux produits. « Il faut mettre l’homme au centre de la réflexion avec le souci permanent d’améliorer son bien-être. Et réfléchir sur l’utilisation du produit avant d’en imaginer les formes. » Cette démarche est nouvelle. Comme le rappelle Benoît Roussel, du laboratoire conception de pro- duits nouveaux de l’École nationale supérieure d’arts et métiers (Ensam) : « Quand je suis arrivé au labo- ratoire, en 1991, les entreprises formulaient des demandes en matière d’ergonomie d’une manière sous-jacente. Pour elles, l’ergonomie n’était pas cen- trale. Depuis quelques années, de plus en plus d’in- dustriels arrivent avec des demandes précises. Ils sou- haitent que leurs produits soient facilement utilisables. L’ergonomie devient une pièce maîtresse dans le processus de conception. » Cette préoccupation traverse aujourd’hui toutes les entreprises, de la multinationale à la PME, quel que soit le secteur d’activité. Cantonnée à l’origine à l’étude des conditions de travail dans les entreprises, l’er- gonomie a fait une entrée remarquée dans le monde des produits de consommation. La prise en compte de l’utilisateur final devient dans bien des cas une priorité. Et les ergonomes sont consultés chaque fois que la relation homme-objet pose problème. Certains pays com- me le Danemark et l’Italie ont très tôt montré la voie (lire p. 15), influençant for- tement certains designers français comme Jean-Marie Massaud, qui vient d’exposer ses œuvres au musée des Arts décoratifs à Paris. En France, certains secteurs ont lancé le mouvement, aidés par le Laboratoire natio- nal d’essais qui analyse le comportement des utilisateurs face aux objets de la vie courante (lire p. 16). Dans l’automobile notamment, le souci d’améliorer le confort du chauffeur a conduit à revoir la concep- Nouveaux produits : l’approche ergonomique s’affirme tion des sièges. Les constructeurs, soucieux de diminuer la fatigue des conducteurs, ont éga- lement cherché par ce biais à renforcer la sécu- rité. Les fabricants de matériel médical ont adopté la même ap- proche. Un travail de longue haleine a été entrepris sur les instru- ments destinés au corps médical, comme les appareils d’échographie de Kontron Instruments, et dans la relation méde- cin-malade, avec l’ordi- nateur plat d’Absolut Design (lire p. 20). Le secteur du meuble français n’est pas en reste, avec en particulier le créneau des sièges de confort (lire p. 18-19). De même, l’arrivée dans la sphère privée d’outils informatiques jusqu’ici destinés au monde du travail et le développement du travail à domicile nécessi- tent de revoir le mobilier conçu pour un univers de bureau. Mais les efforts pour prendre en compte l’uti- lisateur ont conduit à la fabrication d’objets dont l’es- thétique n’est pas toujours la qualité première. D’où l’obligation de mener conjointement des recherches en matière d’ergonomie et de design comme l’a fait Bextra avec son arbre multimedia (lire p. 19) Collaboration entres designers et ergonomes Tous les grands groupes ont intégré cette manière de travailler. Chez Thomson, les ergonomes travaillent en collaboration avec les designers pour la concep- tion de télécommandes de télévision. « Dès le dé- part, nous sommes associés à la réflexion. Nous faisons des recommandations qui sont prises en compte par les designers. A chaque étape du pro- cessus de conception, nous réalisons des tests auprès des utilisateurs pour valider notre démarche », explique Nathalie Gonzales, du service ergonomie de l’entreprise. « Notre objectif est d’arriver à un com- promis avec les designers. Aujourd’hui, la tendance est à la dimi- nution du nombre de commandes. Nous devons en tenir en compte », ajoute-t-elle. A la SNCF, la collaboration entre desi- gners et ergonomes est totalement passée dans les mœurs. « Quand un nouveau chef de projet arrive, il vient discuter avec nous. Nous sommes de plus en plus associés Ci-dessus, lunettes Starck Eyes. Ci-dessous, chaise longue Jean-Marie Massaud. G. DONATI A. MIKLI • N°45 • INDUSTRIES - MARS 1999 PAGE 13 CAHIER INDUSTRIES ANALYSE avant la réalisation du cahier des charges », note Christian Blatter de la division ergonomie. Le champ d’action de ces spécialistes de l’activité humaine s’est même étendu dans cette entreprise publique. Dans un premier temps, les ergonomes n’intervenaient que dans le cadre de missions traditionnelles visant à l’amélioration des conditions de travail. Aujourd’hui, ils sont associés à la conception de produits destinés aux usagers. D’une manière générale, la banalisation des outils informatiques a renforcé le poids des ergonomes. L’irruption de l’univers Macintosh et PC a joué un rôle fondamental sur les attentes des consommateurs en matière de convivialité. « Le contenu et la forme des projets sont choisis en fonction des utilisateurs. En effet, la présentation et le graphisme ne seront pas les mêmes selon que l’on s’adresse à des spécialistes ou à un large public », indique Fabienne Cammas, responsable de Bess’net, une filiale de l’agence de design Plan Créatif qui conçoit des outils multimé- dia. Une approche partagée par une entreprise comme Jay électronique qui a adopté un maniement simplifié pour sa barrière de sécurité (lire p. 17). Le fait de suivre les recommandations des ergonomes peut égale- ment permettre à l’en- treprise de réaliser des économies. Des études récentes ont montré qu’une ré- flexion préalable sur ces aspects entraînait une diminution des coûts de maintenance des sys- tèmes informatiques. Plus les problèmes sont réglés en amont, plus on peut limiter les dysfonc- tionnements. Aujourd’hui, l’ingénieur – principal maître d’œuvre – qui a appris à travailler en tenant compte des recommandations des services marketing puis des designers, doit s’adap- ter à l’arrivée des ergo- nomes, d’autant plus que la prise en considération des utilisateurs permet aux entreprises de se différen- cier sur des marchés de plus en plus saturés. Dans de nom- breux cas, l’ergonomie peut aussi être source d’innovation et ouvrir sur de nou- veaux marchés. Si les grands groupes ont pris une longueur d’avance en ergonomie, les PME ne sont pas pour autant res- tées à l’écart du mouvement. Pour elles, la solution passe rarement par le recrutement d’un ergonome car, dans bien des cas, des interventions ponctuelles suffisent. Des agences spécialisées leur apportent ce service. Dans le cas de projets innovants, les entre- prises peuvent s’adresser à des laboratoires universi- taires comme celui de l’Ensam qui a mis en place une politique de collaboration avec les industriels (voir encadré). De son côté, le secrétariat d’État à l’Industrie a lancé, en 1998, un appel à propositions « Ergonomie et design » qui permet aux entreprises intéressées de bénéficier d’une aide couvrant en partie les frais de recherche, l’élaboration du cahier des charges et la réalisation de prototypes. Ces aides peuvent pren- dre la forme de subventions pour les phases de vali- dation technico-économique et d’avances rembour- sables pour les phases de développement (lire p. 21). La prise en considération des aspects ergonomi- ques et du design dans la conception de produits nouveaux a en effet été identifiée par le secrétariat d’Etat à l’Industrie comme une des cinquante tech- nologies clés à fort enjeu industriel. L. E. Créé en 1978, le laboratoire conception de produits nouveaux de l’Ensam a pour mission essentielle de promouvoir l’innovation dans les entreprises par des actions de collaboration entre l’Ecole et l’industrie. Outre les projets conduits par les enseignants-chercheurs, il réalise, chaque année, des études pour les entreprises dans le cadre d’un DEA « Conceptions de produits nouveaux » qui accueille des ingénieurs mais aussi des designers, des architectes, des ergonomes... Un des axes de recherche concerne la prise en compte de l’ergonomie. A ce titre, grands groupes et PME innovantes ont recours à ses services. Les coûts peuvent varier de 2 000 francs (304,9 euros) pour une intervention ponctuelle à 400 000 francs (6 097,9 euros) dans le cadre de contrats pluriannuels. Le laboratoire a travaillé récemment sur la conception d’un vélo pliant, l’ergonomie des postes de conduite et des sièges automobiles, uploads/Industriel/ c0045-pdf.pdf
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- Publié le Jan 12, 2021
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