LES QUATERNIONS ET LES ROTATIONS 1. Les nombres complexes C La construction du
LES QUATERNIONS ET LES ROTATIONS 1. Les nombres complexes C La construction du corps non commutatif H de quaternions est une variante plus compliquée de la construction du corps commutatif C de nombres complexes. Donc on commence en rappelant la construction de C à partir de R. Les nombres complexes s’écrivent a + bi avec a, b ∈R. Donc C est un espace vectoriel sur R de dimension 2 avec base {1, i}. La loi d’addition de C est celle que C possède en tant qu’espace vectoriel. La multiplication est R-bilinéaire ∗, et 1 est l’élément neutre. Cela signifie qu’on peut développer un produit comme (a + bi)(c + di) = ac + adi + bci + bdi2. (1) Finalement on fixe i2 = −1. Cela nous donne la formule (a+bi)(c+di) = (ac−bd)+(ad+bc)i. Quand on définit C et ses opérations dans cette façon, il n’est pas évident a priori que la multiplication est associative ou commutative. Les autres propriétés des lois — l’addition est associative et commutative avec un élément neutre 0 et des opposés avec z + (−z) = 0, et il y a la loi de distributivité — se déduisent des faits que C est un R-espace vectoriel et la multiplication est bilinéaire. Pour l’associativité de la multiplication, on pourrait développer les deux membres de l’équation h (a + bi)(c + di) i (e + fi) = (a + bi) h (c + di)(e + fi) i et les comparer. Mais c’est un peu lourd. Après développement il y a 8 termes de chaque côté. Mais à cause de la bilinéarité de la multiplication, on peut réduire ce calcul à la vérification qu’on a (uv)w = u(vw) pour u, v, w ∈{1, i}. Cela remplace un calcul légèrement gros avec 8 + 8 termes par 8 petits calculs. De plus 7 des 8 calculs sont pris en charge par le lemme suivant. Lemme 1.1. Soit E un ensemble muni d’une loi de multiplication E×E →E avec un élément neutre 1 ∈E satisfaisant à 1u = u1 = u pour tout u ∈E. Alors pour tout u, v ∈E on a (1u)v = 1(uv), (u1)v = u(1v), (uv)1 = u(v1). En effet, toutes ces expressions sont égales à uv. Ce lemme s’occupe de tous les calculs de (uv)w = u(vw) avec u, v, w ∈{1, i} avec au moins un des nombres u, v, w est 1. Il nous reste un seul calcul (ii)i = (−1)i = −i = i(−1) = i(ii). (2) Donc la vérification de l’associatitivité de la multiplication dans C peut se réduire au petit calcul (2), si on prend compte de la bilinéarité de la multiplication et des propriétés de l’élément neutre 1. ∗. La R-bilinéarité signifie que pour r ∈R et u, v, w ∈C (ou H) on a (u + v)w = uw + vw, (ru)v = r(uv), u(v + w) = uv + uw, u(rv) = r(uv). C’est à dire, pour tout u ∈C les applications C →C envoyant z 7→zu et z 7→uz sont R-linéaires. 1 2 LES QUATERNIONS ET LES ROTATIONS La commutativité de la multiplication dans C se réduit dans la même façon à la vérification qu’on a uv = vu pour u, v ∈{1, i}. Cela se fait très facilement parce que le neutre 1 commute avec tout élément, et i comme tout élément commute avec lui-même. Une autre approche à la définition des nombres complexes est d’identifier C au l’espace de matrices Cmat = a −b b a a, b ∈R ⊂M2(R). (3) Les éléments de Cmat s’écrivent donc a1 + bj avec a, b ∈R et 1 = 1 0 0 1 , j = 0 −1 1 0 . (4) Donc Cmat est un R-espace vectoriel de dimension 2 avec base {1, j} †. Comme 1 est la matrice identité, il est l’élément neutre pour la multiplication des matrices. La multiplication des matrices donne 12 = 1, 1j = j1 = j, j2 = −1, (5) et en développant (a1 + bj)(c1 + dj) = (ac −bd)1 + (ad + bc)j. (6) Donc l’application φ: C →Cmat envoyant a + bi 7→a1 + bj est une bijection telle que les sommes et produits de membres correspondants de C et Cmat correspondent : φ(x + y) = φ(x) + φ(y) et φ(xy) = φ(x)φ(y). On dit que Cmat est un anneau isomorphe au C usuel. L’avantage de Cmat par rapport à la définition précédente de C est que la multiplication dans Cmat est la multiplication de matrices, qui est connue d’être associative. Donc la vérification directe de l’associativité de la multiplication n’est pas nécessaire pour Cmat Le désavantage de Cmat est qu’il faut vérifier que le produit de deux membres de Cmat reste dans le sous-espace Cmat de M2(R). Mais par la R-bilinéarité de la multiplication, il suffit de montrer que les produits de membres de la base {1, j} sont dans Cmat, et ceci est fait dans (5). La conjugaison complexe a une interpretation matricielle jolie. Pour une matrice 2 × 2 définissons sa conjuguée dans la façon suivante : A = a b c d , conj(A) = d −b −c a . (7) Pour toute matrice 2 × 2 on a A conj(A) = conj(A)A = (ad −bc)1. (8) On écrit det A = ad −bc ; c’est le déterminant de A. Pour une matrice z = a1 + bj ∈Cmat, on a conj(z) = a1 −bj. Donc on a bien retrouvé la conjugaison complexe. On a det z = a2 + b2, qui est un réel > 0 quand z ̸= 0. Le choix du sous-espace vectoriel Cmat ⊂M2(R) n’est pas un hasard. Chaque z ∈C définit l’application linéaire de multiplication par z µz : C − → C w 7− → zw. (9) Ecrivons les membres de R2 comme des vecteurs colonnes ( x y ) au lieu de la notation (x, y) classique. Alors on peut identifier C ∼ = R2 en identifiant x + yi ∈C à ( x y ) ∈R2. Alors pour †. On choisit la lettre j à cause des notations dans Hmat ci-dessous. LES QUATERNIONS ET LES ROTATIONS 3 z = a + bi ∈C, l’application µz : C →C de (9) s’identifie à l’application R2 →R2 envoyant x y 7− → a −b b a x y . (10) Voilà les matrices de Cmat. 2. Les quaternions : version matricielle Hmat On commence avec l’approche matricielle. Définissons Hmat = z −w w z z, w ∈C ⊂M2(C). (11) Les membres de Hmat s’écrivent a + bi −c −di c −di a −bi = a1 + bi + cj + dk (12) avec a, b, c, d ∈R et 1 = 1 0 0 1 , i = i 0 0 −i , j = 0 −1 1 0 , k = 0 −i −i 0 . (13) Donc Hmat est un sous-espace vectoriel réel de M2(C) de dimension 4 avec base {1, i, j, k}. Calculons les produits de membres de la base. La matrice identité 1 est l’élément neutre pour la multiplication des matrices 12 = 1, 1i = i1 = i, 1j = j1 = j, 1k = k1 = k. (14) Les carrés des autres membres de la base sont i2 = −1, j2 = −1, k2 = −1. (15) Les autres produits sont ij = k, jk = i, ki = j, ji = −k, kj = −i, ik = −j. (16) Donc tous les produits de membres de la base de Hmat sont dans Hmat. Par la bilinéarité de la multiplication de matrices, on en déduit que tout produit de membres de Hmat reste dans le sous-espace vectoriel réel Hmat ⊂M2(C). Donc la multiplication de matrices se restreint à une multiplication Hmat × Hmat →Hmat. L’addition et la multiplication dans Hmat est l’addition et la multiplication de matrices, donc elles vérifient toutes les propriétés de celles-ci : l’associativité, la distributivité, les propriétés des éléments neutres 0 et 1. L’addition est commutative, mais la multiplication ne l’est pas (voir (16)). De plus, comme Hmat est un espace vectoriel réel, il y a aussi une opération de multiplication par un scalaire r ∈R : r(a1 + bi + cj + dk) = ra1 + rbi + rcj + rdk. La multiplication Hmat × Hmat →Hmat est R-bilinéaire. L’opération de conjugaison de (7) envoye a + bi −c −di c −di a −bi 7− → a −bi c + di −c + di a + bi . Donc on a conj(a1 + bi + cj + dk) = a1 −bi −cj −dk (17) 4 LES QUATERNIONS ET LES ROTATIONS On a det a + bi −c −di c −di a −bi = |a + bi|2 + |c + di|2 = a2 + b2 + c2 + uploads/Industriel/ les-quaternions-et-les-rotations.pdf
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- Publié le Dec 21, 2022
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