-21- 『コーパスに基づく言語学教育研究報告』 No.9 (2012) L'accentuation en français L2 chez les app
-21- 『コーパスに基づく言語学教育研究報告』 No.9 (2012) L'accentuation en français L2 chez les apprenants hispanophones: une étude acoustique Sandra Schwab (Ecole de langue et de civilisation françaises, Université de Genève) Résumé Au vu des différences accentuelles entre le français et l'espagnol, nous avons examiné, dans le cadre du projet IPFC-espagnol (http://cblle.tufs.ac.jp/ipfc/), la réalisation acoustique de l'accentuation française produite par des apprenants hispanophones, afin de déterminer, le cas échéant, la présence d'un transfert accentuel de l'espagnol vers le français. Pour cela, nous avons étudié l'impact de la structure syllabique du mot (CVCV et CVCVC) et de la position de la voyelle dans le mot (première et deuxième voyelles) sur les paramètres acoustiques relatifs à l'accent (F0, amplitude, durée). Les résultats suggèrent la présence d'un transfert des propriétés de l'accentuation espagnole vers le français, du moins en ce qui concerne l'amplitude et la durée. 1. Introduction1 Dans le domaine de l'acquisition d'une langue seconde (L2), l'intérêt d'étudier l'interlangue des apprenants, dans le but de développer non seulement différents modèles psycholinguistiques d'apprentissage de la L2 mais également des outils et des techniques facilitant l'apprentissage de la L2, n'est plus à souligner. Toutefois, comme le relève Gut (2009), peu de recherches basées sur des corpus oraux se sont intéressées aux aspects phonético-phonologiques de l'interlangue de l'apprenant, la plupart des travaux existants dans ce domaine ayant essentiellement porté sur des aspects lexicaux et morpho-syntaxiques de la L2. Ce n'est que très récemment que des corpus oraux de L2 ont été constitués dans le but d'étudier l'interlangue phonique de l'apprenant, tant sur le plan segmental que suprasegmental (Trouvain et Gut, 2007; Meng, Tseng, Kondo, Harrison et Viscelgia, 2009). En ce qui concerne le français L2, le projet "Interphonologie du français contemporain" (IPFC, Detey et Kawaguchi, 2008; Racine, Detey, Zay et Kawaguchi, sous presse, voir également http://cblle.tufs.ac.jp/ipfc/), a été lancé en 2008, dans le but de constituer et de mettre à disposition 1 Je tiens à remercier Isabelle Racine pour ses précieux commentaires lors de la rédaction de cet article. Cette recherche a pu être entreprise et menée à bien grâce à un subside du Fonds National Suisse de la Recherche Scientifique (100012_132144/1; direction: I. Racine). -22- un corpus oral de français langue étrangère (FLE) varié (différentes L1, différentes tâches) spécifiquement créé pour l'étude des aspects phonético-phonologiques de l'interlangue des apprenants. C'est donc dans le cadre du projet IPFC-espagnol (Racine et al., sous presse) que la recherche présentée dans cet article a été effectuée. L'un des aspects abordés dans ce projet traite de l'apprentissage de la prosodie en L2, plus particulièrement de l'apprentissage de l'accentuation, domaine qui n'a suscité un certain intérêt que très récemment, bien qu'il constitue une composante importante dans l'apprentissage d'une L2. Le domaine de l'accentuation étant particulièrement vaste, nous nous limitons, dans ce travail, à l'étude de l'accent primaire (également appelé accent lexical). Parmi les nombreuses recherches traitant de la perception et la production de l'accent lexical en L2 par des apprenants de diverses L1 (voir Kijak (2009) pour une revue de la littérature), aucune d'entre elles ne porte, à notre connaissance, sur le français L2. Ainsi, nous nous sommes intéressés à la production de l'accentuation française par des apprenants hispanophones, afin d'examiner la présence possible d'un transfert accentuel d'une langue à accent libre (l'espagnol) vers une langue à accent fixe (le français). 1.1. Différences accentuelles entre le français et l'espagnol Le français et espagnol se distinguent par les trois caractéristiques qui définissent l'accent (stress en anglais): sa position, sa fonction et ses corrélats acoustiques. En ce qui concerne la position de l'accent, le français se caractérise par un accent primaire2 fixe de nature oxytone, qui se trouve généralement sur la dernière syllabe du mot ou du groupe de mots, se déplaçant à la fin de ce dernier à mesure qu'il s'allonge3. Le français ne présente donc pas un accent de mot, mais un accent de groupe. Ainsi, comme le mentionne Carton (1997: 103), "si beaucoup de francophones ont l'impression que leur langue est sans accent tonique, c'est parce que l'unité accentuelle est élastique". En espagnol par contre, l’accent –dit "libre"– peut apparaître sur une des trois dernières syllabes du mot (Alcoba et Murillo, 1998), ce qui donne lieu à trois patrons accentuels: oxyton, paroxyton et proparoxyton4. Ainsi, on observe généralement, pour les mots en isolé, une correspondance biunivoque entre mot et accent: un mot ne contient qu'un accent lexical. Quant à sa fonction linguistique, l'accent possède en français une fonction démarcative (Léon, 2007): il organise le continuum sonore et segmente la chaîne parlée en unités prosodiques, ce qui facilite le décodage des unités de sens et permet de lever certaines ambiguïtés. En espagnol, langue à accent libre, celui-ci ne présente pas une fonction démarcative (Quilis, 1993), mais une fonction distinctive, puisqu’il permet de distinguer des "paires minimales" accentuelles (ex. número 2 Notons que le français possède également un accent secondaire qui peut être de nature rythmique ou emphatique et dont la position dans le mot est variable (Rossi, 1981). L'accent emphatique ou d'insistance, dont l'apparition dépendrait de facteurs pragmatiques, a aussi été décrit pour l'espagnol (Quilis, 1993). 3 Relevons toutefois que si le patron oxyton se réalise surtout en lecture ou dans un discours neutre, il ne se produit pas toujours de cette manière dans un discours spontané (Léon, 2007). 4 Il est également possible de rencontrer le patron "superproparoxyton" dans des combinaisons comme ábremelo (ouvre-le-moi) (Quilis, 1993). -23- ['numero], le numéro et numero [nu'mero], je numérote). Mentionnons encore que les deux langues partagent la fonction contrastive de l’accent dans l’axe syntagmatique, permettant d’opposer des syllabes accentuées et non accentuées. La réalisation acoustique de l’accent primaire implique, tant en français qu’en espagnol, une modification de trois paramètres acoustiques: durée, amplitude et fréquence fondamentale (F0) (correspondant aux paramètres perceptifs suivants: longueur, intensité et hauteur). Comme le souligne Léon (2007: 150) pour le français, "de manière générale, une syllabe accentuée est en moyenne deux fois plus longue qu'une syllabe inaccentuée, en français standard". Une augmentation de la durée des syllabes inaccentuées à l'approche de la syllabe accentuée, ainsi qu'une proéminence de l'amplitude et de F0 sur la syllabe accentuée (quoique bien moins marquée que la proéminence de la durée) sont également caractéristiques de l'accentuation en français (Léon et Martin, 2000). Quant à l'espagnol, on observe, comme pour le français, que la durée de la syllabe accentuée est supérieure à celle de la syllabe inaccentuée (Canellada et Madsen, 1987). L'accent se réalise également par une variation de F0: F0 est plus élevée sur les syllabes accentuées que sur les syllabes non accentuées (Quilis, 1981), ce qui laisse penser que la durée et F0 jouent un rôle complémentaire dans la manifestation phonétique de l’accent en espagnol. Même si la tradition philologique a soutenu que l’accent espagnol serait surtout un accent d’intensité, l’amplitude, quant à elle, semble ne jouer qu'un rôle secondaire dans la réalisation de l'accent espagnol (Quilis, 1981). Dans l’ensemble, les différences les plus importantes entre l’accent français et espagnol se trouvent dans sa fonction linguistique –démarcative en français, distinctive en espagnol– et dans la nature même des systèmes accentuels –accent fixe en français, accent libre en espagnol– plutôt que dans leurs corrélats acoustiques, bien que des différences existent également à ce niveau-là. 1.2. Modèles de production de l'accentuation en L2 Les différences accentuelles entre le français et l'espagnol laissent supposer, par analogie au crible phonologique (Troubetzkoy, 1949), l'existence d'un transfert accentuel entre ces deux langues, plus précisément dans le cas qui nous intéresse dans ce travail, un transfert de l'accentuation espagnole vers le français. Si de nombreux modèles tentent de rendre compte de l'apprentissage des aspects segmentaux d'une langue seconde (entre autres, PAM (Perceptual Assimilation Model), Best, 1995; SLM (Speech Learning Model), Flege, 1995), les modèles portant sur l'apprentissage des aspects suprasegmentaux se font beaucoup plus rares. Nous les présentons brièvement dans cette section, avec leurs prédictions quant à l'apprentissage de l'accentuation française par des hispanophones. Le modèle différentiel, basé sur une analyse contrastive de la langue première (L1) et de la langue seconde (L2), stipule que la production de l'accent en L2 dépend des différences entre les propriétés de l'accent en L1 et L2 (entre autres, Archibald, 1995). Ainsi, étant donné les différences accentuelles, présentées dans la section précédente, entre le français et l'espagnol, ce modèle prédit que les hispanophones rencontreront des problèmes lors de la production de l'accentuation en -24- français. Un deuxième modèle, le modèle des valeurs par défaut (Dresher et Kaye, 1990), s'inscrit dans le cadre de la phonologie métrique et part du principe que les différents paramètres accentuels possèdent des valeurs par défaut. Parmi ces paramètres se trouve, par exemple, le paramètre "quantity sensitivity" que l'on pourrait traduire par "sensibilité à la quantité syllabique" ou "sensibilité au poids des syllabes", paramètre qui indique si la position de l'accent dans une langue dépend du poids des syllabes (comme c'est le cas en anglais, par exemple). Ainsi, pour ce paramètre, le modèle définit la valeur par défaut "insensible au poids des syllabes". Selon ce modèle, l'apprentissage de l'accentuation en L2 implique un "réglage" des uploads/Industriel/ schwab-2012-l-x27-accentuation-en-francais-l2.pdf
Documents similaires










-
62
-
0
-
0
Licence et utilisation
Gratuit pour un usage personnel Attribution requise- Détails
- Publié le Mar 25, 2021
- Catégorie Industry / Industr...
- Langue French
- Taille du fichier 0.6700MB