travail & sécurité – n° 768 – janvier 2016 L ’industrie de la plasturgie DOSSIE
travail & sécurité – n° 768 – janvier 2016 L ’industrie de la plasturgie DOSSIER 13 © Fabrice Dimier pour l’INRS 14 À chaud ou à froid, un premier bilan 17 In jecter la prévention en phase de conception 20 La lutte contre les TMS, un pro jet à long terme 22 A ttaquer les risques à la racine 24 Le styrène n’a qu’à bien se tenir n DOSSIER RÉALISÉ par Katia Delaval, avec Antoine Bondéelle. DOSSIER travail & sécurité – n° 768 – janvier 2016 A vec 7 % des emplois de l’industrie manu- facturière en France, la plasturgie repré- sente un secteur majeur, malgré une forte com- pétition internationale. Indus- tries automobiles, domaine médical, mais aussi fabricants d’équipements électriques et électroniques, de matériaux de construction, d’emballages… Dans l’Hexagone, les utilisateurs de matières plastiques sont très variés. Si l’on considère uni- quement les entreprises pour lesquelles la transformation de matières plastiques est l’activité principale, plus de 115 000 sala- riés sont concernés. Les matières plastiques sont constituées de polymères et d’additifs – solvants, stabilisants thermiques et UV, pigments, etc. Elles se répartissent principale- ment en deux catégories. D’un côté, les thermoplastiques, les plus courants, qui sont défor- mables et façonnables sous l’effet de la chaleur. De l’autre, les thermodurcissables, synthé- tisés par une réaction chimique lors de leur mise en forme. Les thermoplastiques sont moulés, à chaud et en général sous pres- sion, pour fabriquer un objet. Quant aux thermodurcissables, ils sont synthétisés par une réaction chimique concomitante à leur mise en forme dans des moules. La transformation de ces derniers reste peu automa- tisée. Le procédé est utilisé dans la production de pièces de séries relativement réduites, comme le polyester insaturé pour la fabri- cation de piscines ou le nau- tisme. Des risques chimiques très variés Les polymères sont générale- ment considérés inertes à froid mais les additifs auxquels ils peuvent être associés (anti UV, retardateurs de feu, etc.) sont, pour certains, potentiellement dangereux. C’est donc dès la fabrication des matières et le mélange de leurs composants que l’exposition des salariés à des agents chimiques dange- reux, dont certains sont cancé- rogènes, mutagènes ou toxiques pour la reproduction (CMR), peut apparaître. « Il est nécessaire de bien faire l’inventaire de tous les produits utilisés et des dangers associés. Des substitutions par des produits moins dangereux sont parfois possibles. Sinon, des mesures de protection col- lective voire individuelle doivent être mises en place », précise Cosmin Patrascu, expert en pré- vention des risques associés aux polymères à l’INRS. Cette situation se rencontre particu- lièrement dans la fabrication de thermodurcissables dont les procédés de moulages sont encore très manuels : l’expo- sition des salariés à des subs- tances dangereuses se retrouve à toutes les étapes, notamment en ce qui concerne les solvants. Concernant les thermoplas- tiques, c’est principalement lors de la montée en tempéra- ture des produits, nécessaire à la transformation des matières plastiques, que les risques se concentrent : des substances 14 15 À chaud ou à froid, un premier bilan PRÉSENTS DANS DE NOMBREUX produits industriels, les plastiques recouvrent une grande diversité de matériaux et leur fabrication une multitude de risques professionnels. Outre les dangers liés aux produits chimiques, des risques de nature variée font de la plasturgie un secteur particulièrement sensible. La prééminence du risque chimique ne doit pas masquer les autres risques. LES QUA TRE ENJEUX DE LA CONVENTION NA TIONALE D’OBJECTIF POUR LA PLASTURGIE La Cnam TS a signé avec la fédération de la plasturgie et des composites une Convention nationale d’ob jectif (CNO), qui est entrée en vigueur en septembre 2014 pour quatre ans. Compte tenu des activités spécifiques du secteur, elle s’est fixé quatre ob jectifs principaux : n l’amélioration des atmosphères de travail en lien avec le risque chimique, dont les risques CMR et incendie/ explosion ; n la prévention des risques liés à la manutention et aux manipulations et le renforcement de la sécurité des voies de circulation et des aires de stockage ; n la prévention des risques liés aux troubles musculosquelettiques (TMS), par la mise en œuvre de moyens de manutention et d’aménagement des postes ; n la diminution des niveaux de bruit dans les ateliers et aux postes de travail. DOSSIER travail & sécurité – n° 768 – janvier 2016 dangereuses peuvent être émises sous forme de gaz. Il y a parfois des dégagements d’aldéhydes dont le formal- déhyde, qui se trouve être un CMR. Ces substances peuvent être en majorité captées au sein des machines. Cependant, des émanations résiduelles peuvent être relâchées dans les espaces de travail, notamment au niveau des buses d’injection ou des têtes d’extrusion. « Mais il existe une multitude de formulations et de processus industriels de transformation des plastiques : la nature et la quantité des pro- duits dangereux émis, en géné- ral gazeux, sont très variables. L’INRS a donc développé un pro- tocole permettant de caractéri- ser les produits de dégradation thermique pour aider les entre- prises à réaliser l’évaluation des risques et à installer des moyens de prévention efficaces, tels que le captage à la source », précise Cosmin Patrascu (lire l’encadré « En savoir plus »). Par ailleurs, lors de travaux de purge ou de nettoyage des outils (buses, fourreaux, etc.), l’opérateur peut être exposé à ces substances gazeuses dangereuses. La prééminence du risque chimique dans la plasturgie ne doit pas pour autant masquer les autres risques, également très présents, comme dans tout secteur industriel. La prévention du risque chimique ne constitue d’ailleurs que l’un des quatre objectifs de la Convention natio- nale d’objectif établie par la CnamTS avec la fédération de la plasturgie (lire l’encadré page précédente « Les quatre enjeux de la convention nationale d’objectifs pour la plasturgie ») : les TMS, les risques incendie- explosion, le bruit généré par les machines de transformation des matières plastiques ou par l’usinage, sont également des risques importants dans ce sec- teur. Des gestes et postures à problème Dans les entreprises de transfor- mation de matières plastiques, toutes les conditions sont réu- nies pour présenter un risque incendie-explosion : présence de combustibles (notamment les polymères), de solvants, utili- sation de températures élevées, machines avec circuits élec- triques… De plus, les polymères peuvent se trouver sous forme de poudre – ou de granulés qui émettent des poussières – ce qui peut constituer un risque Atex, tout comme la présence de solvants. « Ces risques doivent impérativement être évalués par l’employeur et faire l’objet de mesures spécifiques de pré- EN SA VOIR PLUS n A telier de plasturgie - Guide pratique de ventilation. INRS, ED 6146. n Matières plastiques et ad juvants - Hygiène et sécurité. INRS, ED 638 . n « Identifier les composés libérés lors de la dégradation thermique des plastiques », Hygiène & Sécurité du Travail, n°237, 4e trimestre 2014. C’est dès la fabrication des matières et le mélange de leurs composants que l’exposition des salariés à des agents chimiques dangereux peut apparaître. © Fabrice Dimier pour l’INRS THERMOPLASTIQUES : UNE MUL TITUDE DE MA TIÈRES Parmi les thermoplastiques les plus courants, on peut citer : le polyéthylène (PE) et le polypropylène (PP) ; le polychlorure de vinyle (PVC) ; le polystyrène (PS) ; et le polyéthylène téréphtalate (PET), le polycarbonate (PC), les polymères acryliques, etc. Il existe de nombreuses techniques très automatisées pour les façonner, la plus courante en France étant l’in jection, procédé par lequel la matière plastique est in jectée à travers une buse dans un moule qui lui donne la forme désirée. REPÈRES n 45 : c’est l’indice de fréquence des A T dans les entreprises de transformation des matières plastiques. n LA MOITIÉ des accidents du travail sont liés à la manutention. Viennent ensuite les accidents du travail liés aux machines et outillages à main, puis ceux causés par les chutes. n 3 730 : c’est le nombre d’entreprises de transformation des matières plastiques en France. Données 2013 et 2014, Cnam TS. DOSSIER travail & sécurité – n° 768 – janvier 2016 vention et de protection comme la mise en place de captages, la suppression ou la maîtrise des sources d’inflammation, ou encore l’installation d’évents d’explosion », rappelle Florian Marc, expert en risques incen- die-explosion à l’INRS. Même si le nombre d’accidents du travail est en baisse dans les entreprises de transforma- tion des matières plastiques, ce secteur reste très sinistré, avec un indice de fréquence de 45. Et c’est la manutention manuelle qui est à l’origine de plus de la moitié des accidents dans les industries de transformation de matières plastiques. Plus de 90 % des maladies profession- nelles y correspondent à des affections périarticulaires pro- voquées par certains gestes et postures de travail (tableau 57 du régime général) 1. Si la transformation de la matière plastique en elle-même est très automatisée pour les thermo- plastiques, les postes en amont (approvisionnement en matières premières) nécessitent la manu- tention de charges lourdes. De même, les postes après transfor- mation induisent, compte tenu de la cadence des machines, une répétitivité des uploads/Industriel/ ts768page13-pdf.pdf
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- Publié le Sep 15, 2022
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