p.1/25 Leçon 10 - Résistance au feu des constructions en béton préfabriqué 10.1
p.1/25 Leçon 10 - Résistance au feu des constructions en béton préfabriqué 10.1 Généralités Le comportement constructif d'un bâtiment en béton lors d'un incendie est un phénomène complexe à cause du nombre important de paramètres différents qui entrent en jeu. La façon actuelle classique dont on calcule la résistance au feu des bâtiments est fort incomplète. Toute la procédure de conception est très fortement simplifiée. Seuls la section des éléments et l'enrobage des armatures sont vérifiés à la lumière de certains critères de résistance au feu. La vérification de la stabilité générale sous l'influence d'actions directes ou indirectes dues à l'incendie est totalement absente. Seuls quelques programmes informatiques complexes traitent le comportement global de la structure, mais ils ne sont pas encore à la portée de n'importe quel concepteur. Le but de cette leçon est de donner au concepteur une meilleure compréhension du comportement d'une construction en béton lors d'un incendie, pour qu'il comprenne quelles sont les actions directes et indirectes qui entrent en jeu et la façon dont la construction y réagit. Ceci doit dès lors permettre de réaliser une meilleure conception en matière de résistance au feu que le simple calcul de la résistance de certains éléments en béton, tel que cela se pratique couramment. Les exigences en matière de résistance au feu d'un bâtiment sont définies dans les règlementations nationales. Elles définissent la durée de résistance de la construction au feu - en général une courbe de feu normalisée ISO - pour différents types et dimensions de bâtiments. Le concepteur doit vérifier la conformité de la construction aux exigences de résistance au feu. Les principales courbes nominales 10.2 Exigences de base L'aptitude d'une construction en béton à conserver sa fonction portante pendant la durée exigée est exprimée comme suit: Ed,fi(t) ≤ Rd,fi(t) 0 200 400 600 800 1000 1200 1400 0 60 120 180 240 300 360 Temps (en minutes) Température (°C) T (courbe d'hydrocarbures)) T (courbe ISO) p.2/25 où: Ed,fi(t) est la valeur calculée de l'effet des actions au moment t de l'incendie Rd,fi(t) est la valeur de calcul de la résistance de la construction aux températures élevées au moment t. Pour répondre aux exigences ci-dessus, on fait appel à 3 critères de base: • La stabilité est symbolisée par le critère "R"; on considère qu'on est conforme à ce critère lorsque la fonction portante est maintenue pendant la durée exigée. • L'isolation thermique par le critère "I"; on considère qu'on est conforme à ce critère lorsque l'augmentation de température moyenne sur toute la surface non exposée ne dépasse pas 140°K et l'augmentation en chaque point de cette surface ne dépasse pas 180°K. Ce critère doit être considéré comme un état limite de service. • L'étanchéité aux flammes par le critère "E"; on considère qu'on est conforme à ce critère lorsque la fonction de séparation, c'est à dire l'aptitude à empêcher le passage du feu ou des gaz brûlants, est maintenue pendant la durée exigée. Pendant un essai au feu, le critère de « l’étanchéité aux flammes » n’est plus satisfait lorsqu’une nappe de coton déplacée à une distance de 2 à 3 cm d’une ouverture s’enflamme spontanément. En pratique cela veut dire qu'il faut prendre les précautions nécessaires pour éviter le passage du feu à travers les fissures, les joints ou autres ouvertures. Selon la fonction qu'un élément de construction exerce dans le bâtiment, les critères suivants devront être respectés: - Uniquement la fonction portante: la résistance mécanique (critère R) - Uniquement une fonction de séparation: l'intégrité (critère E) et si nécessaire, l'isolation (critère I) - Fonction portante et de séparation: les critères R, E et si nécessaire I Dans la leçon 10 on traitera principalement du critère "R". 10.3 Comment réagit un bâtiment à un feu intense? 10.3.1 Réduction des propriétés des matériaux Lorsqu'un incendie se déclare dans une partie de bâtiment, la température monte très rapidement, du moins s'il y a suffisamment de matériel combustible et d'oxygène. Les parties exposées de la construction se réchauffent en fonction de la conductivité thermique des matériaux: très rapidement pour l'acier exposé, assez lentement pour le béton. Deux phénomènes viennent s'ajouter au niveau des matériaux: une réduction de la résistance mécanique et des dilatations thermiques. Le Tableau 10.1 donne une indication de la résistance mécanique résiduelle du béton, des armatures de béton armé et des armatures de précontrainte en fonction de la température. Les valeurs sont extraites de l'Eurocode 2 "Design of concrete structures - Part 1.2: General rules - Structural fire design" [1]. Des informations supplémentaires concernant la relation contrainte-déformation peuvent être trouvées dans ce même document. p.3/25 Béton Armature de béton armé granulats siliceux granulats calcaires laminé à chaud (classe N) formé à froid (classe N) Armature de précontrainte (classe B) torons et fils Température θ [°C] f c,θ / fck f c,θ / fck f sy,θ / fyk f sy,θ / fyk f py,θ / (0,9 fpk) 20 1,00 1,00 1,00 1,00 1,00 100 1,00 1,00 1,00 1,00 0,99 200 0,95 0,97 1,00 1,00 0,87 300 0,85 0,91 1,00 1,00 0,72 400 0,75 0,85 1,00 0,94 0,46 500 0,60 0,74 0,78 0,67 0,22 600 0,45 0,60 0,47 0,40 0,10 700 0,30 0,43 0,23 0,12 0,08 800 0,15 0,27 0,11 0,11 0,05 900 0,08 0,15 0,06 0,08 0,03 1000 0,04 0,06 0,04 0,05 0,00 1100 0,01 0,02 0,02 0,03 0,00 1200 0,00 0,00 0,00 0,00 0,00 Tableau. 10.1 Caractéristiques des matériaux béton, acier de béton armé et armature de précontrainte La température des constructions en acier non protégé va évoluer très rapidement à travers tout le profil, à cause de la grande conductivité thermique de l’acier et de la faible massivité du profil. La situation du béton est fort différente. Le réchauffement se fait de façon beaucoup plus hétérogène sur la section et la longueur des éléments de construction. Un plancher en béton pourra par exemple, après une heure d'incendie présenter une température de 600°C à la face inférieure et de 60°C à la face supérieure. L'armature du béton qui se trouve en partie inférieure va se réchauffer et perdre progressivement sa résistance. Le béton qui l'entoure ralentit très fortement son réchauffement. A une certaine température, l'armature ne pourra plus résister aux tensions présentes et il y aura rupture. On appelle cela la "température critique". Pour un recouvrement d'armature de 25 mm par exemple, la température critique de l'armature (500°C) sera atteinte lors d'un incendie violent après 90 minutes environ, alors que pour un recouvrement de 35 mm elle ne sera atteinte qu'après 120 minutes. Ces données proviennent de l'Eurocode 2 partie 1-2 [1]. Pour les armatures de précontrainte cette température critique est diminuée de 100 à 150°C et le recouvrement devra être augmenté de plus ou moins 10 à 15 mm pour la même résistance au feu. Mais d'autres phénomènes vont également apparaître, tels que les déformations thermiques. Les éléments vont se déformer suite aux répartitions inégales de température: les poutres et colonnes vont se dilater longitudinalement, les planchers et murs également longitudinalement mais aussi transversalement. Il semble donc y avoir une différence importante entre la stabilité au feu des constructions métalliques et en béton. Pour les constructions métalliques, dans la pratique c'est la stabilité des éléments individuels qui est déterminante (défaillance de la protection) tandis que pour le béton préfabriqué c'est l'ensemble de la construction, avec ses détails de liaison qui sont critiques et rarement l'élément individuel. p.4/25 10.3.2 Dilatations thermiques Lorsqu'un incendie se déclare en plein milieu d'un grand bâtiment, les dilatations thermiques seront bridées par la construction environnante - on parlera de "blocage" - et de grandes contraintes longitudinales et transversales apparaîtront. Dans le cas où le feu apparaît au bord d'un bâtiment, les dilatations longitudinales seront bien moins bloquées. Les incendies qui se propagent à plusieurs travées donneront lieu à des grandes déformations qui se cumulent aux extrémités. Un petit calcul démontre par exemple facilement que pour une augmentation moyenne de température de seulement 100°C, le plancher ou la toiture de 100 m de long (4 travées de 25 m) va déjà s’allonger de 100 mm. Fig. 10.2 Efforts de compression dans une construction à ossature à cause de la dilatation thermique bridée La dilatation des poutres ou planchers nervurés sera bien plus grande que pour les planchers plans. Les poutres et nervures sont exposées au feu sur trois faces. La température sera donc plus uniforme sur toute la section. Les planchers pleins vont moins se dilater longitudinalement mais vont se courber à cause de l’élévation de température différente entre la face exposée et la face supérieure. Les incendies plus courts, mêmes s'ils sont plus intenses, vont provoquer moins de dilatation que les incendies plus longs et moins intenses, car le béton a besoin de beaucoup de temps pour se réchauffer. Ceci permet de comprendre que la sollicitation thermique associée à la courbe standardisée ISO et limitée à une durée déterminée de développement du feu n'est pas toujours l'action du feu la plus défavorable. 10.3.3 Déformation des sections Pour les éléments qui ne sont exposés que d'un seul côté - uploads/Ingenierie_Lourd/ download 5 .pdf
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- Publié le Dec 11, 2021
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