Claudine Piaton, Ezio Godoli et David Peyceré (dir.) Construire au-delà de la M

Claudine Piaton, Ezio Godoli et David Peyceré (dir.) Construire au-delà de la Méditerranée L’apport des archives d’entreprises européennes (1860-1970) Publications de l’Institut national d’histoire de l’art L’entreprise Porcheddu et les projets de réservoirs d’eau en béton armé : modèles constructifs et expériences de chantier (1912-1933) The Porcheddu company and the projects for reinforced concrete water tanks: Building models and construction site experiences (1912-1933) Vilma Fasoli DOI : 10.4000/books.inha.12394 Éditeur : Publications de l’Institut national d’histoire de l’art, Honoré Clair, InVisu (CNRS-INHA) Lieu d’édition : Arles Année d’édition : 2012 Date de mise en ligne : 2 mars 2021 Collection : InVisu EAN électronique : 9791097315009 http://books.openedition.org Édition imprimée Date de publication : 1 janvier 2012 Référence électronique FASOLI, Vilma. L’entreprise Porcheddu et les projets de réservoirs d’eau en béton armé : modèles constructifs et expériences de chantier (1912-1933) In : Construire au-delà de la Méditerranée : L’apport des archives d’entreprises européennes (1860-1970) [en ligne]. Arles : Publications de l’Institut national d’histoire de l’art, 2012 (généré le 15 novembre 2021). Disponible sur Internet : <http:// books.openedition.org/inha/12394>. ISBN : 9791097315009. DOI : https://doi.org/10.4000/ books.inha.12394. 74 Organiser le territoire L’entreprise Porcheddu et les projets de réservoirs d’eau en béton armé : modèles constructifs et expériences de chantier (1912-1933) Vilma Fasoli L’entreprise de l’ingénieur Giovanni Antonio Porcheddu127 débute son activité à Turin dans le secteur des construc- tions civiles et industrielles en 1894, s’imposant en tant que concessionnaire du brevet Hennebique pour le béton armé pour l’Italie du nord, avant d’en devenir, à partir de 1914, l’unique détenteur national. G. A. Porcheddu et François Hennebique étaient liés par une estime et une confiance réciproques. Ce dernier soutint l’entreprise italienne dans sa phase initiale, aidant aux opérations de calcul depuis ses bureaux de Bruxelles, tandis que dès 1897 il lui accorde une autonomie progressive qui varie en fonction des difficultés de l’intervention. D’autre part, l’entreprise Porcheddu expéri- mente un nouveau type de fer à béton à section particulière (autre que ronde) et à l’adhérence améliorée, dont le brevet fut déposé en 1906 et diffusé aussitôt dans une publi- cité de la revue Il Cemento128. Quelques données chiffrées permettent de comprendre, et la croissance de l’entreprise, et son succès dans l’application du brevet Hennebique en Italie : de 12 interventions en 1895, elle passe à 424 en 1902129 et, en 1909, l’entreprise a à son actif 1307 chantiers réalisés. L’entreprise Porcheddu sera mise en liquidation entre 1934 et 1935 mais dès 1933 ses activités s’étaient I • VILLES ET RÉSEAUX 75 École italienne de filles, Antalya, Turquie (1922) : plan de la structure en béton armé des extensions Dépôt de locomotives de la gare de Tripoli, Libye (1912) : plan de la structure en béton armé déjà fortement réduites. Au cours des années 1894-1933, elle réalise 2 600 projets, dont seulement cinq hors d’Italie : un dépôt de locomotives et un réservoir d’eau à Tripoli (Libye) en 1912, deux écoles italiennes à Rhodes et à Antalya (Turquie) en 1922, l’hôpital italien et un réservoir d’eau à Tanger (Maroc) en 1926. L’entreprise s’affirme dans le secteur de la construction de réservoirs d’eau potable en béton armé dès 1903. Il s’agit alors d’un projet inhabituel et audacieux dont la réalisa- tion n’est pas sans grandes difficultés. Elle construit deux réservoirs cylindriques superposés (un réservoir inférieur de 480 m3 et un réservoir supérieur de 1 600 m3) à l’intérieur de la tour circulaire sud du Castello Sforzesco de Milan. L’intervention de l’entreprise Porcheddu répondait au projet de restructuration élaboré par l’architecte Luca Beltrami qui avait adapté les deux tours du château pour y placer des réservoirs de service, selon le plan de réorganisation du réseau hydraulique de la ville de Milan. D’autres réservoirs, de dimensions beaucoup plus réduites, seront construits par Porcheddu au cours des années suivantes, pour quelques administrations publiques locales. La revue Le Béton armé, particulièrement intéressée par la question des dimensions et du calcul des structures, affirmait déjà en 1900 que « la construction des réservoirs a été l’une des premières applications du béton armé, et tous les systèmes ont trouvé dans ce genre d’ouvrages un débouché fort important130 ». Cette revue cite aussi bien les travaux antérieurs en France de Joseph Monier – deux réservoirs, l’un de 200 m3 réalisé en 1868 à Maisons-Alfort, et l’autre de 119 m3 construit en 1872 à Bougival – que les réservoirs plus récents de 500 m3 à base cylindrique réalisés en 1897 par François Coignet pour le port de Toulon. À ses débuts, la maison Hennebique construit de préfé- rence des structures à base rectangulaire subdivisées en au moins deux compartiments pour permettre la continuité de l’approvisionnement en eau durant les phases d’entretien qui nécessitent la vidange totale de l’un des deux réser- voirs. En 1900, la maison Hennebique a déjà à son actif la construction de plus de 80 réservoirs131 qui diffèrent les uns des autres par la forme (rectangulaire ou circulaire), par la disposition (enterrés ou élevés sur des structures à piliers ou à mur continu) et par la subdivision interne (de un à plusieurs compartiments). Le réservoir de 260 m3 construit à Saint-Marcel dans l’Aude par Rouverol et Teissier132, agents concessionnaires Henne- bique de Montpellier, est l’une des étapes fondamentales en ce qui concerne ce type de constructions. Les dispositifs et solutions techniques mis au point deviendront des références pour les futurs projets de réservoirs de la maison Hennebique et s’appliqueront également au réservoir de 2 500 m3 qu’elle construira en 1926 à La Rochelle133. La forme cylindrique expérimentée à Saint-Marcel permet une meilleure répartition de la pression de l’eau contre la surface interne du réservoir. La cuve repose sur un pylône formé de 28 colonnes en béton armé sur lesquels reposent des poutres organisées selon un système radial. Pour faciliter le contrôle et l’entretien des installations, la tour centrale carrée du pylône dispose d’un escalier, de compartiments d’évacuation des eaux et de compartiments destinés aux tuyaux de distribution. Pour résoudre le problème du réchauffement de l’eau, la toiture, ou terrasse supérieure, est recouverte d’une couche de terre et d’herbe qui est arrosée régulièrement. Une fois la construc- tion achevée, il a été également décidé d’envelopper le réser- voir d’une paroi de briques créant un sas destiné à diriger l’eau en excès, évitant ainsi qu’elle suinte le long des parois en béton armé. Des ouvertures judicieusement distribuées le long de la paroi interne de la partie supérieure du pylône permettent d’autre part l’évaporation de l’eau en excès. De plus, l’approvisionnement en Pixoline, un revêtement imper- méable dont les qualités furent vantées à plusieurs reprises dans la publicité de la revue Le Béton armé, est réservé aux concessionnaires de la maison Hennebique. Le modèle de Saint-Marcel inspirera également le projet d’un réservoir de 50 m3 de forme hexagonale, destiné à la jetée du port au sparte134 à Tripoli (Libye)135, et présenté par l’entre- prise Porcheddu au ministère des Colonies (Direction générale des Affaires civiles et des œuvres publiques) le 28 mai 1912. 76 Organiser le territoire Réservoir de 2 000 m3 sur le port au sparte, Tripoli, Libye (1912) : étude de la structure en béton armé avec compartiments de 50 m3, coupe et axonométries Réservoir de 2 000 m3 sur le port au sparte, Tripoli, Libye (1912) : étude de la structure en béton armé avec compartiments de 50 m3, plan et élévation I • VILLES ET RÉSEAUX 77 Réservoir sur le port au sparte, Tripoli, Libye : projet de reconstruction d’un réservoir en béton armé, plan, coupe et élévation (1932) 78 Organiser le territoire Réservoir de 50 m3, Tripoli, Libye (1912) : plan et élévation de la structure en béton armé Cette proposition ne sera pas retenue, probablement à cause de la nature du marché à forfait et des contraintes finan- cières. En revanche, le ministère des Colonies acceptera le projet d’un réservoir beaucoup plus grand (2 000 m3 d’eau), à la forme moins audacieuse. Le projet d’un réservoir carré constitué de poteaux-poutres en béton armé divisé en quatre compartiments et pouvant recueillir le peu d’eau provenant de l’aqueduc de la Boumeliana, ainsi que celle fournie par un dessalinisateur d’eau de mer encore à réaliser, est donc approuvé. Les nombreuses difficultés apparues tout au long du chan- tier retardèrent de 91 jours la fin des travaux136, imposant à l’entreprise le paiement d’une pénalité. Les adjonctions demandées par le ministère concernant la surélévation et l’agrandissement du réservoir, destinées à accueillir des bureaux et le logement du gardien, comportaient un renfor- cement des structures de la toiture et la mise en place d’un double gainage sur le fond qui entraînèrent une augmenta- tion des coûts. À la fin des travaux, les tests de stabilité et les essais d’étanchéité ne purent être menés à bien car le dessalinisateur d’eau de mer n’était pas encore terminé et l’aqueduc de la Boumeliana ne fournissait pas suffisam- ment d’eau. Les tests furent donc renvoyés à l’année suivante (mars et avril 1913), laissant le réservoir inactif. En 1913, les tests sur les structures eurent des résultats favorables, tandis que les essais uploads/Ingenierie_Lourd/ inha-12394.pdf

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