La linguistique textuelle en France Dans l’aperçu général de la théorie de la l

La linguistique textuelle en France Dans l’aperçu général de la théorie de la linguistique textuelle on peut mettre en lumière deux traductions essentielles en langue française qui ont largement contribué à installer le projet d'une linguistique textuelle dans le paysage linguistique: celles d'H. Weinrich (1973) et de M. Bakhtine (1978). Le projet d'une linguistique textuelle tient en grande partie son actualité et son succès théorique dans les propos désormais célèbres de M. Bakhtine (1978): «La linguistique (...) n'a absolument pas défriché la section dont devraient relever les grands ensembles verbaux: longs énoncés de la vie courante, dialogues, discours, traités, romans, etc. car ces énoncés-là peuvent et doivent être définis et étudiés, eux aussi, de façon purement linguistique, comme des phénomènes du langage» [6 , p.59]. H. Weinrich (1964, 1973 trad. fr.), le premier, se situe résolument dans le cadre d'une linguistique du texte en étudiant les fonctionnements des temps verbaux [15, p. 12]. Voulant aborder la théorie des temps, H. Weinrich précise que le champ d'analyse ne peut se réduire à une syntaxe de la phrase. Le linguiste peut en effet construire des unités plus grandes et, à l'inverse, il peut pousser la segmentation en direction d'unités plus fines que la phrase. Il définit ainsi un véritable "programme de travail" [15, p.13]. Les deux traductions en langue française d'H. Weinrich et M. Bakhtine ne doivent cependant pas faire oublier les nombreuses recherches fondatrices de la linguistique textuelle menées en Allemagne dans les années 1970, auxquelles il faut ajouter, à cette époque, les travaux de W. Dressler et T.A. Van Dijk, ainsi que ceux du chercheur américain R-A. de Beaugrande. Une mention particulière sera faite ici au chercheur hollandais T.A. Van Dijk dont l'itinéraire intellectuel est retracé dans un numéro récent de la revue Le français dans le monde. Ce qui était nouveau et intéressant dans cette théorie en gestation de la grammaire de textes, d’après lui, c'était l'introduction de la notion de "macrostructure", notion alors inconnue dans les grammaires de phrases. Selon cette notion, non seulement les textes contenaient des relations locales ou microstructurelles entre phrases mais ils possédaient aussi des structures d'ensemble qui définissaient leur cohérence globale et leur organisation. Ce qui est resté, c'est l'importance de la notion de cohérence dans toute théorie sémantique du discours, ainsi que l'idée aujourd'hui évidente que les textes aussi sont organisés dans leur ensemble à des niveaux de description plus globaux [14, p.44]. La linguistique textuelle d'expression française comble aujourd'hui peu à peu son retard par rapport aux pays anglo-saxons. Un indice de ce développement peut être repéré dans les mentions existantes dans les dictionnaires ou précis d'introduction à la linguistique. 1 Citons simplement ici D. Maingueneau (1996) : «Le linguiste prend également en compte des unités plus vastes que la phrase, l'ensemble du texte dont une phrase fait partie. Une branche de la linguistique (la linguistique textuelle ou grammaire de texte) se donne précisément pour objet la textualité: un texte forme en effet une unité, il est autre chose qu'une suite de phrases mises bout à bout (...). Cette unité résulte de contraintes de cohésion et de cohérence» [11, p.19-20]. Lita Lundquist (1988), la première, a brossé un tableau historique de la discipline en France: la linguistique textuelle y est, sous ce nom, moins répandue que dans les pays voisins, étant donné une certaine indétermination terminologique: discours fait en effet concurrence à texte après Benvéniste (1966), chez qui le "discours", comme la "parole" chez Saussure, constitue la manifestation de la langue dans la communication. Aussi l'emploi français du terme "texte" se trouve-t-il en distribution complémentaire avec "discours" (Slakta, 1975: Texte-Phrase-Morphème: système de règles linguistiques formelles. Discours-Énoncé-Mot: ensemble de normes sociales concrètes). Le terme "texte", lui, dans la linguistique textuelle d'inspiration allemande, se voit attribuer deux sens: celui d'unité théorique de la langue et celui de phénomène concret de la parole. A cette hétérogénéité lexicale s'ajoutent deux emplois supplémentaires de discours: celui de l'analyse de discours et celui des travaux sur le discours oral et la conversation (E. Roulet, 1991 et l'école de Genève). C'est ce que précise L. Lundquist (1988), lorsqu'elle écrit que la linguistique textuelle s'est donc d'abord attachée à étudier les phénomènes syntaxiques d'ordre transphrastique et relativement bien délimités (par exemple la substitution pronominale et l'emploi des temps) pour s'approcher ensuite des réflexions sémantico-pragmatiques, tant sur le contexte linguistique proche que sur les notions de situation, d'univers de discours et de connaissances partagées, lesquelles englobent des facteurs cognitifs et psychologiques [10, 145]. Dès lors, la linguistique textuelle a engagé deux séries de recherches, la première visant à définir, par des approches syntaxiques et sémantico-pragmatiques, les contraintes qui pèsent sur l'appropriation d'une phrase bien formée à son contexte, et la seconde, tentant d'élaborer une théorie textuelle globale qui se concentre sur des macrostructures et méta-règles régissant l'interprétation et la constitution progressive du sens du texte. Tant pour les approches transphrastiques et contextuelles que pour les optiques globalisantes et textuelles, on a vu les recherches de la linguistique textuelle s'articuler autour des problèmes inhérents d'une part à la cohérence thématique - thème/rhème et anaphorisation - et, de l'autre, à la cohérence pragmatique - connecteurs et organisateurs textuels. 2 Les principes de base de la grammaire de texte permettent aujourd'hui de mener une véritable réflexion linguistique et textuelle en s'affranchissant d'un trop grand formalisme de ces principes de base. On peut mentionner ici l'importance de la linguistique textuelle dans le champ du Français langue étrangère. H. Rück dans son ouvrage intitulé Linguistique textuelle et enseignement du français paru en 1980 dans la collection du CREDIF chez Hatier expose les principes fondamentaux de la linguistique textuelle et d'en examine les conséquences sur le plan didactique. Selon lui, la linguistique textuelle, comme science de la structure et du fonctionnement des textes linguistiques, a peu à peu pris de l'importance dans le débat scientifique de ces dernières années. Elle ne doit plus aujourd'hui se concevoir comme le complément nécessaire d'une forme de la description linguistique fixée sur la phrase en tant que plus grande unité descriptible, mais elle s'efforce d'atteindre à une reconstruction générale de la linguistique sur les fondements que représente l'unité "texte" [13, p. 9]. Dès lors, H. Rück s'interroge sur les conséquences didactiques qui peuvent se dégager de cet horizon de recherches linguistiques: elles portent à la fois sur les notions de compétence textuelle et de langue source/langue cible. Dans le n° spécial de la revue Le français dans le monde dirigé par J. Cortès, qui marque que jusqu'à une date très récente, le linguiste (surtout français), s'intéressait essentiellement au rôle fonctionnel d'unités minimales ou segments (mots, monèmes ou morphèmes) au sein de cette unité plus vaste ou macrosegment qu'est la phrase. Quelles que soient les difficultés qu'on puisse rencontrer à définir les unités du langage (Saussure a dit à ce propos des choses toujours actuelles), ce mode d'approche - linguistique ou grammatical - est toujours bien vivant et donne lieu à des travaux d'un grand intérêt. On s'accorde, toutefois, à reconnaître que la phrase n'est pas la dimension idéale pour une étude sérieuse des problèmes de communication (sémantique et pragmatique) que nous allons donc tenter d'envisager ici dans un cadre textuel [7, p. 28]. Pour ce faire, J. Cortès part d'une définition du texte empruntée à L. Lundquist (1980) qui propose de saisir le texte comme signe global, un macro-signe doté d'un signifié, d'un signifiant et d'un réfèrent: Sé Sa Référent 3 Un texte est un acte de langage (selon Austin et Searle) qu'elle propose de décomposer en trois actes fondamentaux: un acte de référence, un acte de prédication, un acte illocutionnaire. En d'autres termes, un texte est un acte de langage au moyen duquel: - on parle de quelque chose (référence); - pour en dire quelque chose (prédication); - afin de communiquer avec quelqu'un dans une intention spécifique (illocution). J. Cortès propose alors un schéma abstrait contenant trois niveaux principaux d'analyse: - le niveau référentiel → structure thématique. Sont étudiés ici les phénomènes de progression thématique mentionnés plus haut dans ce cours; - le niveau prédicatif → structure sémantique. Sont étudiés ici les phénomènes de contiguïté sémantique et d'anaphores sémantique (récurrence de traits sémantiques et isotopies) ; - le niveau pragmatique → structure pragmatique. Sont étudiés ici les phénomènes de force et valeur illocutoire des énoncés. De nouvelles solutions s'offrent ainsi à des problèmes qui ne pouvaient seuls être résolus par la grammaire de phrase: les anaphores, les sélections d'articles, les permutations de membres de phrases, les pronoms, la place de l'accent, l'emphase et l'intonation, les relations entre phrases, la concordance des temps. En plus, on voit se développer la grammaire transphrastique ou textuelle. M. Charolles (1988, 1993 et 1995) et B. Combettes (1992) ont été les premiers en France à engager la linguistique transphrastique dans la voie de la définition des plans d'organisation du texte. Ces "niveaux" (Combettes) ou "plans" (Charolles) sont formés de divers domaines qui ont leur spécificité et dont l'étude requiert, de ce fait, des catégories et des concepts particuliers. Dans une perspective que M. Charolles uploads/Ingenierie_Lourd/ la-linguistique-textuelle-en-france.pdf

  • 11
  • 0
  • 0
Afficher les détails des licences
Licence et utilisation
Gratuit pour un usage personnel Attribution requise
Partager