54 ZREE N°4/2013 LES GRANDS DOSSIERS Introduction Introduction Les métamatéria

54 ZREE N°4/2013 LES GRANDS DOSSIERS Introduction Introduction Les métamatériaux sont des matériaux arti- ficiels conçus pour présenter des propriétés physiques qui ne sont pas rencontrées dans la nature. Les métamatériaux électromagnétiques possèdent une structure périodique de dimen- sions inférieures à celles des ondes électro- magnétiques dont ils affectent la propagation. Les métamatériaux sont devenus une nouvelle discipline de la physique et de l’électromagné- tisme. Leurs applications potentielles sont très diverses : les micro-ondes avec les antennes et les composants guidés, les télécommunications, la défense (antennes implantables, absorbants et radômes), la santé avec les capteurs intelli- gents et les systèmes acoustiques. On sait que pour résoudre les équations de Maxwell, il faut connaître les équations « constitutives » qui relient les grandeurs champ électrique et champ magnétique aux pro- priétés intrinsèques des matériaux que sont la permittivité (¡) et la perméabilité (+), voire à d’autres paramètres de cou- plage traduisant la chiralité éventuelle du matériau 1 (j,c)2. La forme générale de ces équations constitutives est don- née par les relations dans lesquelles désigne le champ électrique, le champ d’induction électrique, le champ d’excitation magnétique et le champ magnétique. ¡,j,cet +sont de nature tenso- rielle et sont des matrices 3 x 3. Dans ces équations, du fait des termes de couplage (j,c), le champ électrique peut entraîner une polarisation magné- tique et le champ magnétique une polarisation électrique. Les ondes entrantes peuvent alors avoir un comportement diffé- rent des ondes sortantes. Cette forme d’anisotropie, s’ajoutant à l’anisotropie associée au caractère tensoriel de ¡et + (c’est- 1 La chiralité traduit l’absence de symétrie qui interdit de superposer un système avec son image dans un miroir. 2 Le coefficient j est dénommé « paramètre de chiralité » et le coefficient c « paramètre de Tellegen ». à-dire leur variation en fonction de la direction considérée), a conduit en 1968, le professeur J. A. Kong du MIT à appeler ces milieux des milieux « bianisotropes » [1]. D’ores et déjà, il convient de dire que les mi- lieux bianisotropes, dans le cas le plus général, n’existent pas dans la nature. On peut le regret- ter car un milieu polarisé pourrait alors s’aiman- ter et vice versa, ce qui pourrait contribuer à beaucoup d’applications dans le domaine des micro-ondes. Sans prétendre lister tous les types de milieux naturels, on peut distinguer : sLESMILIEUXISOTROPESDANSLESQUELS¡ et + sont des scalaires ; s LES MILIEUX ANISOTROPES DANS LESQUELS ¡ et + sont tensoriels mais où n’existent pas de coefficients de couplage j,c ; sLESMILIEUXBIANISOTROPESTELSQUEDÏlNISPRÏCÏDEMMENTETqui sont construits de la main de l’homme. On peut classer les milieux isotropes dans un diagramme [¡, +] faisant apparaître quatre quadrants (figure 1) selon le signe de ¡et +. sLARÏGION)CORRESPONDAUXMILIEUXDIÏLECTRIQUESCLASSIQUESÌ¡ et + > 0 qui constituent 80 % environ des milieux naturels ; sLA RÏGION )) CORRESPOND AUX MATÏRIAUX DONT ¡ est < 0 et +> 0. On y trouve de nombreux plasmas. Certains métaux (or, argent) présentent également cette caractéristique à des fréquences optiques ; sLA RÏGION )6 Oá ¡ est > 0 et + < 0 est le domaine des matériaux magnétiques au sens large. Il été démontré que les ondes à polarisation circulaire pouvaient s’y propager donnant naissance à des dispositifs divers comme les isola- teurs, les circulateurs et les déphaseurs non réciproques à ferrite largement utilisés dans les techniques radars et dans les télécommunications ; s,A RÏGION ))) EST LA RÏGION Oá LES DEUX GRANDEURS ¡ et + sont < 0 et donnent naissance à un indice de réfraction n < 03. Il a fallu attendre 1967 pour que le scientifique russe 3 , formule dans laquelle ¡ et + sont des grandeurs complexes. Les métamatériaux Des matériaux naturels aux matériaux créés et fabriqués par l’homme Alain Priou Université Paris Ouest Nanterre La Défense Laboratoire d’Energie, de Mécanique et d’Electromagnétisme REE N°4/2013 Z 55 LES GRANDS DOSSIERS Introduction 6ICTOR6ESELAGOMONTREQUEDESONDESPOUVAIENTSEPROPA- ger dans de tels milieux, ondes obéissant aux équations de Maxwell permettant de déduire R et T [2]. Les structures des métamatériaux En 1999, J. Pendry & al [3] ont proposé une variété de structures planes périodiques qui selon eux permettraient de Si ¡= -1 et += -1, il vient = . construire des métamatériaux. Ces structures consistaient en résonateurs en anneau fendu “split ring resonators (SRR)” équivalant à des boucles ou à des tubes conducteurs inter- rompus par un espace et de tiges conductrices périodiques continues ou discontinues. Un champ magnétique variable crée dans une telle structure « anneau » une force électro- motrice située dans le plan de l’élément, qui génère des cou- rants dans le conducteur. Le gap équivaut à une capacité permettant l’apparition d’un phénomène de résonance fonc- Figure 1 : Classification en quatre quadrants des milieux complexes. Figure 2 : Schéma d’un résonateur en anneau fendu (SRR) Source : Wikipedia. Figure 3 : Dans le matériau de gauche, ¡ et + dérivent des atomes constitutifs – Dans celui de droite, ils dérivent d’éléments constitutifs tels que des SRR. 56 ZREE N°4/2013 LES GRANDS DOSSIERS Introduction tion de la géométrie de l’élément (figure 2). De tels éléments peuvent être assemblés en un métamatériau dans lequel ils conditionnent les valeurs de la permittivité ¡et de la per- méabilité +, comme les atomes le font dans les matériaux naturels (figure 3). En 2000, D.R. Smith & al [4], reprenant les idées de J. Pendry, a montré, pour la première fois, comment fabriquer ce type de matériaux qui n’existent pas dans la nature. Ils ont utilisé, comme cellule élémentaire, des tiges et des anneaux conducteurs montés en un réseau périodique 1 D ou 2 D (figures 4 et 5). En 2003, C.G. Parazolli & al [4] ont réalisé au Phantom Boeing Works une structure 3 D connue sous le nom de Boeing cube (figure 6). ,AVALIDATIONDESÏQUATIONSDE-AXWELLPAR6ICTOR6ESELAGOet les premières réalisations de D.R. Smith & al ont ouvert tout un champ nouveau de conception des matériaux fabriqués par l’homme. %ST CEVRAIMENTNOUVEAU %N %RIC6ON(IPPELDU“Insulation Lab MIT” (Dielectrics and Waves 1952, Artech (OUSE PRÏDISAIT QUEN UTILISANT LANALOGIE ET LÏQUIVALENCEentre les propriétés des matériaux et les circuits électriques équivalents, il était possible de penser à réaliser des milieux à ¡ < 0 et + < 0 soit à indice n < 0. Il a, entre autres, montré l’existence de milieux à ¡ < 0 bien avant tout le monde en uti- lisant des circuits en T en W prédisant que le comportement que l’on peut avoir dans un milieu à ¡< 0 était similaire au fonctionnement magnétique des ferrites, et ce avant le prix Nobel de Louis Néel sur la théorie des ferrites (1970). Les vitraux de nos cathédrales (figure 7) sont encore un autre exemple de ce qui a été réalisé comme structure pério- dique filtrant ou modulant la lumière selon la journée. Est-ce une première application des métamatériaux en optique 4? 4 En 1857 Michael Faraday a synthétise la première solution de nanopar- ticules d’or pur. Il explique alors de manière empirique comment les nanoparticules métalliques modifient la couleur des vitraux. Il faut attendre 1908 pour que G. Mie et P. Lilienfeld élabore une théorie qui explique la couleur des vitraux en fonction de la taille des nano- particules. Figure 4 : Première structure « à main gauche » réalisée à l’UCSD (Université de Californie - San Diego) par D.R. Smith & al. Figure 5 : Structure à résonateurs fendus à deux dimensions réalisée à l’UCSD par D.R. Smith. Figure 6 : Structure 3D - Cube Boeing. Figure 7 : Les vitraux - L’une des premières applications des métamatériaux. REE N°4/2013 Z 57 LES GRANDS DOSSIERS Introduction Les écrans sélectifs en fréquence (Frequency Selective Screens ou FSS) utilisés dans les absorbants, les radômes et décrits largement en 2000 dans un ouvrage de Ben A. Munk [6] représentent une première réalisation de structures pério- diques de petites dimensions (cellules élémentaires de l’ordre de h/4) fabriquées par l’homme (plus de 300 cellules élé- mentaires ont été créées correspondant à autant de fonctions filtres possibles). Un exemple est donné (figures 8 et 9) avec un dipôle linéaire monté en mur de blindage et une structure convoluée pour avoir des fonctions plus large bande. Les métamatériaux sont fabriqués avec des cellules élé- mentaires périodiques dont les dimensions (périodicité des motifs et dimensions) restent très petites devant la longueur d’onde ce qui conduit à regarder ces matériaux comme assez homogène. Une très importante innovation dans ces struc- tures a porté sur la réalisation de surfaces à haute impédance 3()OU()3 TELLESQUEDÏlNIESETRÏALISÏESPAR$3IEVENPIPER5#,!ET(2,LABS ETSURLADÏMONSTRATIONDEl’accordabilité de ces surfaces haute impédance (figure 10). C’était la première fois qu’une antenne à balayage électro- nique planaire était réalisée. C’était aussi la première fois que l’on pouvait : sRÏALISERUNESURFACECORRUGUÏEAPLATIEDÏPAISSEUR h, alors que dans un fonctionnement normal l’épaisseur est de h/4 ; sDANS UNE BANDE DONNÏE AVOIR UN CONDUCTEUR i MAGNÏ- tique » parfait (PMC ou AMC) tout comme on dispose d’un conducteur électrique parfait, ce qui change le fonctionne- ment des antennes plaquées sur une paroi métallique, ren- force et améliore leurs propriétés (gain, directivité et niveau de lobes secondaires). C’est l’ouverture possible vers uploads/Ingenierie_Lourd/ les-metamateriaux-pdf.pdf

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