CHAPITRE IV CHOIX DES INSTRUMENTS 1) Introduction Dans ce chapitre, on utilise

CHAPITRE IV CHOIX DES INSTRUMENTS 1) Introduction Dans ce chapitre, on utilise le modèle d’équilibre partiel pour tester la robustesse du résultat d’équivalence des instruments. A cette fin, on les compare en contexte d’incertitude, du point de vue de la distribution et de l’incitation à innover. On aboutit à plusieurs classements des instruments, par ordre de préférence du Planificateur. Remarque : on garde dans ce chapitre la convention utilisée au chapitre III, pour repérer les instruments : a) Norme uniforme de rejets, b) Taxe pigouvienne, c) Subvention de la dépollution, d) Droits de polluer alloués gratuitement, e) Droits de polluer mis aux enchères. 2) Décentralisation** Dans cette section et la suivante, on s’appuie à nouveau sur l’exemple du chapitre précédent (cf. Chap. III, Sect. 5). La nouveauté vient de ce qu’on conçoit désormais que le Planificateur dispose d’une information incomplète, pour en tirer certaines conséquences sur ses choix pratiques. Pour l’instant, on admet que le Planificateur sait tracer la figure ci-dessous (cf. Chap. III, Fig. 5). Plus précisément, il connaît les courbes Dm, Cm– et Cm+, et la fréquence q des entreprises de type –. Par contre, il ignore le type de telle ou telle entreprise particulière. € O Cm− z− z A € Cm+ O z+ z E Types – Types + E° E Dm . E° Dm . A Figure 1. Ces circonstances le mettent dans une position ambiguë. D’un côté, disposant de la figure 1, il est en mesure de décrire en détail l’état optimal de l’économie. En particulier : il détermine les rejets z– et z+ des types – et + respectivement ; de 45 la proportion des entreprises de chaque type, il déduit ensuite les rejets totaux z° = J (q z– + (1 – q) z+) ; il calcule aussi le coût des dommages de la pollution marginale OA. De l’autre, parce qu’il ignore comment apparier les entreprises et les types, il est incapable, seul, de décentraliser l’état ainsi décrit. En effet, il ne peut dire, de telle entreprise j, prise au hasard dans la population des firmes (1, 2, …, J), si elle est de type – ou +. Par conséquent, il est pris au dépourvu au moment de répartir les rejets totaux. On établit alors le résultat suivant. Premier classement des instruments : En cas d’information incomplète sur les types des entreprises, un système de normes de rejets individuels échoue à décentraliser l’état optimal E°, contrairement aux autres instruments. Donc, le classement des instruments, suivant l’ordre de préférence du Planificateur, est : (a) < (b) ∼ (c) ∼ (d) ∼ (e). L’incapacité des normes individuelles de rejets à décentraliser l’état optimal est immédiate. Revenons à la figure 1. A l’optimum, les entreprises de type – rejettent z–, les autres z+. Sauf miracle, le Planificateur ne peut pas distribuer correctement les ordres correspondants, puisque par hypothèse, il méconnaît les technologies de chaque firme. Par contre, la difficulté est contournée en utilisant les autres instruments. Pour le voir, il suffit de relire la démonstration de l’équivalence des instruments (cf. Chap. III, Sect. 5), où l’on voit que l’état optimal E° est rejoint spontanément, sans que le Planificateur ait besoin d’identifier les technologies individuelles. Son rôle se borne à fixer la valeur de l’instrument (selon le cas, le montant de la taxe, de la subvention, ou le nombre de coupons). Une fois ces grandeurs convenablement choisies, les agents s’y adaptent au mieux de leur intérêt, ce qui les conduit à l’état optimal. Ceci explique qu’on désigne souvent les instruments b) à e) comme des instruments économiques. On peut généraliser ce résultat de la façon suivante : Proposition d’efficacité statique des instruments économiques : Quelle que soit l’information dont dispose le Planificateur, le coût total de dépollution est minimum s’il emploie un instrument économique. En effet, pour tout instrument économique, les choix zj° des entreprises, pour maximiser leur profit, aboutissent à l’égalité : Cm1(z1°) = Cm2(z2°) = … = CmJ(zJ°) = λ, où λ est une constante égale, selon l’instrument, au taux de la taxe pigouvienne, au taux de la subvention ou au prix d’équilibre des coupons. 46 Or, on montre que cette égalité implique que les rejets zj° (j = 1, 2, …, J) minimisent le coût total de dépollution (cf. Chap. III, Sect. 4) : Σj (∫zj zj Cmj(t) dt), sous la contrainte Σj zj ≤ Σj zj°. En effet, par construction, il existe un multiplicateur λ tel que les dérivées premières du lagrangien : L = Σj (∫zj zj Cmj(t) dt) + λ (Σj zj – Σj zj°), par rapport à zi s’annulent en zj° : – Cmj(zj°) + λ = 0 pour j = 1, 2, …, J. Ces conditions sont suffisantes sous les hypothèses technologiques. Ce résultat est l’occasion d’introduire la notion de coût social de la dépollution marginale, noté Cm, très utile pour la suite. C’est la quantité minimale du numéraire à laquelle l’économie doit renoncer pour limiter ses rejets d’une unité (infiniment petite), en supposant que la production totale est toujours maximale. Sous les hypothèses du modèle en équilibre partiel, on montre que : Cm = [Σj (fj′)–1]–1, Cm est décroissant avec z, ∫z z Cm(t) dt = min{zj, j = 1, 2, …, J} {Σj (∫zj zj Cmj(t) dt) ; Σj zj ≤ z}. La démonstration, fastidieuse en raison des notations lourdes, peut être passée. Pour relier Cm aux technologies des producteurs, notons gj = (fj′)–1 la fonction réciproque de Cmj = fj′, pour j = 1, 2, …, J, et g = Σj gj. Du fait que Cmj est strictement décroissante et dérivable, gj existe, est strictement décroissante et dérivable. Donc, g = Σj gj est strictement décroissante, dérivable et admet une fonction réciproque g–1. On montre qu’elle vérifie, pour tout z : C(z) = ∫z z g–1(t) dt = min{zj, j = 1, 2, …, J} {Σj (∫zj zj Cmj(t) dt) ; Σj zj ≤ z}. Cette égalité est obtenue par changements de variables successifs. On a : C(z) = ∫z z g–1(t) dt = – ∫0 λ g–1(g(t)) g′(t) dt = – ∫0 λ t g′(t) dt, en posant z = g(λ) et sachant que z = Σj zj = Σj gj(0) = g(0). Sachant que, pour tout j = 1, 2, …, J, Cmj(gj(t)) = t et g′(t) = Σj gj′(t), on a : C(z) = – Σj (∫0 λ Cmj(gj(t)) gj′(t) dt) = Σj (∫gj(λ) zj Cmj(t) dt). Enfin, comme Cmj(gj(λ)) = λ pour j = 1, 2, …, J, et Σj gj(λ) = g(λ) = z, le profil de rejets zj° = gj(λ) (j = 1, 2, …, J) vérifie la condition nécessaire et suffisante pour minimiser le coût total de dépollution sous la contrainte Σj zj ≤ z. Du fait que g–1 est continue, le coût minimum de la dépollution totale C(z) est dérivable par rapport à z, de dérivée C′(z) = – g–1(z). En d’autres termes, la réduction d’une unité infiniment 47 petite des rejets totaux augmente le coût minimum de la dépollution totale de g–1 unités. C’est la définition du coût social de la dépollution marginale Cm. La figure 2 ci-dessous illustre la procédure à suivre pour construire la courbe représentative de Cm, pour le cas où il y a deux producteurs, j et j′. Pour chaque valeur λ, on lit les quantités zj° et zj′°, à l’intersection de la droite d’équation y = λ avec Cmj et Cmj′. Le point (zj° + zj′°, λ) appartient au graphe de Cm. En répétant l’opération pour toutes les valeurs de λ, on trace la courbe représentative du coût social de la dépollution marginale. Par ailleurs, du fait de la propriété mise en évidence ci-dessus, on sait que l’aire de la surface grisée, délimitée par l’axe des abscisses et la courbe Cm, entre les abscisses z et z, mesure le coût total minimum de la dépollution de la quantité z – z, à partir de l’équilibre de marché E (où les rejets totaux sont z). € z Cmj zj′° O Cmj′ Cm zj° z λ Figure 2. 3) Incertitude*** Nous remettons maintenant en question l’hypothèse suivant laquelle le Planificateur connaît Dm et peut construire Cm (dans l’exemple utilisé, à partir des données des technologies individuelles Cm–, Cm+ et de la fréquence q). Il est, par conséquent, contraint de décider une politique d’environnement, c’est-à-dire de sélectionner un instrument et d’en fixer la valeur, en étant incertain des goûts des individus et des technologies des entreprises. i) Préférences en incertitude Préalablement à toute réflexion, il faut spécifier le comportement du Planificateur, lorsqu’il est confronté à un risque. En l’état, il est indéterminé. En effet, souvenons-nous que ses préférences découlent de celles des individus, par l’intermédiaire des critères de Pareto ou de compensation. Or, aucune hypothèse posée jusqu’ici ne décrit les préférences des individus dans l’incertain ; du coup, celles du Planificateur sont elles-mêmes non définies. Pour énoncer l’hypothèse communément admise concernant les préférences des individus confrontés à l’incertain, introduisons quelques notions nouvelles. On définit une loterie comme la donnée d’une liste d’états de l’économie uploads/Ingenierie_Lourd/ manuel-ecoenv-chap4.pdf

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