Document A : Texte littéraire Le narrateur Paul Bäumer, un jeune Allemand de di

Document A : Texte littéraire Le narrateur Paul Bäumer, un jeune Allemand de dix-huit ans, s’engage volontairement dans l’armée en 1916 après avoir été soumis à un bourrage de crâne patriotique. Il se bat sur le front de l’Ouest. Lors des combats, sous un abri, il poignarde un soldat français venu se réfugier dans le même trou que lui. Le jeune soldat allemand tente de le soigner et reste auprès de lui plusieurs heures. Après une longue agonie, le soldat français finit par mourir… Le silence se prolonge. Je parle, il faut que je parle. C’est pourquoi je m’adresse à lui, en lui disant : « Camarade, je ne voulais pas te tuer. Si, encore une fois, tu sautais dans ce trou, je ne le ferai plus, à condition que toi aussi tu sois raisonnable. Mais d’abord tu n’as été pour moi qu’une idée, une combinaison née dans mon cerveau et qui a suscité une résolution : c’est cette 5 combinaison que j’ai poignardée. A présent je m’aperçois pour la première fois que tu es un homme comme moi. J’ai pensé à tes grenades, à ta baïonnette et à tes armes ; maintenant c’est ta femme que je vois, ainsi que ton visage et ce qu’il y a en nous de commun. Pardonne-moi, camarade. Nous voyons les choses toujours trop tard. Pourquoi ne nous dit-on pas sans cesse que vous êtes, vous aussi, de pauvres chiens comme nous, que vos mères se tourmentent comme les nôtres et que nous 10 avons tous la même peur de la mort, la même façon de mourir et les mêmes souffrances ? Pardonne- moi, camarade ; comment as-tu pu être mon ennemi ? Si nous jetions ces armes et cet uniforme tu pourrais être mon frère1 […]. » Son uniforme est encore entrouvert. Il est facile de trouver le portefeuille. Mais j’hésite à l’ouvrir. Il y a là son livret militaire avec son nom. Tant que j’ignore son nom, je pourrai peut-être 15 encore l’oublier ; le temps effacera cette image. Mais son nom est un clou qui s’enfoncera en moi et que je ne pourrai plus arracher. Il a cette force de tout rappeler, en tout temps ; cette scène pourra toujours se reproduire et se présenter devant moi. Sans savoir que faire, je tiens dans ma main le portefeuille. Il m’échappe et s’ouvre. Il en tombe des portraits et des lettres ; mais la dépression que je subis, toute cette situation incertaine, la faim, 20 le danger, ces heures passées avec le mort ont fait de moi un désespéré ; je veux hâter le dénouement, accroître la torture pour y mettre fin, de même que l’on fracasse contre un arbre une main dont la douleur est insupportable, sans se soucier de ce qui arrivera ensuite. Ce sont les portraits d’une femme et d’une petite fille, de menues photographies d’amateur prises devant un mur de lierre. A côté d’elles il y a des lettres. Je les sors et j’essaie de les lire. Je ne 25 comprends pas la plupart des choses ; c’est difficile à déchiffrer et je ne connais qu’un peu de français. Mais chaque mot que je traduis me pénètre, comme un coup de feu dans la poitrine, comme un coup de poignard au coeur… Erich-Maria Remarque2 (1898-1970), A l’Ouest , rien de nouveau (1929), traduit de l’allemand par Alzir Hella et Olivier Bournac en 1993, éditions Stock. (Titre original : Im Westen nichts Neues) 1 Ici : ami, compagnon, camarade. 2 Erich-Maria Remarque, de son vrai nom Erich Paul Remark, est mobilisé par l’armée allemande en 1916 et envoyé sur le front de l'ouest (Belgique et nord-est de la France) en 1917. En 1919, il renonce officiellement à toute médaille ou décoration et se fait appeler Erich-Maria Remarque dès 1924. A peine le régime nazi mis en place, ses livres sont brûlés en place publique comme de nombreuses autres œuvres d’artistes rejetés par le gouvernement hitlérien. Remarque s'exile d’abord en Suisse, puis aux États-Unis où il sera naturalisé en 1947. Document B : Photogramme Photogramme extrait du film All Quiet on the Western Front de Lewis Milestone (1895-1980), réalisé aux États-Unis en 1930. GRAMMAIRE ET COMPETENCES LINGUISTIQUES (18 POINTS) 1. « Nous voyons les choses toujours trop tard. » (l. 8) a) A quel mode et à quel temps le verbe est-il conjugué ? (1 point) b) Donnez la valeur d’emploi de ce temps dans la phrase. (1 point) 2. « Comment as-tu pu être mon ennemi ? » (l. 11) a) De quel type de phrase s’agit-il ? (1 point) b) Relevez une autre phrase d’un autre type exprimant l’ordre (ou le conseil ou la prière ou le souhait). Nommez ce type de phrase. (2 points) 3. « une main dont la douleur est insupportable » (l. 21-22) a) Identifiez la classe grammaticale du mot souligné. (1 point) b) Donnez-en la fonction grammaticale. (1 point) c) Décomposez ce mot. (1 point) 4. Réécrivez sans erreur le passage suivant en transposant le récit au passé. Votre texte commencera ainsi : « Son uniforme était encore entrouvert... » (10 points) « Son uniforme est encore entrouvert. Il est facile de trouver le portefeuille. [...] Il y a là son livret militaire avec son nom. Tant que j’ignore son nom, je pourrai peut-être encore l’oublier ; le temps effacera cette image. Mais son nom est un clou qui s’enfoncera en moi et que je ne pourrai plus arracher. Il a cette force de tout rappeler, en tout temps ; cette scène pourra toujours se reproduire et se présenter devant moi. » COMPRÉHENSION ET COMPÉTENCES D'INTERPRÉTATION (32 POINTS) 5. En vous aidant du texte et du paratexte, resituer l'époque historique au cours de laquelle a lieu cette scène. Relevez des éléments dans le texte qui le prouvent. (3 points) 6. a) Qui est l'auteur ? Qui est le narrateur ? (2 points) b) Qui sont les deux personnages ? Citez des éléments du texte qui les caractérisent. (2 points) 7. En vous appuyant sur le monologue du narrateur entre guillemets (ligne 2 à 12), expliquez la relation entre les deux personnages. (5 points) 8. Selon vous, pourquoi le jeune soldat Baümer avoue-t-il tout cela au soldat français ? Justifiez votre réponse en citant un élément précis du texte. (2 points) 9. A partir de la ligne 13, de quelles façons le narrateur humanise-t-il le jeune soldat français ? Vous vous appuierez sur trois éléments précis du texte que vous expliciterez. (6 points) 10. a) Relevez et nommez le champ lexical dominant du troisième paragraphe (lignes 18 à 22) (2 points). b) D'après vous, quels sentiments bouleversent le soldat allemand ? (1 point) 11. « Mais chaque mot que je traduis me pénètre, comme un coup de feu dans la poitrine, comme un coup de poignard au cœur... » (l.26-27). a) Nommez et expliquez une figure de style employée dans cette phrase. (2 points) b) Quel effet produit-elle sur le lecteur ? (1 point) 12. Documents A et B a) Décrivez la scène du photogramme proposé (position des personnages, orientation des regards, jeux de lumière...). (3 points) b) Quels liens pouvez-vous établir entre ce photogramme et le texte ? Des éléments descriptifs de l’image et des citations précises du texte sont attendus. (3 point). Dictée Le silence retombe sur notre fosse obscure. Des veilleurs parlent à voix basse. Sous une toile de tente, glisse un mince fil de lumière : on doit faire du vin chaud. On entend monter des gourbis la respiration de ceux qui dorment : on dirait que la tranchée geint comme un enfant malade. Transi, je me remets à danser comme un ours devant mon créneau noir, sans penser à rien qu’à l’heure qui s’écoule. Nez à nez, les bras croisés, les hommes sautillent, pesamment en bavardant, ou battent la semelle d’un rythme régulier. La nuit s’anime de ce bruit cadencé. Dans le cheminement, dans le boyau, la terre gercée résonne sous ces pieds cloutés. Roland Dorgelès, Les Croix de bois, Albin Michel, 1919. uploads/Litterature/ bb1-partie-questions-dictee.pdf

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