25 Le rôle de la littérature de jeunesse dans l’acquisition de la langue Ouahib

25 Le rôle de la littérature de jeunesse dans l’acquisition de la langue Ouahiba Benazout, maitre-assistante, ENS d’Alger, Algérie. Résumé : le texte littéraire a toujours occupé une place privilégiée dans les manuels scolaires Algé- riens de 1ère année secondaire depuis 1986 jusqu’à nos jours. Bien que le nouveau livre de 1ère AS offre une lecture riche et diversifiée, les documents proposés ne sont pas toujours à la portée des élèves de 1ères AS qui trouvent (encore) des difficultés à lire, et à comprendre un texte littéraire ou non littéraire. Dans notre enquête, 70% d’enseignants interrogés estiment que l’étude des textes litté- raires en classe de langue est indispensable puisque c’est à partir de ces textes qu’on peut dévelop- per chez l’apprenant algérien compétences notamment la lecture et l’écriture. La lecture des textes littéraires développe le gout de lire en français. On facilite ainsi l’accès à la littérature tout en contri- buant à faire des enfants lecteurs, à condition que ces textes correspondent aux centres d’intérêt et des apprenants. Cela implique selon nous de sélectionner une littérature francophone, accessible et conçue pour la jeunesse. INTRODUCTION La littérature – concept utilisé pour la première fois par Charles Bateux selon J.L. Dufays (Dufays, Gemmene & Ledur, 1999, p. 62) pour distinguer et mettre en lumière les œuvres de grands écrivains au sein de ce qu'on appelait « les belles-Lettres » – a occupé depuis longtemps une place prestigieuse dans l'enseignement/apprentissage du français langue ma- ternelle. Effectivement, la littérature a de tout temps, représenté un atout indispensable dans la réussite scolaire, professionnelle voire sociale. Elle était, en fait, réservée à une certaine élite. Néanmoins, la di- dactique des langues a permis à la littérature « désacralisée » d'entrer en classe de langue puis- qu'elle n'est plus, selon R. Barthes1 « cet objet choisi pour le prestige qu'on lui accordait mais elle est deve- nue un objet enseignable ». Barthes (Canvat, 2000, p. 57) banalise et désacralise donc la littérature, elle de- vient une matière à enseigner. Cependant, « Doubrovsky, Cohen déclaraient que la littérature ne s'enseigne pas, qu'elle n'est pas faite pour être ensei- gnée »; c'est-à-dire elle ne peut être « enseignable de la même manière que les sciences ou tout savoir transmissible », dira A. Séoud (Séoud, 1997, p. 41). Mais E. Papo et D. Bourgain (Bourgain & Pap, p. 8) affirment que la littérature doit être présente en classe de langue; car elle peut « contribuer au déve- loppement de la compétence de lecture à partir d'une approche des textes littéraires ». En effet, le texte litté- raire constitue un support privilégié pour développer chez l'apprenant une compétence de lecture et celle de l'écriture car « Il offre une infinie palette de sujets et de voix capables de susciter à la fois la lecture et la production écrite » pour G. Jackson, L. Douenel et S. Raoul (Jackson et al, 1994). Différentes méthodologies du français langue étrangère ont plus ou moins évacué le texte littéraire en tant que mode d'apprentissage d'une langue. En effet, les méthodes audio-visuelles limitent son utilisa- tion en début d'apprentissage car l'oral occupe une place plus importante que l'écrit. Cependant, pour la tradition classique, on peut apprendre la langue par la littérature, à ce sujet J. Peytard (Peytard et al, 1994, p. 61) dit que la littérature « fournit l'essentiel des matériaux et des outils, des supports et modes de traitement », Toutes les littératures sont, en effet, mises au service d'un travail de langue" ajoute-t-il. Donc, la maîtrise du système linguistique est primor- diale afin d'acquérir la connaissance ou la connivence culturelle et l'allusion littéraire. 26 Dans les années 80, l'avènement de l'appro- che communicative, comme méthodologie retenue en français langue étrangère, a vu reconsidéré la place de la littérature. Les recherches issues de ces travaux ont montré qu'elle participe aussi bien au développe- ment d'une compétence de lecture que celle de l'écri- ture. C'est par la lecture, affirme A. Séoud que « le texte, un texte se crée; chaque lecture apparaît com- me une nouvelle écriture du texte ». A. Séoud insiste sur le sens inépuisable du texte littéraire, un texte qui offre à chaque fois une lecture et une interprétation nouvelle et différente. La lecture prépare aussi l'écritu- re « lire et écrire se confondent » ajoute A. Séoud (op.cit, p. 162). Par des activités de lecture et de réécriture que l'élève apprendra ainsi à élaborer des textes qui correspondent aux objectifs de chaque ap- prentissage. Il faut signaler que la littérature a toujours oc- cupé une place privilégiée dans les manuels scolaires algériens du cycle moyen et secondaire depuis 1986 jusqu'à la réforme de 1999 / 2000 mais son enseigne- ment n'a pas apporté les fruits escomptés. Avec la réforme donc, de nouveaux manuels apparaissent où la littérature occupe toujours une place de choix, no- tamment dans le dernier manuel, paru en 2005, desti- né aux élèves de 1ère année secondaire; autour du- quel s'articulait notre travail de recherche de magister, intitulé :Place et fonction du texte littéraire dans le nouveau manuel scolaire de 1ère année secondaire. L'objectif de notre recherche consistait à mettre en relief les textes littéraires contenus dans ce nouveau manuel et de démontrer leurs nouvelles places et leurs nouvelles fonctions. La littérature occupe une place non négligea- ble (44 textes sur 80 sont littéraires). Elle est abordée, à travers tous ses genres, nous trouvons des extraits de romans, des poèmes, deux nouvelles intégrales et des extraits de la littérature épistolaire. Ces textes littéraires sont empruntés à de grands écrivains appar- tenant à des courants et des époques différents tels que Montesquieu, J.J. Rousseau, Mme De Sévigné, G. Maupassant, J.M Leclezio, M. Dib... Le livre offre une lecture littéraire riche et diversifiée. Cependant, les documents proposés ne sont pas toujours à la portée des élèves dont la majorité éprouve des diffi- cultés à lire un texte simples. Les thèmes choisis ne correspondent pas souvent aux goûts des adoles- cents. Lors de ce travail de recherche, une enquête par questionnaire sur le terrain s'imposait auprès des enseignants et des élèves de seconde afin de connaî- tre leur opinion sur les textes littéraires, de découvrir la littérature qui leur conviendrait (Algérien-ne ou étran- gère) et de connaître les compétences que les ensei- gnants souhaitent développer à partir de ces textes. Nous avons obtenu les résultats suivants: Les profes- seurs estiment que les textes littéraires contenus dans le nouveau manuel sont opaques et inaccessibles pour leurs élèves, ces derniers avouent qu'ils ren- contrent des difficultés à lire et à comprendre ces do- cuments littéraires à cause des mots difficiles, des figures de style et des implicites culturels. Une majori- té d'enseignants et d'élèves optent pour des textes d'auteurs algériens car ils y retrouvent leur vécu et leur culture. Néanmoins, 70% d'enseignants interrogés affirment que l'étude des textes littéraires en classe de langue est indispensable puisque c'est à partir de ces textes qu'on peut développer chez les apprenants diverses compétences notamment la lecture et l'écritu- re. On leur facilite ainsi, l'accès à la littérature tout en contribuant à faire d'eux des lecteurs à condition que les textes sélectionnés soient accessibles et corres- pondent à leurs centres d'intérêt. Dans le présent travail de recherche et à la lumière des constats relevés, nous voudrions intégrer dans l'enseignement / apprentissage du français la littérature de jeunesse, gage de simplicité d'accès et de motivation, pour voir ainsi, le rôle que peut jouer cette littérature dans l'acquisition d'une langue. La littérature conçue pour l'enfance et la jeunesse prend en compte l'âge, le besoin et l'intérêt des adolescents ; elle les amène donc, à accéder progressivement aux œuvres vers lesquelles ils s'adresseraient plus diffici- lement. La littérature de jeunesse est définie par M. Soriano, spécialiste des contes de Perrault, comme étant « une communication historique (autrement dit localisée dans le temps et dans l'espace) entre un scripteur adulte et un destinataire enfant (récepteur) ». C'est une littérature qui parle de et à la jeunesse. Elle est agréable, amusante et accessible parce qu'elle se caractérise par un style « simplifié par l'emploi des phrases courtes, privilégiant les adjectifs aux relatives, la juxtaposition à la subordination, les métaphores sont moins nombreuses et le vocabulaire est moins com- plexe. » selon C. Delpierre et E. Vlieghe (Delpierre & Vlieghe, 1990, p.113). La littérature de jeunesse com- prend tous les genres, elle est riche en évocation poé- tique sous de nombreuses formes: contes traditionnels et modernes, albums, bandes dessinées, romans, poèmes, fables. On note une diversité dans les genres et dans les thèmes. La littérature conçue pour l'enfan- ce et l'adolescence aborde des thèmes divers, des sujets qui font réfléchir les enfants dans les domaines suivants: psychologique, sociologique, écologique etc... Comme par exemple, les relations familiales, les problèmes de fratrie, l'adoption, l'amitié pour ne citer que cela. Même si les enseignants appréhendent l’étude du texte littéraire en classe de langue, ils admettent que la lecture de ces documents permet non seule- ment aux élèves d’acquérir des savoirs (linguistiques ou thématiques) mais aussi elle uploads/Litterature/ benazout-2010.pdf

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