Cours d’ouverture – IEP de Lyon  Année universitaire 2011-2012 (2e semestre)

Cours d’ouverture – IEP de Lyon  Année universitaire 2011-2012 (2e semestre)  Histoire des féminismes : la conquête de la citoyenneté Muriel Salle – Maîtresse de conférences (Université Claude Bernard – Lyon1)   muriel.salle@univ-lyon1.fr  Pourquoi faire l’histoire du féminisme ? « Rendre les choses intelligibles là où la confusion paraît inévitable. Tel fut le pari d’une histoire de la pensée féministe, d’une généalogie de l’exclusion des femmes de la démocratie, d’une lecture de la tradition philosophique relativement à la différence des sexes. Le féminisme apparaît comme un désordre, une passion, une hystérie, rarement comme un engagement raisonné dans l’espace politique. Le féminisme relève de l’humeur et non de la réflexion, tel est l’habituel commentaire des contemporains d’un mouvement féministe. Le pari fut de retrouver le sens, la logique, les raisons et les fondements de l’acte féministe dans l’histoire. » Geneviève Fraisse, « A Contre-Temps », Genre & Histoire [En ligne], n°2, Printemps 2008. http://genrehistoire.revues.org/index233.html Retrouver l’histoire, c’est nécessairement retrouver le sens. Montrer que l’opinion s’appuie sur une élaboration réfléchie, sur de la pensée. Formuler la domination pour comprendre l’émancipation. « Nous qui sommes sans passé, sans histoire… » Manifestation du 26 août 1970 : « Il y a plus inconnu que le soldat inconnu, sa femme ». Été 1970, Paris sous l’Arc de Triomphe Légitimer une pensée sur la différence des sexes, égalité et inégalité des hommes et des femmes, est une exigence de la modernité politique. Le féminisme, c’est quoi ? L’idée d’une égalité des sexes est très ancienne Christine de Pisan, La cité des dames, XVe siècle « La femme doit se tenir debout aux côtés de l’homme et ne doit en aucun cas être couchée à ses pieds telle une esclave ». Différencialisme (ou essentialisme) Universalisme Thèse : Il existe deux sexes, deux modalités différentes d’incarnation de l’humanité, générant deux manières d’être au monde dont l’une a été bridée et asservie à l’autre. But : L’émancipation des femmes modifierait la conception même du monde commun. Thèse : Rejet de l’argument de la nature duelle des sexes (« nature-elle-ment ») au nom d’une unicité de la Raison. La définition des sexes et la forme hiérarchique de leur rapport repose sur une construction, un « être- devenu » historico-social. But : Il s’agit pour les femmes d’accéder à la position de sujet ou d’individu neutre. 1. si on arrive à prouver la relativité et l’artificialité théorique de l’argumentation de la différence des sexes, l’égalité sera démontrée de façon indiscutable Fonder l’égalité en logique. Marie de Gournay (1565-1645), On ne peut pas prouver qu’il existe davantage de différence entre un homme et une femme qu’entre un homme et un autre homme Argument de la différence de capacités physiques > > Argument de la différence de capacité intellectuelle François Poullain de la Barre (1647-1725) « Qu’on aille au Parlement, on verra si les plus grands juges égalent toujours en force le dernier de leurs huissiers » Hypathie (370-415) et l’héliocentrisme Terme emprunté au lexique médical : « état d’un homme qui présente des traits psychologiques attribués à la femme » par suite d’un arrêt du développement. Un féministe est donc un sujet qui souffre d’une féminisation pathologique. Histoire du mot « féminisme » « doctrine, mouvement qui préconise l’extension des droits et du rôle de la femme dans la société » (Grand Robert historique de la langue française) Hubertine Auclert, pionnière du féminisme français (1848-1914) « Féministe » au sens moderne et positif du terme 1882 Apparition du néologisme « féminisme » = avènement de la IIIe République : apparition de l’individu citoyen qui semble pouvoir impliquer l’égalité de l’homme et de la femme (apparente neutralisation de la différence sexuelle) Muriel Salle (MCF Université Lyon 1) muriel.salle@univ-lyon1.fr « le féminisme, c’est-à-dire cette confusion des sexes qui tend non plus à l’équivalence des conditions, mais à leur identité » (Lafayette, 1925) Photographie d’une garçonne, vers 1925. « Dans ma génération, on n’a pas besoin d’être féministe. Il y a des pionnières qui ont ouvert la brèche. Je ne suis pas du tout militante féministe. En revanche, je suis bourgeoise. J’aime la vie de famille, j’aime faire tous les jours la même chose. J’aime maintenant avoir un mari. Je suis une vraie bourge ! J’ai fini par devenir ma mère, à certains égards, malgré mes huit ans d’analyse ! » (Carla Bruni-Sarkozy dans Vogue le 3 décembre 2012) Honoré Daumier, 1844 « La femme ne doit pas se faire le singe de l’homme. La masculinisation de la femme serait un fléau pour toute la civilisation et pour elle-même. Car elle y perdrait son ascendant et son prestige. Qu’elle se fasse doctoresse, avocate, suffragette, ministresse, tout ce qu’elle voudra, mais qu’elle reste femme » (Léon Daudet, 1878) « La femme est à l’homme ce que l’Africain est à l’Européen, et le singe à l’humain » (Paul Topinard, 1873) « On ne saurait nier qu’il existe des femmes très distinguées, très supérieures à la moyenne des hommes, mais ce sont là des cas aussi exceptionnels que la naissance d’une monstruosité quelconque » (Gustave Le Bon, fin XIXe siècle) http://www.psycho-ressources.com/bibli/femmes-et-hommes.html « Les quelques mots que je viens de prononcer, les femmes et les hommes ici présents ne les ont pas entendus de manière identique ! (…) les femmes, (en moyenne statistique, bien entendu, et avec de larges variations individuelles) entendent deux fois plus fort (2,3 fois, en moyenne) : elle m’entendent donc “crier” — et me croient agressif ou en colère… Tandis que les hommes ont le sentiment que je parle de manière “confidentielle et complice”… elles m’entendent avec leurs deux hémisphères, tandis que les hommes m’écoutent essentiellement avec l’hémisphère gauche, verbal, logique — et donc, critique. Les femmes mobilisent, en même temps, leur hémisphère droit (leur corps calleux est plus important) et mon discours est donc coloré d’émotions, perçu subjectivement — à travers leurs désirs et leurs craintes, leurs valeurs éthiques et sociales (par exemple, féministes…). (…) En fait, nous appartenons à deux « espèces » différentes ! (…) l’homme et le singe possèdent un patrimoine génétique de base, commun à 98,4 % ; ce qui laisse 1,6 % de différence seulement… contre environ 5 % de différence génétique entre l’homme et la femme . Ainsi, un homme mâle est physiologiquement plus proche d’un singe mâle que d’une femme !  … Et, naturellement, les guenons sont proches des femmes ! Pour l’obtention de la citoyenneté : le féminisme de la « première vague » (fin XIXe – mi XXe siècle) Militantes féministes en France, vers 1910 Le droit de vote et mouvement des suffragistes. « suffragettes » : un terme utilisé par dérision Les droits civils, pour l’égalité au sens large : - Droit à l’instruction et accès à tous les métiers - Droit au travail et libre disposition du salaire - Limitation de la puissance paternelle et maritale Des droits sociaux spécifiques en lien avec la maternité Manifestation de suffragettes (Grande Bretagne, vers 1910) Une suffragette gréviste de la faim nourrie de force Carte postale éditée par le Conseil national des femmes françaises (1912) « Nos pancartes de propagande ». Carte postale (s.d.) de la Société pour l’amélioration du sort de la femme et la revendication des ses droits uploads/Litterature/ co-iep-s2-pdf.pdf

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