Université D’Artois – Arras Laboratoire « Textes et Cultures » Université Lille
Université D’Artois – Arras Laboratoire « Textes et Cultures » Université Lille Nord de France École doctorale Sciences de l’Homme et de la Société Modernité et archaïsme des lieux dans les romans d’enquête et d’aventure pour la jeunesse pendant les Trente Glorieuses en France Par Aurélie Gille Comte-Sponville Thèse de Doctorat en Études littéraires françaises Dirigée par Francis MARCOIN Présentée et soutenue publiquement le 4 novembre 2016 Devant un jury composé de : Francis MARCOIN, Professeur de Littérature française à l’Université d’Artois (Arras), Nathalie PRINCE, Professeur de Littérature comparée à l’Université du Maine (Le Mans), Matthieu LETOURNEUX, Professeur de Littérature à l’université de Paris Ouest (Nanterre-La Défense), Évelyne THOIZET, Professeur de Littérature française à l’Université d’Artois (Arras) Lauriane, Je voulais que les premiers mots de cette thèse portent ton nom, comme tu m’as vaillamment portée pendant toutes ces années. Je te remercie pour ton regard critique, exigeant et toujours bienveillant ; je te remercie pour ton aide pratique et ta disponibilité constante ; je te remercie pour nos longues heures d’écoute et de partage où, d’analyses en digressions, nous ne refaisons pas moins que le monde. Au-delà de tout cela, tu le sais : je te remercie d’être entrée dans ma vie et d’avoir enchanté ma route. Je remercie aussi et en toute sincérité : Pr. Francis Marcoin, Qui depuis le début a été un appui solide et rassurant, sachant que j’arriverais au bout de ce travail avant même que je n’en sois pleinement convaincue moi-même ; Mes amies et collègues du Laboratoire « Textes et Cultures », et en particulier Chantal Lapeyre-Desmaison, Florence Gaiotti, Évelyne Thoizet et Éléonore Hamaide-Jager, qui m’ont encouragée et conseillée avec amitié tout au long de ce marathon ; Merci aussi aux nombreux hommes de ma vie : Mon époux Vincent, qui m’a interdit d’abandonner : que cette thèse soit aussi la sienne, dans l’épreuve du quotidien ; Mes fils Thibaut, Arthur et Oscar que j’aime plus que tout au monde et qui sont le moteur de mon existence ; Mon père, Alain, qui force un peu plus chaque jour mon admiration ; Mes frères Adrien et Aloïs, dont l’amour autant que l’humour me sont indispensables ; Merci à celle qui porte un regard aimant sur tout ce que j’entreprends, et que j’aime, et qui m’aime et me comprend : ma mère, Annie ; Merci enfin à ma famille, à mes collègues et amis, que je ne peux tous nommer mais qui savent le rôle qu’ils jouent dans ma vie et la place qu’ils occupent dans mon cœur : mes grands-parents, J.-B., Aude, Mo, Saab, Caro, Manu, Charlotte, Jean-Phi, Aurèle, Léonie, Mag, Natacha, Annabel, Christèle, Carine, Rémy, Maude et Michel. Qu’ils sachent que, plus que jamais, je suis disponible pour aller boire des verres. Et au soleil, en plus. 1 « Perhaps it is only in childhood that books have any deep influence on our lives. […] What do we ever get nowadays from reading to equal the excitement and the revelation in those first fourteen years? »1 Graham Greene, The Lost Childhood and Other Essays, 1951 Pour mes parents, Qui m’ont lu des histoires, en ont inventé pour moi, Et m’ont laissé dérober avec complaisance les premières heures du sommeil refoulé. 1. « Peut-être les livres n’ont-ils d’influence profonde sur notre vie qu’au cours de l’enfance. […] Que tirons- nous aujourd’hui de nos lectures qui puisse égaler l’exaltation et la révélation de ces quatorze premières années ? », Graham Greene, L’enfance perdue et autres essais, 1951. 2 3 INTRODUCTION Liesse collective, cigarettes américaines, on danse, on s’embrasse, on s’étreint en noir et blanc et pour l’éternité dans les archives de la Radiodiffusion française : c’est la France de 1945, celle de la Libération. Cependant le pays est exsangue : humainement, avec plus de 600 000 morts, militaires et civils ; économiquement, en raison de l’anéantissement de nombreuses usines, l’économie de pillage pratiquée par les Nazis et la destruction d’importants moyens de communication. La monnaie est dévaluée, les tickets de rationnement demeurent en vigueur jusqu’en 1949. La misère est aussi morale : les photographies des camps de concentration font la Une de la presse nationale, par exemple dans L’Humanité (journal du 17-18 septembre 1944), Le Figaro (19 avril 1945) ou Le Monde illustré (5 mai 1945), tandis que Les Actualités françaises diffusent sur grand écran les images terribles des « camps de la mort » (notamment le 10 juin 1945) ou encore celles des villes japonaises frappées par la bombe atomique les 6 et 9 août 1945. Certains lieux se départissent alors de leur simple désignation toponymique pour incarner sur le plan symbolique l’érosion de la morale humaine à l’échelle internationale : Oradour-sur-Glane, Auschwitz, Hiroshima. Cependant, la nation française se fédère rapidement : dans un premier temps contre les compatriotes collaborationnistes – l’Épuration légale et spontanée se développe à l’automne 1944 – puis dans la célébration d’une nouvelle unité : même si la « France profonde » sait en 1944-1945 que la Résistance a été minoritaire et que le régime de Vichy a été assez largement accepté […] dans l’immédiat après-guerre, le temps est à l’oubli des « années noires » et à l’exaltation de l’union retrouvée.2 2. Jacques Marseille (dir.), Histoire. Le monde, l’Europe, la France de 1945 à nos jours, manuel de Terminale L-ES-S, Paris, Nathan, 2008, p.271. 4 On croit aux « lendemains qui chantent »3 qu’appelait de ses vœux Gabriel Péri avant d’être exécuté par les Allemands sur le Mont-Valérien en 1941. C’est ainsi que, sous l’influence du gaullisme et du Parti communiste dont la double légitimité semble indiscutable au sortir de la guerre, se déploie le mythe consensuel d’une France unanimement résistante, comme en témoigne le discours du Général de Gaulle à l’Hôtel de Ville de Paris le 25 août 1944 : Paris ! Paris outragé ! Paris brisé ! Paris martyrisé ! Mais Paris libéré ! Libéré par lui-même, libéré par son peuple avec le concours des armées de la France, avec l’appui et le concours de la France tout entière, de la France qui se bat, de la seule France, de la vraie France, de la France éternelle.4 De même, les livres d’histoire destinés aux enfants proposent une vision partiale de la guerre en minimisant la collaboration au profit de la Résistance. Ainsi, à partir de 1953, les élèves du Cours Moyen apprennent dans leur manuel scolaire Histoire de France et Initiation à l’Histoire de la Civilisation que « Quelques-uns acceptent de collaborer avec les Allemands, tandis que les autres veulent suivre le général de Gaulle »5 ; le sort tragique des Juifs y est réduit à une phrase de quatre mots – « les Juifs sont persécutés »6 – tandis que la mention des camps de concentration n’apparaît que pour qualifier le destin des Résistants français : « ceux qui sont pris sont jetés en prison, battus et torturés avant d’être fusillés. D’autres sont envoyés dans des camps de concentration7 où ils meurent de faim, de froid, de fatigue »8. Ce n’est réellement qu’à partir des années 1970 que cette représentation d’une France majoritairement résistante est désavouée, avec par exemple la traduction en 1973 de l’essai de Robert Paxton, La France de Vichy, 1940-19449, qui dénonce la complaisance des autorités collaborationnistes, ou le documentaire de Marcel Ophüls, Le Chagrin et la pitié10, qui rassemble en 1971 des témoignages franco-allemands où le zèle délateur des civils ne 3. Il s’agit du titre de l’autobiographie posthume de Gabriel Péri publiée en 1947. 4. Cité par Jacques Marseille (dir.), Histoire. Le monde, l’Europe, la France de 1945 à nos jours, manuel de Terminale L-ES-S, op. cit., p.272. 5. Éliane Personne, Marc Ballot et Georges Marc, Histoire de France et initiation à l’Histoire de la Civilisation, Cours Moyen 1re et 2e années, Paris, Armand Colin, 1953, p.246. C’est nous qui soulignons les sujets des verbes pour montrer que leur choix n’est pas anodin. 6. Ibid., p.245. 7. L’expression « camp de concentration » fait l’objet d’une note assez réductrice dans le manuel : « endroit où l’on rassemble, en temps de guerre, sous la surveillance de soldats, des habitants d’un pays ennemi » (Ibid., p.252). 8. Ibid., p.246. 9. Paraît aux États-Unis en 1972 sous le titre Vichy France : Old Guard and New Order, 1940-1944 aux éditions Alfred A. Knopf. 10. Le film est produit par des sociétés suisse et allemande et provoque un véritable scandale ; la télévision française refuse de le programmer avant 1981 et il n’est diffusé que dans quelques salles d’art et d’essai. 5 peut plus être nié11. Dans ce film, le biologiste et écrivain Claude Levy raconte son arrestation à dix-sept ans par des policiers français, l’exécution sommaire de sept de ses camarades par un peloton de gendarmes français et sa déportation dans le train de la mort. Son témoignage souligne le hiatus entre les deux représentations de la France : La France a collaboré, c’est le seul pays d’Europe qui a un gouvernement qui ait collaboré […], qui ait instauré des lois qui sur uploads/Litterature/ comte-sponville.pdf
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- Publié le Jan 22, 2021
- Catégorie Literature / Litté...
- Langue French
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