Université de Novi Sad Faculté des lettres Chaire de langue et littérature fran

Université de Novi Sad Faculté des lettres Chaire de langue et littérature françaises Mémoire de séminaire Analyse de deux nouvelles d’Irène Némirovsky : « Dimanche » et « Les rivages heureux » Étudiant: Maitre: Nataša Božić dr Tamara Valčić-Bulić Novi Sad, le 15 janvier 2016. Introduction Le sujet de ce travail de séminaire est l’analyse de deux nouvelles publiées pendant la vie d’Irène Némirovsky, et réapparues dans une nouvelle publication, dans le recueil de nouvelles sous titre de «Dimanche et autres nouvelles » par Le livre de poche en 2011. Toujours mêlant l’autobiographique avec le romanesque, Némirovsky manie son immense talent et style violent dans le genre de nouvelle aussi bien que dans le roman. Dans ces deux nouvelles, Irène se consacre à son sujet préféré : conflit entre mère et fille, suivie de l’obsession par la jeunesse et beauté. Les deux nouvelles offrent une image répétitive, représentée par la dichotomie de personnages et de situations. Par le choix de thèmes, de personnages, et de situations, Némirovsky démontre un souhait clair : peindre un tableau, qui n’est pas forcément parfait, sinon humain, très souvent déplaisant et profondément personnel. La vie et l'œuvre d'Irène Némirovsky Irène Némirovsky(1903-1942), émigrée russe et juive, romancière et nouvelliste d’expression français, connait le succès et la reconnaissance littéraire en France depuis son deuxième roman David Golder en 1929. Née dans une famille de nouveaux-riches à Kiev sous l’empire russe, de père Leonid Némirovsky, homme d’affaires et banquier, et de Fanny Némirovsky, mère-marâtre, insensible et froide envers sa fille, Irène est plutôt élevée par sa gouvernante française et commence à parler le français avant que le russe. Fuyant successivement les pogroms contre les juifs et puis la révolution bolchevique, les Némirovsky quittent Kiev, Saint-Pétersbourg, passent par la Finlande pour s’installer finalement en France. A l’âge de 18 ans, Irène commence à écrire et à publier de petits textes dans des revues. Les études de russe et de lettres à la Sorbonne finies, elle marie Michel Epstein, un banquier russe, immigrant en France de similaire destin que le sien, avec lequel elle a deux filles, Denise (en 1929) et Elisabeth (en 1937). Depuis 1935. les Epstein demandent la nationalité française à plusieurs reprises mais ne réussissent jamais malgré leur conversion au catholicisme et les efforts de leurs amis influents. Avec l’occupation, elle est forcée à fuir Paris, et se refugie avec sa famille dans un petit village d’Issy-L’évêque, dans la zone occupée. Exilée comme tant de fois dans sa vie, elle continue d’écrire et de publier sous pseudonymes pour assurer l’existence à sa famille. Le 13 juillet 1942 elle est arrêtée et déportée au camp de concentration Auschwitz-Birkenau, ou elle meurt un mois plus tard, à cause de typhus. Son mari Michel est arrêté deux mois après et finit lui aussi dans Auschwitz, ou il est gazé a l’arrivée. Ses filles Denise et Elisabeth survivent la guerre à l’aide des amis de la famille. Elles ont gardées derniers manuscrits d’Irène parmi lesquels se trouve un roman inachevé, Suite française. Dizaines d’années plus tard, Denise Epstein décide de sortir le manuscrit, qu’elle fait publier en 2004. chez Denoël, remportant grand succès et le prix Renaudot à titre posthume. De cette courte vie romanesque, Irène laisse pas mal d’œuvres, mais reste oubliée pendant tant d’années. Ses récits sont souvent marqués par les expériences vécues, les souvenirs aussi bien que les blessures d’enfance (notamment infligées par sa mère egocentrique et vaniteuse) et traitent les problèmes du destin, de l’amour, de l’exil, de l’identité, de déracinement, de l’avarice, de judaïsme. Issue des parents juifs, mais jamais pratiquants, Némirovsky a été en pas mal d’occasions accusée d’antisémite, depuis la publication de son roman David Golder, qui suit l’ascension et la déchéance d’un homme d’affaires juif Golder. Confrontée à de telles accusations, Némirovsky dénie tout intérêt délibéré dans le sujet, en se justifiant « qu’elle les (juifs) a vus ainsi ». Durant sa vie, elle publie dans des revues, aujourd’hui considérée de droite et antisémites (notamment Gringoire), mais il faut juger ses choix autrement, comme le suggèrent les auteurs de sa biographie, Philipponat et Liendhardt1. Le père, «chercheur d’or », souvent absent, en voyage d’affaires, la mère toujours en quête d’un nouvel amant, Irène trouve l’amour maternel chez sa gouvernante Marie, surnommée Zezelle. Aigres souvenirs d’enfance : pleurs, négligence, solitude, châtiments cruels de Fanny et les excuses forcés d’Irène laisseront un grand impact sur frêle Irène. C’est Fanny qui va licencier Zezelle, pour faire punir Irène. L’amertume et le dégout accompagneront toujours la mention de Fanny, obsédée par la jeunesse, l’argent et le luxe, qui ne voit en sa fille que le signe de son propre vieillissement. « Je retrouve très bien l’image de ma mère. Comme c’est drôle que, jusqu’à présent, je ne puisse pas écrire ce mot sans haine. »2 Négligée et mal-aimée, Irène trouve de la consolation dans la lecture des livres de Maupassant, Huysmans, Oscar Wilde, Platon et en imaginant des histoires, pour soulager son âme blessée d’enfant. La vengeance par littérature, envers le personnage de mère, est un évènement récurrent dans l’œuvre de Némirovsky (L’Ennemie, Jézabel, Le vin de solitude, Bal). D’ailleurs, c’est par l’acte d’écrire que la figure de fille se venge de cette mère égoïste et cruelle dans « Vin de solitude », en griffonnant sur un cahier: 1 Entrevue pour le magazine en ligne Le salon littéraire (disponible sur : http://salon- litteraire.com/fr/interviews/content/1797993-interview-olivier-philipponnat-patrick- lienhardt-a-la-recherche-d-irene-nemirovsky ) 2 Olivier Philipponnat & Patrick Lienhardt, La Vie d’Irène Némirovsky, Éditions Grasset/Denoël, septembre 2007, p.46. « Dans chaque famille il y a le lucre seulement, le mensonge et l’incompréhension mutuelle.[…] C’est partout pareil. Et chez nous aussi, c’est pareil. Le mari, la femme, et…Elle hésita et écrivit : “L’amant“»3 Suivant la fameuse phrase de Tolstoï, où toutes les familles heureuses se ressemblent, Irène conclue que les malheureuses se ressemblent elles aussi. Déterminée de ne pas répéter les erreurs de ses parents, Irène sera une épouse aimée et aimante, une mère attentive de deux filles. C’est la faute de destin qui a épargnée Fanny, et a fait crever Irène dans un camp de concentration, a 39 ans. Après la guerre, Denise et Elisabeth frappent à la porte de leur belle-mère mais celle-ci les renvoie, criant qu’elle n’a pas de grands-enfants. Dans ce travail de séminaire, on va analyser deux nouvelles publies pendant la vie d’Irène Némirovsky, en 1934, dans la Revue de Paris (Dimanche) et dans Gringoire (Les rivages heureux), qui traitent les deux l’incompréhension et aliénation familiale, la fugacité de l’amour, ainsi que l’antagonisme entre mère et fille. Dimanche – résume La nouvelle raconte une journée dans la vie d’une famille de quatre : le père – Guillaume, la mère – Agnès, et les filles – Nadine (âgée 20 ans) et Nanette (5 ans). Par un doux l’après-midi de printemps les personnages se trouvent réunis pour déjeuner ensemble. Bientôt, on découvre que le père et la fille ainée ont des plans pour s’enfuir de la maison dès que le repas sera fini : le père présente des excuses tant de fois utilisés pour dissimuler ses adultères, et la fille fait semblant d’aller chez une amie. Guillaume, Nadine et la servante quittent la maison, et Agnès reste seule, pour s’occuper de Nanette, récemment guéri d’une fièvre et, plus important pour l’histoire, à contempler sa vie casanière, les infidélités de son mari, la jeunesse et l’amour passés. D’abord, elle se conclue heureuse et contente à être seule, indifférente envers les mensonges de Guillaume, jouissant de sa solitude, sans personne pour la déranger pendant des heures. On suit le monologue intérieur d’Agnès, qui se rappelle de ses premiers rendez-vous avec Guillaume et trace la lente dégradation de leur amour. Pendant ce temps, Nadine se dépêche pour rencontrer Rémi, son petit-ami qui ne se présente pas au rendez-vous finalement. Désespérée, elle téléphone depuis café où elle l’a attendu pendant plus de deux heures mais n’arrive pas à l’obtenir au 3 NEMIROVSKY, Irène, Le vin de solitude, Le Livre de Poche, 2009, II, IV téléphone, puisqu’il est chez lui avec une autre femme qui répond au téléphone. Suivant le fil de ses pensées, Agnès arrive à la vraie cause de ses misères : la jalousie envers Nadine, qui est jeune et amoureuse. Dans ses monologues intérieurs, les deux, la mère et la fille, font des conclusions erronées à propos de l’autre. Finalement, elles se retrouvent au salon, attristées. Téléphone sonne, Rémi appelle pour fixer un autre rendez-vous pour demain. Ravie, Nadine ne peut pas cacher son bonheur, et Agnès remarque l’anxiété et la joie de sa fille, qui déguise de nouveau ces exploits amoureux. Rassurée, Nadine rejette ces doutes. De cet après-midi, rien ne change dans leurs vies. Univers clos de la pensée Pendant cette journée ou il ne se passe effectivement rien, ce sont les monologues intérieurs des personnages qui constituent le tissue de l’histoire. Tout ce qu’on conclue et qu’on découvre sur eux n’est jamais vraiment prononcé par passivité ou pour ne pas briser l’illusion du bonheur familiale. Ce silence où se cachent de douloureux uploads/Litterature/ dimanche-les-rivages-heureux-nemirovsky.pdf

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