LES INROCKUPTIBLES Date : Octobre 2021 Pays : FR Périodicité : Mensuel OJD : 35
LES INROCKUPTIBLES Date : Octobre 2021 Pays : FR Périodicité : Mensuel OJD : 35898 Page de l'article : p.194 Journaliste : Ingrid Luquet-Gad Page 1/1 FLAMMARION 7129671600524 Tous droits réservés à l'éditeur Les Chroniques Portrait de Picabia qu’il utilisera pour son Tableau Bastadada en1920. FRANCIS PICABIA, RASTAljüOüÈRE de Bernard Marcadé L’historien de l’art revient brillamment sur le parcours et les visions de l’artiste insaisissable et antidogmatique, proche un temps de Marcel Duchamp et plus proche encore de la vie. Avec son Francis Picabia, rastaquouère, l’historien de l’art Bernard Marcadé livre une biographie précise et malicieuse d’un artiste qu’il est à vrai dire impossible de définir autrement que de manière apophatique : par ses refus, par ce qu’il n’a pas été, par ce dont il n’a eu de cesse de se dissocier pour mieux s’affirmer tel qu’en lui-même. Et quand bien même - alors que lui, le peintre, le poète, le metteur en scène, l’homme à femmes, le flambeur et l’irrévérencieux a traversé au cours de cinquante années d’activité, entre Paris, New York, Martigues, Lausanne ou Mougins, les principales avant-gardes de la modernité, l’impressionnisme, le cubisme ou le dadaïsme -, sa répudiation de tout mouvement, tout principe, toute pureté et tout moralisme ne conduirait pas pour autant à l’affirmation d’une subjectivité. Picabia, parce qu’il refuse l’auteur au profit du personnage, qu’il saborde la “patte” en élisant l’imitation - ou le “copillage”, ainsi qu’il lui en sera, très tôt, fait reproche -, ne peut s’approcher que par un jeu gémellaire : la polarité antithétique qu’il entretient avec Marcel Duchamp. Tel serait alors l’un des fils conducteurs d’un ouvrage gargantuesque dont les quelque 700 pages disent à elles seules l’impossibilité de résumer la singularité de l’artiste, et la volonté conjointement maintenue par l’auteur de s’atteler à faire œuvre de cet impossible. “Picabia- Duchamp : ce couple à lui seul provoque une véritable déflagration dans le XX siècle artistique, et même au-delà”, lit-on ainsi dès les premières lignes de l’introduction, qui pose également une suite à la saga, elle aussi gargantuesque, que consacrait Marcadé, en 2007, aux mêmes éditions Flammarion, à l’autre pôle de l’antithèse. Des fils, cependant, il y en a plusieurs, et outre le sort fait à la peinture - pour Picabia, “malade d’elle-même, de son histoire et de l’Histoire”-, c’est peut-être cet autre, celui de l’image, qui rend Picabia si contemporain. “Moderne sans être moderniste”, ainsi que le formule Marcadé, et d’une contemporanéité ouverte, récursive sans être rétroactive, réactualisable sans être arrimée à aucune époque, accordée en cela à toutes les individualités rétives aux prépensés de leur temps, Picabia se refuse à regarder l’art pour plonger plus profondément dans la société. S’il gardera, tout au long de sa vie, une attention particulière à l’image reproduite, de la photographie au dessin industriel, il anticipe également, d’une certaine manière, l’arrivée, encore mal digérée dans le champ universitaire français, du tournant des visual studies, attachées à l’élargissement de l’écriture de l’histoire de l’art par la prise en compte d’une culture de l’image antidisciplinaire et opposée à la seule constitution d’un canon - ce que Marcadé qualifie de “vision policière de l’art”. Cette biographie se lit comme une épopée romanesque, jamais pontifiante, ciselée de mille voix et témoignages, et souligne que prendre la mesure de son objet au sein de l’Histoire revient à rouvrir la question de l’histoire de l’histoire de l’art. fl Ingrid Luquet-Gad Françis Picabia, rastaquouère de Bernard Marcadé (Flammarion), 704 p., 35 €. En librairie le 13 octobre. uploads/Litterature/ francis-picabia-rastaquouere-les-inrocks.pdf
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- Publié le Aoû 11, 2021
- Catégorie Literature / Litté...
- Langue French
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