L’homme ouvrit lui-même sa porte. Une légende vivante se tenait devant moi. Ron
L’homme ouvrit lui-même sa porte. Une légende vivante se tenait devant moi. Ron Duros avait pris sa retraite quelques années auparavant et il portait bien ses quatre-vingts printemps – quoi que la manche vide qui pendait à la place de son bras gauche ne déséquilibre sa silhouette trapue. Je ne pus empêcher mon regard de s’attarder sur cette absence un instant de trop. Cela le fit sourire puis il me fit entrer en s’effaçant aimablement. Ron Duros avait servi l’organisation pendant la plus grande partie de sa vie – plus de quarante ans à chasser les monstres et les créatures les plus innommables. Il avait connu le désordre et la folie qui avaient suivit la seconde guerre mondiale, quand la plupart des rippers avaient tragiquement disparu dans la tourmente et que l’ordre se mourait. Il avait participé à sa reconstruction et à la lutte souterraine qui nous opposait alors à des organisations semblables qui opéraient pour divers gouvernements. Puis, abandonnant les attributs qui avaient fait de lui l’un de nos meilleurs enquêteurs, il s’était retiré à New York, non loin de la loge où il avait fait ses débuts, au milieu des années 40, juste après son retour d’Europe. « Installez-vous, jeune homme. » Il me désigna l’un des fauteuils en cuir qui occupaient le centre de sa biblio thèque. « Si vous avez besoin de quoi que ce soit, boisson, nourriture ou autre, ne faites pas cas des règles habituelles de politesse. Notre travail ne nous incline pas aux salama lecs et autres ronds de jambe, n’est-ce pas ? Par ailleurs, je n’aime pas m’embêter avec toutes les questions de proto cole. Le frigo est là, le bar ici. Servez-vous. » J’acquiesçais en silence et me coulais dans un crapaud, laissant mes yeux fouiller les étagères, tentant de déchif frer les titres sur les dos des livres. Duros se servit une tasse de café, directement depuis la cafetière électrique installée près de son bureau. Ce document est une aide de jeu pour l’univers des « Rippers » de Savage World. Il reprend l’histoire de l’ordre et l’ancre dans notre monde contemporain, plus de cent ans après le contexte original. Il se permet, au passage, quelques références à d’autres univers (Hellboy notamment), afin de lancer des ponts et permettre une plus grande facilité d’intégration dans vos parties. L’histoire des Rippers « Alors l’Éternel Dieu fit tomber un profond sommeil sur l’homme, qui s’endormit; il prit une de ses côtes, et referma la chair à sa place. » - Génèse, 2.21 Le rendez-vous était dans un appartement de Central Park West, situé juste au-dessus de la frondaison des arbres. Je laissais mon nom au concierge après qu’un chas seur m’ait tenu la porte d’entrée avec un grand sourire jovial. Il me fit signe de monter en me désignant la rangée d’ascenseurs au fond du hall. Je les dédaignais au profit des escaliers à rampes de bois et de fer. Même si, à New York, la quantité cumulée d’étages pouvaient suffire à faire oublier cette bonne réso lution et à guérir tous les claustrophobes du monde, je redoutais de me retrouver coincé, sans possibilité d’aide, à la merci de n’importe quoi et prenait, autant que possible, les escaliers. Histoire des Rippers 2 — Le commencement serait un bon début, monsieur. — Comme vous dites. » Il réprima un sourire et je sentis qu’il se détendait un peu. « De tous temps, les monstres et les hommes se sont fréquentés et combattus. Il y eut les temps mythiques où l’on tuait des harpies, des minotaures et des gorgones. Vint le temps des démons et des créatures féeriques, des taras ques et des dragons. Au 19éme siècle, lorsque l’organisation des rippers fut formalisée par le Professeur Van Helsing et le docteur Jack, c’étaient les vampires et les loups-garous qui semaient la terreur. Aujourd’hui, les monstres sortent pour Halloween, les vendredi 13 ou passent à travers les fils électriques. Il suffit de prononcer certain nom trois fois face à un miroir pour voir débarquer un grand noir armé d’un crochet et entouré d’abeilles tueuses. La physionomie du monstre change avec les sociétés et les époques. Partout il y eut des chasseurs et des solu tions – créant de longues traditions et expérimentant des méthodes plus ou moins efficaces. Il faut d’ailleurs préciser que la plupart des méthodes inopérantes ont disparu d’elles-mêmes avec leurs infortunés inventeurs. Jamais la question de l’origine réelle de ces monstres ne fut posée. Ils existaient parce que le folklore les faisait naître et leur trouvait des racines dans le monde des hommes – la faute de quelques femmes qui fricotaient avec des dieux ou de quelques hommes mille fois maudits par les mêmes dieux. À l’origine du monstre, on trouve toujours l’homme et ses erreurs ou ses pêchés. Selon les régions du monde, les monstres furent combattus ou vénérés, associés à des valeurs maléfiques ou laissés à leur libre arbitre. Mais aucune cosmogonie générale ne fut jamais dressée. Aujourd’hui encore, les rippers combattent les monstres comme on traitait jadis les maladies – on s’occupe des symptômes sans connaître les causes profondes. Où sont notre Pasteur, notre Koch ? Bien entendu, l’invention de la Rippertech par Dee et Kelly, dans les années 1580 et son développement ultérieur, nous ont offert des moyens sans précédents pour combattre les monstres (peut-être, car qu’est la légende de Siegfried se trempant dans le sang du dragon Fafnir sinon une préfiguration de la Rippertech ?). Mais les moyens ont finit par se confondre avec les buts : on chasse pour prélever, pour se renforcer, plus pour éliminer et guérir. La magie elle-même a perdu de sa prééminence tandis que le crabe grignote un peu plus l’humanité et que, plus rapide, plus facile, plus puissante, la Rippertech est devenue la première manière de faire des jeunes rippers. Trop feignants pour s’astreindre aux années d’étude des arts magiques. Pourtant, les signes sont évidents et il est étrange que personne n’ait voulu les voir. C’est ce que j’ai répété pendant des années à Lord Kensington, cherchant à comprendre ce que je sentais intuitivement, cherchant à formuler ce qui était confus. Je me suis ridiculisé maintes fois, en fait. Aujourd’hui, je m’en veux. J’aurai été plus patient, moins emporté, moins colérique parfois, peut-être que mes idées auraient pu éveiller un intérêt chez d’autres « Je ne devrais plus toucher à ça à mon âge, mais il est plus facile de se débarrasser des bonnes habitudes que des mauvaises. Bien. J’imagine que vous avez des tas de ques tions à me poser. Vous savez, je refuse habituellement de recevoir les jeunes rippers – et même les plus vieux. Ils ne me rendent visite que pour pouvoir approcher la légende, pouvoir lui serrer la main, la seule qui me reste, et écouter quelques vieilles histoires rabâchées. Un bon plan pour faire du name-dropping dans les soirées mondaines. Mais votre lettre m’a intriguée – ainsi que l’appui que vous avez reçu de lord Kensington. Je pensais que ce vieil imbécile me détestait encore et faisait tout ce qu’il pouvait pour discréditer mes idées et mes théories. Vous savez que nous avons commencé ensemble, lui et moi ? Nous avons suivi la formation aux même moment, dans la même loge, là-bas sur le vieux continent. Je sortais de l’hôpital après avoir été blessé durant l’offensive des Ardennes. Lui arrivait tout juste d’Australie, où il s’occu pait de chiffre. Son père venait de mourir et lui laissait le titre et l’héritage de la famille : le Tueur de monstre. Bref, nous nous sommes détesté dès le premier regard et nous avons passé les vingt-cinq années suivantes à nous chamailler sur le terrain, à nous sauver la vie l’un l’autre et à draguer les mêmes filles. Il est celui qui a eu de la chance. Il a fait un beau mariage avec la femme la plus magnifique qui soit et a su résister à l’attrait de la rippertech. — Vous avez les amitiés de lady Kensigton, monsieur. Et je ne crois pas que le lord vous ai jamais détesté. Je pense que, bien au contraire, il vous a protégé jusqu’à présent. Je suis là parce qu’il sait que vous avez raison mais que l’ordre ne survivrait pas si ce que vous affirmez était de connais sance courante. Il sait aussi que l’ennemi s’est infiltré dans nos rangs, bien trop souvent et bien trop facilement. Tant que nous traquons les créatures les plus triviales, nous sommes utiles. Mais que nous nous avisions de menacer la Cabale de manière plus efficace, nous serions rapidement broyés de l’intérieur. Il faut que nous en sachions plus... C’est pour cela que je suis ici. Pour discuter de vos idées, de vos recherches et de la meilleure manière de les employer. Nous vous demandons de revenir dans le jeu, monsieur, et de nous aider une nouvelle fois. » Ron Duros se retourna doucement vers moi, plissant les yeux pour distinguer mon visage plongé dans une ombre complice – je n’avais pas choisi mon uploads/Litterature/ histoire-des-rippers.pdf
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- Publié le Oct 19, 2021
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