1 Colloque Forum Heracles et Université de Perpignant Via Domitia « Le Français
1 Colloque Forum Heracles et Université de Perpignant Via Domitia « Le Français sur Objectifs Universitaires » 10-11 juin 2010 à Perpignan « Le FOU en situation d’urgence : des difficultés à répondre à des besoins aussi critiques que spécifiques – élaboration de modules mixtes FOU/FOS au Maroc » Jean-Marc DEFAYS (jmdefays@ulg.ac.be) Laurence WERY (laurence.wery@ulg.ac.be) Institut Supérieur des Langues Vivantes Université de Liège Depuis plus de vingt ans, l’Institut Supérieur des Langues Vivantes (ISLV) de l’Université de Liège développe parallèlement deux volets d’activités : d’une part, l’enseignement et la didactique du français langue étrangère et seconde ; d’autre part, l’encadrement linguistique des étudiants et aspirants chercheurs francophones (perfectionnement en français langue maternelle, initiation aux discours scientifiques, préparation à la rédaction de mémoires, de thèses). Depuis quelques années, l’ISLV est appelé à conjuguer ces deux axes (FLE et FOU) pour répondre, via des projets d’aide aux développement, à des demandes aussi pressantes que spécifiques d’universités étrangères, notamment marocaine et haïtienne, qui doivent trouver dans les plus brefs délais et dans les meilleures conditions une solution aux graves problèmes linguistiques, et partant académiques et sociaux qui se posent à elles. Pour des raisons assez similaires, les nouvelles générations d’étudiants qui s’inscrivent dans ces universités présentent en effet des profils linguistiques de plus en plus problématiques et maîtrisent de moins en moins bien le français, alors que, que l’on s’en réjouisse ou qu’on le regrette, il reste toujours la langue utilisée dans de nombreuses facultés, les plus prestigieuses. Pour surmonter la rupture linguistique créée par des réformes trop rapides ou radicales, pour éviter les phénomènes d’iniquité et d’exclusion sociales que cette rupture entraîne, pour assurer un recrutement pertinent et efficace des étudiants concernés, ces institutions tentent de mettre en place de toute urgence, avec l’aide que des partenaires étrangers comme l’ISLV peuvent leur fournir, des évaluations et des formations, préalables ou complémentaires, intensives ou extensives, ciblées ou générales, en Français sur Objectif Universitaire. 2 Ces initiatives, outre les obstacles institutionnels qu’elles doivent dépasser, traitent à la fois une multitude de questions sur les plans linguistiques, discursifs, culturels et cognitifs. Nous allons ici tenter d’analyser, à partir d’un cas bien réel que nous sommes en train de vivre, les difficultés qu’ont aujourd’hui les institutions responsables d’enseignement de FLE à intervenir utilement dans ces situations complexes et critiques. Notre propos oblige dès le départ à revoir les diverses dénominations qui ont cours aujourd’hui et à en discuter la pertinence sur le terrain. Pour être simple, les catégories de FLE habituellement évoquées dans ce cas sont les suivantes : 1. le « Français de Spécialité » ou « des Spécialités » (FdS), la plus ancienne désignation, se présente souvent telle une offre d’institution à un public potentiel et porte sur un français basé sur des contenus langagiers spécifiques (français des affaires, français du tourisme, etc.) ; 2. le « Français sur Objectif Spécifique » (FOS), plus récent, répond le plus souvent à une demande précise émanant d’organismes publics ou privés, avec une dimension didactique claire, à savoir une approche communicationnelle ou actionnelle ; 3. enfin, le « Français sur Objectif Universitaire » (FOU) ou « Français sur Objectif Académique » (FOA), n’est toujours pas précisément défini ; il n’existe encore que peu de littérature scientifique le concernant et on pourrait le considérer comme une sous- catégorie de FOS. 1. Analyse des besoins, ciblage du public Nul besoin de revenir ici sur les exigences et les spécificités du ou des discours universitaire(s) auxquelles il faut maintenant aussi familiariser nos étudiants francophones. La société a changé rapidement et profondément ; l’enseignement primaire et secondaire ont (heureusement !) évolué en conséquence ; le public des universités n’est plus le même que celui de la génération précédente, de par son nombre, de par son origine, de par son profil, (heureusement !) plus variés. Il serait étonnant, dans ses conditions, que ne se soit pas marqué une différence entre le langage et les discours pratiqués à l’université, forcément plus conservateurs, et ceux, forcément plus évolutifs, pratiqués par les adolescents qui s’y rendent. 3 En fait, le monde académique commence à peine à s’interroger sur ses propres discours même si se multiplient depuis une dizaine d’années les projets, colloques, publications scientifiques portant sur les « discours universitaires », leurs spécificités, leurs variétés, les enjeux de leur diffusion, de leur standardisation, de leur enseignement… ; et que se généralisent – parallèlement aux enseignements de langues étrangères et conjointement aux enseignements disciplinaires – des formations visant la maîtrise de cette langue et de ces discours universitaires. Le cas qui nous occupe aujourd’hui est plus compliqué : en 2009, l’ISLV recevait une demande urgente de la part des autorités de l’Université Mohammed Ier d’Oujda relative au déficit sans cesse croissant de la maîtrise de français au niveau universitaire des jeunes étudiants à qui elles se voient obligées de proposer une formation linguistiques de « remédiation ». A moins qu’ils ne proviennent d’une famille aisée pratiquant le français ou qu’ils aient fréquenté une école privée bilingue, la plupart de ces étudiants marocains suivent le même parcours scolaire : un enseignement secondaire largement arabisé qui cède soudainement le pas, sans transition ni préparation, à un enseignement universitaire totalement en français. Seules sont dispensées en arabe les études de Droit, d’histoire, de langue et culture arabes… et de religion islamiques vers lesquelles les étudiants défavorisés, mais doués, aigris de ne pouvoir poursuivre des études scientifiques pour ces raisons linguistiques – qu’ils associent à des causes idéologiques – ont d’ailleurs tendance à se rabattre, avec les conséquences culturelles et politiques que l’on devine. Malgré plusieurs mesures pour favoriser le français, prise par les autorités éducatives ou l’Ambassade de France, notamment, on constate qu’en une génération, beaucoup de ces étudiants marocains sont passés d’une situation de français langue seconde à une situation de français langue étrangère. Le test de positionnement dont nous parlerons ci-dessous le confirme. Le problème est d’autant plus complexe et préoccupant que la grosse majorité de ces étudiants de l’Oriental marocain sont berbérophones et qu’ils ont même parfois des difficultés à maîtriser l’arabe écrit, qui leur est tout compte fait aussi étranger. Après une longue période de centralisme linguistique et culturel, la Maroc a récemment commencé à organiser un enseignement primaire en berbère, mais dans un berbère standard artificiellement uniformisé pour l’ensemble du pays qui est fort différent de celui que les enfants parlent à la maison avec leurs parents. Sans parler de l’attrait qu’exerce l’anglais, davantage associé que le français à la modernité et à l’ouverture ! Dans ces conditions, il n’est pas étonnant que se soient déclenché 4 le cercle vicieux du plurilinguisme soustractif et la dangereuse spirale de l’exclusion scolaire et sociale qu’il induit. En dépit de ce contexte critique en amont et des enjeux cruciaux en aval, l’ISLV devait tenter d’intervenir dans le cadre restreint de l’Université Mohammed 1er! Comme il était impossible de travailler avec la population complète de cette université, on a profité de l’occasion de l’ouverture d’une Faculté de médecine en 2008, pour préparer, à la demande des autorités et des collègues professeurs marocains, un module de « remédiation » pour les premiers étudiants à s’y inscrire. L’Ecole Nationale des Sciences Appliquées et une des filières de la Faculté des Sciences suivront le mouvement d’associer l’apprentissage de la langue aux études disciplinaires. Ce projet a été cofinancé par Wallonie Bruxelles International, Administration des Relations Extérieures pour la Communauté française ou la Wallonie- Bruxelles de Belgique (« WBI »). Pour confirmer que les demandes de ce type ont tendance à se multiplier, signalons que c’est le même WBI qui se préparait à financer – parallèlement à une intervention de la Coopération Universitaire au Développement – une aide linguistique similaire à l’Université de Port au Prince, en Haïti, en faveur cette fois de doctorants de la Faculté des Lettres, scolarisés en partie en créole, puis uniquement en français à l’université, handicapés eux-aussi par une maîtrise insuffisante de la langue élaborée et du discours scientifique. L’autre problème qui se pose, dans le cas de Haïti, est que les enseignements, formations, encadrements, notamment linguistiques, que l’on propose aux étudiants et chercheurs universitaires ne profitent pas ensuite au pays, qui manque de cadres moyens, ni à l’ensemble de leurs habitants, notamment via l’enseignement général, puisque les étudiants qui en sont les premiers bénéficiaires, surtout les meilleurs, en profitent avant tout pour partir et faire carrière à l’étranger, dans des conditions plus favorables. Peut-on le leur reprocher ?, mais cela entraîne un autre cercle vicieux que nous sommes, avec les meilleurs intentions, en train d’alimenter au contraire d’y remédier. En tout état de cause, les circonstances que l’on sait ont contraint de remettre ce projet à un avenir qu’on espère pas trop éloigné. Pour en revenir à l’expérience marocaine, le public étant identifié – les étudiants de deuxième année de Médecine, il restait à clarifier et à opérationnaliser la demande des autorités, qui en fait était double : d’une part, préparer un module de « remédiation » en Français sur Objectif Universitaire (FOU), d’autre part, lui uploads/Litterature/ l-fou-en-situation-d-x27-urgence-elaboration-de-module-mixtes-fou-fos-au-maroc-defays-2010 1 .pdf
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- Publié le Fev 26, 2022
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- Langue French
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