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HAL Id: hal-02139171 https://hal-normandie-univ.archives-ouvertes.fr/hal-02139171 Submitted on 24 May 2019 HAL is a multi-disciplinary open access archive for the deposit and dissemination of sci- entific research documents, whether they are pub- lished or not. The documents may come from teaching and research institutions in France or abroad, or from public or private research centers. L’archive ouverte pluridisciplinaire HAL, est destinée au dépôt et à la diffusion de documents scientifiques de niveau recherche, publiés ou non, émanant des établissements d’enseignement et de recherche français ou étrangers, des laboratoires publics ou privés. Les ‘monstres marins’ sont-ils des ‘poissons’ ? Le livre VI du Liber de natura rerum de Thomas de Cantimpré Marie-Agnès Lucas-Avenel To cite this version: Marie-Agnès Lucas-Avenel. Les ‘monstres marins’ sont-ils des ‘poissons’ ? Le livre VI du Liber de natura rerum de Thomas de Cantimpré. Rursus - Poiétique, réception et réécriture des textes antiques, Université Nice-Sophia Antipolis, 2017, ￿10.4000/rursus.1320￿. ￿hal-02139171￿ Rursus Poiétique, réception et réécriture des textes antiques 11 | 2017 Nature et morale : sources, et postérité homilétique, des encyclopédies du XIIIe siècle Les ‘monstres marins’ sont-ils des ‘poissons’ ? Le livre VI du Liber de natura rerum de Thomas de Cantimpré Are Sea Monsters Fishes? Book VI of Thomas of Cantimpré’s Liber de natura rerum Marie-Agnès Avenel Édition électronique URL : http://journals.openedition.org/rursus/1320 DOI : 10.4000/rursus.1320 ISSN : 1951-669X Éditeur Université Nice-Sophia Antipolis Référence électronique Marie-Agnès Avenel, « Les ‘monstres marins’ sont-ils des ‘poissons’ ? Le livre VI du Liber de natura rerum de Thomas de Cantimpré », Rursus [En ligne], 11 | 2017, mis en ligne le 22 décembre 2017, consulté le 19 avril 2019. URL : http://journals.openedition.org/rursus/1320 ; DOI : 10.4000/ rursus.1320 Ce document a été généré automatiquement le 19 avril 2019. Rursus Les ‘monstres marins’ sont-ils des ‘poissons’ ? Le livre VI du Liber de natura rerum de Thomas de Cantimpré1 Are Sea Monsters Fishes? Book VI of Thomas of Cantimpré’s Liber de natura rerum Marie-Agnès Avenel 1 Thomas de Cantimpré a consacré deux livres de son Liber de natura rerum, les livres VI et VII, aux espèces aquatiques2. L’ensemble de cette œuvre encyclopédique, composée dans un but pastoral (LDNR, Prologue, p. 5, l. 91-96), est le résultat d’un long travail de compilation des informations tirées des sources anciennes et médiévales : en témoignent Thomas de Cantimpré lui-même, qui parle dès la première version d’un travail de quinze années, et la tradition manuscrite de son œuvre, dont les variantes enseignent que l’auteur est revenu plusieurs fois sur l’ouvrage, afin de le corriger et de l’amplifier3. Après avoir compilé les informations sur les animaux aquatiques, Thomas les a organisées en livres et en notices, rassemblant tous les éléments de description autour de 148 espèces ainsi distinguées – un nombre encore jamais atteint. L’édition du texte, réalisée par Helmut Boese en 1973, donne à voir les différentes strates du travail de compilation. La première étape, appelée « Thomas I », rassemble dix-neuf livres ; la deuxième, « Thomas II », est augmentée d’un vingtième livre et compte elle-même deux traditions, composées entre 1260 et 12704. Le livre VI, dans la seconde version, regroupe ainsi 60 notices, dont un prologue général et 59 monstra marina ; la version I en revanche était dépourvue de prologue et ne comptait que 56 animaux. Le prologue figure dans les deux traditions du « Thomas II », tandis que le cervus marinus, ch. 8, l’onus, ch. 38 et le tunnus, ch. 52, ne sont décrits que dans la seconde tradition de « Thomas II »5. 2 Le travail ainsi effectué par Thomas de Cantimpré a considérablement facilité celui de ses successeurs, Vincent de Beauvais, Albert le Grand, puis le compilateur de l’Hortus sanitatis, Les ‘monstres marins’ sont-ils des ‘poissons’ ? Le livre VI du Liber de natur... Rursus, 11 | 2017 1 qui y ont trouvé une matière déjà organisée en notices, dans un ordre qu’ils n’avaient plus eux-mêmes qu’à reprendre – ce qu’ils ont fait6, mais sans plus distinguer aussi nettement les pisces des monstra marina. Or c’est cette distinction qu’on étudiera ici, car elle n’est pas aussi clairement visible dans les sources anciennes et médiévales auxquelles a puisé Thomas de Cantimpré ni chez ses contemporains, que ce soit Alexandre Nequam, qui est lui-même une source de Thomas, ou Barthélemy l’Anglais. Il est probable pourtant que ces derniers se soient intéressés aux monstres, car « il(s) hante(nt) l’imaginaire médiéval et il(s) se rencontre(nt) partout », comme le fait remarquer Claude Lecouteux, que ce soit dans la littérature savante, qui « l’étudie gravement », dans les sermons ou dans les sculptures des églises. Le monstre est le résultat d’un écart par rapport à une norme : tout ce qui paraît insolite peut donner lieu à une telle appellation, si bien que « s’estompe la frontière entre monstres et merveilles », mais Claude Lecouteux souligne aussi que « la monstruosité est toute relative »7. Selon Hana Šedinová, Thomas de Cantimpré a opéré de la manière suivante : « […] divise gli esseri marini in due libri : nel primo inserì le creature la cui immagine, il cui comportamento gli apparivano inconsueti o stupefacenti e che per questo motivo vengono indicati come mostri (Libro VI – De monstris marinis), nel secondo descrisse i più diffusi pesci d’acqua dolce e di mare (Libro VII – De piscibus) »8. Cependant, le contenu des notices témoigne parfois d’une familiarité plus grande avec certains monstra qu’avec certains pisces, et, comme l’indique à juste titre Cécile Le Cornec Rochelois, certains pisces pourvus de caratères exceptionnels sont classés au livre VII9. Serait-il alors possible de mieux comprendre ce qui a incité l’auteur à faire cette distinction et comment il a opéré son classement ? On examinera successivement trois pistes, qui apportent chacune des éléments de réponse complémentaires : d’abord les prologues du Liber de natura rerum – le prologue général et ceux des livres VI et VII –, puis les sources utilisées, enfin le contenu des notices, avant d’en venir, en guise de conclusion, au réaménagement de cette distinction par ses successeurs. 1. Les prologues et les termes génériques 3 Dans le prologue à l’ensemble de l’œuvre, Thomas de Cantimpré indique par deux fois, au début d’abord, puis à la fin, le plan qu’il entend suivre. La première fois, il n’utilise l’adjectif monstruosus que pour annoncer la partie qui sera consacrée aux « causes et espèces des hommes monstrueux », tandis qu’il emploie le terme belua, qui, à l’époque classique, signifie « bête », en particulier « gros animal » ou « animal féroce »10, pour annoncer celle des monstres marins11. Le plan repris à la fin du prologue est plus explicite, car il associe clairement un numéro de livre à un titre : le livre III traitera des « hommes monstrueux d’Orient (tertius de monstruosis hominibus orientis) » et le livre VI « des monstres marins (sextus de monstris marinis) », tandis que le VII aura pour titre « les poissons des fleuves et des mers (septimus de piscibus fluvialibus atque marinis) » (p. 5, l. 99-102). La synonymie entre monstra et beluae pour les monstres marins, qui semble ainsi ressortir de ce premier prologue, n’est pas reprise dans le prologue du livre VI. Comme on l’a dit, ce prologue n’apparaît pas dans la première version, contrairement par exemple au prologue sur les poissons, mais a été composé après coup, alors que Thomas de Cantimpré avait déjà distingué les espèces. On n’y trouve pas une définition à proprement parler du monstrum marinum. Les monstra sont tout d’abord présentés non pas par ce qu’ils sont, mais par leur finalité : Les ‘monstres marins’ sont-ils des ‘poissons’ ? Le livre VI du Liber de natur... Rursus, 11 | 2017 2 Monstra marina sunt ab omnipotente deo in ammirationem orbis data. Les monstres marins ont été livrés par Dieu tout puissant à l’admiration du monde (LNDR, VI, prol. p. 232, l. 1-2). 4 Puis, après un bref commentaire, dans lequel l’auteur précise que les monstres s’offrent rarement (raro) à la vue de l’homme, ce qui les rend d’autant plus admirables (ammiranda ), et que Dieu n’a rien créé de plus admirable (mirabiliter) qu’eux sur la terre à l’exception de la nature humaine, il ajoute : Quid enim mirabilius videri potest sub celo monstro ceti atque balene, quod in magnitudine montibus ac vastissimis campis proculdubio comparatur ? Qu’y a-t-il en effet sous le ciel qui puisse susciter plus d’admiration que les monstres cète et baleine, dont la taille sans doute est comparable à l’immensité des montagnes ou à la grandeur des plaines ? (LDNR, VI, prol. p. 232, l. 6-8)12 5 Deux éléments caractérisent ainsi le monstrum, qui sont liés l’un à l’autre : sa taille démesurée et l’étonnement, l’admiration qu’il suscite chez l’homme, de sorte que le cète – ou la baleine – a vocation à apparaître comme l’animal emblématique du livre. Mais, contrairement à la fonction même attachée à l’animal, la grande taille n’apparaît pas déterminante, puisque Thomas de Cantimpré ajoute, presque aussitôt après, qu’il existe d’autres monstres de la mer qui, uploads/Litterature/ les-monstres-marins-sont-ils-des-poissons-thomas-de-cantimpre-article.pdf

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