108 I L’ACTUALITÉ POITOU-CHARENTES I N° 53 I métiers lement pour annoncer la fi
108 I L’ACTUALITÉ POITOU-CHARENTES I N° 53 I métiers lement pour annoncer la fin du livre de papier. Qui oserait encore en douter ? Un étrange préfixe envahit tous les secteurs de notre vie quotidienne : tournez la page et jetez vos livres, le «e-book» est là. Le «tout numérique» inspire bien des craintes mais là où l’informatique réalise le virtuel, l’information virtualise le réel. De nouveaux supports sont d’ores et déjà en phase de gestation et le livre électronique, tel qu’on le connaît actuellement, semble con- damné à l’obsolescence. Le battage médiati- que autour du livre électronique et le millé- narisme apocalyptique qui l’accompagne masquent les véritables enjeux de ce big bang cybertechnologique. Mastodonte de l’impression (370 employés et 250 MF de chiffre d’affaires annuel), Aubin a utilisé depuis 1901 toutes les techniques de l’imprimerie. Si l’ère du plomb, des linotypes et de la typographie Aubin-Euronumérique Du livre imprimé au livre électronique est belle et bien révolue, l’usage des rota- tives offset demeure indispensable pour les gros tirages. Créé en 1995, le départe- ment Euronumérique se spécialise dans le traitement des données numériques et les techniques de pointe. Vitrine high-tech d’Aubin Imprimeur, cette nouvelle sec- tion se propose de décliner la même infor- mation (livre, document, annuaire) sur tous les supports existants : impression numé- rique sur papier, mise en ligne sur Internet, CD-Rom, et fichiers informatiques dédiés au livre électronique. Cette déclinaison multi-support ne correspond pas à une logique de remplacement mais à une vo- lonté de diversification et de complémen- tarité. Quelles que soient les qualités avan- cées par les laudateurs du e-book (écran couleur à cristaux liquides, tactile et retroéclairé, réglage des contrastes et de la luminosité, facilité de navigation, capa- cité de stockage, modem intégré permet- tant de télécharger des textes sur le Web…), celui-ci n’a pas la moindre chance de se substituer au livre imprimé. Son applica- tion intéresse principalement certaines catégories professionnelles : juristes, mé- decins, métiers de l’information… Quant aux avantages de l’impression numéri- ques (une seule ligne de production, pas de stock à gérer, facilité de mises à jour, haute résolution) elle ne se révèle compétitive que pour les petits et moyens tirages. Le CD-Rom et Internet offrent un nouveau rapport à la lecture sans pour autant pou- voir prétendre à concurrencer le livre. Les liens hypertextes modifient les possibili- tés de navigation au sein du texte. Quel- ques romanciers expérimentent des struc- tures narratives arborescentes impliquant des modes de lecture non-linéaires et inte- ractifs. La e-littérature sera hypertextuelle ou ne sera pas… On peut spéculer à loisir sur la fin du livre, la révolution numérique n’a pas encore renvoyé Gutenberg dans les oubliettes de l’histoire. Boris Lutanie www.euronumerique.tm.fr D iscours alarmistes et scénarios es- chatologiques se succèdent actuel- QUATRE ANNÉES DE PIERRE BARILLET Potel et Chabot, Villeroy et Bosch, Roux et Combaluzier, Barillet et Grédy, il y a, comme cela, des couples indissolubles dont on se demande si ceux qui les composent ont une existence individuelle. Barillet et Grédy, eux, ce sont des auteurs de théâtre qui ont triomphé, sur le boulevard, à partir des années 50 avec une vingtaine de comédies, presque toutes des succès, comme Le Don d’Adèle, Fleur de Cactus, Quarante Carats, etc. Pierre Barillet vient de raconter dans Quatre années sans relâche (Editions de Fallois) sa jeunesse parisienne, entre 17 et 20 ans. Comment notamment il fit partie de l’entourage de Jean Cocteau, Charles Trénet, et bien d’autres artistes dont il trace les portraits. Intéressant certes, mais quel rapport avec notre région, nous direz-vous ? Il est très important, car les parents du jeune Barillet s’étaient réfugiés, dès 1940, dans une grande maison d’Argenton- Château où l’auteur revenait chaque vacances et d’où, surtout, il multipliait les envois de colis de victuailles à ses amis parisiens, Cocteau en tête. Ce qui était vital à l’époque. Ce témoignage de Pierre Barillet – qui, autre souvenir poitevin, échoua à sa première partie de bac à Poitiers, malgré le soutien de son maître Maurice Rat – confirme ce que l’on savait déjà par ailleurs : le monde était en guerre, la France saignée à blanc et, malgré tout, la vie artistique et théâtrale, dans Paris occupé, était intense… Claude Fouchier Remue.net François Bon anime remue.net, le site de littérature qu’il a créé en 1997. Des milliers de pages, un vrai atelier où l’on déniche des textes inédits, un bulletin, des liens, des expériences, des ressources, des amis artistes… et des cris comme celui-ci : «Pendant que les trois livres majeurs de Danielle Collobert, disparue en 1978, restent scandaleusement non réédités en France, la traduction de Il Donc s’impose depuis mai 2000 comme un must à New York.» Donc, un site vivant, polémique, généreux, utile. Sur la question d’Internet et du copyright, voici des extraits de sa réflexion, glanés sur le site : «Internet est un fait accompli. Ne pas y être présent avec nos recherches, nos ateliers personnels, nos textes, serait une condamnation à court terme, non pas pour nous personnellement mais simplement pour la vie culturelle, et peut-être, un peu plus largement, pour la place même de notre langue. Quiconque a fréquenté ces temps-ci, en France ou ailleurs, les salles informatiques en livre-service des universités, comprendra l’intérêt vital d’être à cet endroit dans le dialogue, dans les propositions de lecture. Il nous semble, à nous qui animons des sites littéraires, que ce n’est pas incompatible avec l’édition graphique, et qu’au contraire nous contribuons à maintenir vivant, subversif, l’engagement littéraire le plus ancien. […] Sur le site remue.net, une cinquantaine d’auteurs contemporains sont présents, incluant des extraits, des textes difficiles à se procurer, des entretiens. Si POL me demandait demain de retirer de mon site les extraits d’auteurs dont il détient le copyright, je fermerais tout simplement boutique : laquelle boutique ne vise qu’à faire connaître, librement, à temps et fonds perdus, ce qui moi m’excite esthétiquement. Quand me parviennent dans les mains, dérangeants, questionnants, les livres de Christophe Tarkos ou de Nathalie Quintane, j’en parle et je les cite sur mes pages, et si j’en faisais chaque fois la demande à POL, il me trouverait sans doute fatigant. Et une moitié seulement des 4 500 consultations mensuelles (33 000 pages ouvertes mensuellement) de remue.net proviennent de France.» J.-L. T. I L’ACTUALITÉ POITOU-CHARENTES I N° 53 I 109 Montmorillon : la Cité de l’écrit Contact : 05 49 83 03 03 www.citedelecrit.com rement été restauré : une entreprise de très grande envergure principalement financée par le Conseil général de la Vienne et la ville. Il abrite une vingtaine de bouquinis- tes, calligraphes, enlumineurs, imprimeurs, sculpteurs, libraires spécialisés, relieurs, éditeurs et d’autres représentants des mé- tiers du livre. Le lieu ne manque assurément pas de charme mais l’engouement escompté par ces professionnels du livre ne semble pas encore au rendez-vous. Qu’en est-il exactement ? Cette Cité de l’écrit ne s’ap- parente pas vraiment à un village du livre, à l’instar de Redu en Belgique ou Hay-on- Waye au Pays de Galles. La gestion institu- tionnelle du projet ne satisfait pas toujours les attentes des professionnels qui s’y sont installés. Si la logique du parc à thème correspond pleinement aux sites animaliers dans la Vienne (île aux serpents, château des aigles, vallée des singes), il n’en va pas forcément de même pour l’univers livres- que. Les responsables de la Cité revendi- quent quelque 120 000 visiteurs depuis l’inauguration, en juin 2000, mais certains libraires déplorent la quasi-absence d’ama- teurs de livres et de clientèle bibliophile. Ajoutons à cela, les départs de plusieurs professionnels, les querelles intestines, etc. Concevoir la cité comme un «biblioscope» a peu de chance de fonctionner et les dé- parts risquent de se multiplier à l’avenir. Par exemple, il semble vain de contrain- dre, par une charte de qualité, ces profes- sionnels à rester ouverts six jours sur sept, y compris en saison hivernale où la fré- quentation s’avère quasiment nulle, hor- mis le week-end ! En outre le monde du livre exige des compétences spécifiques et une sensibilité littéraire certaine. Gageons toutefois que la qualité des pro- fessionnels investis dans ce projet pro- metteur renverse la tendance actuelle. Le 19 juin dernier se tenait le premier Salon de l’image et de l’écrit. En multipliant les activités – ce que suggérait Régine Deforges, qui est à l’origine du projet – c’est-à-dire les salons, foire aux livres, accueils en résidence d’écrivains, anima- tions, stages d’initiation aux métiers du livre destinés aux scolaires ou aux parti- culiers, et les expositions, la Cité devrait trouver un nouveau souffle. Alors n’hési- tez plus : «Venez visiter la Cité de l’écrit et des métiers du livre.» I Par Boris Lutanie Photo Sébastien Laval S itué à proximité de la Gartempe, le quartier médiéval du Brouard a entiè- 110 I L’ACTUALITÉ POITOU-CHARENTES I N° 53 I qui en a décidé. Le moulin du Verger est un endroit fait pour fabriquer du papier et il en fabrique depuis 450 ans. Si cela avait été une ferme, je serais devenu paysan.» Jacques Bréjoux évoque son coup de uploads/Litterature/ metiers.pdf
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- Publié le Oct 25, 2021
- Catégorie Literature / Litté...
- Langue French
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