Les fabricants d’instruments mathématiques logés dans la Grande Galerie du Louv
Les fabricants d’instruments mathématiques logés dans la Grande Galerie du Louvre (ca. 1600 – ca. 1660) : quelques notices biographiques Aurélien Ruellet, CESR UMR 7323, Tours, France Les informations suivantes ont été collectées dans le cadre d’une thèse d’histoire soutenue à l’université de Tours sous le titre La Maison de Salomon. Contribution à l’histoire du patronage scientifique et technique. France et Angleterre (ca. 1600-ca. 1660), en cours de publication aux Presses Universitaires de Rennes. Les notices qui suivent sont également présentes dans le volume d’annexes de la thèse. Ces notices biographiques visent à compléter, ou corriger le cas échéant, les informations au sujet de certains fabricants d’instruments mathématiques des galeries du Louvre que l’historiographie a déjà rassemblées dans plusieurs travaux : DAUMAS, Maurice. Les instruments scientifiques aux XVIIe et XVIIIe siècle. Paris : PUF, 1953. GUIFFREY, Jules. Liste générale des brevets de logement sous la grande galerie du Louvre depuis 1608 jusqu’en 1791. Nouvelles archives de l’art français, 1873, pp. 1-163. HUARD, Georges. Les logements des artisans dans la Grande Galerie du Louvre sous Henri IV et Louis XIII. Bulletin de la Société de l'histoire de l'art français. 1939, pp. 18-36. LESPINASSE (de), René. Les métiers et corporations de la ville de Paris. Volume I : XIVe-XVIIIe siècle. Ordonnances générales, métiers de l'alimentation. Paris : Imprimerie Nationale, 1886, pp.106-107. Le tableau d’occupation des logements, d’après l’article de Georges Huard qui demeure la source principale de connaissance du personnel des Galeries, s’établit comme suit : Nom Profession logement occupé Années d’occupation Étienne Flantin ouvrier des instruments de mathématiques1. 16e-21e logement 1608-16?? Jacques Alleaume professeur esdites mathématiques 23e logement 1608-1627 Claude Bidault horloger, mais mentionné ailleurs comme « faiseur des instruments en mathématiques ». 20e logement 1642-1652 (brevet dès 1628) Henri-Auguste Bidault horloger 20e logement 1652- André Vernier ingénieur aux instruments de mathématiques du roi 14e logement avant 1626 – 1635 Antoine Ferrier horloger et ouvrier des instruments de mathématiques 22e logement 1608-1622 Guillaume Ferrier horloger et ouvrier des instruments de mathématiques 22e logement 1622-166 ? Pierre et Baptiste Blondeau ingénieurs ès forces mouvantes, et travaillant aux instruments de mathématiques 27e logement 1642- Jacques Buot ingénieur ordinaire du roi 4e logement vers 1648- ?2 Jean Blondeau ingénieur pour les instruments de mathématiques 27e logement 1656-16 ?? 1 Orthographié parfois, sans doute par erreur, Raulin. C’est bien « Flantin » qui figure dans « Lettres patentes de Henri IV accordant des lettres de maîtrise indépendantes en faveur des ouvriers installés dans la galerie du Louvre », 22 décembre 1608. LESPINASSE (de), René. Les métiers. Volume I. op. cit. pp. 106-108, ainsi que dans une copie des lettres patentes : AN, O1 1050, p. 21. 2 AN, MC/ET/XXXIV/115, 21 décembre 1648, Compte et obligation par Jacques Buot. 1 Alleaume3 Né à Orléans, réformé, il exerce comme ingénieur aux Provinces-Unies, puis en France au service du roi, charge pour laquelle il touche des gages variant entre 1200 et 1800 livres tournois entre 1606 et 16264. Il est aussi le professeur de mathématiques du jeune Gaston d’Orléans, charge pour laquelle il touche 600 livres tournois en 16255. Bien en cour, il est donc fréquemment sollicité et se voit adresser des projets à expertiser. A la fin de la décennie 1610, il doit ainsi juger, à la demande de l’entourage de Gaston, d’une proposition de quadrature du cercle émanant de Benedetto Scotto et participe aussi à l’expertise des projets de l’aqueduc Médicis6. Le beau-frère d’Alleaume, Jean Basby, siège par ailleurs au conseil du turbulent frère du roi7. Alleaume fait figure d’aîné au sein de la communauté savante parisienne des années 1610-1620. Il conseille ainsi au mathématicien anglais Edmund Wingate de dédicacer sa « règle de proportion » à Gaston d’Orléans8. Sa médiation est probablement utile, puisqu’il se voit à son tour remercié par une dédicace. Son logis des galeries du Louvre, où il expose diverses curiosités et instruments, le met au contact avec d’autres ingénieurs, comme Didier Henrion, qui le présente comme l’inventeur du compas de proportion9. À sa mort, ses livres et manuscrits sont vendus10. Il est inhumé à Charenton le 3 octobre 1627. Bidault L’histoire de la famille Bidault est assez embrouillée, et les récits la concernant ne sont pas sans contradictions11. Aucun acte notarié à leur propos n’a ici été répertorié. 3 Les dictionnaires biographiques contiennent déjà des notices conséquentes sur Alleaume, qui ne sont toutefois pas exemptes d’erreurs. Parmi les plus complètes, citons WAARD (de), Cornelis. Alleaume, Jacques. In : MOLHUYSEN, P. C., BLOK, P.J. (dir.). Nieuw Nederlandsch Biografisch Woordenboek. Leyde : A.W. Sijthoff’s Uitgevers-Maatschappij, 1912, col. 17-19. Texte disponible sur internet. URL : http://www.historici.nl/retroboeken/nnbw/#page=14&accessor=accessor_index&source=2&view=transcriptiePane Consulté le 10 octobre 2013 et HAAG, Eugène et Émile. La France Protestante. Deuxième édition. Vol. 1. Paris : Sandoz et Fischbacher, 1877, col. 124-125. Ces deux notices suggèrent qu’Alleaume serait le fils de Pierre Alleaume, un disciple de François Viète, ce qui permettrait d’expliquer la transmission des papiers de l’algébriste à l’ingénieur. Si un lien de parenté reste possible, cette identification est démentie par le testament de Jacques Alleaume (AN, MC, ET/XLIX/260, pièce 325) et par un acte notarié passé avec le cardinal de Richelieu (AN, MC, ET/VI/197, 3 mai 1625). Le père de Jacques Alleaume était prénommé Jean. 4 BNF, Mélanges Colbert, 318, fol. 63-64. 5 BNF, manuscrit français 20614, fol. 107 r°. 6 SCOTTO, Benedetto. Quadrature du cercle par demonstration geometrique. Paris : Jean Bessin, [s.d.], épître dédicatoire à Monsieur [Gaston d’Orléans], BNF V-939 (2) ; BERTHIER, Karine. L’aqueduc Médicis: organisation et gestion de la construction d’un ouvrage hydraulique, XVIIe-XVIIIe siècle. In : NEGRE, Valérie, CARVAIS, Robert, GUILLERME, André, SAKAROVITCH, Joëlle (dir.). Édifices et artifices, histoires constructives, Mercuès : Picard, 2010, pp. 749-760. 7 BNF, Cabinet des titres, PO 30, fol. 713. 8 WINGATE, Edmund. Usage de la règle de proportion. Paris : Melchior Mondière, 1624, fol. a ii. L’exemplaire de la Bibliothèque Sainte-Geneviève BSG 8-V 144 NV 2178 FA est dédicacé à Alleaume en remerciement de ce conseil. 9 Henrion passe le voir « il y a dix-sept ou dix huit ans ». HENRION, Didier. L’usage du compas de proportion. Paris : Samuel Thiboust, 1631, fol. 3. 10 TAMIZEY DE LARROQUE, Philippe (éd.). Lettres de Peiresc aux frères Dupuy. Tome Premier : décembre 1617- décembre 1628. Paris : Imprimerie Nationale, 1888, p. 408, lettre de Peiresc à Pierre Dupuy, 11 novembre 1627. Nous n’avons pas trouvé traces dans plusieurs liasses et registres du Châtelet et des Requêtes de l’Hôtel de ce qui a semblé être une vente publique : AN, V4/1465/1, Y3022B, Y3302, Y3397, Y3562, Y3563, Y3564. 11 GUIFFREY, Jules. Nouvelles archives de l’art français. Paris : Charavay frères, 1872, p. 69 est assez confus et sur la foi d’un état de la maison du roi non cité, évoque deux Claude Bidault travaillant dans les années 1630. L’information est reprise par Tardy, Dictionnaire des Horlogers, Paris, 1971, p. 56 et par Catherine Cardinal, La montre des origines au XIXe siècle, Paris, Vilo, 1985, p. 28. Le Fichier Laborde et les brevets du roi conservés ou copiés dans la série O1 semblent toutefois suggérer qu’il n’y eut qu’un Claude Bidault actif dans les années 1630-1640, mais il est difficile d’avoir une certitude en la matière. 2 Un Claude Bidault est mentionné sur plusieurs états de pensions avant l’année 162812. Il est porté régulièrement à partir des années 1630 sur plusieurs états de l’épargne, comme « faiseur des instruments en mathématiques », charge pour laquelle il reçoit une pension confortable13. D’autres artisans du Louvre figurent sur ces états, comme le fourbisseur Petit ou le sculpteur Dupré. Claude Bidault reçoit son brevet de logement aux Galeries du Louvre comme « horloger du roi », le 29 mars 1628, pour « le premier logement qui viendra à vacquer ». Mais c’est en raison de « l’experience [qu’il] s’est acquise à la fabrique de toutes sortes d’instruments de Mathematique » qu’il reçoit ce brevet, « le voulant sa Majesté a cette occasion approcher de sa personne et et le voir quelques fois travailler aux ouvrages qu’elle desire de luy faire faire»14. Toutefois, Claude Bidault ne rentre pas immédiatement à la galerie du Louvre, et il semble d’abord occuper un logement « dans le gros pavillon des Tuileries », ce jusqu’en 1642, date à laquelle il reçoit un brevet pour occuper le logement laissé vacant par l’orfèvre Jean Banquerol. À cette date, il a également la charge de « valet de chambre du roi ». Par le même brevet, il obtient survivance de son brevet de logement pour son fils Henri-Auguste15. Claude Bidault meurt en 1652, et son fils Henri- Auguste prend sa succession16. La descendance de Claude Bidault est bien connue, notamment grâce au Fichier Laborde17. Son fils Henri-Auguste naît en 1629 et a pour parrain Henri-Auguste de Loménie et pour marraine Marie Boyer, l’épouse du marquis Charles de la Vieuville. Son second fils Louis naît en 1630 et pour parrain Louis de Girard, procureur en la chambre des comptes, conseiller du roi, et a pour marraine l’épouse de Henri-Auguste de Loménie. En 1632, son autre fils Claude a uploads/Litterature/ notices-louvre-ruellet.pdf
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- Publié le Nov 19, 2022
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