Revue Philosophique de Louvain Sextus Empiricus, Esquisses pyrrhoniennes. Intro

Revue Philosophique de Louvain Sextus Empiricus, Esquisses pyrrhoniennes. Introduction, traduction et commentaires par Pierre Pellegrin Diego E. Machuca Citer ce document / Cite this document : Machuca Diego E. Sextus Empiricus, Esquisses pyrrhoniennes. Introduction, traduction et commentaires par Pierre Pellegrin. In: Revue Philosophique de Louvain. Quatrième série, tome 100, n°4, 2002. pp. 797-801; https://www.persee.fr/doc/phlou_0035-3841_2002_num_100_4_7456_t1_0797_0000_2 Fichier pdf généré le 26/04/2018 Histoire de la philosophie 797 réalité du non-être, La quête de l'invisible, et qui consistent en une suite de variations très libres sur les différents thèmes du Sophiste, à savoir: la définition du sophiste dans son rapport avec le philosophe, le problème du statut des copies et des imitations, Parménide et la question de l'être, la nature du non-être, le «parricide» à l'égard de Parménide, le rapport entre l'un et le tout, le statut du repos et du mouvement, ainsi que du Même et de l'Autre, la définition de la dialectique... Cette liberté fait que, dans ces «variations symphoniques» (comme on pourrait les appeler), l'auteur ne se prive pas de mêler à la voix de Platon d'autres voix, implicites ou explicites. C'est ainsi que, ça et là, sont évoquées expressément les figures emblématiques de Parménide, d'Heraclite, de Nietzsche, d'Hegel, de Maurice Blanchot ou du psychanalyste Denis Vasse, mais aussi que plane plus d'une fois l'ombre de Freud lui-même ou de Heidegger, comme en témoigne, nous semble-t-il, le passage suivant: «[. . .] si l'on veut bien reconnaître un être au non-être, il faut quelque part lui donner la forme d'une certaine entité qui se tient par elle-même [...], lui accorder une sorte de réalité en soi», dont le sens serait celui d'une apparence, car «si l'être est le mouvement de ce qui s'apparaît, de ce qui fait advenir la "présence", comment celle-ci pourrait-elle s'apparaître à elle-même, sinon en empruntant le statut d'une apparence. C'est cela que Platon a vu et que n'a pas vu son père Parménide. Ce qui donne la "présence" se donne à partir de quelque chose qui manifeste cette présence. L'être se donne à travers un existant, mais cet existant masque l'être» (p. 77). En conclusion, nous dirons que nous avons là un ouvrage de haute philosophie, qu'il faut lire et relire, et surtout méditer, pour ne pas dire savourer lentement. . . Le fait est suffisamment rare aujourd'hui pour qu'il soit souligné. Mais il faut peut-être regretter que le titre, trop modeste en un certain sens, pourrait faire croire au lecteur potentiel qu'il a en mains une étude de plus sur Le sophiste, alors qu'il s'agit plutôt de ce qu'on pourrait appeler un «exercice spirituel» de philosophie. Jacques Follon. Sextus Empiricus, Esquisses pyrrhoniennes . Introduction, traduction et commentaires par Pierre Pellegrin. Un vol. 22 x 15 de 573 pp. Paris, Éditions du Seuil, 1997, Le présent livre constitue un apport significatif en langue française à l'étude du scepticisme antique. Il s'agit d'une traduction des Pyrrôneioi Hypotypôseis (PH), l'ouvrage le plus connu et étudié de Sextus Empiricus, médecin pyrrhonien qui a vécu probablement au IIe siècle après J.-C. Sextus est notre source principale quant au courant sceptique 798 Comptes rendus grec et l'un des auteurs clés pour la connaissance d'autres philosophies hellénistiques telles que le stoïcisme et l'épicurisme. Le livre de P. Pellegrin vient s'ajouter aux multiples traductions de différents écrits de Sextus qui ont été faites au cours des dernières années, particulièrement en langue anglaise, mais aussi en italien, en allemand, voire en espagnol. L'ouvrage est précédé d'une bonne introduction et s'achève par un glossaire utile de certains termes et expressions clés employés dans PH. Il contient également une brève bibliographie, ainsi qu'un index des personnages cités dans le texte et dans les notes — tout en fournissant des données biographiques sur chacun d'eux — et un index des notions. L'un des aspects les plus positifs de ce livre, c'est qu'il contient le texte grec — dans lequel on suit fondamentalement l'édition de H. Mutschmann et J. Mau — , ce qui permet de collationner la version française avec l'original. De plus, P. Pellegrin fournit des notes rendant compte de la lecture qu'il opère entre les différentes variantes qui se trouvent dans les manuscrits ou qui furent introduites par les divers éditeurs et traducteurs. Ces notes renvoient aussi à des passages parallèles des autres ouvrages de Sextus et expliquent ou discutent certains points du texte. Penchons-nous maintenant sur la traduction de certaines notions, de même que sur quelques-unes des questions les plus importantes soulevées dans l'introduction et le glossaire. En ce qui concerne la traduction, nous examinerons tout d'abord celle de deux termes clés du vocabulaire sceptique. Le plus important est celui de phantasia, lequel est rendu par «impression», comme on le fait habituellement en anglais. Cependant, cette traduction présente, à notre avis, certaines difficultés. La première, c'est qu'elle est généralement employée pour rendre le grec typôsis; justement P. Pellegrin traduit ce terme par «impression» dans PH I. 49. Mais peut-être l'inconvénient le plus important que cette traduction entraîne, c'est qu'elle cache le sens du mot grec et sa parenté avec le participe phainomenon, terme essentiel de la terminologie sceptique. Phantasia, qui provient du verbe phaines- thai, peut signifier l'action de se montrer, d'apparaître ou de se représenter, ainsi que le résultat de ces actions. La traduction la plus adéquate pour l'usage que Sextus fait de ce terme serait «apparition» — et peut- être dans certains cas aussi «représentation» — . Cette traduction permet de refléter la relation que le mot phantasia entretient avec le terme phainomenon en fonction adjectivale ou nominale, cas où il doit être traduit par «apparent» et «ce qui apparaît» respectivement. L'autre mot en question est agôgë, que P. Pellegrin traduit par «voie» et qui, en anglais, est généralement rendu par «way». Pour désigner la philosophie pyrrho- nienne Sextus emploie l'expression hé ephektikë agôgë et, surtout, celle Histoire de la philosophie 799 de hë skeptikê agôgë ou, simplement, hê skeptikê, avec le terme agôgë élidé. Celui-ci signifie entre autres la manière de conduire sa vie, la façon de traiter une question ou la direction particulière que Ton suit dans une investigation. Voilà pourquoi même si la traduction par «voie» peut être correcte, une autre traduction possible qui, à notre avis, refléterait plus adéquatement le sens du terme grec, c'est celle de «style». Il faudrait observer, en outre, que l'expression hë skeptikê est rendue par «le scepticisme», de la même manière, donc, que hë skepsis. Comme on vient de l'indiquer, cette expression-là présuppose le terme agogë, de sorte que la traduction correcte — quoique du point de vue sémantique elle n'introduise aucune différence — est «le <style> sceptique». Remarquons finalement que les titres grecs qui apparaissent dans l'index au début de chaque livre présentent parfois certaines différences par rapport à ceux qui sont en tête de chaque chapitre. Dans quelques cas Pellegrin offre la même traduction pour les deux versions, d'où le fait que quand on collationne le grec avec le français on ne comprend pas dans un premier moment la raison de la traduction offerte. Nous voudrions faire allusion maintenant à deux questions abordées par Pellegrin. La première, c'est que selon lui PH ne précède pas les autres écrits de Sextus, puisque quand il existe des passages parallèles, cet ouvrage contient des versions plus élaborées et améliorées que celles qui se trouvent dans le reste de ses écrits, du fait que Sextus aurait eu égard aux objections que ceux-ci auraient suscitées. Pellegrin s'oppose ainsi à la thèse défendue principalement par V. Brochard et K. Janâcek, selon laquelle PH occuperait la première place dans la chronologie des ouvrages de Sextus. Une autre des raisons que Pellegrin présente pour fonder sa position, c'est que dans le reste de l'œuvre de ce sceptique on ne trouve rien qui corresponde au livre premier de PH, dans lequel on explique quel est le caractère du scepticisme — ses principes, son critère, sa fin, ses arguments, etc., — ainsi que ses différences au regard des philosophies dans lesquelles on voyait une affinité avec le style sceptique. Le fait que plusieurs éléments contenus dans ce livre se trouvent disséminés dans les autres ouvrages de Sextus est pour Pellegrin un indice que dans PH I celui-là les aurait unifiés postérieurement. Cependant, il y a quelques décades, Janâcek et J. Blomqvist ont établi que les parties qui constituent aujourd'hui Adversus Dogmaticos — plus connu comme Adversus Mathematicos (AM) VII-XI — étaient précédées d'une section non conservée et composée vraisemblablement de cinq livres, dans laquelle on traitait les mêmes questions que dans le livre premier de PH. Ceci expliquerait le fait sur lequel s'appuie l'argument de Brochard — auquel Pellegrin lui-même fait allusion — pour conclure que PH est l'ouvrage le plus ancien de Sextus: de même que dans AM il existe des 800 Comptes rendus références à AD, dans celui-ci il y a plusieurs renvois à des sujets traités dans un écrit antérieur, lequel, par l'identité thématique, doit être PH. Le passage le plus important à cet égard se trouve au début d'AD I, où l'on lit: «Le caractère général de la uploads/Litterature/ phlou-0035-3841-2002-num-100-4-7456-t1-0797-0000-2 1 .pdf

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