Objet d’étude : Écriture poétique et quête du sens, du Moyen Âge à nos jours. 7
Objet d’étude : Écriture poétique et quête du sens, du Moyen Âge à nos jours. 73 Objet d’étude : Écriture poétique et quête du sens, du Moyen Âge à nos jours. Séquence 1 (Groupement de textes) L’expression poétique de la révolte contre la guerre Problématique L’expression de la révolte contre la guerre de l’Antiquité à l’époque contemporaine : Comment l’écriture poétique dans ses diverses formes sert-elle cette dénonciation ? Lectures analytiques La dénonciation de la guerre au XIXe siècle Lecture analytique n° 1 Victor Hugo, « L’expiation », Les châtiments, V, 13, vers 1-28, (1853). Lecture analytique n° 2 Arthur Rimbaud, « Le dormeur du val », Poésies, (1895). Dénonciation de la guerre au XX° siècle. Lecture analytique n° 3 Aragon, « La guerre et ce qui s’ensuivit », le Roman inachevé, (1956). Lecture analytique n° 4 Desnos, « Ce cœur qui haïssait la guerre ». Support des lectures cursives. Textes, documents et/ou activités complémentaires Documents en lecture cursive Quel regard porte ces poétiques sur la guerre ? (De l’Antiquité au XVI° siècle). Charles d’Orléans « En regardant vers le pays de France » (XVe siècle) Agrippa d’Aubigné, Les Tragiques (1616) Documents complémentaires La révolte après la fin de la deuxième guerre mondiale. Jaques Prévert, « Barbara », Paroles (1949). La chanson au service de la dénonciation de la guerre. Boris Vian : « À tous les enfants » (1954). En comparant ce poème avec celui d’Aragon et en observant les différents sens du mot « ombre », montrez comment Apollinaire fait mémoire de ses camarades victimes de la guerre. Apollinaire, « Ombre » Lecture cursive La parole poétique qui dit pour dédire. La remontée des cendres de Tahar Ben Jelloun L’histoire de l’Art La peinture, un moyen artistique pour dénoncer la guerre Analyse de deux tableaux Gustave Courbet, L’homme blessé (entre 1844 et 1854) Otto Dix, Danse macabre année 17 Activité personnelle Séquence 6 Objet d’étude : Écriture poétique et quête du sens, du Moyen Âge à nos jours. 74 Texte de la lecture analytique 1 L'expiation Il neigeait. On était vaincu par sa conquête. Pour la première fois l'aigle1 baissait la tête. Sombres jours ! l'empereur revenait lentement, Laissant derrière lui brûler Moscou fumant.2 Il neigeait. L'âpre hiver fondait en avalanche. Après la plaine blanche une autre plaine blanche. On ne connaissait plus les chefs ni le drapeau. Hier la grande armée, et maintenant troupeau. On ne distinguait plus les ailes ni le centre. Il neigeait. Les blessés s'abritaient dans le ventre Des chevaux morts ; au seuil des bivouacs désolés On voyait des clairons3 à leur poste gelés, Restés debout, en selle et muets, blancs de givre, Collant leur bouche en pierre aux trompettes de cuivre. Boulets, mitraille, obus, mêlés aux flocons blancs, Pleuvaient ; les grenadiers, surpris d'être tremblants, Marchaient pensifs, la glace à leur moustache grise. Il neigeait, il neigeait toujours ! La froide bise Sifflait ; sur le verglas, dans des lieux inconnus, On n'avait pas de pain et l'on allait pieds nus. Ce n'étaient plus des cœurs vivants, des gens de guerre : C'était un rêve errant dans la brume, un mystère, Une procession d'ombres sous le ciel noir. La solitude vaste, épouvantable à voir, Partout apparaissait, muette vengeresse. Le ciel faisait sans bruit avec la neige épaisse Pour cette immense armée un immense linceul. Et chacun se sentant mourir, on était seul. Victor Hugo, les châtiments, V, 13, (1953) Texte de la lecture analytique 2 1 Aigle : emblème de Napoléon Ier. 2 Les Russes ont préféré abandonner et incendier leur capitale, et laisser ensuite l’armée française en proie au terrible hiver lors de son retour. 3 Soldat qui joue du clairon. Il s’agit d’une métonymie : les soldats sont désignés par l’instrument qu’ils utilisent. Séquence 6 Objet d’étude : Écriture poétique et quête du sens, du Moyen Âge à nos jours. 75 Le Dormeur du val C’est un trou de verdure où chante une rivière, Accrochant follement aux herbes des haillons D’argent ; où le soleil, de la montagne fière, Luit : c’est un petit val qui mousse de rayons. Un soldat jeune, bouche ouverte, tête nue, Et la nuque baignant dans le frais cresson bleu, Dort ; il est étendu dans l’herbe, sous la nue, Pâle dans son lit vert où la lumière pleut. Les pieds dans les glaïeuls, il dort. Souriant comme Sourirait un enfant malade, il fait un somme : Nature, berce-le chaudement : il a froid. Les parfums ne font pas frissonner sa narine ; Il dort dans le soleil, la main sur sa poitrine, Tranquille. Il a deux trous rouges au côté droit. Arthur Rimbaud « Le Dormeur du val » Poésies (1895) Texte de la lecture analytique 3 La guerre et ce qui s’ensuivit […] On part Dieu sait pour où ça tient du mauvais rêve On glissera le long de la ligne de feu Quelque part ça commence à n'être plus du jeu Les bonshommes là-bas attendent la relève (…) Et nous vers l’est à nouveau qui roulons Voyez La cargaison de chair que notre marche entraîne Vers le fade parfum qu’exhalent les gangrènes Au long pourrissement des entonnoirs4 noyés Tu n'en reviendras pas toi qui courais les filles Jeune homme dont j'ai vu battre le cœur à nu Quand j'ai déchiré ta chemise et toi non plus Tu n'en reviendras pas vieux joueur de manille5 Qu'un obus a coupé par le travers en deux Pour une fois qu'il avait un jeu du tonnerre Et toi le tatoué l'ancien Légionnaire Tu survivras longtemps sans visage sans yeux Roule au loin roule train des dernières lueurs Les soldats assoupis que ta danse secoue Laissent pencher leur front et fléchissent le cou Cela sent le tabac la laine et la sueur Comment vous regarder sans voir vos destinées 4 entonnoirs : cratères causés par l’explosion des obus. 5 manille : jeu de cartes. Séquence 6 Objet d’étude : Écriture poétique et quête du sens, du Moyen Âge à nos jours. 76 Fiancés de la terre et promis des douleurs La veilleuse vous fait de la couleur des pleurs Vous bougez vaguement vos jambes condamnées Vous étirez vos bras vous retrouvez le jour Arrêt brusque et quelqu’un crie Au jus là-dedans Vous baillez Vous avez une bouche et des dents Et le caporal chante Au pont de Minaucourt6 Déjà la pierre pense où votre nom s'inscrit Déjà vous n'êtes plus qu'un nom d'or sur nos places Déjà le souvenir de vos amours s'efface Déjà vous n'êtes plus que pour avoir péri. Louis Aragon, « La guerre et ce qui s’ensuivit », Le roman inachevé, 1966, Gallimard Texte de la lecture analytique 4 Ce cœur qui haïssait la guerre voilà qu’il bat pour le combat et la bataille ! Ce cœur qui ne battait plus qu’au rythme des marées, à celui des saisons, à celui des heures du jour et de la nuit, Voilà qu’il se gonfle et qu’il envoie dans les veines un sang brûlant de salpêtre7et de haine Et qu’il mène un tel bruit dans la cervelle que les oreilles en sifflent Et qu’il n’est pas possible que ce bruit ne se répande pas dans la ville et la campagne Comme le son d’une cloche appelant à l’émeute et au combat. Écoutez, je l’entends qui me revient renvoyé par les échos. Mais non, c’est le bruit d’autres cœurs, de millions d’autres cœurs battant comme le mien à travers la France. Ils battent au même rythme pour la même besogne tous ces cœurs, Leur bruit est celui de la mer à l’assaut des falaises Et tout ce sang porte dans les millions de cervelles un même mot d’ordre : Révolte contre Hitler et mort à ses partisans ! Pourtant ce cœur haïssait la guerre et battait au rythme des saisons, Mais un seul mot : Liberté a suffi à réveiller de vieilles colères Et des millions de Français se préparent dans l’ombre à la besogne que l’aube proche leur imposera. Car ces cœurs qui haïssaient la guerre battaient pour la liberté au rythme même des saisons et des marées, du jour et de la nuit. Robert Desnos, « L’honneur des poètes », in Destinée arbitraire8.B 6 Premiers mots d’une chanson dont les paroles ont été inventées par un soldat en 1914 et qui évoque une tranchée, dans un lieu qui fut particulièrement meurtrier. C’est sur la commune de Minaucourt que se trouve actuellement la nécropole nationale où ont été inhumés 21 319 soldats. 7 salpêtre : nom habituel du nitrate qui rentre dans la composition des explosifs. 8 Poésie Gallimard, 1975, pp. 224-225. Séquence 6 Objet d’étude : Écriture poétique et quête du sens, du Moyen Âge à nos jours. 77 Charles d’Orléans « En regardant vers le pays de France » (XVe siècle) Charles d’Orléans (1394-1465), grand prince de France (il est le père du roi Louis XII), est fait prisonnier par les Anglais lors de la bataille d’Azincourt. Il restera vingt-cinq ans en captivité en Angleterre, aucun membre de sa famille ne pouvant uploads/Litterature/ sequence-6-2018.pdf
Documents similaires










-
28
-
0
-
0
Licence et utilisation
Gratuit pour un usage personnel Attribution requise- Détails
- Publié le Mar 14, 2022
- Catégorie Literature / Litté...
- Langue French
- Taille du fichier 0.2497MB