COURS DE FORMATION DE TARIQ RAMADAN TAFSIR DU CORAN COLLECTIF DES MUSULMANS DE

COURS DE FORMATION DE TARIQ RAMADAN TAFSIR DU CORAN COLLECTIF DES MUSULMANS DE FRANCE COLLECTIF REGIONAL SUD __________________________________________________________________ Sourate Yoûssouf versets 7 à 33 L’épreuve de l’amour Introduction : Cette sourate relate l’histoire de Joseph (Yoûssouf), un Prophète, fils lui-même du prophète Jacob (Ya’coub). Cette histoire va l’emmener loin de son père, jusqu’en Egypte, avec de nombreuses péripéties. Dès le premier verset, Dieu nous dit qu’il y a des signes dans cette histoire, il se trouve quelque chose de tout à fait édifiant dans l’histoire de Joseph. En fait, le caractère édifiant de cette histoire se manifeste à travers la notion de l’épreuve de l’amour. En effet, on se rend compte à plusieurs niveaux que l’amour peut devenir une épreuve. Certes, dans un premier temps, l’amour pour nous tous, est quelque chose de naturel, de pur et de beau. Or, la réalité de celui qui porte la foi, c’est d’orienter ses sentiments dans un sens spécifique. Dans cette histoire on se rend compte que tous les amours ne sont pas tous de la même nature même s’ils sont tous naturels. Les dimensions fondamentales de la relation d’amour sont présentes dans cette histoire : - Première dimension : la relation d’amour filial entre le père et le fils. - Deuxième dimension : la relation d’amour fraternel entre les frères. - Troisième dimension : la relation d’amour entre un homme et une femme. Ces trois dimensions sont présentes en une seule histoire et pour chacune de ces dimensions, on s’aperçoit qu’il y a une épreuve. Première partie : Sourate 12 versets 7 à 14 7 Il y a vraiment en Joseph et en ses frères des signes pour ceux qui posent des questions (qui interpellent), 8 Lorsqu’ils dirent : « Joseph et son frère sont plus aimés par notre père que nous, bien que nous soyons plus nombreux (que nous soyons un groupe). Notre père se trouve dans un égarement manifeste. 9 Tuez Joseph ou bien éloignez-le dans n’importe quel pays éloigné, afin que vous restiez seuls à jouir de la bienveillance de votre père, après quoi, vous serez des gens bien considérés. » 10 L’un d’eux prit la parole en disant : « Ne tuez pas Joseph, mais jetez-le dans les profondeurs invisibles du puits. Si vous procédez ainsi, un voyageur le recueillera. » 11 Ils dirent : « ô notre père, pourquoi n’as-tu pas confiance en nous au sujet de Joseph ? Nous sommes sincères vis-à-vis de lui. 12 Envoie-le demain avec nous, il s’ébattra et jouera tandis que nous veillerons sur lui ». 13 Il dit : « Cela m’attriste que vous l’emmeniez ; je crains que le loup ne le dévore au moment où vous ne ferez pas attention à lui ». 14 Ils dirent : « Si le loup le dévorait alors que nous sommes nombreux, nous serions des personnes diminuées en esprit (stupides) ». Dans la révélation, se trouvent des histoires, car une histoire a deux portes : elle a les faits que l’on peut retenir avec son esprit et elle est un signe qu’il faut méditer avec son cœur. Ici Dieu nous dit tout d’abord qu’ il y a vraiment en Joseph et en ses frères des signes pour ceux qui posent des questions, qui interpellent sur l’histoire de Joseph et plus fondamentalement, sur la dimension de la gestion de ses sentiments. L’histoire de Joseph, c’est l’histoire de la gestion de nos sentiments. Comment gère-t-on ce que l’on peut sentir et comment ce que l’on sent peut devenir une épreuve pour celui qui porte ces sentiments? C’est l’interpellation de la profondeur, de ce que nous avons dans le cœur qui va être finalement l’interpellation sur laquelle nous avons à méditer. Par ailleurs, on va se rendre compte que Joseph va vivre un parcours, une initiation, le parcours d’un fils de prophète qui va vivre, d’épreuve en épreuve, le fait de devenir lui-même un envoyé. Depuis le début, ceci est su, entre lui et son père il y a une communication du cœur. L’histoire de Joseph, c’est l’histoire d’un cœur à l’épreuve, d’une foi à l’épreuve et d’une initiation par l’épreuve. Joseph se rapproche de Dieu par les épreuves auxquelles il fait face. 1/ Un sentiment d’amour blessé : Joseph et son frère sont plus aimés par notre père que nous Tout commence par un sentiment d’amour blessé. Le premier sentiment de ces enfants, des dix autres enfants, c’est de sentir que leur père aime plus leurs frères qu’eux. Toute la question en Islam concernant ce sentiment d’amour, qui est naturel pour tous les êtres humains sur la terre, est la suivante : que font-ils de cet amour … ? Ce n’est pas que tu aimes qui pose un problème, c’est comment tu aimes et pourquoi tu aimes. En d’autres termes, ils vont avoir un amour blessé qui ne va pas être géré dans la lumière de la foi mais qui va être géré dans les profondeurs de la blessure, loin de Dieu. Il va mener les enfants vers le pire. Ils ont senti que leur père les aimait moins, ils vont oublier Dieu dans la gestion de ce sentiment, ils vont vouloir tuer, vouloir éloigner, ils vont mentir. Quand ce sentiment d’amour, qui est naturel au départ, n’est pas géré par la foi, un cercle vicieux se met en place. Ils passent du mensonge à la volonté de tuer, à la volonté d’éloigner. Ils vont partir complètement dans ce qui est l’ombre de la gestion de nos sentiments. Au contraire, Joseph, qui lui aussi vit cet amour de son père, va avoir une toute autre attitude. Chaque fois, que son sentiment est mis à l’épreuve, il revient à Dieu et va vivre son amour dans la lumière. On a donc un enseignement fondamental : avec le même sentiment, on peut aller vers le plus grand des maux ou on peut se rapprocher du Très-Haut, en gérant ce sentiment. Qu’est ce que tu fais avec ce que tu sens ? Les frères ne comprennent pas qu’entre le père et le fils, il n’y a pas qu’une relation de sang, il y a une relation de foi. Le père sait qui est son fils, son fils est un prophète, comme lui-même l’est. Joseph a vu onze étoiles, la lune et le soleil se prosterner. Le secret de l’amour de Jacob pour son fils, c’est qu’à la relation de sang s’ajoute la lumière de la foi. Il aime son fils dans son sang mais dans la spiritualité qui le rapproche de Dieu. Et ceci est une des dimensions fondamentales de la façon dont on doit aimer ses enfants. Je ne t’aime pas seulement parce que tu portes mon sang, je t’aime parce que tu portes le dépôt de la foi qui est plus que le sang. Et cette relation particulière va provoquer la jalousie de ces frères. Mais ils n’ont pas la clé, oubliant Dieu, ils ne voient pas ce qu’il faut voir, ils vont vivre la jalousie et le cycle de la jalousie va les amener très loin. La blessure est telle qu’ils vont vouloir le pire, vouloir tuer leur frère. Ceci nous permet de mettre en évidence les deux notions suivantes : - La jalousie est un des sentiments les plus naturels avec l’amour. Maintenant, tout dépend de ce que l’on fait de ce sentiment. Si on aime quelqu’un, on va forcément être préoccupé de ce qu’il regarde ou de ce qu’il fait. D’ailleurs, si quelqu’un ne se préoccupe pas de ce l’autre pense, de ce qu’il fait, on peut légitimement avoir des doutes sur son amour. A côté de l’amour, il y a un sentiment de possession mais il s’agit de le maîtriser avec Dieu. Ce sentiment, il faut le mettre à sa place. La jalousie est quelque chose qu’il faut maîtriser même si elle est un des signes du fait que l’on aime. Mais lorsque l’on oublie Dieu, on le laisse aller et on devient jaloux à vouloir tuer, éloigner, mentir… C’est ce qui arrive aux frères. Oubliant Dieu, ils s’oublient… - C’est une question d’amour mal géré qui commence l’histoire de Joseph. Ainsi, nous ne devons jamais oublier ce que peut provoquer la blessure d’un cœur. Par ailleurs, il faut insister sur le fait que Dieu, Jacob et Joseph vont pardonner aux dix frères à la fin de l’histoire. Il y a un pardon à la fin de l’histoire. La source du mal qu’ils vont provoquer correspond à la blessure du cœur. On peut faire n’importe quoi quand on a le cœur blessé. Dans les banlieues, on s’aperçoit qu’une grande majorité de la communauté musulmane, dans ceux qui ne prient pas ou qui ne sont pas habitués à vivre dans la spiritualité, a le cœur blessé. Ménagez les cœurs blessés, il ne faut pas les juger uniquement sur ce qu’ils font mais en connaître la cause et on se rend compte souvent que ce sont des cœurs blessés, des cœurs qui manquent d’affection, de reconnaissance, d’attention. La question que l’on doit se poser uploads/Litterature/ tafsir-sourate-youssef.pdf

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