MODÈLES THÉORIQUES • THEORETICAL MODELS Dialogos z 12/2005 79 LA GRAMMAIRE DE T

MODÈLES THÉORIQUES • THEORETICAL MODELS Dialogos z 12/2005 79 LA GRAMMAIRE DE TEXTE Corina CILIANU-LASCU 1 Principes fondamentaux ertains faits linguistiques comme les pronoms anaphoriques ou cataphoriques, les définitivants, l’emploi et la concordance des temps, l’emploi des hyperonymes ou des hyponymes déterminent la nécessité de constituer un autre niveau d’analyse, au delà de la phrase, la grammaire de texte [GT], différente de la grammaire de la phrase par: - son objet - ses règles de constitution spécifiques. Le texte (textus: «tissé, tressé», de texere, «tisser, tresser, assembler habilement », [9, p.13] est une succession de phrases, mais toute suite de phrases n’est pas nécessairement un texte: il s’agit d’un «ensemble organisé de phrases» [8, p.603] qui détermine une implication réciproque des phrases comme élément impliquant ou impliqué (phrase antérieure ou postérieure). Chaque phrase représente un thème pour la phrase suivante, et un commentaire pour la phrase précédente [4, p. 279]: thème thème thème Ph1 Ph2 Ph3 commentaire commentaire commentaire « Une des contraintes qu’on trouve fréquemment est l’identité référentielle: deux propositions peuvent être liées si elles contiennent un terme qui dénote le même référent (dans un monde possible). La contrainte la plus générale: deux propositions sont liées si les faits qu’elles dénotent sont liés. Deux faits sont liés si l’un est une condition de l’autre. Cette condition peut être très faible (compatibilité) ou très forte (implication) » [9, p.100]. Les rapports entre les phrases suivantes sont différents du point de vue de leur conditionnement réciproque: (1) Pour le pilote, cette nuit était sans rivage puisqu’elle ne conduisait ni vers un port (ils semblaient tous inaccessibles), ni vers l’aube (Saint-Exupéry). (relation d’implication) (2) Ce matin-là il y avait du verglas; j’ai eu peur de sortir en voiture. (relation de compatibilité) Le texte impose une série de conditions: - la nécessité d’un contexte situationnel: « Inséré dans ce contexte extralinguistique (…), l’énoncé n’est plus seulement une phrase isolée, mais un fragment d’un tout plus vaste, le complément d’un cum-texte qui hausse l’énoncé au rang d’un texte » [8, p.7]. - les rapports entre texte et discours: « On appellera texte la structure formelle, grammaticale d’un discours. On appellera base du texte la structure sémantique sous-jacente au texte » [9, p.100]. - l’application des règles de cohérence est obligatoire pour qu’il y ait bonne formation de la base du texte. Ces règles comportent deux niveaux: le niveau de la base du texte linéaire (base propositionnelle) et le niveau de la macro-structure (de la signification globale). Si le niveau micro- structurel implique la successivité des phrases en séquences, le niveau macro-structurel représente la structure de signification globale, les relations entre séquences constitutives du texte [3, p.13]. La séquence suppose un changement de perspective spatio-temporelle et thématique. - la structure du texte doit prendre en compte le concept de texture: « organisation formelle d’un texte qui assure sa continuité sémantique, son isotopie » [M.A.K. Halliday, H. Riquaia, 1976 in 4, p.280]: l’intéractivité d’éléments qui assurent au discours son homogénéité, ou bien, d’une manière plus large, la récurrence de catégories sémiques thématiques ou figuratives [A.J.Greimas, J. Courtès, 1979 in 4, p. 280]. Si l’on lit une phrase comme: (3) Monsieur le Directeur, C MODÈLES THÉORIQUES • THEORETICAL MODELS Dialogos z 12/2005 80 Suite à l’incident qui a exposé mon collaborateur, M. Dupont, à notre chef des achats, celui-ci l’ayant mis à la porte pour insolence, je me permets de faire appel à votre indulgence. on peut penser que: - il y a un événement antérieur (« l’incident »). - il y aura un énoncé qui suivra. - il y a un rapport de subordination professionnelle entre l’énonciateur et le destinataire de ces propos. Les énoncés sont donc insérés dans un réseau de relations dont la pertinence donne leur sens. Cela se manifeste sur deux niveaux: - l’axe linéaire, où toute parole se réalise, - l’axe sémantique du signe linguistique: sa capacité de renvoyer à des faits et à des éléments extralinguistiques (objets du monde réel, relations entre objets, entre rapports sociaux, psychologiques, etc.), axes qui sont interdépendants et qui renvoient, rétroactivement, à du « déjà exprimé » ou, prospectivement, à de « l’encore à exprimer ». La phrase (3) représente une phrase typique de transition, un signe linguistique complexe qui a comme fonction principale de passer d’un thème discursif à un autre (son insolence – votre indulgence) et, en même temps, d’établir, de nouveau, l’interaction linguistique spécifique à tout échange communicatif: le destinataire doit réagir par rapport à « l’incident » et à la demande « d’indulgence ». Dans (3), il y a donc jonction entre ce qui s’est passé antérieurement (« suite à... »), et ce qui va se dire («appel à votre indulgence ») avec explication des faits passés dans (4) et (5): rétrospectivement (« leur différend » et « quoi qu’il en soit ») et ce qui pourra se passer (« disposé à »), prospectivement: (4) Leur différend provenait d’un désaccord sur la décision de l’achat d’un lot assez important de composants électroniques; tel est le motif de l’incident mais la raison est peut-être liée à une opposition de tempérament. (5) Quoi qu’il en soit, conscient de ses torts, M.Dupont est disposé à présenter ses excuses au Chef des achats afin que l’incident soit clos pour tous. Les phrases (3), (4) et (5) sont des fragments d’un entrelacement relationnel; elles sont complètes du point de vue syntaxique, mais elles doivent être insérées dans un « texte » pour être interprétées correctement. 1.1 Pour définir la linguistique textuelle, H.Rück [9] prend en considération une série d’éléments spécifiques à la GT dont nous ne prendrons en compte que quelques-uns (1.1.1. – 1.1.7.). 1.1.1 Le rapport entre le texte et la situation Selon la forme d’introduction d’un fait antérieur, la phrase (3) fait partie d’une lettre. Si le même fait était présenté au destinataire dans d’autres circonstances (en face à face ou au téléphone), sa présentation serait différente: (6) Vous êtes au courant du dernier incident entre notre chef des achats et M.Dupont ? Eh bien, je sollicite votre indulgence ! (7) Je vous appelle au sujet de l’incident entre notre chef des achats et M.Dupont pour solliciter votre indulgence. Dans cette acception, le texte est interprété comme « composant linguistique d’un acte de communication, fonctionnant au niveau communicatif » [Schmidt in 9, p. 14]. et la « signification textuelle » est le produit d’une série de directives actancielles données sur la base d’hypothèses implicites (présuppositions) dans une situation spatio-temporelle déterminée qui suppose la prise en compte des rôles des participants, de leurs objectifs de communication, du code de la langue et du canal de transmission. L’énoncé (8) est complet du point de vue syntaxique, mais son contenu d’information demande les compléments: toutefois (réfère à quoi ?), au déballage (de quels articles ?), conformes à mon ordre (quel en est le contenu ?). (8) Toutefois, en procédant au déballage, j’ai constaté que les articles n’étaient pas conformes à mon ordre. 1.1.2 Affinités sémantiques Les rapports textuels reposent sur un réseau de relations sémantiques et ne sont orientés qu’en second lieu par des éléments formels et fonctionnels. L’exemple (9) comporte une suite d’énoncés perçus comme étant interdépendants, et représente, donc, un texte; pourtant ce texte donne une impression de facticité: (9) Venu tardivement à la peinture, Paul Gauguin fut influencé par l’impressionnisme (1). L’impressionnisme est un courant artistique du XIX-ème siècle (2). Marqué par les voyages, le peintre s’intéresse particulièrement aux cultures primitives (3). Gauguin est allé à la Martinique (4). La peinture de Gauguin se caractérise par la simplicité et la force des formes et des couleurs de la Martinique (5). Il faut voir quels sont les éléments qui donnent cette impression: la reprise du nom impressionnisme de MODÈLES THÉORIQUES • THEORETICAL MODELS Dialogos z 12/2005 81 la phrase (2), l’article défini les à la place du possessif dans (3), la répétition du nom Gauguin au lieu du pronom il dans (4), la peinture de Gauguin, les couleurs de la Martinique, au lieu de sa peinture et les couleurs de ce pays (5). 1.1.3 Relations référentielles Après avoir abordé l’aspect sémantique de la textualité (cohérence textuelle reposant sur les relations préexistantes dans la réalité qu’elle reproduit), il faut discuter le problème des relations référentielles intratextuelles: les catégories « rétrospectives »: l’anaphore, et les catégories « prospectives »: la cataphore (v. 5.3.1.). Temps et constitution textuelle Les temps déterminent aussi le déroulement du texte de façon récurrentielle: ce sont des éléments fonctionnels d’un système intratextuel de signaux, par lequel le récepteur est amené à recevoir ce qui est signifié, selon une attitude déterminée. L’approche de Weinrich [11] à ce sujet représente une optique opérationnelle du point de vue didactique. Il s’agit de: temps commentatifs temps narratifs passé composé plus-que-parfait passé simple présent passé antérieur conditionnel futur imparfait La profondeur du texte narratif (arrière-plan / premier plan) est donnée par l’opposition de la paire temporelle imparfait / passé simple. La tentative d’expliquer les oppositions temporelles comme une paire des relations fonctionnelles à l’intérieur du système textuel est plus uploads/Management/ grammaire-du-texte-complet.pdf

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  • Publié le Jul 02, 2021
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