Pratiques Linguistique, littérature, didactique 157-158 | 2013 Théories et prat

Pratiques Linguistique, littérature, didactique 157-158 | 2013 Théories et pratiques des genres « Genre » ou « type » de discours ? Une dimension à explorer pour l’étude du langage dans des situations de travail Magali Husianycia Édition électronique URL : https://journals.openedition.org/pratiques/3796 DOI : 10.4000/pratiques.3796 ISSN : 2425-2042 Éditeur Centre de recherche sur les médiations (CREM) Édition imprimée Date de publication : 1 juin 2013 Pagination : 133-152 Référence électronique Magali Husianycia, « « Genre » ou « type » de discours ? », Pratiques [En ligne], 157-158 | 2013, mis en ligne le 18 décembre 2017, consulté le 21 septembre 2021. URL : http://journals.openedition.org/ pratiques/3796 ; DOI : https://doi.org/10.4000/pratiques.3796 © Tous droits réservés Dans chaque organisation, qu’elle soit publique ou privée, nous rencontrons différents types de communication et de discours face auxquels nous devons nous adapter, tant au niveau de la gestuelle qu’au niveau linguistique. Chaque discours a son faisceau de normes, son vocabulaire, son registre de langue (familier, cou- rant, soutenu, technique), une situation précise, des interlocuteurs changeants, etc. Le discours se caractériserait alors par des choix énonciatifs et linguistiques. Quels sont les traits linguistiques (lexical, syntaxique, sémantique, pragmatique) caractéristiques des discours et quels traits permettent de mesurer les proximités et les distances entre les discours ? Est-ce qu’un discours peut appartenir entière- ment à un « genre » ou un « type » ou comporte-t-il des parties relevant chacune d’autres « genres » ou d’autres « types » ? La recherche que nous avons entreprise tente d’examiner les traits linguistiques et extralinguistiques caractéristiques dé- terminant des différences et des similitudes entre les discours et de constituer des ensembles de discours. La problématique de cette recherche consistait à mettre en lumière l’existence de types de discours au travail, à savoir le « genre professionnel ». Ce travail s’est appuyé sur les recherches de M. Lacoste (1995 et 2005 [2001]) qui développe trois notions désignant trois types de parole reflétant trois rapports entre le langage et l’activité de travail : « parole dans le travail », « parole sur le travail » et « parole comme travail ». Nous avons privilégié ce classement parce qu’il s’inscrit dans le champ de la sociolinguistique et parce qu’il a été défini à partir d’études sur des corpus recueillis dans des diverses organisations françaises. Toutefois, cette clas- sification n’a pas été développée pour caractériser des types de discours et aucune analyse linguistique n’a, jusqu’à présent, conforté cette classification. Nous avons donc recherché les critères extralinguistiques et linguistiques qui permet- traient de déterminer des types de discours variés, et ce, en nous inspirant de cette catégorisation correspondant à trois rapports entre langage et activité. Il s’agit, dans cet article, de nous positionner sur les notions de « genre » et de « type » en lien avec notre problématique de recherche, la terminologie pouvant 133 PRATIQUES N° 157/158, Juin 2013 « Genre » ou « type » de discours ? Une dimension à explorer pour l’étude du langage dans des situations de travail Magali Husianycia ATILF – Université de Lorraine être employée différemment selon les recherches. La mise en perspective de diffé- rentes études sur la problématique du « genre » et du « type » en littérature et dans le domaine « langage et travail » nous ont amenée à nommer « genre », les discours écrits et oraux en situation de travail. Cette notion de « genre professionnel », nous la retrouvons dans les travaux du domaine langage et travail. Le genre profession- nel que nous étudions est le « discours en situation de travail » qui comprend à la fois des types d’écrits professionnels et des types de discours oraux. Nous avons montré qu’au sein du genre professionnel, il existait trois grands types linguisti- ques (que nous avons nommé langage expositif, langage de co-action, langage péri-professionnel) en lien avec trois types de discours déterminés à partir de cri- tères linguistiques, interactionnels et extralinguistiques. Chaque type linguisti- que met l’accent sur les caractéristiques linguistiques majeures d’un type de dis- cours : — Le type linguistique « langage expositif » a déterminé le type de discours « langage sur le travail ». Lors des débriefings, les personnes mettent en œuvre un langage sur le travail qui leur permet de faire le point sur ce qui a été réalisé. Nous parlons d’exposé (ou d’exposition) et de description des activités et des actions réalisées et à réaliser. Ces discours sont soumis à des mécanismes de planification, car ils sont préparés à l’avance par les collaborateurs. Ces discours sont également marqués par des actions à plusieurs, c’est-à-dire une juxtaposition d’actions indi- viduelles. Les critères linguistiques récurrents sont les énoncés-titres, les formes bi-nominales, les marqueurs de structurations, les organisateurs énumératifs, les pronoms-sujets « nous » et les adverbes de cadre. — Le « langage de co-action » a déterminé le « langage comme travail ». Lors- que les personnes travaillent en collaboration pour la réalisation d’un projet, elles utilisent un discours qui leur permet la mise en œuvre d’une activité et d’une tâche spécifique. Nous parlons d’élaboration, de construction. Dans ces discours, peu soumis à des mécanismes de planification, nous relevons un degré d’interactivité assez élevé, une activité fortement engageante et des actions conjointes, les colla- borateurs ayant un enjeu commun. Nous relevons un certain nombre de déictiques, des énallage de personne (tu à valeur de on), des énonciations conjointes, ainsi qu’un grand nombre de reprises et de reformulations. — Le « langage péri-professionnel » a déterminé le « langage dans le travail ». Dans le cadre d’une activité professionnelle, d’autres activités langagières ne sont pas directement centrées sur l’activité de travail. Ces échanges portent une fonc- tion phatique et des enjeux faiblement engageants. Nous remarquons de nombreu- ses narrations et de fréquentes ruptures humoristiques. Afin de mener à bien notre étude de catégorisation des discours en situation de travail, il nous a semblé indispensable d’analyser les récentes études mettant en exergue la notion de « genre » et/ou de « type ». Les études ont pour objectif soit de rechercher explicitement des genres ou des types (de textes ou de discours), soit de rechercher des modes de classification des genres et/ou des types, soit de s’inté- resser à la variation des textes et des discours. Les auteurs n’admettent pas de défi- nition précise et commune. Nous avons donc été confrontée à des critères de clas- sement hétérogènes et des imprécisions dans la terminologie. D’ailleurs, dans le domaine de la littérature, J.-M. Schaeffer affirmait : « De tous les champs dans les- quels s’ébat la théorie littéraire, celui des genres est sans nul doute un de ceux où la confusion est la plus grande. » (In Théorie des genres de Genette, G., Jauss H. R., Schaeffer J.- M., Scholes R., Stempel W. D., Viëtor K., 1986 : 16). 134 Le genre apparaît tantôt comme une étiquette, tantôt comme un système de nor- mes. Par ailleurs, il n’existe pas d’inventaire des genres et il n’y a pas véritable- ment d’accord entre les chercheurs sur la définition des notions de « type » et de « genre ». La diversité des points de vue a donc rendu difficile notre travail de défi- nition et notre positionnement. La notion de « genre de discours » est traditionnel- lement employée pour classer les textes littéraires (poésie, roman, théâtre, essai, etc.). Quant à la notion de « types de discours », elle nomme des classes de dis- cours et est parfois opposée à « genre de discours » (comme dans les travaux de J.-P. Bronckart, 1997). Nous remarquons qu’il n’y a pas de normes fixes et que les normes caractérisant les genres ou les types sont établies à partir d’un ensemble de caractéristiques internes (linguistiques) et externes (extralinguistiques). 1. Les recherches pour une typologie textuelle Plusieurs linguistes ont cherché à typologiser les textes écrits. La notion de « typologies textuelles » a été proposée par E. Werlich (1975), qui distingue cinq types de textes : descriptif, narratif, expositif, argumentatif et instructif. J.-M. Adam (1987a) s’appuie sur ces typologies et propose sept types textuels : ré- cit, description, argumentation, exposition, injonction-instruction, conversation et poème. Cependant, ces typologies ne lui semblent pas rendre compte de l’hété- rogénéité des textes : « À ce niveau de généralité — que nous avons adopté dans nos travaux antérieurs —, nous avons affaire à une typologie trop globale qui ne tient pas assez compte de l’hétérogénéité des textes eux-mêmes. » (1987b : 55- 56). Dès lors, J.-M. Adam développe une typologie séquentielle, afin de rendre compte de la diversité des productions textuelles et discursives (1992). Il rem- place ainsi le concept de « typologie des textes » par un modèle de structure com- positionnelle des textes. Le découpage des textes en séquences lui permet d’obser- ver des « faits de régularité » et d’analyser les différents éléments linguistiques qui composent le texte, ainsi que l’articulation de ces éléments. Les structures séquentielles définies par J.-M. Adam correspondraient d’une certaine manière aux « structures compositionnelles » dont parle M. Bakhtine uploads/Management/ pratiques-3796.pdf

  • 15
  • 0
  • 0
Afficher les détails des licences
Licence et utilisation
Gratuit pour un usage personnel Attribution requise
Partager
  • Détails
  • Publié le Nov 02, 2022
  • Catégorie Management
  • Langue French
  • Taille du fichier 0.2240MB