Questions de communication Olivier Arifon Citer ce document / Cite this documen
Questions de communication Olivier Arifon Citer ce document / Cite this document : Études chinoises Arifon Olivier. Questions de communication. In: Études chinoises, hors-série 2010. Étudier et enseigner la Chine. pp. 361-375; doi : https://doi.org/10.3406/etchi.2010.987 https://www.persee.fr/doc/etchi_0755-5857_2010_hos_1_1_987 Fichier pdf généré le 09/11/2019 Questions de communication Olivier Arifon Chacun de nous, chercheur ou citoyen, expérimente chaque jour la société de communication où toute information est considérée comme un messa- ge légitime et important. Cependant, l’étude et l’analyse de la construction des messages et des codes de réception de ces derniers doivent constam- ment être menées. Dans notre espace mondialisé et numérisé, où l’autre et sa culture sont devenus si proches, il s’agit de comprendre le sens et les contenus symboliques et culturels des messages. Si les sciences humaines et sociales, notamment la sociologie, ont une réelle vigueur en Chine et dans les études chinoises, les sciences de l’infor- mation et de la communication (SIC) selon la terminologie française, propo- sent des résultats sur ces thèmes encore modestes en volume et en qualité. En Chine, cette discipline étudie surtout la publicité, la communication institu- tionnelle, l’information scientifique et technique ou les médias. En France, les SIC ont une grande diversité d’objets : médias, journalisme, muséologie, anthropologie de la communication, médiation culturelle, bibliothèques, in- telligence économique, communication des organisations et usages et effets d’Internet. Les méthodes sont, elles aussi, très diverses : empirisme, enquêtes qualitatives ou de terrain, structuralisme, sémiologie, linguistique, interaction- nisme… Au même titre que des travaux de sociologie 1, ou sur le droit et la dé- mocratie 2, les études chinoises sur les processus et dispositifs d’infor- 1 Laurence Roulleau-Berger, Guo Yuhua, Li Peilin et Liu Shiding (dir.), La Nouvelle sociologie chinoise, Paris : CNRS Editions, 2008 et Jean-Louis Rocca (dir.), La Société chinoise vue par ses sociologues, Paris : Presses de Sciences Po, 2008. 2 Mireille Delmas-Marty et Pierre-Etienne Will (dir.), La Chine et la démocratie, études chinoises, hors-série 2010 Olivier Arifon Questions de communication 362 362 mation et de communication ont à gagner d’une mise en perspective et d’un contact avec la France. Les échanges entre les deux communautés de chercheurs permettent l’étude et les comparaisons entre les théories et les modèles développés. Avec des référents issus de l’anthropologie de la communication et de l’interactionnisme 3, cet article propose de présenter un bref historique et les modalités des SIC en France et en Chine. Le but est double : présenter l’existant et ses caractéristiques et exposer l’intérêt à collaborer avec des collègues et institutions chinoises, tant en sciences de l’information et de la communication qu’en sinologie. Cette présentation s’appuie sur des exemples extraits du numéro 55 de la revue Hermès, l’une des principales revues scientifiques fran- çaises des SIC, consacré à la « Société civile et Internet en Chine et Asie orientale », (décembre 2009) 4. Cette réflexion est aussi nourrie par une coopération conduite depuis 2006 avec des collègues de la China Foreign Affairs University (Waijiao xueyuan 外交學院) et de la Communication University of China (Zhongguo chuanmei daxue 中國傳 媒大學), toutes deux basées à Pékin. Retraçons d’abord les origines des SIC en France et en Chine, influencées l’une et l’autre mais à des périodes différentes par les écoles anglo-saxonnes. L’exposé se poursuit par des exemples de ter- rain. Il s’achève par une réflexion sur la collaboration franco-chinoise. Limites et frontières des SIC en Chine et en France Le cas de états-unis Pour des raisons historiques, commençons par les États-Unis. Les études de communication y ont trois origines : la rhétorique, qui s’est enrichie de la lin- guistique (dès le xviiie siècle), la formation universitaire des journalistes (à par- tir de 1908) et enfin l’enseignement sur les médias (dans l’après-guerre), qui Paris : Fayard, 2007. 3 David Le Breton, L’Interactionnisme symbolique, Paris : PUF, 2004 et Yves Winkin, Anthropologie de la communication, Paris : Seuil, 2001. Olivier Arifon Questions de communication 363 363 4 Fondée en 1988, cette revue est rattachée à l’Institut des sciences de la communication du CNRS (ISCC) dirigé par Dominique Wolton. Voir : www. larevuehermes.cnrs.fr. fait suite à la propagande et au développement de la radio et de la télévision 5. La France et la Chine ont, bien entendu, d’autres filiations et d’autres histoires. Aux États-Unis, les études sur les médias et la communication et celles sur la documentation et l’information (documentation science, information science) sont historiquement et institutionnellement dissociées. En d’autres termes, la réunion entre études sur l’information et sur la communication n’existe pas sous cette forme et de façon plus générale dans le monde anglo-saxon. Les départements de communication, différents de ceux de sociologie, d’histoire ou de sciences politiques regroupent plusieurs disciplines, avec pour consé- quence, un plus fort ancrage dans les sciences sociales et une faible présence des approches littéraires. On retrouve toutefois des tendances communes à ces trois pays, dont les plus évidentes sont la communication comme axe de formation des journalistes et l’analyse des médias et de la communication de masse. Les origines des SIC en France. En France, les SIC sont officiellement nées lors de la création, en 1972, d’une section du CNU, actuellement la 71e. Elle est le fruit de la rencontre entre études littéraires et études journalistiques et surtout de la nécessité de développer des formations aux techniques de communication. À cela, deux raisons : les fondateurs, qui avaient reçu une formation littéraire, ont contribué à structurer un champ autonome de recherche au moment de la création des Instituts universitaires de technologie. Ainsi, les SIC sont marquées par la nécessité de former des professionnels de l’information (documentalistes) et de la communication (publicitaires et chargés de com- munication) maîtrisant techniques et outils. L’émancipation prendra vingt ans. Dès la création de la 71e section du CNU, information et communi- cation sont liées, ce qui constitue une particularité française. En 2008, le CNU présente officiellement la discipline de la manière suivante : Les sciences de l’information et de la communication (SIC) recouvrent particulièrement : A. Les études sur les notions d’information et de communication, sur leurs relations, sur la nature des phénomènes et des pratiques ainsi désignés, de même que les différentes approches scientifiques qui s’y appliquent. 5 Yves Winkin, « De quelques origines américaines des sciences de la communication », Hermès, 2004-38, p. 103-109. B. L’étude, d’une part, des processus, des productions et des usages de l’information et de la communication, d’autre part, de la conception et de la réception de celles-ci. Ainsi que l’étude des processus de médiation et de médiatisation. C. L’étude des acteurs, individuels et institutionnels, de l’information et de la communication, l’étude des professionnels (dont notamment les journa- listes) et de leurs pratiques. D. L’étude de l’information, de son contenu, de ses systèmes sous l’angle des représentations, des significations ou des pratiques associées. E. L’étude des médias de communication et des industries culturelles sous leurs divers aspects. 6 Cette définition du champ doit être complétée par la spécificité de l’approche : Est du ressort de la 71e section, l’étude des processus d’information ou de communication relevant d’actions contextualisées, finalisées, prenant appui sur des techniques, sur des dispositifs et participant des médiations sociales et culturelles. Sont également pris en compte les travaux dévelop- pant une approche communicationnelle de phénomènes eux- mêmes non communicationnels. 7 On regroupe aujourd’hui l’approche des sciences de l’information et de la communication en cinq champs : sémiologie, pragmatique, psy- chologie, questions technologiques et rapport aux images. Ceci donne une faible place à l’information/documentation qui se regroupe autour des bi- bliothèques, des archives et de leur gestion ; on retrouve ici la dichotomie présente aux États-Unis comme en Chine. La légitimité des SIC comme discipline se pose encore actuelle- ment. Pourtant, il nous semble que le fait d’étudier des objets et processus sous l’angle de la communication a bien une cohérence et une légitimité. Les chercheurs en SIC, à l’origine issus de filières très diverses, suivent aujourd’hui des cursus centrés sur l’information et la communication tout en 6 Source : http://www.cpcnu.fr/section.htm?numeroSection=71, consulté le 12 janvier 2010 7 Idem. assumant les emprunts à (et les hybridations avec) d’autres disciplines plus anciennes comme l’histoire ou la sociologie. En France comme dans les autres pays latins, les SIC sont bien implantées dans les études portant sur les médias et les processus de communication, sans toutefois en revendiquer le monopole. Il reste plus étonnant de voire des littéraires ou des urbanis- tes s’emparer de ces thèmes. Enfin, de nombreuses recherches françaises abordent les médias et la communication en s’inscrivant dans différentes disciplines (économie, histoire, sciences politiques et sociologie) 8. La comparaison entre SIC au niveau international reste un exercice difficile et délicat ; du fait du caractère exceptionnel du cas français, mais aussi du fait d’influences croisées d’autres disciplines. On touche là aux limites et aux intérêts de l’approche comme cela est souvent le cas dans l’approche comparatiste. Les origines des SIC en Chine Copiées du modèle américain, les SIC en Chine sont séparées entre com- munication d’une part et sciences de l’information (gestion de l’informa- tion et des bibliothèques) d’autre part 9. La communication s’est dévelop- uploads/Management/ questions-de-communication.pdf
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- Publié le Sep 26, 2021
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