Le quali-collaboratif, au-delà du buzzword. Mieux comprendre ce que le collabor
Le quali-collaboratif, au-delà du buzzword. Mieux comprendre ce que le collaboratif change pour les études qualitatives, et à quelles conditions. Depuis le mitan des années 2000, une nouvelle façon de concevoir la recherche consommateur qualitative a émergé autour de nouveaux acteurs. Nous partions pour notre part d’une intuition simple : ce que l’on appelait alors le web 2.0 serait une occasion unique de renouveler notre façon d’entrer en relation avec nos contemporains, consommateurs, citoyens, salariés, professionnels. Pour en savoir plus sur leurs vies. Pour les engager différemment, en leur parlant comme à des participants, des acteurs de leur propre vie et de celle des marques, et plus simplement des consommateurs passifs. Pour les faire passer du statut d’enquêtés à celui d’inspirateurs. Pour les mettre en situation de coproduire le sens des marques, ce qu’ils feront de toute façon dans leur vraie vie de consommateurs. Quel bilan – provisoire – en tirer aujourd’hui ? Est-ce à une vraie révolution dans nos mentalités de spécialistes de l’écoute et de la compréhension des gens que nous devons procéder ? Face à la multiplication, qui quelquefois peut sembler anarchique, des techniques et des intervenants utilisant ce qui devient le label « collaboratif », quelles règles simples se donner pour évaluer ce qu’est une approche d’étude qualitative collaborative efficace – c’est-à-dire fiable, engagée, et suffisamment différente des techniques classiques pour apporter quelque chose de plus ou au moins d’original ? L’objet de cette contribution est d’essayer de répondre à ces quelques questions. Pour prendre un peu de recul sur nos pratiques. Pour aider chacun à mieux cerner ce que signifie cette nouvelle donne. Et, surtout, à comprendre comment en tirer parti au mieux pour faire avancer la cause de l’écoute, de la connaissance et en définitive de l’intégration du consommateur dans les entreprises. En redéfinissant ce qu’une approche d’étude collaborative peut apporter de différent ou de plus. Les conditions qu’elle doit remplir pour le faire. Et les compétences requises pour ne pas passer à côté de ce que les gens nous disent de plus ou nous disent mieux. 2014 Pourquoi adopter de nouvelles approches d’étude et de nouvelles pratiques qualitatives si c’est pour obtenir les mêmes résultats qu’avant ? C’est la question que se posent encore – et légiti- mement - beaucoup de praticiens de la recherche consommateur ou d’opinion, il n’y a qu’à faire un tour sur certaines discussions sur LinkedIn pour s’en convaincre. Alors, qu’attendre de plus ou de différent des approches qualitatives online et notamment des plateformes quali-collaboratives qui viennent aujourd’hui diversifier et complexifier l’offre, notamment dans le domaine spécifique de l’exploratoire et de la recherche d’insights ? Quatre champs de progrès nous semblent particulièrement féconds. À l’origine de l’étymologie du mot blog, il y a – qui s’en souvient encore – le mot web-log. Un web-log, c’était un journal intime sur le web – une façon nouvelle de partager sa vie avec qui le voulait bien, sans se rencontrer physiquement. C’est à l’évidence le deuxième champ de progrès que permet d’explorer ce nouveau type d’approches qualitatives. En effet : se livrer au regard des autres, c’est difficile, même si on a envie de partager ses expériences de vie. Définir ce qu’on peut attendre du qualitatif collaboratif, c’est comprendre ce qu’il peut donner de plus. C’est quelquefois une critique faite au qualitatif online, particulièrement quand il prend la forme du forum/blog, que de privilégier une démarche rationnelle, de la part du consommateur. A l’inverse d’une démarche offline qui donnerait plus de place à l’expression des émotions, par exemple dans le body language qui par définition est invisible, quand le participant est à l’abri des regards de ses pairs et du modérateur, derrière son écran. Mais en réalité, examiner de près cette objection, c’est au contraire se donner l’opportunité de repenser la relation entre émotionnel et rationnel dans les études qualitatives, et de créer les conditions de s’approcher un peu plus, via ce qu’il y a de spécifique dans l’expression sur le web, de la vérité des gens. En effet, donner au consommateur un espace d’expression qui lui soit propre, sécurisé, anonymisé et généreux en temps, c’est lui donner la possibilité d’articuler comme il l’entend réaction émotionnelle et pensée rationnelle – en tout cas une occasion de le faire qu’il ne rencontre que rarement de cette façon. L’opposition émotionnelle/rationnelle peut alors apparaître, sur des sujets d’opinion mais aussi marketing, pour ce qu’elle est : artificielle. Aller au fond d’un sujet, vraiment au fond, c’est pouvoir exprimer son coup de gueule ou son coup de foudre ; c’est aussi pouvoir, en deuxième, troisième ou quatrième instance, articuler son attachement, son intérêt, sa déception. Avec la force d’évocation de l’écrit ; avec le recul de l’écrit. 1 2 Au-delà du débat rationnel / émotionnel Donner le droit à l’impudeur Le quali-collaboratif, au-delà du buzzword Mieux comprendre ce que le collaboratif change pour les études qualitatives, et à quelles conditions. Car en définitive, quelle autre utilité pour ces démarches quali-collaboratives, que de détecter des insights plus vrais et donc plus puissants ? Ce qui ne veut pas dire, du reste, qu’une utilisation confirma- toire de ce type d’approche n’a pas sa pertinence – pour des raisons, notamment, de coûts et de vitesse d’exécution. Mais réussir à créer une intimité impudique et à faire travailler les gens seuls ensemble, c’est avant tout se donner les moyens d’accéder si ce n’est à plus de vérité, du moins à plus d’humain et surtout, pour nous autres marketeurs, d’humain utile : puisque c’est une façon de réinventer dans le territoire des études, l’articulation parole/secret et individu/collectif qui est au cœur même de l’humain. Car, et c’est sans aucun doute l’apport majeur des approches quali-collaboratives, parler en ligne avec ses pairs et celui qui mène l’étude mais qui est tout sauf un deus ex machina, c’est accéder au petit miracle d’être seul avec les autres. Alphonse Allais voulait construire les villes à la campagne, le web permet d’inventer une autre façon de se parler conciliant lui aussi le meilleur des deux mondes : l’intimité et le respect de l’individu que permettent l’anonymat, l’asynchronicité et la délocalisation du terrain – chacun chez soi, chacun son rythme ; la démarche communautaire qui permet de profiter du meilleur du collectif – tous ensemble pour avancer dans la discussion et parfois le conflit, mais en conservant toujours la liberté d’être soi, entièrement, sans compromis. Avec un bénéfice évident pour celui qui cherche à comprendre, derrière son écran, ce que pense ou ressent un groupe : la certitude d’obtenir des insights plus solides et plus profonds parce que partagés par tous à partir de récits individuels. 3 4 C’est pourquoi partager son expérience sans se livrer au regard est pour les consom- mateurs qui participent à une étude quali-collaborative une opportunité qu’ils saisissent le plus souvent à bras-le-corps pour parler, pour en dire plus en donnant plus. Et plus le sujet est délicat, plus le deal entre pairs – et avec le modérateur – est gagnant-gagnant. Puisque la relative impudeur induite par l’outil même – mettre chacun en situation de parler de ses difficultés à faire manger ses enfants, à gérer une famille sans modèle parental clair, à traiter de son éja- culation précoce, à assumer de voir son visage vieillir dans la glace – prend un sens positif : c’est le prix à payer pour comprendre comment font les autres, et obtenir leur aide. Mettre chacun en situation d’être seul, ensemble Rechercher la profondeur d’insight Pourquoi une étude online ressemblerait-elle à une étude, online ? Le digital, parce qu’il est encore nouveau dans cet univers, nous offre une opportunité unique de changer la donne et de surprendre le consommateur, pour le meilleur. Parce qu’il rebat les cartes de l’univers de référence des études qualitatives, y compris aux yeux des consommateurs eux-mêmes. Dans un monde ultra-marketé dans lequel tout le monde a plus ou moins une idée ou une représentation de ce qu’est une étude, proposer à un consommateur de participer à une investigation, c’est lui proposer autre chose. Et d’abord une autre forme, qui pour le mettre en condition d’en dire plus et mieux doit être à la fois familière et différente. Et, surtout, doit adopter des codes qui le sortent du cadre mental « enquêteur / enquêté », « modérateur / répondant », « institution / individu ». Les codes du blog d’auteur ; les codes du forum media ; les codes des réseaux sociaux : peu importe, du moment qu’ils ne sont pas des codes d’études. Il est une fascination de la technique, qui n’a fait que s’amplifier par le développement des nouvelles technologies. Il est vrai que la multiplication à l’infini des options qu’elles offrent, et surtout le sentiment d’accélération continue qu’elles provoquent, peuvent donner le vertige à la personne la plus raisonnable. Pourquoi ne pas exploiter, en temps réel selon l’expression consacrée, toutes ces ouvertures techno- logiques successives pour améliorer nos plateformes et rendre l’expérience de partage et d’expression toujours plus étonnante pour nos participants ? Fils RSS, webcams, réalité augmentée… uploads/Marketing/ freethinking-qualicollaboratif-052014.pdf
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- Publié le Mar 24, 2022
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