Data marketing – marketer, c’est prévoir http://www.lenouveleconomiste.fr/lesdo
Data marketing – marketer, c’est prévoir http://www.lenouveleconomiste.fr/lesdossiers/datamarketingmarketercestprevoir25158/ 1/6 A Data marketing – marketer, c’est prévoir La vraie valeur ajoutée de la donnée ne réside plus seulement dans le ciblage, mais dans la prédictibilité des comportements des consommateurs Par Lisa Mélia nnée 2012, pendant la campagne présidentielle américaine, Mitt Romney décide d’utiliser un logiciel spécialisé dans l’analyse des bases de données pour identifier les riches donateurs pro républicains potentiels. L’outil aurait décortiqué la situation économique de 2 millions de familles autour de San Francisco. Résultat: le candidat républicain récolte plus de 350 000 dollars de donations sur un terrain traditionnellement acquis aux démocrates. Ou comment le big data se met au service du marketing politique. On définit généralement le big data comme le flot d’informations générées chaque seconde sur Internet par des individus, des organisations, des entreprises. Un véritable “tsunami d’informations”, résume Ginni Rometty, CEO d’IBM, qui se mesure en exaoctets, c’est à dire en milliards de gigaoctets. Les enjeux autour des “méga données”, comme on les appelle en français, s’articulent autour des cinq V: volume (le nombre de données sera multiplié par 300 d’ici 2020, selon le Crédit Suisse), vélocité (gestion en temps réel), variété (elles viennent aussi bien de vidéos, de réseaux sociaux ou encore d’e mails), véracité (grâce au développement d’outils pour garantir la fiabilité de la data), et enfin valeur. Clive Humby, le créateur des cartes de fidélité du distributeur britannique Tesco, parle même d’un “nouvel or noir”, qu’il faut collecter, enrichir et affiner, et dont le potentiel économique semble colossal, notamment du point de vue du marketing. Selon l’agence Makezi, auteur d’un livre blanc sur le data marketing, 84 % des directeurs marketing français considèrent l’utilisation des données personnelles des clients et des clients potentiels comme une opportunité pour toucher de nouvelles cibles. “Il s’agit d’un mouvement de fond, confirme Catherine Michaud, présidente de la délégation customer marketing de l’Association des agences conseil en communication AACC). ( Pour les acteurs du marketing, la donnée représente désormais un Eldorado.” La loi des algorithmes Géolocalisation, “like”, tweet, Instagram… Jamais les particuliers n’ont laissé autant de traces sur le Web. Quel intérêt pour le marketing ? “Nous avons développé une approche pour exploiter finement les données big data et avons lancé un projet pilote à partir des données CRM du site Internet d’une entreprise, illustre Éric Hazan, directeur associé chez McKinsey. Nous avons établi deux cents critères pour segmenter les visiteurs et les acheteurs qui avaient visité ce site, et avons identifié 25 % des consommateurs comme ayant une propension à acheter plus importante. Nous nous sommes demandé ce qui se passerait si nous allouions l’investissement en display advertising de cette entreprise en ciblant ces 25 %. Nous avons réalisé une simulation qui montrait des retours sur investissement de l’ordre de 140 %. L’expérience réelle, menée sur six semaines, a généré un retour sur investissement de 250 %.” Car c’est un fait, une grande partie de l’investissement média est devenue “ro iste”, c’est à dire que les annonceurs ont besoin d’un retour sur investissement. Et c’est désormais la donnée qui permet de remplir cet objectif et d’en évaluer la réussite. D’où viennent les données ? D’abord de sources internes à l’entreprise. Itesoft propose par exemple des solutions pour automatiser les interactions des sociétés avec leurs clients et leurs fournisseurs. “Nous avons commencé avec le papier, puis le fax, l’e mail et désormais le Web, détaille Philippe Delanghe, directeur marketing d’Itesoft. Nous travaillons aujourd’hui à l’intégration du SMS, de la voix ou encore des réseaux sociaux.” La collecte de ces informations permet un premier niveau de compréhension. Par exemple, une mutuelle peut repérer la présence d’un internaute sur son site. S’il ouvre un formulaire d’inscription, mais qu’il ne va pas au bout du processus, la société reçoit une alerte qui lui permet éventuellement de le recontacter pour tenter de conclure la transaction. Si plusieurs internautes abandonnent au même point, le service marketing saura qu’un point de blocage rebute les clients potentiels et devra apporter des solutions. “Et quand on mélange ces données internes avec des données externes, la lecture des données s’enrichit”, estime Philippe Delanghe. ^ Data marketing – marketer, c’est prévoir En d’autres termes, la data permet non seulement de déterminer l’impact du marketing sur l’acte d’achat, mais elle ouvre également la voie à des stratégies de segmentation, de ciblage et de prédictibilité, puisque le “marketing de la donnée” repose sur des algorithmes qui repèrent et isolent les interprétations et les liens invisibles à l’œil nu. “La vraie valeur ajoutée des données, c’est la prédictibilité”, assure Philippe Delanghe. Amazon, dont le business model repose sur la collecte de data, connaît si bien ses clients qu’il serait capable de leur envoyer des livres avant même qu’ils ne passent commande. Sans se tromper, bien sûr, soutient Jeff Bezos, le PDG du groupe qui vient d’enregistrer le brevet d’un système de livraison qui anticipe les commandes. “Il y a un changement de culture au sein des entreprises, affirme de son côté Nicolas Beauchesne, directeur général et fondateur de l’agence FiftyFive. Le chiffre, les nombres, les maths et les statistiques prennent de plus en plus de place dans les sociétés. Ils permettent plus de rationalité, sans étouffer la créativité.” Ciblage ou flicage ? L’une des sources du big data les plus prometteuses, ce sont les réseaux sociaux, Facebook et Twitter en tête. “En France, les internautes fréquentent en moyenne 2,9 réseaux sociaux”, affirme Éric Hazan. Ils regroupent un vivier d’informations très diverses : celles renseignées directement par l’utilisateur – comme son nom, son âge, ses préférences –, mais aussi celles déduites de ses activités, ses “j’aime”, ses abonnements, ses jeux… “Facebook met ces informations à disposition des annonceurs, explique Axel Prévot, CMO chez SocialMoov. Aujourd’hui, je peux réaliser une campagne qui ne cible que les hommes de 30 ans, qui vivent à Paris, aiment le football et les films de Quentin Tarantino, et sont en couple. Les outils des réseaux sociaux nous permettent de créer des stratégies publicitaires beaucoup plus pertinentes.” Facebook, notamment, propose plusieurs outils qui révolutionnent le marketing digital. D’abord, un “pixel de tracking” qui suit l’utilisateur dans sa navigation Web et sur tous les supports qu’il utilise, ordinateur, tablette ou smartphone. “Par exemple, nous travaillons pour Deezer, indique Axel Prévot. Si un utilisateur clique sur la publicité qu’il voit sur Facebook et qu’il souhaite souscrire un abonnement sur le site, mais qu’il se trouve dans le métro, il n’ira peutêtre pas au bout de la transaction. Par contre, il réalisera son achat, le soir, sur son PC. Du point de vue de l’annonceur, savoir que la publicité était à l’origine de l’achat, même à plusieurs heures d’intervalle, nous montre l’impact réel de notre campagne.” Ensuite, Facebook propose des algorithmes dits “lookalike audience”. Ils agrègent les données sur un groupe d’acheteurs et repèrent les profils similaires qui sont susceptibles d’être intéressés par le même produit. Le réseau social au milliard d’utilisateurs s’est même http://www.lenouveleconomiste.fr/lesdossiers/datamarketingmarketercestprevoir25158/ 2/6 Data marketing – marketer, c’est prévoir associé avec des géants de la data comme Acxiom et Datalogics, qui agrègent de la donnée en dehors du Web, par exemple via les cartes de fidélité des supermarchés. La donnée estelle comportementale ou personnelle ? Devant l’ampleur des données disponibles, et des possibilités de filtrage et d’agrégation, il se pose avec de plus en plus d’acuité la question de la confidentialité des données personnelles. Les annonceurs peuventils collecter, conserver et utiliser des informations sur leurs utilisateurs ? “Le nerf de la guerre, c’est l’exploitation, atteste Catherine Michaud. La société, mais aussi les entreprises et les agences qui les conseillent, ont une vraie responsabilité sur cette question.” La CNIL et le CNNum se penchent d’ailleurs sur le sujet et organisent des concertations nationales, dont les résultats devront éclairer le législateur. “L’acceptation par défaut est de plus en plus remise en cause, soutient Catherine Michaud. Il faut désormais informer de manière claire le consommateur, poser la question.” En matière d’eprivacy, la règle n’est pas “qui ne dit mot, consent”. À la racine du problème, la notion de collecte de données, très ambivalente. Les acteurs jurent tous qu’ils ne récupèrent pas des données personnelles, nominatives et individualisées, mais des données comportementales. “Néanmoins, l’exploitation se rapproche beaucoup de la donnée personnelle”, rétorquetelle. Globalement, les professionnels restent vigilants, assure Hugo Loriot, directeur médias chez FiftyFive. Ils ne veulent pas tuer la poule aux œufs d’or : “nous développons des modèles qui laissent le choix aux internautes d’accepter ou non d’être suivis, et nous sommes très engagés sur ce sujet. Les entreprises ont conscience qu’elles doivent respecter cela pour pérenniser le modèle”. Mais attention à ne pas se lancer non plus dans une chasse aux sorcières. Le data marketing est un système gagnantgagnant : des taux de conversion plus importants pour les annonceurs, des publicités mieux ciblées pour les utilisateurs. “Il faut trouver le bon dosage, résume Catherine Michaud. L’interdiction totale serait contre- productive, tout autant que l’autorisation sans limites.” Multicanal, un jeu de miroir D’après le cabinet IDC, en 2013, le digital représentait 10 uploads/Marketing/data-marketing-marketer-c-x27-est-prevoir-09-8-2021.pdf