LES GÉNIES DE LA SCIENCE N°18 Trimestriel Février 2004 - Mai 2004 FRANCE METRO
LES GÉNIES DE LA SCIENCE N°18 Trimestriel Février 2004 - Mai 2004 FRANCE METRO 5,95 €, DOM 5,95 €, BEL 6,77 €, CAN 8,75 $, CH 10,80 FS, LUX 6,77 €, PORT. CONT. 6,48 €, MAR 50 MAD, MAU7,62 € E - RD FRANCE METRO 5,95 €, DOM 5,95 €, BEL 6,77 €, CAN 8,75 $, CH 10,80 FS, LUX 6,77 €, PORT. CONT. 6,48 €, MAR 50 MAD, MAU7,62 € L’arbre de vie © POUR LA SCIENCE E n 1859, après 20 années d’études minutieuses et de réflexions, Darwin publie L’origine des espèces. Cette œuvre non seulement bouleverse les sciences du vivant, mais révèle aussi à l’homme son humble place parmi les êtres vivants. Si l’idée d’évolution était déjà dans l’air du temps, Darwin la transforma en une théorie construite, soutenue par une idée révolu- tionnaire: l’idée de sélection naturelle. Selon lui, les organismes se modifient de générations en générations pour former, sur une longue échelle de temps, de nouvelles espèces. En outre, la sélection naturelle, qui garantit la survie et la mort des individus, est aussi responsable de la disparition d’espèces, ainsi que d’entières formes de vie. L’idée, simple et puissante, dérange. Débats véhéments, polémiques, interprétations, transformations, les réactions sont nombreuses, et se poursuivent aujourd’hui encore. C’est dans une Angleterre colonisatrice que les esclaves furent proclamés les égaux des sujets de sa Majesté britannique, c’est dans une nation empreinte de culture biblique que le dogme de la Création fut mis à mal, c’est un gentil- homme campagnard sans fonction universitaire qui révolutionna notre conception du Monde. L’Angleterre était un pays de contraste où le conserva- tisme ambiant avait le mérite de conserver… la liberté de pensée. Nous suivrons Darwin pas à pas, dans les hasards heureux qui permettront la maturation de ses idées, la métamorphose de l’étudiant médiocre de la bourgeoisie victorienne. Nous accompagnerons le naturaliste patient et méticuleux dans son périple sur le Beagle, la «chance de sa vie». Voyage qui inspira sa longue réflexion vers une vision du Monde si difficile à accepter. Et nous comprendrons, enfin, les tenants et aboutissants de la plus belle théorie de l’histoire naturelle. Une citation tirée de L’homme sans qualité de Robert Musil nous guidera dans notre exploration: Tu n’as qu’à te représenter ce qui se produit de nos jours: lors- qu’un homme important met une idée au monde, elle est aussitôt la proie d’un processus de division, fait de sympathie et d’antipathie: les admirateurs d’abord, en arrachent de grands morceaux à leur conve- nance et déchiquettent leur maître comme des renards une charogne; ensuite les adversaires anéantissent les passages faibles, et il ne reste plus bientôt de quelque œuvre que ce soit qu’une provision d’aphorismes où amis et ennemis puisent à leur gré. Il s’ensuit une ambiguïté générale. Il n’est pas de Oui qui n’entraîne son Non. Accomplis l’acte que tu vou- dras, tu trouveras toujours vingt nobles idées pour le défendre et, si cela te chante, vingt autres non moins nobles pour l’attaquer. On serait assez tenté de croire qu’il en va comme de l’amour, de la haine et de la faim, où les goûts doivent être différents pour que chacun puisse avoir son compte. Barbara CONTINENZA Professeur d’histoire des sciences de l’Université de Rome «Tor Vergata» Darwin, une vie pour une idée Darwin, perché sur l’arbre des espèces? 3. Darwin, une vie pour une idée 4. L’évolution, une révolution La théorie de Darwin, exposée en 1859 dans L’origine des espèces, apparaît d’emblée comme une nouvelle conception du monde. Était-ce une révolution ou une évolution? 8. L’homme et les singes La découverte des singes anthropomorphes suscita de nombreuses polémiques dès le début du XIXe siècle. On craignait les retombées iconoclastes d’un rapprochement entre les singes et l’homme. DARWIN, par Barbara CONTINENZA 30. Le long périple du Beagle Lorsqu’il embarque sur le Beagle, en 1831, Darwin est un jeune homme de 22 ans, doté d’une bonne formation de naturaliste. À son retour, après cinq ans de navigation, il est déjà célèbre. 17. Babouins et métaphysique Le 16 août 1838, Darwin écrit: «L’origine de l’homme a été démontrée. La métaphysique doit prospérer. Celui qui comprend le babouin contribuera davantage à la métaphysique que Locke.» 19. Les années de formation Comme son père et son grand-père, le jeune Charles entame des études de médecine, interrompues en 1827. Lorsqu’on le réoriente vers la vie ecclésiastique, le virus de l’histoire naturelle l’a déjà contaminé. Encarts d’abonnement entre les pages 0 et 1, un encart broché service lecteurs et une carte d’abonnement entre les pages 96 et 97. 82. L’origine de l’esprit Il devra se faire «une vive lumière sur l’origine de l’homme et sur son histoire» concluait Darwin dans L’origine des espèces. Après un long silence, il aborde cette délicate question en 1870. N°18 • Février 2004 52. Événements intimes Le mariage en 1839, les enfants, la maladie: problèmes personnels et réflexions théoriques aggravent chez Darwin le conflit intérieur sur la religion. Il en deviendra agnostique. 57. Premières ébauches En 1842 et en 1844, Darwin écrit deux ébauches de sa théorie de l’évolution. Puis, pour affermir sa réputation, il entame un long travail sur la systématique de certains crustacés, les cirripèdes. 62. Compagnons de route L’été 1858, alors qu’il prépare une troisième version de sa future œuvre maîtresse, Darwin reçoit un article de Wallace qui présente des idées très voisines. 68. L’origine des espèces En 1859, après plus de vingt ans de travail, Darwin publie L’origine des espèces. Il profitera des éditions suivantes pour répondre aux critiques essuyées par sa théorie. 46. La lutte pour l’existence Si les espèces se modifient graduellement, Darwin doit expliquer leur admirable adaptation à leur milieu. En lisant Malthus, en 1838, il identifie sélection artificielle et sélection naturelle. 42. Les prémices d’une théorie Après avoir confié à des experts le matériel collecté lors de son voyage, Darwin entreprend en 1837 la rédaction de ses Carnets. Il n’y livre pas toute sa pensée, mais l’expression «ma théorie» devient récurrente. © POUR LA SCIENCE L es historiens le soulignent: dans son ouvrage le plus célèbre, The Origin of Species («L’origine des espèces»), publié en 1859, Darwin n’employa jamais le terme «évolution», et jamais il ne traita de l’espèce humaine! Darwin était courageux, mais pas téméraire. L’année 1859 est néanmoins un jalon. Moins de 40 ans après, le paléonto- logue américain Henry Fairfield Osborn (1857-1935) rédigeait l’une des pre- mières histoires de l’évolutionnisme et, comme ce serait de plus en plus la ten- dance, cherchait partout où cela semblait possible des anticipations de l’idée d’évolution. En 1894, dans son livre Des Grecs à Darwin – Conception historique du développement de l’idée de l’évolution, il écrit: «“L’avant et l’après Darwin” seront toujours l’ante et post urbem conditam de l’histoire de la biologie.» Selon Osborn, l’idée d’évolution n’était pas neuve, mais elle avait «atteint sa maturité actuelle par de lentes contributions apportées au cours de vingt-quatre siècles. [...] Plus on l’étudie, plus on a la conviction que la loi de l’évolution a été atteinte non pas d’un bond décisif, mais par le développement progressif de chaque idée subordonnée et connexe, avant que cette loi ne soit reconnue comme un tout unique par Lamarck d’abord, par Darwin ensuite». Osborn raconte ainsi l’évolution de l’idée d’évolution. Cette évolution-là ressemble à un processus darwinien, ce qui n’est pas un hasard. L’évolution dar- winienne des êtres vivants procède graduellement, sans sauts brusques,et nous pouvons penser que la connaissance se développe similairement. Cette vision «continuiste» et cumulative de la science est une application (avant la lettre) de la théorie évolutionniste de la connaissance, qui transpose le mécanisme darwi- nien de l’évolution des êtres vivants à l’émergence et à l’établissement d’idées nouvelles. L’évolution s’applique à l’Évolution. Le fait que pour Darwin, l’évolution ne soit pas synonyme de progrès, c’est- à-dire d’une avancée vers une perfection toujours plus grande, semble un détail que l’on pouvait encore, selon Osborn, se permettre de négliger. Par ailleurs, on pouvait aussi ignorer les différences entre la théorie de Darwin et celle de Lamarck, considérées comme de simples étapes dans un parcours fort long. «L’avenir, concluait Osborn, nous dira si les précurseurs de Darwin et Darwin lui- même [...] ont résolu de manière satisfaisante cet antique problème, ou s’il nous faut encore attendre un prochain Newton pour notre philosophie de la Nature.» Par son allusion à Newton, Osborn faisait référence à une expression cou- ramment utilisée quelques années avant la mort de Darwin pour lui rendre hom- mage. Le «Newton du brin d’herbe» dont Kant (1724-1804) n’osait pas espérer l’avènement s’était finalement incarné en Darwin, l’homme qui avait été enfin capable d’expliquer, en termes de lois purement naturelles, le «mystère des mys- tères», la structuration et la différenciation de la vie sur Terre. Dans la Critique de la faculté de juger (1790), Kant, au point culminant de sa réflexion sur la nature de la science et de la connaissance, avait affirmé: «Il est tout à fait certain que nous sommes incapables de connaître, avec nos principes mécaniques simplistes, les êtres organisés et leur possibilité interne uploads/Philosophie/ les-genies-de-la-science-vol1-darwin.pdf
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- Publié le Nov 12, 2022
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