De Vindividu et du voyage philosophique MARC RICHIR les innombrabies héritiers
De Vindividu et du voyage philosophique MARC RICHIR les innombrabies héritiers de Hegel, s'inspire de lui de maniére de plus en plus confuse ou, chez les meilleurs, de plus en plus subtile, donc ce qui, chez eux, se dissimule avec plus ou moins d inconscience, d'art ou de ruse, apparait dans son cuvre au grand jour: Vonto- théologie d'une substance qui, selon la formule célebre, doit se comprendre aussi comme sujet ; archéo-téléologie d une subjectivité qui s'auto-institue, A travers des acteurs dont la singularité est ipso facto comprise comme nécessité d'un moment particulier du pro- cessus, dans la transparence pour elle-méme du commencement et de la fin: la philosophie ne consiste qu'é amener le sujet philosophant particulier au lieu méme du sujet universel - Dieu, dont Hegel ne rend justement pas compte de labsolue singularité qui est pourtant, depuis Aristote, le paradoxe constitutiZ de l'onto-théologie et VHis- 'oire ne consiste qu'A amener les individus singuliers a la reconnais sance <inale de l'harmonie organique entre leur particularité et l'uni- versalité. Avec le recul du temps, nous découvrons qu'il nest sans doute pas de philosophie plus singulitre - au sens que les moralistes attribuent a ce terme - dans son acharnement véritablement terri- 'jant a réduire la singularité, mais aussi dans son Zantasme corrélatif de "aire commencer la philosophie, e+ l'Histoire humaine, en suppo- sant d'avance les problémes résolus. Notre intention n'est pas de retracer, ici, ne serait-ce qu'une ébauche de la généalogie de la pensée hégélienne, ni d'indiquer trés préclsé- ment, sur textes, les glissements qui s'y opérent et par lesquels se met en place cette sorte de machine infernale du systéme. Il nous 84 décisive. importe, en revanche, de rappeler que cette pensée qui, comme -oute pensée, n'est pas sortie toute nue du puits, est inscrite dans le mou- vement philosophique nommé « idéalisme allemand », et trouve ses racines chez Kant, qui en fut le grand initiateur. Or Kant ut préci- sément, dans la tradition moderne, le philosophe le plus attenti® a la question de l'individu, avec une lucidité telle qu'elle est toujours sus- ceptible de nous solliciter aujourd'hui. Cette question apparait dans . la Critique de la Faculté de juger', ou se pose également la question de la téléologie, et par la, de l'archéo-téléologie, mais de maniére cri- tique, c'est-a-dire avec un sens philosophique dont l'esprit hégélien représen-e la négation Ja plus résolue. A nos yeux, la troisiéme Cri- tique constitue une sorte de croisée de-chemins ou quetqiechose du"destin_de Tindiv au jour ac ire ans vient -Prenons comme fil conducteur la section ultime (IX) de la « seconde Introduction? », Kant commence par y opposer le champ de la Cri- tique de la Raison pure (l'exhibition des conditions de possibilité a priori légitimant la connaissance objective) et celui de la Critique de la Raison pratique (l'exhibition des conditions de possibilité @ priori légitimant une éthique purement rationnelle, c'es:-a-dire, on le sait, strictement coextensive dA liberte). Dans le"preiitier, rappelle-t-il, «Véiiténdement légifére a priori pour la nature comme objet des sens en vue d'une connaissance théorique de celle-ci dans une expérience possible » : c'est-a-dire que la, pensée, supposée spontanée, se 'rouvant confrontée & l'extériorité des données des sens (les phénoménes de l'intuition sensible), s'ouvre A cette extériorité en se structurant et en phénoménes objecti?s d'une connaissance théorique (la connaissance scientifique), et par 1a méme, du champ d'une expérience possible, en laquelle la connaissance objective est assurée de sa vérité, sans que ce champ puisse a priori étre limité quant a son contenu factuel. Autre- ment dit, l'ouverture de la pensée aux phénoménes sensibles est ouverture @ leur phénoménalité, et comme on le sait, le lieu de la entre pensée et phénoménalité est le schématismé 'ranscen= dantal, eu ultime ce doute que la philosophie hégé-ienne de l'Histoire ne soit l'un des événements les plus marquants de notre modernité, Ce qui, chez la structurant du méme coup la phénoménalité des phénoménes (1'es et le temps) de maniére telle pace cat gories) que son auto-strucitiration a soit du priori (les meme coup structuration des phénoménes en rencontre nda scientifique, Mais comme on saif auss moins de larté, la pensée aux prises quoique tfés sotivent avec -laisser abuser par cette derniére au point de la prendre pour son avec la phénomenali'é peut se i_permettant d'établir une connaissance pure a priori éméme (dans la psychologie rationnelle), dé Ta totalité des 85 \A hénoméne a elle illusion transcen meédiu anta e), Ces irc pour e noménes Sensi es (dans cosmologie rationnelle), ou de l'intégralité a des déterminations intelligibles (dans la théologie rationnelle), Cette partie trop peu souvent étudiée de la premiére Critique (la dialectique transcendantale) ouvre a la problématique de I'illusion transcendan- tale, qui est pour l'essentiel la problématique de la métaphysique clas- sique. Or, elle est tout aussi importante que la premiére (l'analytique transcendan'ale) dans la mesure ott elle concerne, en fait, la ques- phéndmeénalité nécessaire de la pensée, én ce que, A son déaut, elle ne pourrait tout simplement pas se réfléchir ou se reconnaitre dans l'activité de connaissance, et celle-ci serait pour ainsi dire aveugle ou « mécanique ». Il y a la, déja, quelque chose qui doit nous alerter, puis- que ce qui est constitutif de la connaissance objective, c'est une sorte d'harmonie préétablie entre la pensée et la phénoménalité des phéno- ménes, comme si les deux devaient s'accorder, depuis toujours, en vue de la connaissance théorique, en un processus téléologique d'har- monisation mutuelle. A l''inverse, poursuit Kant, dans le second champ, celui de la Raison pure pratique, « la Raison légifére a priori pour la liberté et sa propre causalité, comme étant le supra-sensible dans le sujet, en vue d'une connaissance pratique et inconditionnée », C'est-a-dire qu'en ce cas, s'autodéterminant purement en toute liberté dans la pure forme de la loi morale (ce_quiest la forme du supra-sensible dans le sujet, sensible, de la cause supra-sensiblé] Et, pour que la moralité soit fac- tuellement possible, il faut présupposer un accord ou une harmonie préétablie de la cause l'e"fet. Comme 'écrit Kant}, « l'e*fet d'aprés le concept de liberté est le but final (Endzweck) qui doit (soll) exister (ou dont le phénoméne doit exister dans le monde sensible), et pour cela la condition de possibilité en est présupposée dans la nature (du sujet comme étre sensible, c'est-a-dire comme homme) ». Or, comme l'observe Kant dans la méme page, les deux champs, celui de la Raison pure théorique et celui de la Raison pure pratique, «sont complétement isolés l'un de l'autre... par la grande fracture qui sépare le supra-sensible des phénoménes ». Et, précise-t-i1 plus loin, « la faculté de juger... fournit le concept qui médiatise les concepts de la nature et le concept de liberté » (ibid.); c'est, on le sait, le 86 Raison 'pure théorique. a la Raison pure-pratique. Qu'est-ce 2 dire ? Ventendement « fait par conséquent en méme temps signe vers un substrat supra-sensible de la nature qu'il laisse cependant tout & fait indéterminé ». Cela signifie que dans la connaissance objective, la pensée ne s'ouvre précisément a 'extériorité naturelle que dans la mesure oui elle s'est toujours déja structurée en structurant du méme coup la phénoménalité des phénoménes mais qu'elle ne drer, mais seulement les rencontrer a travers leur phénoménalité, c'est la un fait qui échappe A la connaissance en tant qu'il s'y est toujours urtant bien_¢ déja produit, et dont elle peut tout au plus reconstruire, a posteriori, la possibilité dans la démarche traiscéndantalé dé~fondation, en supposant, dans l'idéalité d'un substrat supra-sensible de la nature, qu'un accord entre la pensée et la nature est possible - donc en pré- dans la connaissance scientizique, cette sorte d'harmonie entre pensée et phénoménalité phénom#nes, sans quant tion par concept du substrat supra-sensible, 8 moins, justement, de dire dogmatiquement que la connaissance objective est toujours déja déterminée d'un seul coup a la Zois dans sa Zorme et dans son contenu Zactuel (donc dans sa totalité). Dans la Raison pratique, en revanche, écrit Kant, « la Raison donne 8 ce substrat ladétermina- tion par_sa loi pratique a Cette détermination es tellé a nouveau, qu'elle suppose accord possible entre la loi et l'action morale, c'est-a-dire entre l'autodétérmination intéligible a a loi et ses effets comme phénoménes dans l'homme sensible (l'homme comme phénoméne, c'est-a-dire aussi comme individu) et le monde phéno- ménal, sans pouvoir exhiber le fondement de cet accord, mais en en postulant la possibilité dans les idées de Dieeu,.de la liberté et de l'immortalité de l'ame, qui marquent bien quant a elles la distance infranchissable qu'il y a entre le concept pur de la loi et la contin- Que réalise, quant 6 elle, aculté ?\Elle procure, dit Kant, « par son principe a priori pour juger la nattite d'aprés ses lois particuliéres possibles, son substrat supra-sensible (en nous aussi bien qu'en dehors de nous) la déterminabilité par le pouvoir (Ver- 87 e passage de la mégen) intellectuel ». Tel est le lieu crucial qu'il faut nous efforcer d'expliciter. Tout d'abord, qu'en est-il de ce substrat.supra-sensible qui est en nous aussi bien uploads/Philosophie/de-lindividu-et-du-voyage-philosophique.pdf
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- Publié le Fev 27, 2021
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