1 UNJF - Tous droits réservés Contentieux constitutionnel Leçon 4 : La justice
1 UNJF - Tous droits réservés Contentieux constitutionnel Leçon 4 : La justice constitutionnelle en France : l'organisation du Conseil constitutionnel Frédérique RUEDA Table des matières Section 1. La composition du Conseil constitutionnel........................................................................................... p. 2 § 1. Les membres de droit.................................................................................................................................................................. p. 2 § 2. Les membres nommés.................................................................................................................................................................p. 3 A. Les autorités de nomination.........................................................................................................................................................................................p. 3 B. La politique de désignation des membres du Conseil.................................................................................................................................................p. 4 § 3. Le Président du Conseil constitutionnel et son rôle.....................................................................................................................p. 5 Section 2. Le statut du Conseil constitutionnel ..................................................................................................... p. 8 § 1. Le statut des membres du Conseil.............................................................................................................................................. p. 8 A. Les prérogatives........................................................................................................................................................................................................... p. 8 B. Les contraintes............................................................................................................................................................................................................. p. 9 § 2. Une administration rudimentaire.................................................................................................................................................p. 10 A. Le Secrétaire général.................................................................................................................................................................................................p. 10 B. Les collaborateurs du Conseil....................................................................................................................................................................................p. 11 2 UNJF - Tous droits réservés Dans la mesure où le Conseil constitutionnel est une juridiction, les conditions de son indépendance et de son bon fonctionnement doivent être assurées. Or on peut dire que la composition et l'organisation du Conseil sont tout à fait révélatrices du rôle limité qui lui avait initialement été confié par les Constituants. Cette ambiguïté et cette limitation se manifestent d'ailleurs dès le choix du nom de l'organisme : on peut en effet remarquer que les Constituants ne l'ont appelé ni "Cour" ou "Tribunal", ce qui en aurait fait sans ambages un élément de l'autorité judiciaire doté d'une autorité indiscutable, ni au contraire "Comité" ou "Commission", termes prosaïques trop liés à des fonctions administratives plus ou moins subordonnées. Le terme retenu de "Conseil" l'a été pour son imprécision et parce qu'il pouvait s'utiliser aussi bien dans un contexte juridique que politique. Il était donc logique que ce flou se retrouve dans les dispositions organisant l'existence et le fonctionnement du Conseil constitutionnel. Nous le vérifierons tout d'abord en examinant les éléments relatifs à la composition du Conseil, avant d'en étudier les manifestations dans son fonctionnement. Section 1. La composition du Conseil constitutionnel Une institution dépend toujours des personnes qui la composent, et l'incarnent. De ce fait, le choix des membres du Conseil constitutionnel nous en apprend beaucoup sur son statut réel : à la place particulière qui est la sienne, à la charnière entre le politique et le juridique, penche-t-il plutôt vers l'un ou vers l'autre ? Si cette question est toujours d'actualité pour des institutions anciennes et respectées comme la Cour Suprême américaine, elle est encore bien plus pertinente pour des institutions plus récentes et plus controversées, telles que notre Conseil constitutionnel. La composition du Conseil constitutionnel est fixée par la Constitution, à son article 56. (1) Le Conseil constitutionnel comprend neuf membres, dont le mandat dure neuf ans et n'est pas renouvelable. Le Conseil constitutionnel se renouvelle par tiers tous les trois ans. Trois des membres sont nommés par le président de la République, trois par le président de l'Assemblée nationale, trois par le président du Sénat. (2) En sus des neuf membres prévus ci-dessus, font de droit parti à vie du Conseil constitutionnel les anciens présidents de la République. (3) Le président est nommé par le président de la République. Il a voix prépondérante en cas de partage." Cet article de la Constitution est complété par l'article 1° de l'Ordonnance du 7 novembre 1958 relative au Conseil, qui précise que son président "est choisi parmi les membres du Conseil nommés ou de droit". Pour étudier les membres du Conseil, il faudra donc distinguer les membres de droit des membres nommés, pour enfin terminer par le rôle particulier du président du Conseil. § 1. Les membres de droit Il s'agit là d'une particularité controversée du Conseil constitutionnel. Les anciens Présidents de la République sont en effet membres de droit, à vie, du Conseil constitutionnel. De ce fait, ils ne sont pas concernés par les dispositions des articles 9, 10 et 11 de l'Ordonnance du 7 novembre 1958, relatifs aux possibilités de démission volontaire ou de démission d'office et de remplacement prévues pour les autres membres. La Constitution n'apportant aucune précision, tous les anciens Présidents sont visés, quelle que soit la République sous laquelle ils ont exercé leurs fonctions.Toutefois, ces membres de droit ne peuvent pas participer aux séances s'ils exercent un mandat parlementaire. Cette interdiction valant pour la durée entière de ce mandat et est étendue à l'exercice de fonctions politiques d'importance - raison pour laquelle le Président GISCARD D'ESTAING n'y a pas siégé pendant longtemps. Une telle disposition est une spécificité de la V° République - elle n'a d'équivalent que les charges de "sénateur à vie" qui existaient au XIX° siècle. Elle a été insérée dans le statut du Conseil pour des raisons purement conjoncturelles, de "politique politicienne" : il s'agissait en effet de trouver une sinécure (au sens propre de 3 UNJF - Tous droits réservés charge sans fonction réelle - n'oubliez pas que le Conseil constitutionnel était au départ conçu comme une institution de faible importance...) à René COTY, dernier Président de la IV° République dont le mandat allait être abrégé par l'instauration de la V° République. Cette bizarrerie constitutionnelle est généralement considérée comme fâcheuse, au point que l'on a à plusieurs reprises proposé de supprimer cette catégorie de membres. Elle est en effet représentative des débuts de la V° République, moment où, comme on l'a dit, la conception que l'on se faisait du rôle du Conseil oscillait entre le politique et le juridique : si la présence de cette catégorie de membres est effectivement incongrue dans une institution "juridictionnelle" comme l'est devenu le Conseil, elle pouvait se comprendre pour un organe à vocation plus politique. Aujourd'hui, une partie de la doctrine considère qu'elle ne se justifie plus, car les inconvénients de son maintien paraissent dépasser les avantages du statu quo : elle est en effet la source potentielle de modifications brutales et incontrôlables dans les majorités au sein du Conseil et y introduit un élément clairement politique contraire à son impartialité nécessaire. Le Comité pour la Révision de la Constitution présidé par le Doyen Georges VEDEL, dans son rapport remis au Président de la République en 1993, estimait ainsi que l'évolution du Conseil constitutionnel vers une juridictionnalisation toujours plus affirmée devrait impliquer la disparition de cette catégorie de membres, d'ailleurs de facto tombée en désuétude pendant de nombreuses années. En effet, René COTY a été parmi les anciens Présidents de la IVe République le seul à siéger régulièrement au Conseil constitutionnel, de mars 1959 à sa mort en 1962. Vincent AURIOL, autre ancien Président de la IV° République, s'est volontairement retiré - ne pouvant démissionner - en 1960 en signe de désaccord avec la politique du Général DE GAULLE (notamment sa volonté de limiter le rôle du Conseil au strict minimum) ;il n'a siégé ultérieurement qu'une fois, lors du recours contre la loi référendaire modifiant le mode d'élection du Président de la République. Enfin, parmi les Présidents de la V° République : ni le Général DE GAULLE, qui avait une piètre opinion du rôle du Conseil et a donc expressément décliné l'honneur d'y siéger, ni Georges POMPIDOU, décédé en cours de mandat, ni François MITTERRAND n'ont jamais exercé leur droit, pour des raisons diverses. Le premier à profiter de cette possibilité a été le Président Valéry GISCARD D'ESTAING, qui n'avait jamais exclu cette possibilité pour l'avenir, a fini comme on l'a dit par décider de siéger en 2004.Il a été immité, depuis, par Jacques CHIRAC. § 2. Les membres nommés Les membres nommés sont la seule catégorie permanente de membres du Conseil constitutionnel, la seule également qui permette d'apprécier le caractère réellement juridictionnel de l'institution, sur le plan organique. Pour cela, il convient d'une part d'étudier les autorités de nomination, puis d'examiner la politique de désignation des membres du Conseil. A. Les autorités de nomination Le Conseil constitutionnel comprend, en plus des membres de droit, neuf membres nommés par les plus hautes autorités de l'Etat. Ainsi, trois d'entre eux le sont par le Président de la République, trois autres par le Président de l'Assemblée Nationale, et les trois derniers par le Président du Sénat. La durée du mandat des membres du Conseil étant de neuf ans non renouvelables, ils sont renouvelés par tiers tous les trois ans, afin de garantir une certaine continuité dans la jurisprudence du Conseil et la soustraire, dans une certaine mesure, au choc des alternances politiques. Cela signifie en pratique que chaque autorité de nomination désigne un membre destiné à remplacer celui qu'elle avait nommé neuf ans auparavant. Le dernier renouvellement partiel a eu lieu en 2007, le prochain aura lieu en 2010, pour remplacer Olivier Dutheillet de Lamothe, Dominique Schnapper et Pierre Joxe. On peut ici se demander pourquoi le Premier ministre, personnage important de l'Etat et autorité de saisine du Conseil, n'est pas doté de cette capacité de nomination. L'explication généralement avancée tient à la plus 4 UNJF - Tous droits réservés grande légitimité démocratique dont bénéficieraient les trois autorités compétentes, plus proches du peuple car issues du suffrage universel, direct ou indirect... Une critique fréquente concernant ce point est que les trois autorités de nomination sont politiques, ce qui serait susceptible uploads/Politique/ 4-l-x27-organisation-du-conseil-constitutionnel.pdf
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- Publié le Oct 10, 2021
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