1 Après les difficultés ardues que nous avons rencontrées dans l'analyse de l'E

1 Après les difficultés ardues que nous avons rencontrées dans l'analyse de l'Evangile de Philippe afin d'en faire ressortir les thèmes prévalants, “L'Hypostase des Archontes” nous présente un discours relativement direct sur le mythe de la création des Gnostiques. C'est pour l'instant le premier texte se rapportant à la cosmologie que nous trouvons dans notre Plan de Lecture des Codex de Nag Hammadi. Il n'existe que cinq textes de cette teneur dans l'ensemble de ces codex et “L'Hypostase des Archontes” en constitue le texte le plus concis et le plus accessible. C’est donc un bon point de départ pour explorer les écrits cosmologiques. Ce texte suit l’Evangile de Philippe dans le Codex II et est lui-même suivi du texte “Sur l’Origine du Monde” qui est un autre traité cosmologique - un rare exemple, dans les Codex de Nag Hammadi, de textes comparables qui sont réunis. En introduction de la traduction de Bentley Layton, Roger A. Ballard écrit: “L'Hypostase des Archontes est sûrement l’oeuvre d’un maître Gnostique instruisant une audience... Cette audience est une communauté de Chrétiens Gnostiques, au fait des écrits des deux testaments, et acceptant l’autorité de Paul.” Cette affirmation est typique des libertés que se permettent les érudits lorsqu’ils considèrent les écrits Gnostiques comme des versions des premiers écrits Chrétiens. Il est vrai que le paragraphe d’introduc- tion utilise un langage que l’on retrouve dans les lettres de Paul, aux Colossiens et aux Ephésiens, mais qui peut dire que Paul, lui-même, n’a pas emprunté ce langage aux cercles Gnostiques? Dans tous les cas, ce langage était alors communément usité et le fait de citer Paul “le grand apôtre” en dit plus sur l’audience concernée que sur la nature de l’enseignement qui leur est prodigué. “Je t'ai envoyé cela parce que tu t’enquiers de la nature et de l'origine des autorités (en Grec exousia)” pourrait suggérer que le maître Gnostique a été requis de clarifier ou de corriger ce que Paul est supposé avoir dit. Egoïsme cosmique L'Hypostase des Archontes entre immédiatement dans le vif de l’histoire. Elle aborde de suite un événe- ment décisif dans le mythe de la Création Gnostique: le dieu imposteur, qui est aveugle, déclare qu’il est le seul dieu de l’univers mais il est démenti par une voix divine qui lui dit qu’il fait erreur. Le texte fait ici éclater une salve: “Ses pensées devinrent aveugles”. (87.5). Le fait que les humains puissent penser de façon aveugle, dans l’ignorance de la nature de leurs pensées, et dans l’inconscience de l’auto-obscurcis- sement des processus de pensées, est un enseignement de base des sciences bouddhistes et noétiques; cependant, les Gnostiques y ajoutèrent une tournure bizarre, l’associant à un acte arrogant d’égoïsme cosmique. Ils enseignèrent que les processus de la psyché humaine sont emmêlés avec les événements du cosmos dans son ensemble (un synchronisme cosmo-noétique). Par notre mental, nous sommes im- pliqués dans la démence et dans l’arrogance du chef des Archontes. Pour découvrir un parallélisme extraordinaire avec l’égoïsme du dieu imposteur dans le mythe Gnostique, nous renvoyons le lecteur à notre essai “La folie de l’ego”. Dans l’Hypostase des Archontes, les autorités ou puissances sont initialement appelées Exousia, un ter- me que l’on retrouve dans les écrits attribués à Paul; cependant, le terme Archontoi se présente un peu plus loin dans le texte. Le chef des Exousia n’est pas appelé par son nom habituel, Yaldabaoth, comme par ailleurs dans les Codex du Nag Hammadi. Dans les enseignements des Mystères sur les “sphères planétaires”, les Exousia sont connectés à Jupiter et à la force de la jalousie (en Grec, phthonos). L’Hypostase des Archontes John Lash “L'Hypostase des Archontes” est également appelée “L'Origine des Archontes” et “L'Origine des puissances”. C'est un traité cosmologique présentant la version Gnostique de la Genèse: le mythe de Sophia, l'émergence des Archontes, le viol d'Eve, la démence de Yaldabaoth, la conversion du Soleil et autres éléments mythologiques. Codex de Nag hammadi. NHC II, 4. 7 pages. Intact. 2 L’Hypostase des Archontes n’explique pas, comme le font d’autres traités cosmologiques, comment le chef des Archontes fut engendré à partir de “l’abysse” (NOUN en Copte), ici appelé “sa mère” (MAAY en Copte). Le terme NOUN indique que le chef des autorités, et sa légion, émergent du royaume de la ma- tière élémentaire, du chaos, de l’abysse. C’est ce que nous appelons les champs quantiques, la matrice (supposée) inorganique de la vie organique. Sophia - appelée ici Pistis Sophia, la “Sagesse Confiante” - a établi un monde céleste pour les autorités “en conformité avec leur pouvoir”, formant ce monde “à l’image de la structure (typos) des mondes qui sont au-dessus, car c’est à partir du monde invisible que le monde visible fut créé” (87.10). Les “mondes du dessus” sont dans le Plérome, source de toutes les structures archétypiques de manifestation. Les Archontes ne peuvent rien inventer. Tout doit procéder de Sophia, un Eon en provenance du Plérome. Selon d’autres textes, le chef des Archontes crée son propre monde céleste, le système planétaire, en imitant les structures du Plérome, mais s’il est aveugle, comment peut-il percevoir ces formes divines? Ce passage insinue que Sophia se joue du dieu imposteur Yaldabaoth en lui faisant croire que c’est lui- même qui réalise ce qu’elle, la Divinité réelle, crée pour lui. Maintenant, un événement sublime: l’image de “l’incorruptibilité” se reflète dans le royaume du chaos duquel émergent les Exousia. Dans les compositions sémantiques du Copte, le terme “incorruptibilité” est construit avec TAKO “corrompre, faire périr”, avec le préfixe AT-, “ne pas” et MNT- qui fonctionne comme le suffixe Français -tion: ce qui donne MNTATTEKO “capacité de ne pas corrompre”. (Le A de TAKO se change en E, une des nombreuses transformations orthographiques déconcertantes du Copte). Le terme est également rendu par “ce qui est non périssable”. Cette abstraction est présentée comme une conscience vivante et présente même s’il ne lui est pas donné un nom angélique ou divin, tel qu’Elelath. Cette présence abstraite, de façon étrange, supposée être dans le Plérome, produit une image dans la matière élémentaire (MOOY, “les eaux”) et les Exousia la convoitent mais ils sont incapables de l’attein- dre. Il nous est dit qu’ils peuvent la désirer parce qu’ils ont une âme mais pas d’esprit. C’est l’unique texte des Codex de Nag Hammadi qui affirme quasiment que les Archontes ont une âme, une sorte de vie intérieure. Ils peuvent soupirer après quelque chose, la désirer, mais ils succombent ensuite à la jalousie pour ce qu’ils ne peuvent pas avoir. Apparemment, l’image de l’incorruptibilité ressemble à la forme humaine que les autorités, appelées maintenant Archontoi, tentent de copier. Les Archontes “dressèrent des plans” et dirent “ Allons. Créons un humain (ROME) qui sera issu de l'humus de la terre (KAZ, variation de Ge, Gaïa, la Terre en Grec)”. On ne sait pas s’ils façonnent, un homme, un mâle ou la forme humaine (peut-être androgyne?) parce que le Copte ROME est utilisé tout aussi bien pour homme et pour humain. Selon 87.30, ils modelèrent la forme humaine “à l’image de Dieu” ou “apparition divine”. Nous apprenons immédiatement que l’image est femelle parce que les Archons se décident maintenant “à voir sa contrepartie masculine”. Ils façon- nent tout d’abord une image femelle ou matrice et produisent ensuite, à partir de cette image, une forme mâle qu’ils dotent de leur souffle mais la forme mâle est incapable de se tenir debout. Cet épisode est réminiscent des mythes indigènes de création qui décrivent une tentative bâclée de produire la forme hu- maine - par exemple dans le Popol Vuh. Les Archontes soufflent furieusement mais ils sont incapables d’animer leur création pseudo-humaine car “ils ne connaissaient pas la nature de son pouvoir” (88.10). Maintenant vient un passage remarquable. L’esprit du Plérome, observant que “la forme humaine do- tée d’âme (psychikos)” est incapable d’atteindre sa stature réelle, envoie une partie de lui-même, de la “Terre de Diamant”, dans la créature en lutte. Et “l’homme devint une âme vivante”, PSYCHE ETONE. Le terme ETONE apparaît également dans le nom des Mystères, “le Jésus vivant”, comme nous l’avons déjà remarqué. Par “vivant”, les Gnostiques entendent quelque chose comme “éternel” plutôt que simplement “vivant”. (Cela nous rappelle la distinction entre zoe, la force de vie immortelle, et bios, la force des for- mes de vie biologique, élucidée par le mythologiste Karl Kerenyi dans Dionysos.) La Terre de Diamant est un terme frappant qui rappelle les enseignements Bouddhistes sur la Conscience Diamant ou Vajra. Une telle conscience réside dans le Plérome mais comme Sophia est unie à la Terre, la présence divine du Plérome emplit la Terre. Avec le soutien de l’Eon Sophia, Adamas (“la créature terrienne”) peut main- tenant se lever et faire preuve de pouvoir spirituel en nommant les animaux. Les types mâles et femelles de l’humanité (ROME) vivent dans un monde édénique, un paradis naturel, la biosphère. Sophia demeure au sein de toute la biosphère mais Elle y est également présente au travers du médium spécifique de la lumière blanche vivante ou lumière de Diamant, la Lumière Organique. La mythologie de l’Hypostase des Archontes uploads/Politique/ hypostase-des-archontes.pdf

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