Nicolas AGUILLON LE MYSTERE DE LA SAINTE AMPOULE DE MARIE- MADELEINE Saint-Maxi
Nicolas AGUILLON LE MYSTERE DE LA SAINTE AMPOULE DE MARIE- MADELEINE Saint-Maximin - Aix - Paris - Vézelay - Londres 1305 Au Chevalier Hugo de Gaudaleno par delà les âges et au petit Ulysse pour les temps à venir. Merci à ma Dame Isabelle. « Il disait que c’était mal fait de prendre le bien d’autrui : car rendre était si dur que, même à prononcer le mot seulement, rendre écorchait la langue par les r qu’il contient, lesquels représentent les râteaux du diable, qui toujours retient et tire de son côté ceux qui veulent rendre le bien d’autrui ». Jean, sire de Joinville, Vie de saint Louis . Prologue Saint-Maximin, le 29 septembre 2012 A M. Charles-Robert Lebougre, secrétaire de Monseigneur S..., Président de l’Académie Pontificale d’Archéologie de Rome. Cher monsieur, Depuis notre précédente affaire épistolaire et votre conduite inqualifiable – vous avez fait disparaître un manuscrit d’une valeur incommensurable de peur qu’il ne nuise à la mémoire de vos ancêtres [1] – votre trace a été difficile à suivre. Je ne m’étonne pourtant pas de vous retrouver en poste au Vatican. Sans doute votre ardeur à faire disparaître certaines pièces contraires au dogme de l’Eglise vous aura valu votre promotion soudaine... Pour ma part, je regrette simplement que le manuscrit que j’ai néanmoins publié sous le titre Les sept démons de Marie-Madeleine, ait été accueilli comme une fiction en lieu et place du témoignage historique qu’il était en réalité. Pour vous montrer que je ne vous garde pas rancune, j’ai voulu que vous soyez le premier à apprendre la nouvelle : j’ai découvert un second manuscrit dans la cave de mon habitation saint-maximinoise écrit de la même main que celui que vous avez fait disparaître – ou transmis à Rome peut-être ? Ce nouveau manuscrit, est relié de façon plus soigneuse que le premier : la reliure contemporaine, sur ais de bois, à deux fermoirs, est recouverte d’un fragment de parchemin, emprunté à un missel du XIème siècle. L’on devine que l’auteur était plus fortuné que par le passé… Le corps du texte comprend douze cahiers relatant l’enquête qui suivit la disparition de la Sainte Ampoule en 1305. Vous n’ignorez sans doute pas que cette relique passait pour avoir contenu le sang du Christ, recueilli avec un peu de terre par Marie-Madeleine au pied de la Croix... Je vous laisse découvrir cet incroyable récit. Paul Fabre Premier cahier Le larcin de la Sainte Ampoule Les voies du Tout Puissant sont impénétrables ! Jamais je n’eusse cru reprendre la plume pour narrer de si incroyables aventures à nouveau. Je pensais le temps de mes folles pérégrinations passé à tout jamais. Et voici qu’à l’âge vieillard [2] , je fus à nouveau appelé pour défendre le bien de ma chère sainte Marie de Magdala. Son bien le plus précieux sans aucun doute : la très Sainte Ampoule. Pour ceux qui ignoreraient encore ce qu’elle est en vérité, je dois retourner au temps où je participai avec pelle et pioche à l’exhumation des tombeaux aux côtés du prince de Salerne, notre actuel comte de Provence, Charles II d’Anjou. Comme je l’ai déjà rapporté ailleurs, la découverte des augustes sarcophages fut chose aisée et rapide. Mais, tout excité qu’il fût, le seigneur se fatigua dès que la première sépulture fut dégagée et confia à ses hommes et aux habitants présents le soin de creuser plus avant. Il en va souvent ainsi avec les puissants : leur enthousiasme est prompt en toute chose, mais sitôt qu’ils se lassent, ce sont les pauvres qui doivent finir leur labeur inachevé... C’est pourtant avec la plus grande piété et la minutie la plus incroyable que l’excavation fut pratiquée. Certains objets curieux furent ainsi arrachés à leur long sommeil et à la terre qui les avait protégés si longtemps. Parmi ces pièces d’une inestimable valeur, car étant sans doute un bien de Marie- Madeleine elle-même, se trouva un curieux flacon de verre rempli d’une matière brune que l’on prit tout d’abord pour un flacon de parfum. C’était évidemment chose stupide : comment songer un seul instant que la sainte femme qui avait tout abandonné et qui s’était dépouillée de tout pour honorer le Christ dans le désert de la Sainte Baume eût pu conserver une coquetterie telle. Certains eurent beau argumenter que dans son passé trouble elle avait toujours aimé les onguents et les cosmétiques, et qu’elle en avait même oint le Sauveur lui-même comme les Saintes Écritures le rappellent [3] , mais ils durent bientôt renoncer à leurs hypothèses, car en examinant le flacon de plus près, on découvrit qu’il était empli de petits cailloux et de terre ainsi que d’une autre substance, semblable à de la rouille ou de la corne séchée. C’est alors que frère Bernard qui avait assisté à toute la découverte se signa et se jeta à genoux en nous invitant à faire de même. Il s’empara de la fiole qu’il tint au-dessus de sa tête baissée en disant : « Mes enfants, priez pour celui qui a donné son sang pour nous sauver ! Priez devant cette Ampoule Sainte qui contient le sang de Jésus recueilli par Marie-Madeleine au pied de la croix ! » Et comme nous contemplions tous ladite ampoule, un grand prodige se fit : l’étrange substance se liquéfia et se mit à monter et descendre à l’intérieur. Nul homme présent n’osa bouger ni parler pendant un temps considérable. Onques je ne vis spectacle si fascinant que ce bouillonnement divin et j’eusse pu rester en extase pendant une infinité, hélas ! Le phénomène cessa et le sang reprit sa forme originelle. Depuis lors, le saint miracle se répète invariablement, mais uniquement, chaque vendredi saint après la lecture de la Passion [4] . Le précieux objet fut depuis lors conservé en une armoire solide dans le logis des frères bénédictins, puis après leur triste départ, dans celui des prieurs dominicains qui débutèrent leur règne sur le grand chantier de la Basilique et la cité nouvelle. Il n’en sortait que pour les grandes célébrations : offices ou processions [5] . Jusqu’à ce terrible vendredi où l’ampoule quitta mystérieusement sa demeure de noyer... Son absence fut remarquée et signalée au moment des mâtines par le frère affecté à la garde du trésor qui s’éveilla d’un sommeil engourdi, comme on me le rapporta par la suite. En effet, je fus mandé quérir dès que la disparition fut constatée. L’on comptait sur mes anciens talents d’enquêteur pour résoudre le mystère au plus vite. Il me souvient encore comment le nouveau prieur, père Jean Gobi, était tout retourné lorsqu’il m’accueillit dans son cabinet privé, dans le plus grand secret, alors que le jour était tout neuf encore. Mes anciennes habitudes d’observation acquises grâce à l’enseignement de mon mentor, l’Inquisiteur Robert le Bougre, se réveillèrent sur le champ, comme après un long sommeil. Un peu confuses au départ, puis affûtées comme le coutel du charcutier. Jean Gobi semblait sincèrement désespéré, et on l’eût été à moins : tout juste à l’aube de son entrée en fonction, il perdait un des biens les plus précieux sous sa responsabilité ! Le réceptacle sacré du sang du Christ ! Je n’avais jamais encore eu le privilège d’être dans son intimité depuis son arrivée, et je croyais bien que la disgrâce dans laquelle son prédécesseur, Jean Vigorosi, m’avait tenu depuis l’affaire des homicides de ribaudes allait se poursuivre sous son prieurat... Mais nécessité vaut pardon ! Et je fus traité avec grands égards dès mon apparition salvatrice... Messire Jean Gobi était un homme vénérable, tant par son apparence que par sa nature profonde. Il ne portait pas la tonsure : il l’habitait. Il était fait d’un curieux mélange de profonde piété et de force de caractère. C’était bien lui le digne prieur de Montpellier qui avait tenu tête au roi de France au point de se voir chassé de ses états et de devoir fuir en Provence [6] … Pourtant, en ce jour précis, son visage témoignait d’un grand embarras et même d’une affreuse inquiétude… Sa figure sans âge me scruta avidement dès mon arrivée. Je compris qu’il devait faire la part en lui de tout ce qu’on avait dû lui servir à mon propos, en bien comme en mal… Il sembla un instant regretter de m’avoir fait chercher et je crus même qu’il allait me congédier, mais il n’en fit rien et il reprit son examen silencieux de ma personne. Dans la pièce se trouvait également le gardien à la coupable inattention : un jeune novice du nom de Bérenger, que je connaissais un peu, pour avoir commercé quelquefois avec lui aux Halles Neuves lorsqu’il était de corvée d’emplettes. Son regard se perdait parfois dans le vide, comme s’il y contemplait l’immensité de sa négligence. Il y avait hélas aussi ce benêt de bedeau, que le prieur avait fait éveiller dès la nouvelle connue. En tant que responsable du matériel de l’église et de la maison prieurale, il n’avait pu que constater l’effraction de l’armoire et le larcin uploads/Religion/ le-secret-de-la-sainte-ampoule-de-marie-madeleine-by-nicolas-aguillon-aguillon-nicolas.pdf
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- Publié le Jui 02, 2022
- Catégorie Religion
- Langue French
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