La production écrite en sciences: étude préliminaire portant sur des élèves du

La production écrite en sciences: étude préliminaire portant sur des élèves du Manitoba par Léonard P. Rivard Collège universitaire de Saint-Boniface Winnipeg (Manitoba) RÉSUMÉ Cet article décrit une étude qui a porté sur la production écrite en sciences naturelles chez des élèves de la cinquième à la neuvième année dans des écoles franco- manitobaines et dans des écoles d'immersion. La complexité syntaxique, l'emploi des conjonctions et l'usage des verbes ont tous été évalués dans les rapports de laboratoire recueillis auprès de treize professeurs participant à l'étude. Bien que les résultats soient peu concluants, la complexité syntaxique et l'usage des verbes étaient très utiles comme critères pour comparer différents groupes d'élèves, tandis que l'emploi des conjonctions était moins utile. ABSTRACT The purpose of this study was to assess scientific writing in the French language by students in grades 5 to 9 in Franco-Manitoban and French immersion schools. Syntactic complexity, use of connectives, and verb usage were aspects of language use analyzed in the interpretive section of lab reports submitted by 13 teachers participating in the study. Although the findings are not conclusive, syntactic complexity and verb usage were found to be particularly useful measures for differentiating among groups of students, while use of connectives was found to be less useful. En 1982, le ministère de l’Éducation du Manitoba a réalisé une étude portant sur la production écrite en anglais des élèves de la 3, 6, 9 et 12es années (Manitoba Writing Assessment Program, 1982). Au niveau de la douzième année, l'étude comportait une épreuve écrite et un exercice de planification, c’est-à-dire la rédaction d’une dissertation descriptive et CAHIERS FRANCO-CANADIENS DE L'OUEST VOL. 4, N° 1, PRINTEMPS 1992, p. 71-88 l’élaboration du plan d'une dissertation persuasive (en ne rédigeant que la conclusion). Aux trois autres niveaux, les élèves devaient composer une histoire ou un récit et décrire la marche à suivre pour réaliser un projet (par exemple un bonhomme de neige). Ensuite, pour analyser des données, divers moyens ont été employés, notamment la notation selon les impressions générales, les barèmes analytiques, les barèmes descriptifs et le dénombrement des erreurs. En octobre 1982, les résultats détaillés de cette évaluation ont été publiés dans un rapport préliminaire; toutefois, aucun rapport final, analysant ces données, n'a été diffusé. Il est regrettable que cette étude en soit restée ainsi car les données brutes, à elles seules, n'ont pas jeté de lumière sur la qualité de la production écrite des élèves. Objectifs de l'étude Dans le présent article, nous voulons aller plus loin que ce rapport préliminaire de 1982, en mesurant la production écrite en sciences chez des élèves de la cinquième à la neuvième année dans des écoles franco-manitobaines (élèves dont la langue maternelle est le français) et dans des écoles d'immersion (élèves apprenant le français comme langue seconde). Au cours de notre étude, un certain nombre de questions ont été soulevées: existe-t-il une corrélation entre la facilité à manier le langage et la facilité à exprimer des idées? Peut-on faire la distinction entre les élèves de ces niveaux (cinquième à neuvième année) à l'aide de divers critères linguistiques? Peut-on faire la distinction entre les élèves des écoles franco-manitobaines et ceux du programme d’immersion en utilisant les mêmes critères? Bien que notre travail ne soit pas une étude définitive sur la production écrite en sciences dans les écoles manitobaines, nous tenterons de répondre à ces trois questions tout en dégageant des éléments pertinents qui pourraient faire l’objet d'une étude plus importante. Ainsi, il faut donc considérer cet article comme une étude préliminaire sur la production écrite en sciences. Les travaux antérieurs Les barèmes descriptifs utilisés dans l'étude manitobaine de 1982 portent sur le dénombrement de structures syntaxiques particulières dans les textes des élèves. À chacun des quatre niveaux, on a compté le nombre d’unités linguistiques diverses, y compris leur nombre total: mots, unités-T (propositions indépendantes), propositions subordonnées, propositions adverbiales, propositions relatives et propositions nominales 72 CAHIERS FRANCO-CANADIENS DE L'OUEST, PRINTEMPS 1992 (Manitoba Writing Assessment Program, 1982). Ensuite, on a utilisé ces données pour établir des notes de complexité syntaxique en relevant notamment le nombre de mots par unité- T et par proposition, ainsi que le nombre de propositions subordonnées par unité -T. Kellogg Hunt a défini ainsi l'unité-T (Minimal Terminal Unit): «the shortest grammatically complete sentence [...] that a passage can be cut into without creating fragments» (Hunt, 1977, p. 93). Une unité-T peut transmettre une seule idée et englober toutes les ressources linguistiques – subordination, incises, conjonctions, substitutions, modifications, transfor- mations, etc. – dont dispose le rédacteur pour composer une phrase logique et cohérente. Chez les bons rédacteurs, le nombre d'unités-T par phrase diminue à mesure qu'augmente le nombre de mots par unité-T. En se fondant sur des études menées dans de nombreux pays, notamment au Japon, en Hollande et dans les îles du Pacifique, Hunt soutient que l'analyse des unités-T vaut autant pour d'autres langues que l'anglais. Les recherches de Hunt (1977), ainsi que celles de Witte et Davis (1982) et de Pringle et Freedman (1985) ont démontré que l'unité-T est un moyen efficace de comparer des textes rédigés par des élèves au sein d'une grande catégorie d'âges. Des études menées par ces auteurs confirment également que l'unité-T permet d'évaluer différents types d'écrits (par exemple un texte narratif par opposition à un texte descriptif). Pour sa part, John Perron (1977) a découvert non seulement que le degré de complexité syntaxique varie considérablement d'un genre à l'autre, mais aussi que les structures syntaxiques utilisées par des enfants ayant un niveau de compétence différent varient grandement lorsqu'ils rédigent des textes de divers genres. Les résultats de ces recherches sont également appuyés par les travaux menés par Walter Loban (1976) au cours desquelles il a mesuré l'évolution du langage chez 211 élèves pendant une période de treize ans, à partir de la maternelle. À l'instar de Hunt, Loban a également étudié les stratégies adoptées par les rédacteurs pour élargir la portée du langage. Le rôle de la subordination, de la conjonction et des verbes dans l'élaboration du langage constitue une partie importante de son étude. Un index pondéré de subordination a été utilisé pour évaluer et comparer les stratégies d'élaboration dans les textes rédigés. Loban soutient que la clarté du message est intimement liée au nombre et au type de verbes employés dans un texte particulier LA PRODUCTION ÉCRITE EN SCIENCES… 73 et que les bons rédacteurs emploient donc des verbes plus imagés, précis et inusités. Il s'est également penché sur la précision des méthodes qu'utilisent les professeurs pour évaluer la production écrite des élèves. Loban a tout d'abord demandé aux professeurs d'évaluer les compétences linguistiques des élèves faisant l'objet de l'étude. À partir des résultats ainsi obtenus, il a réparti les élèves en groupes selon leur niveau de compétence (faible ou élevé). Il a relevé des différences entre les deux groupes en ce qui concerne les points suivants: le nombre moyen de mots par unité de communication, l’élaboration du sujet et du verbe sur le plan syntaxique, le nombre de transformations grammaticales, les aptitudes à la lecture et à l'écriture, la richesse du vocabulaire, l’emploi de charnières, l’emploi de suppositions, d'hypothèses et du mode conditionnel et l’emploi de propositions adjectivales. Il en conclut que «the average number of words per comunication unit proved to be one of the most crucial measures of fluency developed during the course of the investigation» ( Loban, 1976, p. 26). Tout en appuyant cette observation, Roy O'Donnell (1977) affirme que cette méthode est presque aussi efficace que l'index pondéré d'élaboration, établi à la suite de calculs complexes basés sur l'utilisation de stratégies d'expansion, telles que les propositions adjectivales, adverbiales, conjonctives et nominales et l’emploi de prépositions. L'étude des sciences en langue seconde Selon Ebel, Bliefert et Russey (1987), les personnes étudiant les sciences dans une langue seconde ont de la difficulté à employer les verbes, les adverbes, les articles, les pronoms, les prépositions et les conjonctions. Les prépositions et les conjonctions, que l'on peut appeler des charnières, permettent d'établir des liens qui sont essentiels lorsqu'on fait des généralisations à partir de certaines données. En sciences, on emploie souvent des mots et des expressions comme ainsi, ensuite, parce que, cependant et par conséquent. Thomas Huckin et Lesley Olsen ont affirmé que «connectives are sometimes misused by nonnative speakers [...] because of miscate- gorization, overgeneralization, interference from the native language or the improper blending of two forms» (Huckin et Olsen, 1983, p. 347). D'un autre côté, les adverbes, les verbes, les articles et les pronoms sont tous nécessaires pour éliminer les ambiguïtés et pour rédiger avec précision. L'emploi des verbes 74 CAHIERS FRANCO-CANADIENS DE L'OUEST, PRINTEMPS 1992 en particulier revêt une importance capitale en communication. À ce sujet, Huckin et Olsen ont également observé que the most common areas of difficulty [...] with regard to the use of verbs [are]: 1) major tense distinctions; 2) the use of the progressive aspects of the verb; 3) subject-verb number agreement, and; 4) grammatical irregularities of particular verbs (Huckin et Olsen, 1983, p. 441). En sciences, uploads/Science et Technologie/ 41-rivard.pdf

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