Mohammed EL Himer Enseignant chercheur Université Ibn Tofail Faculté des Lettre
Mohammed EL Himer Enseignant chercheur Université Ibn Tofail Faculté des Lettres et des Sciences Humaines Département de français, Kénitra mohelhimer@yahoo.fr Tél. 06 63 01 43 51 Synthèse des études consacrées à l’arabe marocain et nature du lexique abordé (Publié dans : Langues maternelles : enseignement/apprentissage des langues étrangères au Maroc, 2000, Faculté des L.S.H. Agadir.) Introduction L’objet de cette communication est de présenter un bilan analytique et critique des études consacrées à l’arabe marocain (AM) dans le domaine linguistique. Mon objectif premier n’est pas de donner une liste bibliographique exhaustive dans ce domaine, je considère que ce travail a fait l’objet d’une évaluation par ailleurs (1), mais de mettre en exergue les étapes essentielles qui ont marqué l’étude de l’AM. Le second objectif est de rendre compte de manière sommaire de la nature du lexique abordé dans ce travail. Les références qui vont être citées sont représentatives des périodes auxquelles elles renvoient : Le présent travail sera organisé de la manière suivante : Dans la première section, il sera question de la nature et de la finalité des recherches consacrées à l’AM avant et après l’indépendance du Maroc. La deuxième section sera consacrée au type de lexique étudié dans ces recherches. I- Nature et finalité des recherches consacrées à l’AM Il importe d’abord de distinguer deux grandes périodes qui ont marqué la recherche de l’AM : la période du protectorat et celle d’après l’indépendance. I.1- Recherche de la période coloniale Les recherches linguistiques effectuées pendant la première période sont définies par une politique coloniale dont l’objectif essentiel était de comprendre et faire comprendre la langue du pays à coloniser afin de pouvoir dominer ses sujets avec les moindres dégâts et partant accéder, via la langue, à leur culture et à leur mentalité pour contrôler leur terre. Il s’agissait de mettre au service du politique linguistique. Cette thèse est soutenue par deux faits au moins : - L’intérêt accordé à l’AM en tant que langue orale parlé quotidiennement par des marocains arabophones au détriment de la langue classique (AC), la langue officielle du pays - La recherche linguistique est confiée à des militaires comme Marçais (1911), Brunot (1931), Brunot et Malika (1939), etc. Ces recherches avaient pour mission de rassembler des corpus de l’AM pour apprendre aux militaires à parler et comprendre la langue, comme le précise clairement Laoust (1920 : 128-129) qui dit : ‘’… nos officiers (…) sont les premiers à reconnaître l’intérêt qu’il y a pour eux à communiquer directement avec leurs administrés sans recourir à des intermédiaires parfois douteux. ‘’ Ajoutons à cela les premiers Instituts spécialisés dans les études linguistiques marocains ont été fondés par le général Lyautey : Institut des Hautes études marocaines, par exemple. Il s’ensuit que les travaux effectués par les recherches de cette période (Cantineau (1950), Brunot (1920), Marçais (1911), Gaudefroy et al. (1952) entre autres ne peuvent être qualifiés de travaux scientifiques au sens strict du terme. Ce sont de simples documents pédagogiques destinés à vulgariser l’AM. De manière générale, les recherches de cette période soulèvent les remarques suivantes : - On ne relève pas de marocain participant à ces études, excepté le cas de quelques interprètes travaillants dans la même perspective tels que Tedjini Belkacem (1923- 1924) et Ben-Smail (1932). - Ces travaux ne sont pas inscrits dans un cadre théorique défini tel qu’on le comprend aujourd’hui à savoir un ensemble de concepts universels organisés selon lesquels l’étude est appréhendée. - Les recherches, à cette époque, n’ont pas été effectués uniquement par des français, mais on retrouve également des espagnols : ex. Alarcon et Santos(1913), des anglo-saxons, comme Harrel (1962), etc. sans trop écarter l’idée que leur production était que leur production était sous-tendue par la même idéologie, notamment en ce qui concerne les espagnols qui ont travaillé sur les parlers du nord du Maroc. - Sur le plan du contenu, il est question, de manière générale, du relévé des différentes classes grammaticales <nom, verbe, adjectif etc.) suivi d’une description globale et sommaire du phénomène à l’étude <quelques lignes souvent suffisent). Toutefois, quel que soit l’objectif pour lequel ces travaux ont été réalisés, il faut reconnaître qu’ils constituent les éléments de base dans le domaine de la recherche sur l’AM, ne serait-ce que sur le plan du corpus et de la distinction des différentes classes grammaticales. D’autant plus que parmi les chercheurs en questions, il y avait aussi des universitaires. A signaler enfin que certains travaux remontent à une époque bien avant le début du protectorat. I.2- Recherches de la période après l’indépendance Après le départ des français, il y eut une rupture avec la recherche sur l’AM durant une période qui a duré à peu près une dizaine d’années. Ce fait est expliqué à mon avis, par deux faits au moins : - Les chercheurs français qui ont choisi de continuer leurs travaux dans le Maroc n’étaient plus que leurs recherches, comme auparavant, par une politique définie par les militaires. Cette liberté dans le travail a amené certains d’entre eux à dépasser le cap de la mission coloniale pour suivre le courant nationaliste qui a commencé à plaider pour le retour à la langue officielle. D’où l’intérêt porté à l’AC (voir Pellet (1956), Fleisch (1961)). D’autres ont préféré tout simplement marquer une pause. - Les marocains n’étaient pas préparés pour prendre la relève dans ce domaine juste après la fin de l’époque coloniale. Il a fallu attendre plus d’une décennie pour voir apparaître les premiers travaux des chercheurs marocains. Cette période elle-même, peut être divisé en deux étapes essentielles dans le domaine linguistique de l’AM : la première période, allant de la moitié des années soixante jusqu’au début des années soixante-dix, est dominée par des étrangers tels que Harrel (1965), Colin (1966), Abdelmassih (1970 et 1973), etc. La méthode générale du travail n’a pas connu de changement : description globale des phénomènes linguistiques sans cadre théorique précis. La deuxième étape qui commence grosso modo, à partir de 195 est caractérisée par la prise en main des recherches des marocains en plus de certains étrangers. Ces recherches sont régies par un cadre théorique bien défini. Là encore il faut dire que les objectifs ne sont pas les mêmes. Les marocains cherchent à explorer leur langue alors que les étrangers tentent d’’’explorer’’ leur ‘’produit’’ théorique dans le but de pouvoir confirmer l’’’universalité ‘’de leurs hypothèses. Cette deuxième étape elle-même va connaître deux moments distincts : le premier est inscrit dans le structuralisme en tant que cadre théorique qui a contribué à l’appréciation de la valeur des langues orales de manière générale et le deuxième est dominé par le générativisme depuis le modèle standard connu par SPE (the Sound Pattern on English) jusqu’aux modèles les plus récents. Il faut dire que la stagnation qu’à connu la recherche en AM durant la période des années soixante et l’avènement du générativisme pendant ce temps n’ont pas favorisé une production importante, sur le plan quantitatif, dans le cadre structuraliste. Les travaux relevés dans cette optique, émanent soit de personnes restées fidèles à ce cadre comme Youssi (1984), Elbaze (1980), soit d’étudiants, à l’époque, ayant reçu une formation dans ce cadre, ex. Laabi (1975), Hilili (1979), entre autres. Quant aux générativisme, il faut dire que le modèle SPE est le moins servi dans le cadre de la recherche réalisée sur l’AM.(2). La part du lion dans ce domaine est attribuée aux modèles qui s’inscrivent dans ce qu’on appelle aujourd’hui : morphophonologie pluridimentionelle.(3). Ce cadre marque la recherche effectuée sur l’AM tant sur le plan quantitatif que sur le plan qualitatif. En effet, les thèses, consacrées à l’AM, soutenues dans nos facultés sont au nombre considérables, il en est de même pour les articles publiés dans des revues spécialisées et les documents édités, sans compter les mémoires de licence élaborés chaque année. Sur le plan qualitatif, il fau signaler que chaque travail est consacré à un phénomène particulier ce qui aboutit généralement à une analyse approfondie. On peut citer à titre illustratif : la syllabe en AM (Belkirane (1992), Ait Hammou (1988), le nom d’action (Imouzaz (1991), le nom féminin (Fennich (1992), le verbe (El himer (1991), (Bennis (1992), la gémination (Benhallam (1981) et El Himer (1992), etc. I.3- Niveaux linguistiques abordés Comme il a été signalé, les modèles qui prédominent à partir des années quatre-vingt s’inscrivent dans le cadre général de la morphophonologie. Ce fait a eu impacts sur l’orientation des recherches de manière générale en ce sens que cette dicispline est la plus servie en AM. Cela ne signifie nullement que les autres niveaux sont déclassés. Une partie non négligeable des travaux est effectuée en sociolinguistique : je cite notamment Boukous (1979), Zaidane (1980), Dahbi (1984), Cherkrouni (1984), Moumine (1985), etc. En syntaxe nous avons aussi Khairi (1992), Berressoul (1994), entre autres. Cependant le ‘’manque’’, à ma connaissance, est ressenti au niveau de la sémantique qui constitue le parent pauvre dans ce domaine. Concernant le lexique, il faut dire qu’il n’y a pas de ‘’dictionnaire’’ au sens propre du terme. Ce que nous avons ce uploads/Science et Technologie/ synthese-des-etudes-consacrees-a-l-arabe.pdf
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- Publié le Jul 06, 2022
- Catégorie Science & technolo...
- Langue French
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