95 PRATIQUES ET MÉTIERS JUIN 2019 — RÉFÉRENCES EN SANTÉ AU TRAVAIL — N° 158 TM

95 PRATIQUES ET MÉTIERS JUIN 2019 — RÉFÉRENCES EN SANTÉ AU TRAVAIL — N° 158 TM 51 La survenue d’une maladie infectieuse sur le lieu de travail peut être source d’inquiétudes. Aussi est-il particulièrement important que l’équipe de santé au travail puisse rapidement évaluer le risque réel de transmission de la maladie à partir de la personne malade (cas source). Cet article propose une démarche d’investigation afin d’évaluer au mieux le risque en cas d’exposition avérée à un germe à transmission interhumaine. Le guide EFICATT (www.inrs.fr/eficatt) permettra de définir une conduite à tenir adaptée à chaque situation. en résumé ingestion, par exemple lors du port de mains contaminées à la bouche, ou encore par inoculation (piqûres, blessures…) ; O l’hôte : représenté par le travail- leur à son poste de travail, appelé plus loin « sujet exposé », qui peut présenter des spécificités. Au contact d’une personne atteinte d’une maladie à contagiosité inte- rhumaine, il n’y a risque de trans- mission que si l’exposition est compatible avec le mode de trans- mission habituel de la maladie. Ainsi, un patient tuberculeux re- présente un réservoir de la bactérie Mycobacterium tuberculosis trans- missible par voie respiratoire. Si le patient atteint d’une forme pul- monaire tousse et crache, il existe un risque d’inhalation d’air conta- miné par les bactéries pour tout son entourage, les autres malades et les soignants. Mais s’il s’agit d’un patient atteint d’une tuberculose dont la localisation est exclusive- ment osseuse, il n’y a pas de risque d’exposition pour son entourage. Selon l’agent biologique en cause : O le délai d’apparition des symp- tômes peut se compter en heures, jours ou mois après la contamina- LA CHAÎNE DE TRANSMISSION Les infections sont dues à la péné- tration puis à la multiplication d’un micro-organisme (bactéries, virus, champignons, parasites 1) dans le corps. Le pouvoir pathogène d'un agent biologique varie selon l’espèce. Ain- si un agent infectieux donné peut être pathogène uniquement pour certaines espèces animales, à la fois pour l’homme et l’animal (on parle alors de zoonoses) ou encore uniquement pour l’homme (par exemple tuberculose, coqueluche, varicelle…). Cet article concerne uniquement ce dernier type de maladie, à contagiosité interhu- maine. La chaîne de transmission d’une maladie infectieuse est composée de plusieurs maillons : O le réservoir : ici un homme, appe- lé plus loin « cas source » ; O le mode de transmission propre à chaque agent biologique : en milieu de travail, ce sera essentiel- lement par inhalation, par contact avec la peau ou les muqueuses, par AUTEURS : M.C. Bayeux-Dunglas, D. Abiteboul, département Études et assistance médicales, INRS Que faire en cas de maladie contagieuse en milieu de travail ? MOTS CLÉS Évaluation des risques / Agent biologique / Maladie infectieuse / Conduite à tenir / Risque biologique 1. Pour les parasites, il s'agit d’infestation N° 158 — RÉFÉRENCES EN SANTÉ AU TRAVAIL — JUIN 2019 96 PRATIQUES ET MÉTIERS Que faire en cas de maladie contagieuse en milieu de travail ? tion ; c’est ce que l’on appelle la pé- riode d’incubation. Dans certains cas, le sujet, bien qu’asymptoma- tique pendant cette période, peut malgré tout être à l’origine d’une transmission de la maladie ; O les manifestations sont variées (lésion cutanée, pneumonie, hépa- tite…) ; O la gravité de la maladie est variable (simple fièvre, complica- tions cardiaque ou pulmonaire, décès…) ; O certaines infections peuvent perturber le bon déroulement ou l’issue d’une grossesse (avor- tement, prématurité, malforma- tion…) comme par exemple la rubéole. Des facteurs individuels de l’hôte interviennent également dans le risque de développer une infection après une contamination. Ainsi, certaines personnes peuvent avoir acquis une immunité vis-à-vis d’un agent pathogène après un contact avec celui-ci, qu’elles aient été ou non malades. Cependant toutes les maladies infectieuses ne procurent pas une immunité durable. Une immunité peut également être acquise par la vaccination mais le nombre d’agents infectieux pour lesquels il existe un vaccin est très limité. À noter que beaucoup de vaccins, pour maintenir une protection efficace, nécessitent des rappels réguliers. Certaines situations peuvent, à l’inverse, entraîner une baisse de l'immunité, comme par exemple certains traitements immunosup- presseurs donnés après une greffe d’organe ou pour des maladies au- to-immunes, une chimiothérapie anti-cancéreuse, certains stades de l’infection par le virus de l’im- munodéficience humaine (VIH)… L’immunodépression peut entraî- ner une plus grande sensibilité aux infections (infections récidivantes) et/ou un risque accru d’infections sévères (par exemple infection invasive à pneumocoque chez les sujets sous chimiothérapie). Par ailleurs, certains agents biolo- giques habituellement peu ou pas pathogènes peuvent entraîner des infections dites « opportunistes » parfois sévères sur des personnes fragiles (par exemple aspergillose en cas d’immunodépression sévère ou de pathologie pulmonaire sous- jacente, ou toxoplasmose cérébrale chez un patient VIH au stade SIDA). CONDUITE À TENIR EN MILIEU DE TRAVAIL EN PRÉSENCE D’UN CAS DE MALADIE INFECTIEUSE En milieu de travail, sont régulière- ment rencontrées des situations où des salariés ont été en contact avec des personnes atteintes de patholo- gies potentiellement contagieuses. Cette situation peut se présenter du fait de l’activité professionnelle en elle-même (travail en établisse- ment de santé, dans les métiers de la petite enfance…) ou au contact d’un collègue présentant une ma- ladie infectieuse. Devant la survenue d’une maladie infectieuse à transmission inter- humaine en milieu de travail, le service de santé au travail doit être sollicité afin de mener des inves- tigations le plus rapidement pos- sible. Cela permettra d’obtenir des informations concernant : O le cas source, pour juger de sa contagiosité ; Ole sujet possiblement exposé, afin d’apprécier sa réceptivité à la mala- die ; Oles circonstances de l’exposition, afin de définir si celle-ci a pu entraî- ner une contamination. La « Fiche d’investigation devant une maladie contagieuse en milieu de travail » (annexe 1 pp. 97-98) pré- sente les questions à se poser pour mener à bien une enquête autour d’un cas de maladie infectieuse à transmission interhumaine en milieu de travail. Les annexes 2 et 3 (pp. 99 et 100) proposent les fiches « Cas source » et « Cas exposé », qui permettent de synthétiser les élé- ments recueillis au cours de l’en- quête, de faciliter la prise de déci- sions et d’en assurer la traçabilité dans le dossier médical. La base de données EFICATT (Expo- sition fortuite à un agent infec- tieux et conduite à tenir en milieu de travail) (www.inrs.fr/eficatt), constituée d’une quarantaine de fiches « maladies » élaborées par des médecins de différentes spé- cialités et experts du sujet, fournit les éléments indispensables pour réaliser cette enquête et compléter ces documents (annexe 4 p. 101). Elle permet d’aider tout médecin à évaluer le risque de transmission d’une maladie donnée et à définir, si nécessaire, la conduite à tenir im- médiate, les actions à entreprendre ainsi que le suivi médical à mettre en place. Q S’agit-il bien d’une maladie contagieuse à transmission interhumaine ? Q Si oui, y a-t-il une transmission possible au sein de l’entreprise ? Cela va dépendre : des caractéristiques du cas source O Est-ce un cas possible ou un cas confirmé ? - si le cas est confirmé, à quelle date le diagnostic a-t-il été posé de façon certaine ? O S’agit-il bien d’une forme contagieuse de la maladie ? O Quand ont débuté les symptômes ? O Le cas source était-il présent dans l’entreprise durant la période de contagiosité de la maladie ? † du type d’exposition qui est potentiellement contaminante  O Quel est (sont) le(s) mode(s) de transmission connu(s) de la maladie à partir du cas source ? - par inhalation de gouttelettes ou d’aérosols venant des voies aériennes ; - par contact de la peau ou des muqueuses (yeux, nez, bouche) avec des mains sales ou des surfaces ; - par ingestion en portant les mains ou un objet souillés à la bouche voire à la suite d’une projection sur la bouche ; - par inoculation : piqûre ou coupure avec des objets contaminés.  OLes circonstances d’une contamination potentielle à partir du cas source sont-elles réunies ? Q Si les conditions d’une contamination potentielle sont réunies, deux questions essentielles : O Des mesures d’isolement ou d’éviction doivent-elles être mises en place autour du cas source ? - si oui, s’assurer qu’elles ont été prises. O Combien de personnels ont été potentiellement exposés ? Les recenser. Q Si un ou plusieurs sujets ont été exposés, préciser leur niveau de risque : O Rassurer les sujets exposés n’ayant aucune manifestation de la maladie alors que le délai d’incubation est dépassé. Ex : si l’incubation de la maladie en cause est d’une semaine maximum et que le salarié exposé est vu, sans symptôme, 3 semaines après son dernier contact avec le sujet source, il n’y a plus de risque. O En dehors de ce cas, parmi les sujets exposés, quels sont ceux qui sont susceptibles d’être contaminés (= sujets réceptifs) ? Pour cela : - rechercher une immunisation • soit du fait d’un antécédent de la maladie (ex : antécédent de rougeole, de varicelle…), • soit liée à uploads/Sante/ tm-51.pdf

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  • Publié le Mai 10, 2022
  • Catégorie Health / Santé
  • Langue French
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