Mémoire de Maîtrise en médecine No 1921 Eugen Bleuler, “La suggestibilité négat
Mémoire de Maîtrise en médecine No 1921 Eugen Bleuler, “La suggestibilité négative”, 1904 Introduction, traduction et annotations françaises par Aubane Rossier Etudiante Aubane Rossier Tuteur Prof. Vincent Barras Institut universitaire d’Histoire de la médecine et de la santé, Unil Expert Prof. Jacques Gasser Département de psychiatrie CHUV Lausanne, décembre 2015 2 3 Table des matières Résumé ...............................................................................................................................................4 Introduction......................................................................................................................................5 Contexte historique..................................................................................................................... 11 Traduction de l’article................................................................................................................ 17 Conclusion ...................................................................................................................................... 34 Annexes ........................................................................................................................................... 38 Bibliographie des ouvrages lus ou consultés................................................................................38 Bibliographie d’Eugen Bleuler...........................................................................................................40 Texte original : « Die negative Suggestibilität » ...........................................................................45 4 Résumé Mon travail de maîtrise est constitué d’une traduction d’allemand à français d’un article à propos de la suggestiblité négative, « Die negative Suggestibilität » écrit par Eugen Bleuler en octobre 1904 qui paraît dans la Psychiatrisch-Neurologische Wochenschrift (Bleuler, 1904b). Il s’agit d’un article pertinent pour la compréhension des débuts de la schizophrénie et ce symptôme typique de cette maladie qu’est la suggestibilité négative. En juin 1910, il publie dans le même journal un article sur le négativisme schizophrénique, « Zur Theorie des schizophrenen Negativismus » (Bleuler, 1910d), des théories qu’il reprend un an après dans sa monographie, « Dementia Praecox oder Gruppe der Schizophrenien » (Bleuler, 1911). La suggestibilité négative correspond à une disposition psychique qui conduit un sujet à se soumettre trop facilement à toutes suggestions négatives extérieures et à y obéir, sans critiques suffisantes de ses valeurs et conséquences. Le négativisme se retrouve chez tout être humain, c’est un phénomène normal et non accidentel qui nous permet de nous protéger de certaines actions, de corriger certaines réactions. C’est tout particulièrement appréciable chez les enfants qui apprennent d’abord à utiliser le « non » et le rejet, alors que le « oui » est plus simple à prononcer dans la langue allemande. A chaque idée s’associe toujours son idée contraire, il s’agit d’association de contrastes. Ce qui est par contre pathologique, est un négativisme qui surgit à des occasions inhabituelles ou de manière plus prononcée ; il découle directement du mécanisme d’idée contraire. Un exemple de phénomène qui se comporte uniquement en idées contraires est l’obsession. Chez les malades psychiatriques, les idées primaires sont toujours en conflit avec la réalité. La suggestibilité et la négativité ont en fait la même origine. Plus tard, Bleuler renomme la suggestibilité négative ambitendance, terme selon lui plus adéquat, qui est actuellement défini par un complexe formé de deux besoins contraires. Mots clés : Dementia Praecox, Suggestibilité négative, Eugen Bleuler, Schizophrénie, Négativisme. 5 Introduction Etudiante en médecine à l’université de Lausanne, j’ai écrit cet essai dans le cadre de mon travail de maîtrise. J’ai choisi un thème particulier qui est celui de l’histoire de la médecine, car je suis personnellement intéressée par ce sujet. J’y trouve un certain attrait car il s’agit d’un thème vaste et quelque peu obscur pour moi, n’ayant fait que très peu d’études dans ce domaine. Je trouvais passionnante l’idée de rechercher des anciens documents, d’essayer de comprendre le fonctionnement et les connaissances d’antan dans différents domaines de la médecine, de déchiffrer des textes souvent écrits dans un langage d’époque. Donc même s’il s’agit d’une langue parlée aujourd’hui, les termes, le style et la façon de s’exprimer étaient différents ; effectivement les langues évoluent passablement au cours des siècles. Un grand défi a donc été pour moi de me familiariser avec les méthodes de recherche en histoire de la médecine et des sciences du vivant et d’également approfondir mes connaissances dans ce domaine pour pouvoir réaliser un travail qui soit aussi original qu’intéressant. Il a donc fallu que je fasse des recherches pour trouver des sources primaires et secondaires sur un sujet donné et que je les analyse pour en faire une synthèse. Le texte qui suit décrit quelles ont été mes méthodes, ainsi que ma ligne de conduite tout au long de mon travail. J’ai donc débuté ce travail en devant choisir un sujet plus précis pour mon travail, car mon thème de départ était effectivement très large: « Histoire de la pratique médicale du 19-20e siècle ». Je pouvais ainsi m’intéresser à plusieurs différents domaines de la médecine pour autant que cela garde un attrait historique. Je me suis rapidement intéressée à l’histoire de la psychiatrie, car il s’agit d’un domaine riche, vaste et souvent peu compris ; ce que je trouvais le plus captivant était surtout d’observer à quel point la pensée en psychiatrie a évolué au cours du temps. J’ai donc commencé par feuilleter plusieurs livres généraux sur l’histoire de la psychiatrie pour ainsi acquérir une idée d’ensemble sur le sujet. Puis je me suis rapidement focalisée sur l’histoire de la schizophrénie, car c’est une pathologie qui n’est pas encore totalement comprise et à propos de laquelle il y a actuellement beaucoup de 6 recherches. L’évolution des connaissances de cette maladie dans le temps est très complexe et mérite une attention particulière. C’est tout à fait fascinant de découvrir les différentes façons de traiter la schizophrénie en fonction des différents psychiatres de l’époque qui essaient de comprendre et traiter ce mal : Emil Kraepelin, Eugen Bleuler, Carl Gustav Jung, Sigmund Freud entre autres. L’interaction, tant par les lettres que par les discussions, entre ces psychiatres du début de 20e siècle était très riche, et c’est pourquoi j’ai décidé de retenir cette période précise. C’est au tournant du XIXème siècle que certains articles et monographies pertinents à propos de la maladie ont été écrits et publiés. Je me suis alors décidée pour une étude des différentes relations que les psychiatres avaient entretenues entre eux pour comprendre cette maladie et quelles méthodes distinctes de travail ils utilisaient ; par exemple Kraepelin lisait les dossiers de ses patients alors que Bleuler passait le plus clair de son temps à s’entretenir avec ses patients pour essayer de les comprendre, de rentrer dans leurs mondes perturbés. J’ai donc commencé la lecture attentive des livres de Brigitta Bernet (Bernet, 2013) et de Jean Garrabé (Garrabé, 1992) sur l’histoire de la schizophrénie afin de m’aider à choisir plus précisément sur quel moment de l' histoire et sur quel psychiatre j’allais me focaliser. C’est ainsi que grâce à l’ouvrage de Brigitta Bernet (Bernet, 2013), j’ai pu connaître et me familiariser avec la vie et les travaux de ce psychiatre somme toute peu connu malgré ses nombreux apports à la psychiatrie : Eugen Bleuler. C’est d’ailleurs cet homme qui proposa le terme de « schizophrénie » pour renommer la « démence précoce » de Kraepelin en 1908 lors d’un congrès à Berlin, pour bien illustrer l’idée d’ «esprit fractionné», éthymologie grecque où « schizein » signifie « fractionner », « fendre » et « phrèn », « esprit ». J’ai donc décidé de m’intéresser plutôt à ses écrits et mettre ainsi de côté les rapports entre les différents psychiatres de cette période comme je souhaitais le faire au départ. Comme toute recherche historique, le sujet s’affine en cours de route ; le chercheur commence avec certaines idées puis c’est avec le temps et les éléments de la recherche, et donc les nouvelles connaissances acquises, que j'ai pu définir plus exactement l'objet de mon travail final. L’absence de traductions de la majorité des ouvrages ou articles allemands du début du 20e siècle m’a alors très rapidement sauté aux yeux. La plupart des textes n’ont 7 jamais été traduits ou pour certains, bien plus tard seulement. C’est pourquoi j’ai fait le choix de traduire un article important de ce psychiatre pour combler ce manque évident et pour permettre aux lecteurs ne maîtrisant pas la langue allemande d’avoir accès à ses textes, ses connaissances et ses théories. J’ai spécifiquement choisi le professeur Bleuler car il n’est que peu connu en comparaison de ses illustres contemporains Freud ou Jung. Il était évident pour moi de traduire un article qui avait paru avant sa monographie de 1911 « Dementia Praecox oder Gruppe der Schizophrenie » (Bleuler, 1911) pour pouvoir comprendre ses idées et théories avant même sa proposition du terme « schizophrénie » et le cheminement qu'il avait fait pour arriver à écrire son livre, qui sera d’ailleurs traduit de manière résumée en français par Henri Ey en 1926. La bibliographie du livre de Brigitta Bernet (Bernet, 2013) m’a permis de sélectionner quelques articles écrits par Bleuler entre 1900 et 1910 qui me paraissaient, selon leur titre, pertinents pour expliquer le concept de schizophrénie. J’en ai finalement retenu quatre : « Dementia Praecox » de 1902 (Bleuler, 1902b), « Die negative Suggestibilität » de 1904 (Bleuler, 1904b), « Komplexe und Krankheitsursachen bei Dementia Praecox » de 1908 (Bleuler, 1908a) et « Die Prognose der Dementia Praecox » de 1908 (Bleuler, 1908b). Après plusieurs lectures, j’ai finalement opté pour le deuxième article, « Die negative Suggestibilität », car il traite un sujet très important de la schizophrénie qui est la suggestibilité négative : il s’agit d’un symptôme présent chez toute personne mais qui est pathologiquement augmenté chez les patients schizophréniques. Dès lors je trouve intéressant justement de se rendre compte qu’il s’agit d'un mécanisme psychique perturbé ou même augmenté. Cette uploads/Sante/eugen-bleuler-la-suggestibilite-negative.pdf
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- Publié le Mar 17, 2021
- Catégorie Health / Santé
- Langue French
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